Espistém'opinion
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Espistém'opinion



  1. #1
    invitec950cde9

    Espistém'opinion


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    Si la nuit porte conseil, certains week-ends peuvent aussi favoriser quelques inspirations que je soumets à vos esprits... sans nul doute aucunement ramollis par la canicule.

    Avant de prétendre épiloguer sur ce qu’est la vérité scientifique, ne faudrait-il pas se demander en quoi consiste une vérité communément admise ? N’est-ce pas tout simplement ce qui est cru ou accepté comme vrai par une pensée essentiellement subjective, mais qui se réfère à un critère réputé objectif, celui de la conformité au réel. Et comment pourrait-on parler de vérité certaine ou absolue dans la mesure où, d’une part personne ne peut se targuer d’avoir déjà mis le doigt sur le Réel, et d’autre part, le point de départ de tout raisonnement/jugement qui nous a permis d’atteindre une supposée vérité part toujours d’une hypothèse ou axiome émanent directement d’un esprit donc par définition apriorique et non démontrable.
    On peut d’ailleurs noter que cette vérité (objet prétendu vrai) ne s’est pas produite ex nihilo : il a fallu non seulement une hypothèse, mais surtout un être humain bien vivant qui se projette en avant pour la formuler et l’émettre, en acceptant le risque de se tromper. On retrouve d’ailleurs là par analogie l’idée d’intentionnalité husserlienne (la conscience est toujours conscience de quelque chose, objet vers lequel le sujet se projette…), et il a fallu en quelque sorte qu’il s’engage tout entier dans cette démarche de recherche pour espérer en extraire une vérité, d’ailleurs seulement relative.

    Déjà là, il apparaît évident qu’une vérité n’est jamais neutre, car celui qui fait un pari jubile toujours d’avance à l’idée de le gagner. Il y a dans la conjecture comme un acte, un agir concret et pas une simple pensée abstraite qui se découvre vraie. Avoir trouvé une vérité, se présente comme une victoire sur un mensonge, une conquête d’un territoire gagné sur une vaste étendue jusqu’alors inconnue et vierge à déflorer, un pouvoir, une prise de possession accompagnée du plaisir d’y planter son drapeau. Eurêka ! Vaincre l’ignorance relève quasiment du vocabulaire guerrier. Cela procure une satisfaction d’appétit assouvi ou de soif étanchée qui relève bien plus de la sensation (faim, soif…la peur de manquer et le besoin de sécurité ou de survie ne sont pas bien loin…) que de la réflexion méditative. Ce qui tend à démontrer que celui qui adhère à une vérité n’est jamais désintéressé mais au contraire partie prenante. Et on voit bien avec quelle solidarité ceux qui sont persuadés d’une même vérité se soutiennent comme pour se remercier mutuellement de s’approvisionner réciproquement en victuailles et se soulager ensemble de leurs communs appétits.

    Alors je rétorque d’avance, à qui aurait quelques velléités de prétendre que "sa" vérité est neutre et objective car conforme à la science, que cette dernière n’a pas d’autres possibilités que de mettre en évidence des constats concernant restrictivement des phénomènes purement physiques et mesurables (d’où son objectivité) pour en extraire - par déduction ou induction - ces LOIS dites de la Nature que personne ne pourrait contester car se répétant indéfiniment ou habituellement lorsque confrontées à des réalités (ou faits réels). Sans oublier non plus que celles-ci ne sont pas vraies dans l’absolu mais seulement dans le cadre d’un système bien précis sachant qu’elles pourront ne pas être vérifiées dans un autre ensemble théorique (ou paradigme). De plus, comme dirait Heidegger "la science ne pense pas" sauf qu’il faudrait lui répondre que si effectivement elle ne pense pas par elle-même, elle nous DONNE cependant à penser et ainsi à nous engager. Et dans cet acte de pensée l’homme a le champ libre pour interpréter et juger de la bonne application concrète des avancées scientifiques ou technologiques, dans le sens de ce qu’il jugera BON ou BIEN pour sa pratique quotidienne (ou praxis). Mais cette fois, il ne s’agira plus de jugements d’entendement (vérifications au moyen de valeurs numériques et mathématiques) mais de jugements de valeurs dites sociales ou encore morales tant il est vrai qu’un individu isolé est incapable de juger selon une dite norme faute d’éléments de comparaison ou de repères que seule la diversité des multiples opinions d’une société est en mesure de lui procurer. D’où le fait que chacun, armé de simples convictions, nage en réalité en plein océan d’opinions (*) d’ailleurs trop souvent récupérées pour ne pas dire manipulées subrepticement par l’idéologie dominante qui façonne à sa guise l’inconscient collectif.

    (*) opinion publique, force sociale résultant de la similitude des jugements portés sur certains sujets par une pluralité d’individus et qui s’extériorise dans la mesure où elle prend conscience d’elle-même.

    -----

  2. #2
    bardamu

    Re : Espistém'opinion

    Bonjour,
    Tu conclus sur une question de "valeurs" et de "manipulation d'opinion" donc j'ai jugé que ça concernait plus l'éthique que l'épistémologie. Si ton idée était autre, merci de la préciser et je redéplacerai le fil.
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  3. #3
    invite72477e4c

    Re : Espistém'opinion

    Où veux-tu nous emmener, Primavera, avec ta délicieuse prose, dans une hallucination collective ?

