La conscience: Nietzsche contre Descartes
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La conscience: Nietzsche contre Descartes



  1. #1
    invitec3f63e10

    Question La conscience: Nietzsche contre Descartes


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    Salut à vous tous!

    Je suis en terminale S. Je suis actuellement le cours sur la conscience (philosophie). Il y a une petite chose que je ne comprends pas très bien. Pourquoi Nietzsche n'est pas d'accord avec Descartes sur "Je pense donc j'existe"??

    Merci de vos réponses.

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  2. #2
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Bonsoir,

    Voici un texte de nietchzsche (Par-delà le Bien et le Mal) qui précise sa critique :
    "Une pensée ne vient que quand elle veut, et non pas lorsque c'est moi qui veux ; de sorte que c'est une altération des faits de prétendre que le sujet moi est la condition de l'attribut "je pense". Quelque chose pense, mais croire que ce quelque chose est l'antique et fameux moi, c'est une pure supposition, une affirmation peut-être, mais ce n'est certainement pas une "certitude immédiate". En fin de compte, c'est déjà trop s'avancer que de dire "quelque chose pense", car voilà déjà l'interprétation d'un phénomène au lieu du phénomène lui-même. On conclut ici, selon les habitudes grammaticales: "Penser est une activité, il faut quelqu'un qui agisse, par conséquent..." [...] Peut-être s'habituera-t-on un jour, même parmi les logiciens, à se passer complètement de ce petit "quelque chose" (à quoi s'est réduit finalement le vénérable moi).

  3. #3
    invite1ab59cc3

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Je pense donc je suis...

    C'est une phrase très courte qui suggère beaucoup de questionnement en effet :

    Qui pense ? Qui est ce "Je" ? Qui suis-je ?
    Que signifie au juste être/exister ?

    Le cogito semble fonder l'existence d'un "Je",
    Mais ne s'agit-il pas là au fond d'un Jeu de la pensée ?
    Le Cogito n'est-il pas au fond une Tautologie ?
    Une pensée affirmant sa propre existence, peut-elle fonder autre chose qu'elle même ? Peut-elle dépasser le solipsisme ?

    Finalement une autre formulation du Cogito ne pourrait-elle pas être : Le constat auto-référentiel suivant :

    "Une pensée se produit ", ou " Ceci est une pensée" ?

  4. #4
    invite1ab59cc3

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    .

    Et si le "Je" n'était qu'une illusion de la pensée ?

    Une pensée qui se pense de manière auto-référentielle.

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    bardamu

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par jreeman Voir le message
    Bonsoir,

    Voici un texte de nietchzsche (Par-delà le Bien et le Mal) qui précise sa critique :
    Bonjour,
    juste un mot : dans la première partie de cette citation, Nietzsche reprend plus ou moins la critique de Kant sur le Cogito cartésien, c'est-à-dire le passage indu du constat d'être pensant (sans détermination) à celui que cet être est déterminé comme "Je".
    Il y rajoute en plus la critique de l'idée de "quelque chose", idée qu'on retrouve dans un autre texte (faudrait que je cherche...) où il considère la pensée (ou le "Je", je ne sais plus trop) comme étant fractionnée, multiple. Ce n'est plus alors "une chose" mais des choses.
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  7. #6
    invitec3f63e10

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Bonjour à vous tous,

    D'abord je vous remercie de m'avoir répondu, ou du moins de m'aider.

    Je vous dis tout ce que j'ai compris :

    Selon "je pense" de Descartes: il y a quelque chose qui pense. Quelle chose? Quelque chose qui est en moi, qui m'appartient. Cette chose, elle pense, elle est donc pensante. Quant au "j'existe" : seule cette chose pensante peut me prouver que j'existe en tant que sujet. Donc la pensée détermine le "je", seule cette pensée prouve l'existence d'un "être" ou d'un "je". Supposons que Descartes est seul dans un monde, débarrassé de tous de ses préjugés, de tout qui lui entoure. Il rejette tout. Le "toucher" et le "sentir" ne prouvent pas l'existence d'un être, selon lui. Seule la pensée peut prouver cette existence.


