Fumeurs noirs et oxygène
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Fumeurs noirs et oxygène



  1. #1
    Amanuensis

    Fumeurs noirs et oxygène


    ------

    Bonjour,

    Ma question porte sur les sources d'énergie utilisées par le vivant dans les écosystèmes autour des fumeurs noirs au fond de l'océan.

    On voit couramment écrit que ces écosystèmes sont indépendants de la surface et de la photosynthèse. (Qu'ils ne dépendent pas de l'énergie apportée par le rayonnement solaire). Cela me paraît au minimum partiellement faux, la question principale étant celle de l'indépendance par rapport à l'oxygène libre.

    Il me semble que les eucaryotes (crevettes, vers, ...) dans ces écosystèmes ont besoin d'une grande quantité d'oxygène. Est-il possible que cet oxygène soit produit localement en quantité suffisante ? Je pense que non, auquel cas on ne peut pas dire que ces écosystèmes soient indépendants de la surface !

    Reste la question si la partie lithotrophe peut se passer d'oxygène venant de la surface. Or dans ce je lis de leurs systèmes de récupération d'énergie, l'accepteur final des électrons semble être en général l'oxygène. Une partie de cet oxygène libre doit est générée localement par la réduction du CO2, nécessaire pour qu'un autotrophe se procure le carbone, selon la réaction (simplifiée) CO2 + H2O --> CH2O + O2.

    Mais j'intuite que cela ne peut pas s'équilibrer. I.e., que l'énergie consommée (e.g., comptée en nombre d'ATP) pour la réduction du CO2 est supérieure à celle produite par la lithotrophie, une fois ramenée à un atome d'oxygène créé ou consommé.

    Diverses possibilités restent :

    - les lithotrophes ne sont pas indépendants, eux non plus, de la surface : ils ont besoin d'oxygène en provenant, c'est à dire d'origine photosynthétique.

    - ils sont autonomes, mais utilisent (en plus de l'oxygène créé localement) un accepteur d'électron (un oxydant) fourni par l'environnement (la question est alors lequel ?)

    - ils produisent des accepteurs d'électron autres que l'oxygène, tels qu'il peut y avoir équilibre entre cette production et la "consommation" d'accepteur d'électron par la récupération lithotrophe d'énergie (question, lesquels ?).

    - ???

    Auriez-vous des éléments d'information sur le sujet, ou des pistes vers des textes traitant explicitement de ces questions ? (Par opposition a des textes survolant le sujet sans être suffisamment clairs pour répondre à mes questions; ça, j'en trouve plein...)

    Merci d'avance,

    -----
    Pour toute question, il y a une réponse simple, évidente, et fausse.

  2. #2
    Geb

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Sur Terre, les êtres vivants sont invariablement composés, au niveau atomique, de carbone, d'hydrogène, d'oxygène et d'azote.

    Donc, d'une manière ou d'une autre, ils ont besoin d'oxygène pour survivre et se reproduire. C'est, je pense, la raison pour laquelle tu n'as pas encore eu de réponse. Ta question n'est pas très claire.

    Les fumeurs noirs sont au moins caractérisés par un fort gradient (une grande différence en fonction de l'éloignement de la source) en température et en pH.

    Il est donc a priori évident qu'autour d'un évent, il pourrait y avoir des organismes hyperthermophiles à proximité de l'évent, thermophiles un peu plus loin, etc...

    J'ignore si au plus près de l'évent des organismes eucaryotes peuvent survivre, aucun d'entre eux n'étant thermophile à ma connaissance. Ce sont plutôt des eubactéries et surtout des archées.

    Il est tout de même bon de signaler qu'à la sortie de l'évent d'un fumeur noir, la température est de 300 à 350°C. Il est donc évident qu'aucun organisme vivant ne peut survivre dans ces conditions.

    Ce qui en fait des zones regorgeant de vie, ce sont principalement les sels minéraux, et notamment les composés soufrés, qui s'échappent de ces évents.