    La vérité existe, les méthodes pour l'atteindre aussi.

    Certes, nous vivons dans un monde où elles ne sont
    plus bonne à dire, tellement nous nous sommes
    fourvoyer dans le mensonge. Mais n'est-ce-pas
    là, la destinée de toutes les civilisations décadentes.

    C'est là que le mot Apocalipse (révélation) prend tout son sens.

    J'ai décidé de prendre la pillule bleu, j'ai pris une sacré
    claque, mais maintenant je me sens mieux, je comprends mieux et je me sens libre.

    Bardamu, j'espère que je n'ai rien dis de choquant qui puisse entrainer la fermeture du sujet. C'est fou, en ce moment, tous les sujets auquels je participe sont fermés après mon passage.

    Suis-je une persona non grata ?

    Cordialement,

  4. #4
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par bardamu
    Bonjour,
    Tu conclus sur une question de "valeurs" et de "manipulation d'opinion" donc j'ai jugé que ça concernait plus l'éthique que l'épistémologie. Si ton idée était autre, merci de la préciser et je redéplacerai le fil.
    Bonjour à tous,
    A mon avis le principal sujet de ma petite prose consiste dans une analyse du "tenir pour vrai" qui est une question d'épistémologie (théorie de la connaissance, vérité...) , même si j'en pense que des questions de valeurs s'y infiltrent au niveau de l'opinion. Un peu comme pourrait le démontrer le mot "juste" qui peut tour à tour signifier soit "exact", vrai... soit dériver du mot "justice" où s'est glissé une idée de valeur. Mais placé en éthique ça pourra aller aussi.

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par el_pulpo
    Où veux-tu nous emmener, Primavera, avec ta délicieuse prose, dans une hallucination collective ?
    La vérité existe, les méthodes pour l'atteindre aussi.
    Je n'ai pas cherché à démontrer ni que la vérité n'existait pas, ni que nous vivions une hallucination collective.. mais seulement essayé de traquer certains mécanismes qui pouvaient influencer notre perception de la vérité. Suffit d'en prendre conscience, de se poser les bonnes questions, bref je plaide pour la vérité et non contre.
    Certes, nous vivons dans un monde où elles ne sont plus bonne à dire, tellement nous nous sommes
    fourvoyer dans le mensonge. Mais n'est-ce-pas
    là, la destinée de toutes les civilisations décadentes.
    C'est là que le mot Apocalipse (révélation) prend tout son sens.
    Je positive au contraire, je ne prétend pas que notre civilisation est décadante. Les problèmes d'opinion et d'illusion de la raison sont des questions qui ont toujours existé (et qui furent dès l'antiquité des questionnements philosophiques) et pas du tout liées au modernisme. Au contraire notre évolution vers un progrès des moyens techniques de communication et vers l'élaboration d'un état de Droit est selon moi signe de progrès au niveau des mensonges collectifs.

    J'ai décidé de prendre la pillule bleu, j'ai pris une sacré claque, mais maintenant je me sens mieux, je comprends mieux et je me sens libre.
    Fais quand même attention à ne pas t'envoler trop haut...

    Bardamu, j'espère que je n'ai rien dis de choquant qui puisse entrainer la fermeture du sujet. C'est fou, en ce moment, tous les sujets auquels je participe sont fermés après mon passage.

    Suis-je une persona non grata ?
    Ohhh mais pourquoi ??

  7. #6
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    pour en extraire - par déduction ou induction - ces LOIS dites de la Nature que personne ne pourrait contester car se répétant indéfiniment ou habituellement lorsque confrontées à des réalités (ou faits réels)
    Salut,
    Je ne vois pas pourquoi,je peux contester la validité de toutes les lois de la nature d'un point de vue logique si je veux,je n'ai aucune preuve que la loi de la gravitation ou la MQ seront encore valables dix secondes après la fin de mon post.
    Par contre je peux arguer qu'il n'est pas très raisonnable ou probable de le croire jusqu'à présent,c'est tout.



    Sans oublier non plus que celles-ci ne sont pas vraies dans l’absolu mais seulement dans le cadre d’un système bien précis sachant qu’elles pourront ne pas être vérifiées dans un autre ensemble théorique (ou paradigme).
    Je dirais plutôt,mais je crois que c'est le sens que tu lui donnes,que ces lois sont reléguées au statut d'approximations,de formes asymptotiques, dans une théorie plus étendue.Elles sont donc toujours valables mais dans un domaine restreint du monde des phénomènes

    De plus, comme dirait Heidegger "la science ne pense pas" sauf qu’il faudrait lui répondre que si effectivement elle ne pense pas par elle-même

    Il faut lui répondre avec une bonne paire de baffe et un bonnet d'ane oui ,chaque fois que j'entends ça j'ai envie de sortir mon revolver à anti matière

    Pour le reste,effectivement, il est clair que toute démarche scientifique est parasitée par des jugements de valeurs et des enjeux qui ne sont pas objectifs/avoués/conscients.
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  8. #7
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par mtheory