    Nietzsche est complètement en désaccord avec Descartes. Selon Nietzsche, "je pense donc j'existe" est une simple illusion de langage. Pourquoi il dit cela? Parce qu'il y a quelque chose autre que "Moi" ou "je" qui pense? Pouvez-vous m'expliquer plus?

    Merci de vos réponses.

  8. #7
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Selon Nietschze la pensée échappe aussi à la personne, elle vient à elle mais elle n'en sait pas pour autant d'où, elle s'impose à elle : pour preuve comment peut-elle dire, "je pense" ? Elle doit avoir au préalable défini ce qu'est "penser", c'est donc bien la preuve qu'avant le "je pense donc je suis", il y a autre chose qui fonde l'être.
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 09/10/2008 à 22h40.

  9. #8
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par bardamu
    Il y rajoute en plus la critique de l'idée de "quelque chose", idée qu'on retrouve dans un autre texte (faudrait que je cherche...) où il considère la pensée (ou le "Je", je ne sais plus trop) comme étant fractionnée, multiple. Ce n'est plus alors "une chose" mais des choses.
    Peut-être sur la volonté, quand il commence à dire que la volonté est définie par un état affectif, un avant, un après, un état de tension mais pas seulement.

    Elle s'exerce au sein d'obstacles qui montrent que la volonté s'exerce au sein d'une communauté de "sous-âmes" dans laquelle il a fallu obéir et commander. Il faut donc, celui Nietszche que le philosophe considère l'acte de volonté comme un acte moral qui consiste à mettre en place un rapport de maître à serviteur parmi ces "sous-ames" et d'où naît la vie.
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 10/10/2008 à 03h06.

  10. #9
    invitec3f63e10

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Merci Jreeman pour tes explications

  11. #10
    invite1ab59cc3

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    "Une pensée ne vient que quand elle veut, et non pas lorsque c'est moi qui veux ; de sorte que c'est une altération des faits de prétendre que le sujet moi est la condition de l'attribut "je pense". Quelque chose pense, mais croire que ce quelque chose est l'antique et fameux moi, c'est une pure supposition, une affirmation peut-être, mais ce n'est certainement pas une "certitude immédiate". En fin de compte, c'est déjà trop s'avancer que de dire "quelque chose pense", car voilà déjà l'interprétation d'un phénomène au lieu du phénomène lui-même. On conclut ici, selon les habitudes grammaticales: "Penser est une activité, il faut quelqu'un qui agisse, par conséquent..." [...] Peut-être s'habituera-t-on un jour, même parmi les logiciens, à se passer complètement de ce petit "quelque chose" (à quoi s'est réduit finalement le vénérable moi).
    Je pense donc je suis :

    On constate que le "Je" est postulé dés la prémisse, et donc que la conclusion, ne fait qu' établir ce qui faisait partie du postulat initial, c'est donc une tautologie.

    Or ce "Je" du cogito, n'est pas défini, il est imposé d'emblée comme entité pourvue d'une existence nouménale constituée.

    Par ailleurs le cogito, semble réduire le JE ( Le moi antique ) à l'être pensant, au simple petit objet d'une conclusion logicienne, évacuant par là-même toute démarche visant à percevoir, le vénérable MOI,
    le moi transcendant, échappant à toute tentative d'analyse...

    Cordialement,
    Mumyo

  12. #11
    invite6b1a864b

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Selon moi Descartes voulait juste dire que l'existence de soit peut être démontrer indépendamment de celle de la réalité, de manière interne à la conscience..

    On peut imaginer un pauvre bougre, sourd, aveugle, muet, paralytique insensible, qui aurait perdu le sens de l'odorat et la proprioperception.. Il se demanderait si il est toujours dans "la réalité", si il existe..
    Il pourrait toujours se dire que puisqu'il a une mémoire et qu'il se pose la question, cela suffit à prouver qu'il existe.