    En outre, l'océan mondial étant gorgé d'oxygène depuis environ 2 milliards d'années, il me paraît logique que les organismes qui se développent dans ces milieux aient développé des processus physico-chimiques pour absorber l'oxygène moléculaire dissous dans l'eau.

    Il ne faut pas non plus confondre l'oxygène rejeté après une réaction métabolique (dont le but est de produire de l'énergie utilisable par l'organisme, sous la forme d'ATP) et l'oxygène absorbé par l'organisme lorsqu'il s'alimente.

    Cordialement.

  3. #3
    Amanuensis

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Citation Envoyé par Geb Voir le message
    Sur Terre, les êtres vivants sont invariablement composés, au niveau atomique, de carbone, d'hydrogène, d'oxygène et d'azote.

    Donc, d'une manière ou d'une autre, ils ont besoin d'oxygène pour survivre et se reproduire. C'est, je pense, la raison pour laquelle tu n'as pas encore eu de réponse. Ta question n'est pas très claire.
    J'aurais pensé que "oxygène libre" était suffisamment clair pour ne pas être confondu avec l'atome oxygène.

    Ma question porte sur le besoin en molécules de dioxygène.

    En outre, l'océan mondial étant gorgé d'oxygène depuis environ 2 milliards d'années, il me paraît logique que les organismes qui se développent dans ces milieux aient développé des processus physico-chimiques pour absorber l'oxygène moléculaire dissous dans l'eau.
    Bien d'accord. Mais c'est bien ce qui amène la question. Pour dire que l'écosystème des fumeurs noirs sont indépendants de la photosynthèse, il faudrait montrer qu'il pourrait se passer de cet oxygène moléculaire dissous. Il me semble qu'il y a de bonnes raisons de penser que ce n'est pas le cas.

    Il ne faut pas non plus confondre l'oxygène rejeté après une réaction métabolique (dont le but est de produire de l'énergie utilisable par l'organisme, sous la forme d'ATP) et l'oxygène absorbé par l'organisme lorsqu'il s'alimente.
    Une molécule de dioxygène est la même quelle que soit son origine !

    Quand à la confusion citée, c'est bien, d'une certaine manière, celle qui me gène dans les textes que je lis sur ces sujets. Mais ce genre de "confusion" peut être lue dans la phrase citée ci-dessus : que veut dire "s'alimenter" ??? Si c'est récupérer de l'énergie de l'extérieur, cela peut être compris comme la même chose que "produire de l'énergie". Et si c'est récupérer des matières premières, alors récupérer des atomes C à partir du CO2 rejette de l'oxygène (et non pas en absorbe). Autrement dit, les autotrophes rejettent de l'oxygène quand ils s'alimentent (au sens utiliser le CO2 pour en tirer le carbone qui entre dans l'anabolisme), et les hétérotrophes absorbent de l'oxygène quand ils s'alimentent (au sens utiliser un couple réducteur + dioxygène comme source d'énergie prise à l'extérieur).

    Ma question peut se lire (entre autres) comme une recherche d'information sur le cycle du dioxygène dans l'écosystème d'un fumeur noir dans l'hypothèse où il serait coupé d'une source extérieure de dioxygène.
    Dernière modification par Amanuensis ; 23/02/2012 à 14h28.
    Pour toute question, il y a une réponse simple, évidente, et fausse.

  4. #4
    kamor

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Je suis assez d'accord avec Geb, si un hiver nucléaire frappait la Terre, la répercutions sur la vie au fond des océans serait surement nulle. L'oxygène dissous dans l'eau devrait être suffisant pour longtemps.

