Bonjour,
Suite a une discussion dans un fil en physique sur la mecanique quantique, j'ouvre un fil pour tenter d'expliquer un peu, les idées de base de la Géométrie non commutative telle qu'elle s'est developpée, et si possible de donner des liens avec la physique et son developpement (je poste quand meme en maths, car c'est avant tout des maths). J'espere que ca vous interessera!
Les idées qui ont amené au developpement de la géométrie non commutative cadrent parfaitement avec l'ensemble des idées qui a globalement chamboulé toute la géométrie au cours du XXe siecle, c'est l'idée de passer d'une notion tres ensembliste d'espace, où les points occupent la majorité des preoccupations, a une notion plus allusive, où ce qui est important ce n'est plus tellement les points de l'espace sous jascent, mais les fonctions que l'on peut definir dessus (le parallèle avec la mecanique quantique est d'ailleurs patent). Cette transfiguration s'est opéré dans de nombreux contextes en mathématiques, et les precursseurs sont sans doute Leray et Cartan en geométrie ananlytique complexe, avec le developpement de l'algèbre homologique, mais cette idée se retrouve en géométrie algébrque (c'est surtout là en fait qu'elle a illustré sa puissance en premier lieu) en geométrie analytique complexe, en geométrie non commutative, mais aussi par exemple en theorie des distributions (ou la notion de valeur en un point disparait, et les points sont remplacé par les fonctions tests).
Regardons ce qui se passe du point de vue de la topologie et de la géométrie differentielle. Une variété differentielle c'est un espace topologique, qui localement est homéomorphe a R^n, et muni d'un atlas dont les fonctions de transitions sont lisses. A quoi sert cette lissité? Moralement elle sert a une seule chose, elle sert a pouvoir dire si une fonction sur la variété est lisse ou non. Et une idée naturelle est de se dire, plutot que se donner cette atlas, peut on se donner directement des ensembles de fonctions (ici pour intriduire proprement la chose il me faudrait parler de faisceau, qui lie tous les points de vue, mais je vais pas le faire parce qu'on a pas strictement besoin pour le geo diff et la GNC), et decreter, voila les fonctions lisses.
Ainsi une variété differentielle X, arrive équipée avec un ensemble particulier, son ensemble de fonctions lisses (à valeur dans C), que je noterai simplement C(X). L'idée fondamentale qui fait basculer la comprehension, c'est la question suivante "Que peut on comprendre de X en regardant uniquement C(X)?". Et le petit miracle, c'est qu'en fait les reponses a ces questions etaient deja connues avant meme de poser la question en ces termes.
Mais avant de voir quelles sont ses reponses, examinons un tout petit peu la tete de C(X), c'est un C-espace vectoriel, on sait aussi multiplier des fonctions, c'est donc une algèbre (commutative), on a aussi une involution, la conjugaison complexe, et une topologie (que l'on peut penser comme la topologie de la norme sup, meme si c'est pas tout a fait ca) pour laquelle elle est complete. ON a donc une algèbre de banach commutative munie d'une involution (dans la suite je triche un peu, par certains moments ce que j'enonce n'est vrai que pour l'algèbre des fonctions continues).
Comment donc retrouver l'espace sous jascent a C(X)? La reponse est simple, a un point x, on fait correspondre l'application de C(X) dans C, qui a une fonction f associe f(x), que l'on note en , c'est un carractère de C(X), on peut mettre une topologie sur l'ensemble de ces carractères (la topologie faible-*). Je note Car(C(X)) l'espace des carractères de C(X). Et le théorème de Gelfand assure alors que non seulement X est homéomorphe a l'espace des carractères de C(X), X=Car(C(X)), mais aussi que si on se donne n'importe quelle algèbre de banach verifiant les conditions vue plus haut, C, alors C est isomorphe a l'algèbre des fonctions sur l'espace de ces carractères de C, autrement dit C=C(Car(C).
Autrement dit connaitre X et connaitre C(X) est exactement la meme chose, via les carractères! C'est pas tout, les fonctions entre espace X et Y, donnent bien sur un mophisme d'algèbre entre C(Y) et C(X) (dans ce sens), et toutes les morphismes proviennent de tels fonctions! Autrement dit on a perdu aucune information de nature topologique en passant de X à C(X)!!
Pour l'instant je n'ai parlé que de géométrie non commutative, mais le passage au non commutatif est a present béant. Qu'est ce qui se passe maintenant quand je me donne au lieu de l'espace X, n'importe quel algèbre verifiant les conditions vue plus haut, mais sans s'imposer la comutativité. SI l'algèbre est commutative, alors on a un espace X bien defini qui lui est associé, et on peut voir cette algèbre comme l'algèbre des fonctions sur X.
Avant de décrire comment retrouver certaines notions de base de géométrie sur ces algèbres non commutatives (ce que je ferais dans un prochain message, j'ai deja été tres long), je voudrais mentionner rapidement les interactions de ce point de vue avec la mecanique quantique.
Quand on etudiant l'espace des phases d'un systeme mecanique, traditionnelement on lui attachait une variété differentielle, l'espace des phases du systeme. Par exemple, en etudiant le pendule simple, on regarde l'espace des theta, theta', et on etudie des champ de vecteurs la dessus (le champ d/dt theta=theta' et d/dt theta'=-sin(theta)) et le mouvement est donné par les intégrales de ce champ sur la variété, au temps t, theta' est donné par la première fonction coordonnée, qui a un point d'une courbe intégrale associe sa projection sur le second axe. Autrement dit x et p sont donné par des fonctions sur l'espace des phases, une variété differentielle. Autrement dit ce dont des elements de C(X) (ou X est l'espace des phases), une algbère commutative.
Qu'a remarqué Heisenberg que si l'on regarde les "fonctions" p et x sur l'espace des phases d'un systeme tout petit, alors on a pas px=xp, autrement dit, x et p ne peuvent pas etre element d'un C(X) ou X serait un espace des phases classiques, il font donc partie d'un C(X) mais pour C(X) une algèbre non commutative, autrement dit un espace non commutatif.
Voila pour une introduction, j'introduirai les concepts a proprement de parler de GNC dans mon prochain post (enfin sauf si celui la vous deplait). L'idée va etre de traduire les operations geométriques sur X, en des operations uniquement sur C(X), et a partir de la de pouvoir donner une definition de ces opérations geométrique qui marche pour une algèbre C quelconque.
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