    Il faut lui répondre avec une bonne paire de baffe et un bonnet d'ane oui ,chaque fois que j'entends ça j'ai envie de sortir mon revolver à anti matière
    Je précise bien,à Heidegger,pas Primavera
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  9. #8
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par mtheory
    Je ne vois pas pourquoi,je peux contester la validité de toutes les lois de la nature d'un point de vue logique si je veux,je n'ai aucune preuve que la loi de la gravitation ou la MQ seront encore valables dix secondes après la fin de mon post.
    Par contre je peux arguer qu'il n'est pas très raisonnable ou probable de le croire jusqu'à présent,c'est tout.
    Bien sur que dans l’absolu rien n’est certain à jamais et pour l’éternité, car dans notre monde spatiotemporel tout est relatif. Et ceci est vrai pour tout y compris pour les lois scientifiques. Et tout ce que peut nous démontrer une logique pure (qui raisonne en boucle sur elle-même) c’est que dans l’absolu rien n’est logique… ce qui me semble logique. Et c’est sans doute pourquoi je pense que le positivisme logique ne mène à rien.

    A vrai dire je considère que nous devons nous contenter de vérités scientifiques à notre échelle de temps et d’espace, et à ce titre, si on se place d’un pur point de vue pratique, Newton a fait aussi bien qu’Einstein, chacun ayant émis des vérités scientifiques mais qui restaient vrais uniquement dans le cadre de leur système réciproque (cf notion de paradigme). N’empêche que Newton a permis à la philosophie d’évoluer depuis Platon jusqu’à Kant, et ainsi de suite chaque étape dans l’avancée des concepts scientifiques permettant à la synthèse effectuée par la pensée philosophique de se remettre en question et d’avancer à son tour.
    D’ailleurs Hegel lui aussi considérait que toute pensée (philosophique) n’était valable que pour son temps (cf concept d’historicité).
    Je dirais plutôt,mais je crois que c'est le sens que tu lui donnes,que ces lois sont reléguées au statut d'approximations,de formes asymptotiques, dans une théorie plus étendue.Elles sont donc toujours valables mais dans un domaine restreint du monde des phénomènes
    Penchant pour la thèse d’un idéalisme réaliste, je pense de toute façon que notre monde (au plan physique) n’est que celui des phénomènes (cf noumène kantien) et rien d’autre. Par contre je crois qu'il est essentiel pour nous de connaître ces lois de la nature car elle nous permettent, tout en "structurant" nos concepts et notre langage, de "structurer" en même temps notre organisation sociale (institutions, Droit...).
    Il faut lui répondre avec une bonne paire de baffe et un bonnet d'ane oui ,chaque fois que j'entends ça j'ai envie de sortir mon revolver à anti matière
    Il est certain que pour lui l’Etre n’est pas dans le savoir scientifique qui au contraire ne contribuerait qu’à le voiler, mais je ne lui donne pas entièrement tord quand j’ajoute qu’effectivement elle ne pense pas par elle-même mais qu’en fournissant une nouvelle vision du monde (par élimination d’erreurs plus que par découvertes de nouvelles vérités), elle participe largement à la pensée philosophique et à sa "marche" vers l’Etre qui, se connaissant, prend conscience de lui-même.
    Hegel parlerait d’Etre Absolu et de processus historique dont le sujet n’est autre que l’humanité.

    Pour le reste,effectivement, il est clair que toute démarche scientifique est parasitée par des jugements de valeurs et des enjeux qui ne sont pas objectifs/avoués/conscients.
    Oui, mais je cherche aussi à montrer l’aspect pas seulement négatif de l’opinion, ou plutôt de la multitude des opinions qui ajoutées les unes aux autres, au sein des masses d’individus qui composent les sociétés (démocratie d’opinions), aboutissent à une certaine forme de vérité concrète et pragmatique, par somme algébrique de toutes les diversités appelées à exprimer leurs opinions singulières.

  10. #9
    bardamu

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    Oui, mais je cherche aussi à montrer l’aspect pas seulement négatif de l’opinion, ou plutôt de la multitude des opinions qui ajoutées les unes aux autres, au sein des masses d’individus qui composent les sociétés (démocratie d’opinions), aboutissent à une certaine forme de vérité concrète et pragmatique, par somme algébrique de toutes les diversités appelées à exprimer leurs opinions singulières
    Salut,
    Est-ce qu'il ne s'agirait pas de la question des constructions de "visions du monde" communes et de la place des sciences en leur sein ?
    Mais la vérité du commun n'est-elle pas plutôt l'erreur du commun ?

    Les sciences sont bien souvent réduites à un schéma simplifié pour entrer dans un discours "accessible à tous", on remplace le modèle standard en physique par le "Big bang" et une image d'explosion, la théorie de l'évolution par "l'homme descend du singe", en oubliant souvent de préciser qu'il ne s'agit que de simplifications plus ou moins abusives.