    Ma question peut se lire (entre autres) comme une recherche d'information sur le cycle du dioxygène dans l'écosystème d'un fumeur noir dans l'hypothèse où il serait coupé d'une source extérieure de dioxygène.
    La source étant l'eau de mer, ça va être difficile

    les lithotrophes ne sont pas indépendants, eux non plus, de la surface : ils ont besoin d'oxygène en provenant, c'est à dire d'origine photosynthétique.
    La photosynthèse ne produit pas d'oxygène, elle l'utilise simplement. Même les bactéries anaérobies strictes sont constituées d'oxygène tout comme surement les premières bactéries ayant participé à la création de notre atmosphère. Elles ont utilisé l'oxygène pour le relâcher sous forme de gaz. La "production" n'est pas réelle.
    ils sont autonomes, mais utilisent (en plus de l'oxygène créé localement) un accepteur d'électron (un oxydant) fourni par l'environnement (la question est alors lequel ?)
    Pour la chimiosynthèse le choix est assez vaste. Peut être le soufre ou le fer, deux éléments naturellements présents à la sortie de ces fumeurs

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    Amanuensis

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Citation Envoyé par kamor Voir le message
    Je suis assez d'accord avec Geb, si un hiver nucléaire frappait la Terre, la répercutions sur la vie au fond des océans serait surement nulle. L'oxygène dissous dans l'eau devrait être suffisant pour longtemps.
    Je ne contredis pas ces affirmations. Mais ce n'est pas la question que je pose. Ma question est proche de la question qu'est-ce qui resterait comme éco-système une fois l'oxygène dissous venant de la surface complètement consommé.

    La photosynthèse ne produit pas d'oxygène, elle l'utilise simplement.
    Si vous voulez... Je pense que cette phrase indique que vous ne comprenez pas le point que j'essaye de poser.

    Même les bactéries anaérobies strictes sont constituées d'oxygène tout comme surement les premières bactéries ayant participé à la création de notre atmosphère. Elles ont utilisé l'oxygène pour le relâcher sous forme de gaz. La "production" n'est pas réelle.
    ????

    Pour la chimiosynthèse le choix est assez vaste. Peut être le soufre ou le fer, deux éléments naturellement présents à la sortie de ces fumeurs
    Le soufre sous quelle forme ? Le fer sous quelle forme ?

    Il est question d'oxydo-réduction, citer des atomes n'est pas suffisant.

    Et ma question exige de bien distinguer la chimiosynthèse et la chimiotrophie. En parlant de fer ou de soufre, il me semble que cela correspond à la chimiotrophie. Car la chimiosynthèse fait nécessairement intervenir des molécules avec du carbone. Un exemple de "chimiosynthèse" est la réaction globale CO2 + O2 + 4H2S → CH2O + 4S + 3H2O (cette réaction est donnée en exemple dans le wiki), et elle demande de l'oxygène libre.

    Il me semble qu'on peut la décomposer en une réaction de chimiotrophie, 4 H2S + 2 O2 -> 4 S + 4 H2O + énergie libre, et une réaction de synthèse proprement dite, CO2 + H2O + énergie libre -> CH2O + O2. Vu comme cela, on voit que la réaction de chimiotrophie consomme de l'oxygène, et que celle de synthèse en produit. (Et la décomposition rend clair l'aspect énergétique.)

    Ce type de métabolisme n'est pas indépendant de l'oxygène dissous, donc n'est pas indépendant de la photosynthèse (qu'elle soit actuelle ou ancienne n'est pas un point pertinent pour mon problème).

    Quelles réactions de chimiotrophie permettent à une cellule de consommer moins de dioxygène qu'elle n'en produit lors de la chimiosynthèse ?
    Dernière modification par Amanuensis ; 27/02/2012 à 10h10.
    Pour toute question, il y a une réponse simple, évidente, et fausse.

  7. #6
    Amanuensis

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Une remarque au passage : je soupçonne la réaction indiquée dans le Wiki d'être fausse, au sens où elle n'est pas équilibrée énergétiquement. La réaction est plus vraisemblablement

    n(4 H2S + 2 O2) + CO2 + H2O -> n(4 S + 4 H2O) + CH2O + O2

    avec n un nombre non nécessairement entier, tel que l'énergie libre dégagée par la combustion de H2S soit suffisante pour permettre la réduction du CO2. (La réaction indiquée dans le wiki est le cas particulier n=1.)

