La cogénération, oubliée au grenelle de l'environnement, ne manquera pas de s'inviter au débat qui va suivre
La cogénération consiste à chauffer des immeubles avec des rejets thermiques produits par des centrales thermiques ou par des groupes électrogènes.
D'un point de vue pratique, la chaleur utilisée est un sous-produit à peu près gratuit de la production d'électricité.
Grande cogénération:
Nos centrales nucléaires envoient dans la nature des quantités phénoménales d'eau aux alentours de 25°C, voire 35°C, qui vont réchauffer l'air du temps. Si on s'organise pour qu'elles produisent par exemple de l'eau à 80°C, le manque à produire en énergie électrique sera dérisoire, alors que l'eau chaude obtenue sera capable de chauffer la plus grande partie de nos villes. C'est la grande cogénération.
Les décideurs ne font pas le pari de la grande cogénération à cause de l'importance des investissements en réseaux de chauffage urbain, à cause également de la diabolisation de l'énergie nucléaire par les écologistes. D'autre part l'existence même de la cogénération montre qu'un chauffage électrique traditionnel représente un énorme gaspillage.
C'est là probablement une première raison pour laquelle la cogénération a été oubliée jusqu'à présent au Grenelle de l'environnement.
La petite cogénération consiste à remplacer les chaudières de chauffage central par des groupes électrogènes. La chaleur rejetée par ces groupes est utilisée pour le chauffage. L'électricité produite est soit vendue et envoyée dans le réseau de distribution électrique, soit utilisée sur place, en principe pour autre chose que du chauffage.
La multiplication de la petite cogénération concurrencerait dangereusement la production des grosses centrales thermiques et on a là une deuxième raison pour laquelle la cogénération a pu être oubliée au Grenelle de l'environnement.
Pourtant, la moyenne cogénération est très développée en Europe du Nord: des centrales thermiques de moyenne puissance sont installées en ville. Elles alimentent un réseau de chauffage urbain en même temps qu'elles produisent du courant.
En France, ici ou là, des quartiers urbains ou des ensembles immobiliers sont chauffés par moyenne cogénération. Il se peut alors qu'un marché trop confidentiel aboutisse à des coûts excessivement élevés pour le consommateur.
La cogénération constitue avec la pompe à chaleur un des deux principaux chauffages à faible production d'entropie. Ces chauffages ont deux caractéristiques essentielles:
1°) les échanges de chaleur s'y font toujours avec des écarts de température peu importants.
Par exemple, la partie chaude de la pompe à chaleur, celle qui fournit la chaleur à l'immeuble, a une température inférieure à 80°C en général, et plus cette température est basse, meilleur sera le rendement de la pompe.
Pour ce qui est de la cogénération, la température des rejets thermiques utilisés y dépasse rarement 100°, c'est également de la chaleur "basse température", comparée à la chaleur "haute température" fournie par tous les combustibles habituels, où les températures de combustions dépassent 1500°C.
2°) L'autre caractéristique essentielle des chauffages à faible production d'entropie est particulièrement intéressante pour les économies d'énergie: la chaleur obtenue a une contrepartie faible ou très faible, en énergie électrique consommée ou en énergie électrique non produite.
Avec une pompe à chaleur, pour obtenir 100 joules de chaleur dans un immeuble, on consomme en général seulement 25 à 33 joules d'énergie électrique. Le reste est emprunté à l'air du temps.
Le rendement d'une pompe à chaleur, bien que situé entre 300% et 400% , reste ne général une dizaine de fois inférieur au rendement maximum théorique.
Avec la cogénération, la contrepartie d'énergie électrique correspondant à une quantité de chaleur donnée est beaucoup plus avantageuse qu'avec une pompe à chaleur parce que le nombre de transformations, qui toutes occasionnent des productions d'entropie, y est réduit au minimum. En effet, la source d'énergie est déjà de la chaleur basse température, rejetée par le dispositif électrogène.
Une étude plus approfondie aboutit à la considération:
Tous les chauffages traditionnels sont incompatibles avec une gestion rigoureuse des ressources énergétiques, parce qu'ils transforment directement de la chaleur haute température en chaleur basse température, et que la production d'entropie correspondante revient à utiliser 95% environ du combustible pour chauffer directement l'air du temps.
Pour cette raison, une politique de protection de l'environnement exige une véritable sensibilisation et une mise sur le marché rapide des appareils permettant le développement de la cogénération, à partir des différents combustibles traditionnels: fioul, gaz, bois, etc.
Louis Rougnon Glasson
professeur agrégé en sciences physiques
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