    Ce qui émerge du "bon sens" ou du "sens commun", à mon sens c'est plus la généralisation d'une erreur satisfaisante, reposante, que la définition d'une vérité, difficile à obtenir, toujours problématique.
    Que ce soit au nom de valeurs, d'objectifs se voulant pédagogiques voire de buts marketing, il s'agit bien souvent de ne pas trop faire penser, d'arrêter la pensée à des solutions toutes faites, prêtes à consommer.
    Credo plutôt que intelligo.
    "plus facile, plus rapide, plus séduisant est le côté obscur"
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  11. #10
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par bardamu
    "plus facile, plus rapide, plus séduisant est le côté obscur"
    excellent!
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  12. #11
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    Il est certain que pour lui l’Etre n’est pas dans le savoir scientifique qui au contraire ne contribuerait qu’à le voiler, mais je ne lui donne pas entièrement tord quand j’ajoute qu’effectivement elle ne pense pas par elle-même mais qu’en fournissant une nouvelle vision du monde (par élimination d’erreurs plus que par découvertes de nouvelles vérités), elle participe largement à la pensée philosophique et à sa "marche" vers l’Etre qui, se connaissant, prend conscience de lui-même.
    Bien sûr que si elle pense par elle même,c'est évident,il suffit de se rappeler que la science et la philosophie était faites par les mêmes personnes et qu'un scientifique (un vraie) est un philosophe en habits d'ouvrier (je sais plus qui utilisait cette expression).
    Copernic et Képler étaient sous perfusion Platonicienne et Pythagoriciennes,Jacobi et Einstein sous Spinoza etc...
    Et que dire de Leibnitz,Descartes,Pascal ?
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  13. #12
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par bardamu
    Salut,
    Est-ce qu'il ne s'agirait pas de la question des constructions de "visions du monde" communes et de la place des sciences en leur sein ?
    Mais la vérité du commun n'est-elle pas plutôt l'erreur du commun ?

    Les sciences sont bien souvent réduites à un schéma simplifié pour entrer dans un discours "accessible à tous", on remplace le modèle standard en physique par le "Big bang" et une image d'explosion, la théorie de l'évolution par "l'homme descend du singe", en oubliant souvent de préciser qu'il ne s'agit que de simplifications plus ou moins abusives.

    Ce qui émerge du "bon sens" ou du "sens commun", à mon sens c'est plus la généralisation d'une erreur satisfaisante, reposante, que la définition d'une vérité, difficile à obtenir, toujours problématique.
    Que ce soit au nom de valeurs, d'objectifs se voulant pédagogiques voire de buts marketing, il s'agit bien souvent de ne pas trop faire penser, d'arrêter la pensée à des solutions toutes faites, prêtes à consommer.
    Credo plutôt que intelligo.
    "plus facile, plus rapide, plus séduisant est le côté obscur"
    Mes remarques ne se limitaient pas à l'opinion vis à vis du savoir scientifique, mais étaient en fait plus générales.
    Mais je pense qu’il n’est pas très "sympathique" de mépriser à tel point le "sens commun" qui de toute façon, qu’on le veuille ou non, gouverne le monde.

    Mais cette réponse m'a tout simplement fait penser à La République de Platon et à son allégorie de la caverne, bref à sa théorie des Idées. Attention, je crains que la dictature du despote éclairé ne soit pas bien loin !!!
    Je ne sais si ce que je dis est limpide, mais personnellement c’est à l’approche plus pragmatique et dialectique d’Aristote que j’adhère, car elle est à la fois plus subtile et reflète mieux la complexité de la réalité concrète.

  14. #13
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par mtheory
    Bien sûr que si elle pense par elle même,c'est évident,il suffit de se rappeler que la science et la philosophie était faites par les mêmes personnes et qu'un scientifique (un vraie) est un philosophe en habits d'ouvrier (je sais plus qui utilisait cette expression).
    Copernic et Képler étaient sous perfusion Platonicienne et Pythagoriciennes,Jacobi et Einstein sous Spinoza etc...
    Et que dire de Leibnitz,Descartes,Pascal ?
    Je crains qu'il y ait eu léger malentendu. Quand on dit que la "science ne pense pas", cela ne signifie pas que le "scientifique" ne pense pas... car personne n'ignore que les scientifiques sont super intelligents.... et même que par le passé, ils ont très souvent été à la fois philosophes et scientifiques.

  15. #14
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Je sais qu'il se place aussi à un point de vue existentialiste derrière cette phrase mais pas seulement,donc sous toutes les coutures c'est "rubbish" tu as une autre interprétation ?
    Dernière modification par mtheory ; 01/08/2006 à 22h14.
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  16. #15
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    En fait l'objet de la science est de découvrir en quoi consiste les lois de la physique, chimie, biologie etc... à ce titre son rôle se limite une simple description des phénomènes sans émettre par elle-même aucun jugement "de valeur".
    Mais pour ce qui est de la position de Heidegger vis à vis de la science, s'agissant d'ontologie et de métaphysique, je m'étais juste limitée à y faire allusion, mais le creuser d'avantage déborderait du cadre de cette discussion.

  17. #16
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    En fait l'objet de la science est de découvrir en quoi consiste les lois de la physique, chimie, biologie etc... à ce titre son rôle se limite une simple description des phénomènes sans émettre par elle-même aucun jugement "de valeur".
    .
    ça c'est une définition de positiviste,ce n'est pas ni en pratique ni en théorie ce qui se passe pour la majorité des scientifiques,surtout des grands.
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  18. #17
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Sans doute, mais lorsque le scientifique lui-même interprète ou extrapole des résultats purement scientifiques, il sort de ce pur travail de scientifique et c'est à ce moment là, dans son interpétation ou lorsqu'il donne un "sens", qu'il ajoute des jugements de valeur dans lesquels, à titre personnel, on peut dire qu'il s'engage.