    C'est quand même une puissante et rassurante affirmation..

    C'est très important, car c'est l'autre bout du tourbillon qu'est la conscience, (je parle d'un vrai tourbillon, celui de l'information qui rentre, est retraité dans un modèle de la réalité, et fournit un comportement.. autre exemple : les robots qui marche utilise un modéle physique qui anticipe leur avenir postural proche..), infiniment petit de la conscience..

  13. #12
    bardamu

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Message de modération
    Quelques messages ont été supprimés pour cause de hors-sujet.
    En l'occurrence, le sujet a été bien spécifié comme concernant 2 auteurs. Je demanderais donc qu'on évite de faire un traitement général de la conscience et qu'on reste concentré sur la comparaison des conceptions des auteurs en question.

    Merci.
    Ethica, IV, 43 : Titillatio excessum habere potest et mala esse.
    Spinoza

  14. #13
    invite6b1a864b

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par Mumyo Voir le message
    Je pense donc je suis :

    On constate que le "Je" est postulé dés la prémisse, et donc que la conclusion, ne fait qu' établir ce qui faisait partie du postulat initial, c'est donc une tautologie.

    Or ce "Je" du cogito, n'est pas défini, il est imposé d'emblée comme entité pourvue d'une existence nouménale constituée.

    Par ailleurs le cogito, semble réduire le JE ( Le moi antique ) à l'être pensant, au simple petit objet d'une conclusion logicienne, évacuant par là-même toute démarche visant à percevoir, le vénérable MOI,
    le moi transcendant, échappant à toute tentative d'analyse...

    Cordialement,
    Mumyo
    Je peux vous assurer que le moi n'est pas fondamentalement hermétique à l'analyse. Nous sommes tous des animaux, et la plupart des gens sont prévisibles.

  15. #14
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Un autre passage (§ 54) où la position est encore plus directe, il l'évoque en passant par l'analyse de Kant et finalement en laissant entendre que la pensée pouvait finalement être considérée comme purement apparente (une illusion du langage) :

    Autrefois on croyait à l'âme comme on croyait à la grammaire et au sujet grammatical. On disait "je" déterminant, "pense" prédicat déterminé ; penser est une activité à laquelle il est indispensable de supposer un sujet comme cause. Puis on a essayé, avec une ténacité et une ruse admirables, de sortir de cette ornière, et l'on s'est demandé si par hasard l'inverse n'était pas plutôt vrai : "pense" déterminant, "je" déterminé; "je" serait alors une synthèse opérée par la pensée elle-même. Kant voulait au fond prouver que, du point de vue du sujet, le sujet ne peut être prouvé et l'objet pas davantage; l'idée que le sujet individuel, donc l'âme put n'avoir qu'une existence purement apparente ne lui a sans doute pas été étrangère.
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 10/10/2008 à 15h02.

  16. #15
    jamajeff

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    En effet, Nietzsche a certainement envoyé les attaques les plus rudes contre toute prétention de "certitude immédiate", la certitude cartésienne du Cogito autant que les certitudes empirico-sensualistes ,ou encore les philosophies post-kantiennes et post-hegelienne... Il est donc bien normal que tout passe sous le marteau nietzschéen. Car, pour l'auteur, la "vérité" - encore faudrait-il en définir le sens - se retrouve dépourvue de tout argument lorsqu'elle ne sort pas vainqueur d'un combat qui puisse justifier sa puissance. Dans le premier aphorisme de "Par delà..." Nietzsche pose d'emblée le souci qui guide tout le livre. Mais sur qui peut-on compter pour la mise en combat?

