L'importance de l'action de l'homme
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L'importance de l'action de l'homme



  1. #1
    Squared

    Question L'importance de l'action de l'homme


    ------

    Bonsoir Mme Masson-Delmotte et/ou Mr Kandel,

    Cela fait depuis quelque temps que j'entend dire que l'homme a une action négligeable sur le réchauffement de la planète. En effet, j'ai pu encore vérifier il y a quelques jours sur un site ou un physicien parlait de ce phénomène, que l'humain aurait finalement un rôle négligeable dans ce réchaufement, le soleil y participant majoritairement.
    Pouvez-vous confirmer ces affirmations ?
    Si oui, devons nous tout de même nous inquiéter de notre impact sur l'environnement au niveau du réchauffement climatique et à quel niveau principalement ?

    Je vous remercie d'avance de répondre à mes questions.

    Très cordialement,

    Alexandre

    -----
    "Qu'est-ce qu'il y a avant le big bang ? ... et bien l'apéro ! " - PVB

  2. #2
    invitee38b7566

    Re : L'importance de l'action de l'homme

    Les activités humaines modifient profondément les concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre : + 30% de CO2 par rapport au niveau pré-industriel, doublement des concentrations atmosphériques en méthane. Cette augmentation des concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre modifie le bilan radiatif de la planète, de l'ordre de 2.5 W/m² si l'on prend en compte tous les gaz à effet de serre. Les grandes incertitudes concernent la réponse du système climatique à ce changement du bilan radiatif de la terre : réchauffement de l'atmosphère et de la surface, augmentation du contenu en eau de l'atmosphère, plus chaude donc plus humide (encore plus d'effet de serre), changement de la couverture nuageuse (avec des effets complexes selon le type de nuage formé), réduction des surfaces enneigées et englacées donc encore plus de rayonnement solaire absorbé et augmentation du réchauffement...

    Les conséquences de l'augmentation des gaz à effet de serre vont dépendre de ces rétro-actions dans le système terre, qui peuvent entraîner une réponse climatique amplifiée. Un dernier exemple : aujourd'hui, seulement la moitié de nos émissions de CO2 s'accumulent dans l'atmosphère, l'autre moitié est reprise par la végétation et l'océan ("puits de carbone"). Il semble que les effets du réchauffement climatique vont diminuer ces "puits de carbone", entraînant un accroissement plus rapide des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère et un changement climatique encore plus important.

    En ce qui concerne l'impact du soleil sur le climat, il faut bien sûr séparer les variations à long terme de l'orbite de la Terre, qui jouent à des échelles de temps très longues (de l'ordre de plusieurs milliers d'années) des variations de l'activité du soleil proprement dites. Ces dernières sont connues assez précisément grâce au suivi par satellites, depuis une trentaine d'années. Pour les périodes plus anciennes, on dispose d'observations historiques (ex : taches solaires) ou d'indicateurs indirects via la production d'isotopes cosmogéniques dans la haute atmosphère. Ces observations indirectes sont difficules à traduire en termes de W/m². Des simulations suggèrent que les fluctuations d'activité solaire peuvent modifier le bilan radiatif de la haute atmosphère (absorption par la couche d'ozone stratosphérique), la dynamique de la haute atmosphère et peut être la dynamique de la circulation atmosphérique, en particulier dans les hautes latitudes. Il semble ainsi qu'un minimum d'activité solaire a pu être impliqué dans le refroidissement climatique marqué dans l'hémisphère nord au cours du 14ème au 19ème siècle, parfois appelé "Petit age de glace" à cause de l'avancée des fronts des glaciers en particulier dans les Alpes. Nous parlons de changements de température inférieurs à 0.5°C.

    Pour quantifier l'impact des variations de l'activité du soleil sur le climat, il est possible d'étudier en détail les variations climatiques année par année au cours du dernier millénaire. La difficulté est de séparer les variations liées à l'effet d'éruptions volcaniques, l'effet de variations de l'activité solaire, l'effet des activités humaines (déforestation et changement d'usage des sols / gaz à effet de serre / aérosols) ou bien même une variabilité naturelle du climat.