  19. #18
    mtheory

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    Sans doute, mais lorsque le scientifique lui-même interprète ou extrapole des résultats purement scientifiques, il sort de ce pur travail de scientifique et c'est à ce moment là, dans son interpétation ou lorsqu'il donne un "sens", qu'il ajoute des jugements de valeur dans lesquels, à titre personnel, on peut dire qu'il s'engage.
    Mais tout à fait,ce que je veux dire c'est que la science part d'une démarche philosophique et que la philosophie doit se donner pour but de devenir une science.
    Le 'charcutage' que fait Heidegger en sous entendant que la démarche scientifique,la science en elle même, conduit à l'oublie de la pensée au sens ou la pensée pense l'être et l'ex-istence n'est vraiment pas malin.
    “I'm smart enough to know that I'm dumb.” Richard Feynman

  20. #19
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Personnellement je n'approuve pas non plus la position "anti science" de Heidegger, et à vrai dire j'y vois une influence idéologique sous jacente, sachant qu'il s'agissait surtout pour lui de dénigrer la philosophie occidentale qui se serait selon lui "égarée" à partir de Platon et de sa théorie de la connaissance.
    la science part d'une démarche philosophique
    Mais là par contre j'aurais plutôt dit que la science "ouvre" une démarche philosophique.

  21. #20
    bardamu

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    En fait l'objet de la science est de découvrir en quoi consiste les lois de la physique, chimie, biologie etc... à ce titre son rôle se limite une simple description des phénomènes sans émettre par elle-même aucun jugement "de valeur".
    Mais pour ce qui est de la position de Heidegger vis à vis de la science, s'agissant d'ontologie et de métaphysique, je m'étais juste limitée à y faire allusion, mais le creuser d'avantage déborderait du cadre de cette discussion.
    Salut,
    Pour une éventuelle discussion de l'idée de Heidegger, j'ai fait un nouveau fil avec un extrait où il explique ce qu'il voulait dire par là : http://forums.futura-sciences.com/sh...735#post709735.
    A mon sens, ce n'est pas fondamentalement une question de "valeurs" mais plutôt d'une distribution épistémique des questions.
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  22. #21
    invite0e4ceef6

    Re : Espistém'opinion

    le savoir vrai consiste dans l'ensemble des savoir que j'utilise naturellement sans même y penser, ni les concevoir, pour ecrire cette petite phrase et vivre au quotidien..

    la croyance viens ensuite, c'est ma pensé sur les choses que je ne comprend pas et dont je me fait des idées qui ne marche pas souvant, du moins pas plus que le hasard

    la theorie, viens après la croyance, et part du même principe, c'est une pensée qui cherche a mettre en forme des relation de cause et de conséquance dans le monde..
    une théorie obtiens des resultats qui tienne de la probabilité, mais c'est résultat par ces explication sont toujours supérieur a ce que l'on attend du hasard

    et enfin l'on retrouve le savoir, ou la theorie est entièrement recoupé par les faits, cette théorie est prédictible a 100% ou 99,99% le fait de réussir a obtenir par la théorie un resultat conforme au attente devient si banal, que devenant un fait normal, l'on en oublie même qu'il est necesaire d'y penser..

    c'est pourquoi toute personne a une somme de savoir assez importante sur son environement quotidiens qu'il tiens, certes plus de l'expérience, que du fait de pensé, toutefois ce savoir est bien plus solide que beaucoup d'autre.. et c'est sans doute pourquoi il fut si difficile de faire preuve de l'héliocentrisme, ou encore aujourd'hui du darwinisme...
    le fait de ne pas avoir la theorie formelle sur le fonctionement des choses n'empèche pas de pouvoir prédire correctement le comportement des choses.. or prédire c'est bien faire un pari sur le futur, et réussir son pari a chaque éssais, démontre que l'on est en présence d'un savoir, et non d'une connaissance(approximative), ou d'une simple croyance..

  23. #22
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    En fait ce que j'ai soulevé c'est plus exactement l'inter action entre savoir (objectif, neutre) et opinion (subjective), c'est-à-dire du "tenir pour vrai" sous l'influence des autres et pas seulement les mécanismes plus ou moins intuitifs du savoir au moyen des perceptions sensibles notamment. On y retrouve d'ailleurs la même différence qui sépare les fondements de la science et ceux de la philosophie.
    J'ai d'ailleurs trouvé un texte de Paul Ricoeur sur le sujet de cette vaste notion de "croyance" au sens de doxa qui situe un peu mon angle d'approche.

    ... Ayant ainsi laissé derrière nous le langage ordinaire, laissé de côté la bifurcation des sciences humaines, nous élaborerons pour elle-même l'énigme du tenir-pour-vrai. Nous y serons aidés par le jeu des synonymes qui exhibent en quelque sorte (c'est-à-dire placent et montrent à l'extérieur) les variations de sens du vocable lui-même. Au premier rang de ces synonymes se tiennent les mots opinion et foi. Cette proximité n'est pas fortuite ; elle est imposée par les contextes successifs qui ont institué le jeu réglé des acceptions du mot croyance. Le contexte initial, pour une investigation philosophique, est le contexte grec de la doxa, mot que l'on a traduit par opinion. Une première problématique se noue ainsi à partir de l'opposition opinion-science.