    Si n=1/2, la consommation nette d'oxygène est nulle, et la réaction pourrait être indépendante de l'oxygène venant de la photosynthèse. Mais nombre d'indices laissent penser que n>1. Qu'en est-il ?
    Dernière modification par Amanuensis ; 27/02/2012 à 10h33.
    Pour toute question, il y a une réponse simple, évidente, et fausse.

  8. #7
    Geb

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Bonjour,

    En ce qui concerne les accepteurs d'électrons utiles à la respiration cellulaire, il y a :

    - le dioxygène,
    - le groupement nitrate,
    - le groupement nitrite,
    - le fer (III),
    - le soufre,
    - le dioxyde de manganèse (IV) (chez Alteromonas putrefaciens),
    - le groupement sulfate,
    - le dioxyde de carbone,
    - l'acide acétique,
    - l'acide formique,
    - le méthanol,
    - les méthylamines,
    - le sulfure de diméthyle,
    - le méthanéthiol,
    - les fumarates (esters et sels de l'acide fumarique).
    - le thiosulfate,
    - l'anthraquinone-2,6-disulfonate (AQDS),
    - l'arséniate (V),
    - le sélénate (VI),
    - le chlorate et le perchlorate (chez Wolinella succinogenes).

    Ce qui porte le nombre d'accepteurs (que j'ai pu trouver) à 20 en tout. Certains de ces accepteurs ont besoin d'une atmosphère riche en oxygène. Lesquels exactement je l'ignore. Quoiqu'il en soit, dans un tel cas de figure, ça implique la présence d'organismes photosynthétiques libérant cette oxygène au préalable.

    Il n'y a pas d'autres accepteurs impliqués dans les différents types de métabolisme cellulaire à ma connaissance. Cela dit, le fumarate est souvent cité, mais plutôt comme intermédiaire dans chacun des cycles.

    Aussi, il existe une voie métabolique que l'on pense être la première de toute. Voir cette discussion :

    http://forums.futura-sciences.com/de...determine.html

    Il s'agit de la voie dite de Wood–Ljungdahl (ou voie acetyl-coenzyme A) pour fixer le dioxyde de carbone de manière autotrophe (et sans l'aide directe ou indirecte de la photosynthèse). Cette voie métabolique est utilisée par les bactéries acétogènes et les archées méthanogènes. On a des raisons de penser que les êtres vivants utilisant cette voie métabolique furent les premiers à apparaître, au sein des fumeurs blancs (température max ~100°C, contre près de 400°C pour les fumeurs noirs), à une époque où la photosynthèse d'oxygène moléculaire n'existait pas encore.

    Cordialement.
    Dernière modification par Geb ; 27/02/2012 à 14h53.

  9. #8
    Amanuensis

    Re : Fumeurs noirs et oxygène

    Merci. J'avais raté cette discussion, et c'est tout à fait le genre d'information qui donne des éléments de réponse à mes questions.

    Si je comprends bien l'article cité, la réaction qui "motoriserait" le vivant pourrait être

    4H2 + 2HCO3- --> CH2COO- + 2H2O + δQ + δW

    avec δQ de la chaleur, et δW du travail sous la forme d'un gradient de proton.

    Et une autre serait

    4H2 + CO2 --> CH4 + 2H2O + δQ + δW

    avec δW là encore sous forme de gradient de proton.

    Dans les deux cas, c'est le couple CO2/H2 qui est la source d'énergie, et dans les deux cas une même réaction fait à la fois la récupération de l'énergie libre et la réduction du CO2 permettant d'incorporer le carbone. Intéressant.
    Pour toute question, il y a une réponse simple, évidente, et fausse.

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