Bonjour tout le monde,
La vie de l’homme est partagée entre le bonheur et le malheur. Il passe sa vie à fuir la souffrance pour atteindre le plaisir. Il fuit le malheur pour atteindre le bonheur. Mais il n’y arrive jamais. L’homme n’arrive jamais à échapper aux griffes du malheur. Et tout est toujours à recommencer. Alors il crée des morales permettant apparemment d’arriver au bonheur. Il crée des philosophies de vie pour échapper au malheur. Une fois de plus, celles-ci ne semblent pas efficaces à cent pour cent. Alors, il envisage une voie centrale, la voie du juste milieu. La voie du juste milieu. Mais comme chaque homme a son idée du juste milieu, tout est à recommencer. Bien sûr, certains hommes parviennent apparemment à quitter les rivages du malheur pour pénétrer au cœur du bonheur. Mais la majorité de ceux-ci vit en dehors du monde réel. Qu’ils vivent dans un temple, un monastère, un ashram, leur bonheur est présent tant que des étrangers ne viennent pas perturber leur quiétude. Une guerre, et le bonheur s’envole comme s’il n’avait jamais appartenu à ces humains.
Comment l’homme détermine-t-il s’il est heureux ou non? Il se dit heureux lorsqu’une quantité de ses désirs se voient assouvis. Pour une personne, trente pour cent de ses désirs doivent être rencontrés pour qu’elle se dise heureuse. Pour une autre personne, soixante-quinze pour cent de ses désirs devront être assouvis pour qu’elle vibre de bonheur. Cela veut dire en fait que la première passera une grande partie de sa vie dans l’impression de bonheur, parce que son quota sera plus facilement et plus fréquemment atteint que l’autre. Tandis que la deuxième sera certainement plus souvent dans une phase de malheur. En fin de compte, tout n’est qu’une question de perception. Le pourcentage de désirs atteints détermine le bonheur ou le malheur dans la vie psychologique de l’homme.
Mais la faculté de désirer beaucoup de choses complique aussi l’atteinte de ce bonheur. En fait, le bonheur n’est rien. Le malheur n’est rien. Rien que des idées. Le dilemme qui se pose pour l’homme c’est qu’il ne peut attirer le bonheur sans sentir l’odeur du malheur. L’inverse est aussi vrai. S’il désire être heureux, il exprime par là qu’il ne veut pas être malheureux. Le bonheur est une satisfaction de la pensée. Et le malheur est évidemment une déception de la pensée. Si l’homme veut être heureux, il exprime un désir. Ce désir qu’il a devra être satisfait. Mais aussitôt qu’un désir apparaît, il y a autant de possibilités qu’il soit satisfait, qu’il y en a qu’il ne le soit pas. Donc, le désir du bonheur, la recherche du bonheur entraînent la possibilité du malheur. Et comme les désirs de l’homme, qui sont de plus en plus nombreux, ne sont pas tous satisfaits, le malheur apparaît fréquemment à ses yeux psychologiques.
L’homme pense et élabore des théories du bonheur. Il veut ne plus être malheureux tout en étant heureux. C’est important de bien saisir la nuance. Pour y parvenir, il doit se détacher complètement du bonheur. De cette façon, il n’a plus peur de le perdre. Ne désirant plus de bonheur, il ne se colle plus au malheur. Pour éliminer le malheur, il élimine le bonheur, c’est-à-dire le désir du bonheur.
Chez l’homme, le plaisir est un petit bonheur. L’accumulation de plaisirs ou encore l’extension dans le temps d’un plaisir lui laisse croire qu’il échappe au malheur. Qu’est-ce qui crée chez lui le plaisir? Quel est ce mécanisme du plaisir? La pensée de l’homme compare ce qui est perçu par les sens avec ce qui est déjà en souvenir. Mais cette comparaison n’a pour raison que la recherche de ce qui, un jour, a donné du plaisir, afin de le reconnaître dans le présent. S’il est reconnu, alors l’homme essaie de s’en rapprocher. Si c’est l’inverse qui est perçu, alors il essaie de fuir. Ainsi, pour l’homme, le bonheur est constitué de tous les malheurs qu’il n’a pas; d’où l’illusion. Le bonheur n’existe pas.
À vous,
Le mystérieux inconnu
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