    La mise en série des contextes philosophiques conduit en gros de la croyance-opinion à la croyance-foi. La première étape est marquée par le passage de l'opinion à l'opiner ; le verbe fait en effet apparaître une nouvelle affinité de sens : opiner, c'est juger. Cette acception nouvelle est mise en valeur dans les contextes stoïcien et cartésien ; la croyance s'enrichit ainsi d'une signification remarquable qui l'éloigne de l'acception péjorative de l'apparence ou de l'illusion et la rapproche de l'acception laudative (éloge) de l'affirmation, entendue comme pouvoir souverain du oui et du non.

    Ainsi rabattue sur le pôle subjectif de l'assentiment, la croyance devient le belief de la philosophie anglaise, lequel noue un nouveau pacte avec le probabilisme et le scepticisme ; la crise du concept de vérité est ainsi ouverte ; Kant tentera de la résoudre en dissociant fermement les conditions purement subjectives du tenir-pour-vrai des conditions objectives du savoir véritable. Ce discernement critique, opéré par Kant, entre croire et savoir, est proprement le point tournant de toute l'analyse du concept de croyance.... encyclo universalis

  24. #23
    bardamu

    Re : Espistém'opinion

    Citation Envoyé par Primavera
    Mes remarques ne se limitaient pas à l'opinion vis à vis du savoir scientifique, mais étaient en fait plus générales.
    Salut,
    essayons quand même de ne pas trop s'écarter du thème de Futura-Sciences...
    Citation Envoyé par Primavera
    Mais je pense qu’il n’est pas très "sympathique" de mépriser à tel point le "sens commun" qui de toute façon, qu’on le veuille ou non, gouverne le monde.
    Le "sens commun", par définition, on le partage tous. Le mépriser, ce serait se mépriser.
    La question est de savoir si on en fait une finalité ou plutôt un commencement, si le "bon sens" est un potentiel à réaliser ou se prend au sens commun comme une chose qu'on aurait spontanément et qui se suffirait en l'état.

    Quand tu parles de "une certaine forme de vérité concrète et pragmatique, par somme algébrique de toutes les diversités appelées à exprimer leurs opinions singulières", on pourrait se demander si c'est une somme (cumul positif) ou plutôt une moyenne éliminant la qualité du singulier.
    Si les scientifiques en étaient resté au "bon sens" et au "sens commun", ils n'auraient jamais dit que la Terre tourne autour du Soleil. Il n'y aurait non plus jamais eu de révolutions des mentalités si quelques personnages singuliers de l'histoire n'avait fait du nouveau, parfois en dépit du "bon sens", c'est-à-dire du sentiment général d'une époque.

    Il peut y avoir du particulier sans général mais pas de général sans particulier, et tant qu'à établir un gouverneur du monde, je serais plutôt d'avis que c'est le singulier, le particulier qui l'exerce.
    Citation Envoyé par Primavera
    Mais cette réponse m'a tout simplement fait penser à La République de Platon et à son allégorie de la caverne, bref à sa théorie des Idées. Attention, je crains que la dictature du despote éclairé ne soit pas bien loin !!!
    Passage du fait au droit...
    On peut faire une lecture inverse où le fait étant que la compréhension demande un effort et que le "sens commun" n'en demande pas puisqu'on est d'emblée dedans, le "despote éclairé" jaloux de ses lumières (?) prétextes à s'autoproclamer "guide", dirait "dormez braves gens, le sens commun suffit"...
    Citation Envoyé par Primavera
    c'est-à-dire du "tenir pour vrai" sous l'influence des autres et pas seulement les mécanismes plus ou moins intuitifs du savoir au moyen des perceptions sensibles notamment.
    Citation Envoyé par Ricoeur
    La première étape est marquée par le passage de l'opinion à l'opiner ; le verbe fait en effet apparaître une nouvelle affinité de sens : opiner, c'est juger. Cette acception nouvelle est mise en valeur dans les contextes stoïcien et cartésien ; la croyance s'enrichit ainsi d'une signification remarquable qui l'éloigne de l'acception péjorative de l'apparence ou de l'illusion et la rapproche de l'acception laudative (éloge) de l'affirmation, entendue comme pouvoir souverain du oui et du non.
    Je ne suis pas sûr que Ricoeur veuille parler "de l'influence des autres" dans ce passage.
    Citation Envoyé par Descartes, Discours de la Méthode
    pour toutes les opinions que j’avais reçues jusques alors en ma créance, je ne pouvais mieux faire que d’entreprendre une bonne fois de les en ôter, afin d’y en remettre par après ou d’autres meilleures, ou bien les mêmes lorsque je les aurais ajustées au niveau de la raison . Et je crus fermement que par ce moyen je réussirais à conduire ma vie beaucoup mieux que si je ne bâtissais que sur de vieux fondements et que je ne m’appuyasse que sur les principes que je m’étais laissé persuader en ma jeunesse, sans avoir jamais examiné s’ils étaient vrais.
    http://descartes.free.fr/]Descartes
    Accepter une opinion devient positif parce que l'opinion a été évaluée parfois en dépit de l'opinion générale (ou de celle des "autorités", les scolastiques pour Descartes).
    C'est le passage de l'idée tout faite, de l'opinion-idée reçue, à l'idée vraie.

