Bonjour.
Je me permets de créer ce topic pour parler en particulier du principe d'équivalence, mais aussi de l'apesanteur (et donc de l'"universalité de la chute libre"). Depuis un certain temps, durant mon temps libre, je me suis vraiment remis à la relativité générale (que j'avais un peu étudiée en M2 il y a quelques années, mais un peu en "survol") et je me suis particulièrement beaucoup attardé sur ce fameux principe d'équivalence ainsi que sur l'apesanteur. Je me suis également réinvesti dans la mécanique newtonienne pour comprendre les fondements des lois de Newton, ainsi que la dynamique dans le cas d'un référentiel non galiléen (en translation et/ou en rotation sur lui-même) avec l'apparition des forces inertielles. Je voudrais savoir d'abord si bien compris ce que sont l'apesanteur et le principe d'équivalence (corrigez-moi si je dis des conneries), mais j'ai toujours de sérieuses interrogations.
Quand on creuse, on se rend compte que l'apesanteur est une notion faussement simple. Dans la vie courante, on a tendance à penser que l'apesanteur est l'"absence de pesanteur", mais en fait pas du tout : c'est beaucoup plus subtil que ça, plus complexe aussi. En effet, les satellites en orbite autour de la Terre ne sont situés qu'à quelques centaines de kilomètres, donc l'accélération de pesanteur g (qui vaut environ 9,8m/s² sur Terre en moyenne) se réduit plutôt autour de 8m/s², soit une accélération toujours très forte. Ainsi, si on ne tombe pas, c'est uniquement grâce à la vitesse initiale de l'objet (au sens vectoriel : direction, sens, norme) acquise une fois les moteurs coupés que l'objet se met en orbite autour de la Terre, l'empêchant de "tomber" (ou plutôt l'objet tombe constamment vers la Terre). Bref, le satellite (et les astronautes dans les stations orbitales) est en chute libre, ce qui signifie qu'il est en apesanteur dans la mesure où la seule force qui s'exerce sur lui est la gravitation terrestre (bon, aussi l'attraction solaire, mais on va faire simple).
En ayant cela en tête, je me suis donc sérieusement interrogé sur la raison pour laquelle, dans le référentiel d'un satellite ou d'une station orbitale, les astronautes se déplacent avec un mouvement rectiligne uniforme. En effet, le principe d'inertie de Newton nous dit qu'un corps soumis à une somme vectorielle de forces nulle est animé d'un mouvement rectiligne uniforme (pour peu qu'il ait déjà une vitesse initiale). Or, dans le cas de l'apesanteur, tout le monde est en chute libre, donc tout le monde est soumis à la gravitation : une seule force a priori, donc résultante non nulle. Problème.
C'est alors qu'entre en jeu ce fameux principe d'équivalence. En appliquant les lois de Newton (j'ai mis les vecteurs en gras), on trouve mi.a = mg.g où mi est la masse inerte (relative à l'accélération inertielle) et mg la masse gravitationnelle qui, au premier abord, n'ont aucune raison d'être égales. En retournant la relation sous la forme a = mg / mi et en faisant plein de mesures de l'accélérations de différents objets en chute libre en la comparaison avec la valeur de g (expériences d'Ötvös en particulier), on a trouvé que ces deux masses sont pratiquement égales (avec une précision de 10^-8 je crois).
Avant que je n'étudie la relativité générale, je n'ai eu que des cours de mécanique classique qui ne m'ont absolument pas introduit ces notions de "masse inertielle" et de "masse gravitationnelle", donc quand j'ai découvert cette différenciation il y a quelques années, j'étais tombé des nues : ça avait été très déstabilisant pour moi. Je ne sais pas ce qu'il en était durant vos cursus, si vous aussi on vous a énoncé les lois de Newton et de la gravitation universelle de manière aussi "simpliste" pendant des années avant de découvrir cette subtilité.
Bref, je continue. Einstein a donc énoncé le principe comme quoi la masse inertielle et la masse gravitationnelle sont les mêmes. Ce n'est pas démontré vu que c'est un principe qui n'a jamais été mis en défaut par l'expérience, et c'est ce sur quoi va reposer la relativité générale (ainsi que sur la relativité restreinte).