    2 éléments font suggérer que ce n'est pas l'activité solaire qui est responsable du réchauffement récent (dernières décennies, depuis ~1975) :

    1) dans l'état actuel des connaissances, la fin du 20ème siècle et les dernières années représentent la période la plus chaude des 1000 dernières années, y compris, à l'échelle globale, la période médiévale, qui semble associée à une activité solaire plus intense que la moyenne;

    2) des simulations ont été réalisées à l'aide de modèles numériques de climat (circulation de l'océan, de l'atmosphère, à 3 dimensions). Les simulations prenant en compte l'activité solaire et le volcanisme permettent d'expliquer les variations au début du 20ème siècle jusqu'aux années 1960 mais pas le réchauffement qui a suivi. Au contraire, l'augmentation des teneurs atmosphériques en gaz à effet de serre a permis de simuler le réchauffement observé. Enfin, les simulations prenant en compte l'effet combiné de tous ces forçages permettent de simuler correctement l'ordre de grandeur des variations de température observées au cours du 20ème siècle.

    Enfin, dernier élément : en 1995 et 2001, des simulations d'évolution du climat avaient été réalisées selon certaines hypothèses sur l'évolution des émissions et des concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre. Au cours des années qui ont suivi, l'évolution des températures globales correspond à ces prévisions.

    Pour résumer, il semble que
    - les variations "naturelles" du climat (hors activités humaines) peuvent être influencées par ce qui perturbe le bilan radiatif comme les éruptions volcaniques (effet à relativement court terme) ou les variations d'activité solaire
    - cependant il n'est pas possible d'expliquer le réchauffement de la 2ème moitié du 20ème siècle par ces phénomènes naturels;
    - au contraire, ce réchauffement récent s'explique bien par l'augmentation de l'effet de serre d'origine humaine. Dans notre communauté, on parle de "l'anthropocène" = la période où ce sont les activités humaines qui pilotent l'évolution à la fois de la composition de l'atmosphère, globalement, et du climat.

    Il est certain qu'au cours des 50 années à venir il y aura des variations d'activité solaire et de volcanisme, cependant, leurs effets seront à comparer à l'augmentation de l'effet de serre ... selon nos choix de développement. Ainsi, depuis 1990, année de référence pour le protocole de Kyoto, l'impact radiatif des gaz à effet de serre dûs aux activités humaines a encore augmenté de 20%! Et le réchauffemetn s'est poursuivi. Les concentrations atmosphériques en C02 pourraient atteindre le triple ou le quadruple de leur niveau "naturel" d'ici 100 ans.

    En ce qui concerne l'évolution future du climat, le réchauffement est inéluctable et persistera pendant des centaines d'années (temps de résidence du CO2~100 ans + effet de l'inertie thermique de l'océan). Au delà de l'incertitude sur l'ordre de grandeur du réchauffement (de l'ordre de quelques degrés globalement) il faut bien voir qu'on déstabilise très brutalement un système complexe. Si l'attention se concentre souvent sur les températures à l'échelle globale, le changement climatique va se décliner à l'échelle locale et à toutes les échelles de temps (variabilité jour à jour, cycle saisonnier, variabilité interannuelle...) et pas uniquement en températures mais également en terme de cycle de l'eau. Nous sommes tous très vulnérables par rapport à beaucoup de ces changements et en particulier par rapport à des changements brutaux du régime des précipitations. La fonte des glaciers et la déstabilisation des régions du grand nord est en cours et contribuera à une augmentation significative du niveau des mers, ce qui posera très vite problème dans les régions côtières. Malgré les incertitudes liées à l'utilisation de modèles numériques de climat pour évaluer les risques à venir, leur vérification par rapport aux climats du passé me donne confiance dans leur capacité à représenter les processus essentiels et simuler correctement le premier ordre des changements climatiques. Par rapport aux ordres de grandeur attendus, même une diminution importante de l'activité solaire ne compensera pas cet accroissement de l'effet de serre.

  3. #3
    Squared

    Re : L'importance de l'action de l'homme

    Merci beaucoup pour cette réponse détaillée Madame Masson-Delmotte.

    Très cordialement,

    Alexandre
    "Qu'est-ce qu'il y a avant le big bang ? ... et bien l'apéro ! " - PVB

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