    Chez les stoïciens, il s'agit de gérer ses propres opinions, lesquelles déterminent notre perception des choses.
    Citation Envoyé par Epictète
    X. CE qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions qu'ils en ont. Par exemple, la mort n'est point un mal, car, si elle en était un, elle aurait paru telle à Socrate, mais l'opinion qu'on a que la mort est un mal, voilà le mal. Lors donc que nous sommes contrariés, troublés ou tristes, n'en accusons point d'autres que nous-mêmes, c'est-à-dire nos opinions.

    XI. ACCUSER les autres de ses malheurs, cela est d'un ignorant ; n'en accuser que soi-même, cela est d'un homme qui commence à s'instruire ; et n'en accuser ni soi-même ni les autres, cela est d'un homme déjà instruit.

    http://abu.cnam.fr/cgi-bin/go?pensepict1
    En philosophie ou en sciences, tenir pour vrai en raison de l'influence des autres me semble plutôt considéré comme une faiblesse, l'abandon d'un pouvoir de penser par soi.

    Il n'empêche qu'on commence toujours comme ça, l'éducation est à base d'idées reçues et les phénomènes communautaires ne sont pas négligeable dans la constitution des opinions.
    Il doit y avoir pas mal de travaux en psycho-sociale ou en économie là-dessus.

    Un papier sur le sujet par un économiste : What is a collective belief ?.
    Au lieu de définir la croyance de groupe comme le fait qu'un membre croit que la majorité des autres pense ceci ou cela, il propose de la définir comme le fait qu'un membre croit que la majorité des autres pense que la majorité des autres croit ceci ou cela. En gros, la croyance de groupe se constitue parce que les individus croient en une croyance de groupe indépendament de l'opinion en jeu.

    Et finalement, on semble plutôt en épistémologie qu'en éthique... On va attendre un peu pour être sûr.
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  25. #24
    invitec950cde9

    Re : Espistém'opinion

    Salut,
    Citation Envoyé par Bardamu
    essayons quand même de ne pas trop s'écarter du thème de Futura-Sciences...
    Ce qui m’a inspiré le thème de ce fil étant le fait que certains de mes interlocuteurs avaient affirmé s’appuyer sur des faits ou observations scientifiques pour arguer de l’objectivité de leurs opinions sur des questions de société : je trouve donc qu’au contraire nous sommes en plein dans la thématique de FS. Suffit-il de prétendre s’appuyer sur des faits scientifiques pour être soi-même objectif ?
    Car il est intéressant de s’interroger sur ce grand espace mental ou psychologique qui sépare la pure démonstration scientifique objective de l’interprétation que chacun peut en faire, en entrant dans le domaine de l’opinion.
    D’ailleurs s’il suffisait de faits "scientifiquement démontrés" pour établir une vérité universelle, on ne comprendrait pas pourquoi sur diverses questions de société, comme celle de l’écologie par exemple (à l'appui de données dites scientifiques et climatologiques), nous rencontrons si peu d’accords unanimes.

    Le "sens commun", par définition, on le partage tous. Le mépriser, ce serait se mépriser.
    La question est de savoir si on en fait une finalité ou plutôt un commencement, si le "bon sens" est un potentiel à réaliser ou se prend au sens commun comme une chose qu'on aurait spontanément et qui se suffirait en l'état.

    Quand tu parles de "une certaine forme de vérité concrète et pragmatique, par somme algébrique de toutes les diversités appelées à exprimer leurs opinions singulières", on pourrait se demander si c'est une somme (cumul positif) ou plutôt une moyenne éliminant la qualité du singulier.
    Si les scientifiques en étaient resté au "bon sens" et au "sens commun", ils n'auraient jamais dit que la Terre tourne autour du Soleil. Il n'y aurait non plus jamais eu de révolutions des mentalités si quelques personnages singuliers de l'histoire n'avait fait du nouveau, parfois en dépit du "bon sens", c'est-à-dire du sentiment général d'une époque.

    Il peut y avoir du particulier sans général mais pas de général sans particulier, et tant qu'à établir un gouverneur du monde, je serais plutôt d'avis que c'est le singulier, le particulier qui l'exerce.
    Le sens commun n’est certainement pas une finalité en soi, mais on ne peut refuser de le prendre en compte si on veut échapper à l’arbitraire d’un pouvoir qui serait certes éclairé mais oligarchique ou autocratique, entre les mains d’un petit nombre que ne manquera jamais d’abuser de ce pouvoir s’il n’en est pas empêché par une loi démocratique qui elle sera forcément le résultat des suffrages du peuple et de son "sens commun". C’est bien pour cela d’ailleurs que nos démocraties occidentales sont dites "démocratie d’opinions". Faut-il le déplorer ou s’en réjouir ?