Einstein a donc l'idée de nous placer dans le référentiel en chute libre. Dans ce référentiel, l'objet en chute libre est donc soumis à deux forces :
- force d'inertie d'entraînement fie = -mi.a
- le poids P = mg.g
En partant du principe que dans une chute libre l'accélération inertielle et l'accélération gravitationnelle sont équivalentes (c'est ça en fait le principe d'équivalence), cela implique que la masse inertielle et la masse gravitationnelle sont les mêmes : mi = mg = m.
Par conséquent, on a fie = -P.
Donc la somme vectorielle des forces auxquelles est soumis l'objet dans le référentiel en chute libre est nulle. On peut donc appliquer le principe d'inertie et comprendre pourquoi, dans le référentiel d'un satellite en orbite autour de la Terre, tous les objets se déplacent avec une trajectoire rectiligne uniforme vu qu'ils ne ressentent plus aucune force (et uniquement à partir du moment où les moteurs sont coupés).
J'ai aussi compris que ce principe d'équivalence n'est valable que localement, au voisinage de l'objet en train de tomber, étant donné que le champ gravitationnel n'est absolument pas homogène. Si on se place dans le référentiel de l'objet en chute libre, les objets qui sont situés par exemple loin à notre droite ou à notre gauche se rapprochent de nous (vu que le champ gravitationnel est radial et que nous nous approchons tous du centre de gravité), tandis que ceux qui sont situés loin au-dessus ou en-dessous de nous ont tendance à s'éloigner de plus en plus de nous (effet de marée tant qu'on n'a pas touché le sol).
Est-ce que j'ai bon jusqu'à maintenant ? Y a-t-il quelque chose à corriger dans ce que j'ai dit ?
Maintenant, il me reste quelques sérieuses interrogations. La première concerne les effets physiologiques. Ok, donc dans un référentiel inertiel en chute libre, c'est comme si on ne ressentait aucune force. Pourtant, ce n'est pas du tout ce que dit notre corps. En effet, quand je vais dans un grand huit, j'ai comme un "haut-le-coeur" au moment où on commence à "tomber", et c'est la même chose quand je suis en train de subir une violente accélération (pendant le décollage d'un avion par exemple). Il en est de même pour les astronautes en apesanteur. D'où viennent ce "malaise" et ces effets physiologiques quand nous sommes en apesanteur ? Est-ce dû au brutal changement de référentiel au moment où tous les moteurs sont éteints pour passer en apesanteur ? Est-ce un effet temporaire une fois que la situation est "stabilisée" ?
Ensuite, j'ai une autre grosse interrogation. Quand un objet se déplace sur Terre et qu'on se place dans le référentiel terrestre, ce dernier n'est pas un référentiel galiléen dans la mesure où il est en rotation. On subit une force centrifuge (ou plutôt axifuge), et pour peu que l'objet se déplace dans ce référentiel terrestre il subit également l'accélération de Coriolis. Etant donné que les satellites, les stations orbitales et les astronautes sont en orbite autour de la Terre, pour moi il n'y a aucune raison qu'ils ne subissent pas également la force centrifuge et la force de Coriolis. Il y a donc une petite chose qui m'échappe dans mon raisonnement de tout à l'heure quand j'ai compatibilisé le poids et la force d'inertie et que j'en ai fait la somme vectorielle qui est nulle : est-ce que mon terme fie inclut également la force centrifuge et la force de Coriolis (et non pas uniquement l'accélération due au mouvement de translation) ? Si oui, est-ce que ça veut donc dire que le référentiel inertiel de chute libre tient à la fois compte de l'accélération gravitationnelle, de l'accélération centrifuge et de l'accélération de Coriolis ?
Bref, désolé pour le pavé, mais ça fait depuis plusieurs jours que je me creuse la tête pour vraiment comprendre ce principe d'équivalence (et aussi l'apesanteur). J'avais besoin d'écrire tout cela pour savoir si déjà j'ai compris dans les grandes lignes ce principe, mais aussi pour répondre à certaines de mes interrogations qui subsistent. J'ai réalisé que c'est le pilier de la relativité générale (avec la relativité restreinte), donc que si je veux comprendre cette théorie, je dois vraiment comprendre sa "clé de voûte" (en quelque sorte). Bon, il y a toujours le formalisme mathématique et les tenseurs, mais ça à la limite, c'est plus un détail qu'autre chose pour moi (pour l'instant je ne trouve pas ça trop dur, il faut juste être un peu minutieux avec les indices, ne pas s'emmêler les pinceaux).
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