    Mais en fait "sens commun", et "savoir scientifique éclairé", ne sont pas deux pôles à opposer mais au contraire à composer dialectiquement ensemble. Bien sur l’idéal serait que chaque individu soit parfaitement "éclairé", droitement instruit et cultivé, parfaitement lucide et réfractaire (car conscient) à toute influence néfaste qui le détournerait du savoir vrai…. mais malheureusement notre monde n’est pas un monde idéal, mais simplement affronté aux réalités. Il nous faut donc parvenir à comprendre comment concrètement Cela fonctionne dans sa marche (ou processus historique) vers le Savoir.
    Passage du fait au droit...
    On peut faire une lecture inverse où le fait étant que la compréhension demande un effort et que le "sens commun" n'en demande pas puisqu'on est d'emblée dedans, le "despote éclairé" jaloux de ses lumières (?) prétextes à s'autoproclamer "guide", dirait "dormez braves gens, le sens commun suffit"...
    D’où justement cet aspect dialectique de la réalisation du réel, et dans ce cas particulier (anthropologie) on retrouve encore cette indispensable complémentarité des contraires : le savoir instinctif qui se manifeste dans le "sens commun" est utile au "savoir réfléchi" qui résulte de l’esprit mathématique du scientifique (entendement), mais réciproquement le second est aussi utile au premier.

    On retrouve d’ailleurs ici cette même problématique de dialectique toujours soulevée par la métaphysique, (et que posait notamment Heidegger, mais il n’est pas le seul) : la Vérité est-elle dans l’Etre (dans l’ultrasensible que cet instinct primitif du savoir savait décrypter par la représentation artistique notamment, d’où selon lui nécessité de l’herméneutique..) ou au contraire dans le connaître scientifique (par le sensible) ? C’est à propos de cela que je disais opter pour la réponse d’Aristote plutôt que Platon.
    Je ne suis pas sûr que Ricoeur veuille parler "de l'influence des autres" dans ce passage.
    Non pas précisément mais c’était un extrait pris en bloc qui permettait tout de même de réorienter la discussion plus près de mon approche, particulièrement sur ce point où Ricœur souligne cet aspect de l’opinion comme pouvoir souverain du sujet qui y trouve l’occasion de s’engager, de prendre parti, de s’impliquer tout entier… voire d’exister.

    Accepter une opinion devient positif parce que l'opinion a été évaluée parfois en dépit de l'opinion générale (ou de celle des "autorités", les scolastiques pour Descartes).
    C'est le passage de l'idée tout faite, de l'opinion-idée reçue, à l'idée vraie.

    Chez les stoïciens, il s'agit de gérer ses propres opinions, lesquelles déterminent notre perception des choses.

    En philosophie ou en sciences, tenir pour vrai en raison de l'influence des autres me semble plutôt considéré comme une faiblesse, l'abandon d'un pouvoir de penser par soi.
    Oui mais le fait est que nous ne sommes jamais conscients de l’influence que nous subissons de la part des autres (phénomène subi, de conviction/séduction) alors que je pense que l’influençabilité de l’humain est très forte. Les manipulations et propagandes qui agissent sur nos opinions et manière d’agir sont toujours incolores, inodores et indolores. Dans notre pays, on le dénonce surtout en matière de publicités commerciales, mais il n’y a pas que dans ce domaine que ce phénomène d’aliénation se produit.
    Il n'empêche qu'on commence toujours comme ça, l'éducation est à base d'idées reçues et les phénomènes communautaires ne sont pas négligeable dans la constitution des opinions.
    Il doit y avoir pas mal de travaux en psycho-sociale ou en économie là-dessus.
    Certainement, et ce sont des questions qui m’intéresse particulièrement en ce moment. Sur le fil "définir le terme agressivité" nous avons été amenés à comparer agressivité et violence, et j’avais proposé (sans succès) d’approfondir cet aspect particulier de la violence (viol de l'intimité des convictions) sous l’angle des manipulations mentales.

    Un papier sur le sujet par un économiste : What is a collective belief ?.
    Au lieu de définir la croyance de groupe comme le fait qu'un membre croit que la majorité des autres pense ceci ou cela, il propose de la définir comme le fait qu'un membre croit que la majorité des autres pense que la majorité des autres croit ceci ou cela. En gros, la croyance de groupe se constitue parce que les individus croient en une croyance de groupe indépendament de l'opinion en jeu.
    Je ne sais pas selon quel schéma précis cela fonctionne, mais je suis tout à fait persuadée qu’un tel phénomène d’attraction au niveau d’un groupe intervient, peut-être est-ce l’instinct grégaire, ou un besoin inexpliqué de symbiose ou plus trivialement le besoin d’une protection par celui qui a su s’affirmer comme leader du groupe (possesseur du Savoir) par un phénomène de séduction … ce qui ne manque pas de me faire penser aux gourous des sectes.
    Je crois que les nouvelles thèses dites de morphogénèse pourraient nous éclairer sur ces questions.
    Et finalement, on semble plutôt en épistémologie qu'en éthique... On va attendre un peu pour être sûr.
    C’est bien ce que j’avais dit au début… Ceci dit, je trouve que c’est effectivement un phénomène de croyance qui est à la source du "tenir pour vrai" de l’opinion.