    Citation Envoyé par Nietzsche
    Au fond, qui pose les questions? Qu'est-ce donc en vous qui veut la "vérité"?" De fait, la question de l'origine de ce vouloir nous a longtemps retenu, jusqu'à ce que enfin une question encore plus essentielle nous ait définitivement arrêtés : celle de la valeur de cette volonté. [...] Le problème de la valeur de la vérité s'est-il présenté à nous, ou est-ce nous qui l'avons abordé?(§1)
    "Par delà..." n'est pas un livre de solutions, mais un ensemble réflexions problématiques à l'oeuvre, de problèmes non pris en compte dans l'hiustoire, montrant la nécessité d'une réelle jeunesse, d'une pensée libre, la nécessité d'un dépassement des philosophies transmises par l'histoire. De douter et faire douter, en somme, à partir de nouvelles "perspectives" de recherche.
    Mais la mise en garde du début du livre est également importante, car selon Nietzsche, cette recherche "comporte un risque, et peut-être le plus grand des risques", à savoir la tendance de se figer en doctrine (ce qui reviendrait à en faire un traité de morale). Comme Nietzsche l'écrivait à son ami Jacob Burckhardt en 1886, lorsqu'il lui envoya un exemplaire du livre :

    Citation Envoyé par Nietzsche
    "Les conditions effrayantes de tout accroissement de la culture, le rapport inquiétant entre ce qu'on appelle "l'amélioration" de l'homme (ou carrément son "humanisation") et l'augmentation du type "homme", surtout la contradiction qui existe entre toute conception morale et toute conception scientifique de la vie, [...] voilà, ce me semble, un problème que nous ne partageons, Dieu merci, qu'avec un tout petit nombre de vivants et de morts. Poser ce problème, c'est peut-être l'entreprise la plus hardie qui soit, et la plus dangereuse, non pour celui qui l'ose, mais pour ceux auxquels il s'adresse".
    Derière la critique nietzschéenne de la philosophie, il n'y a pas le souci de descendre un philosophe, mais de rendre possible une pensée actuelle, un diagnostic sur l'état présent (fin du XVIIIe) qui ne soient pas vérolés d'impossibilités a priori transmises par l'histoire, mais dont le sens se retrouve dilué et émerge sous forme d'évidences. En effet, les a priori historiques étaient encore tellement pesants (principalement Kant et Hegel) que toute proposition de recherche philosophique (psychologique,...) s'en retrouvait freinée a priori. Bref, l'Allemagne, pour nietzsche, n'a pas encore fait sa Renaissance, elle ne l'a fait que par procuration. Voilà le grand reproche de Nietzsche : la "culture" par procuration et le lourd bagage historique que recouvrent les pensées "modernes".

    Ainsi, par rapport à Descartes, le problème de Nietzsche tient en deux aspects:
    1) Les erreurs manifestes de raisonnement et les conséquences actuelles. D'ou la nécessité du "diagnostic" des présupposés historiques qui ont rendu vicieu toute innovation...
    2) L'importance de Descartes, Kant, Hegel,etc. en tant que limites qui nous sont données à dépasser et non pas à suivre bêtement...

    Ainsi d'un point de vue analytique, Nietzsche récuse l'intuition même de Descartes, en tant que celle-ci implique toujours un "préjugé", un élément d' interprétation hétérogène préalable qu'on "oublie".

    Citation Envoyé par Nietzsche
    [...] ce "je pense" suppose que je compare, pour établir ce qu'il est, mon état du moment à d'autres états que m'a révélés l'expérience de mon moi ; du fait que je doive me reporter ainsi à un "savoir" venu d'ailleurs, ce "je pense" n'a donc pour moi aucune certitude immédiate. (§16)
    Mais, comme Nietzsche ne veut pas tomber en excès mais analyser finement, il soumet sa propre critique, en contrepoint, au tribunal de la vie en posant en la question : "Monsieur, [...] pourquoi est-ce absolument la vérité qu'il vous faut?"

    Question qui, en poassant, semble, à première vue, rejoindre le propos des Considérations Inactuelles II, où Nietzsche critiquait déjà tout savoir en les soumettant au "tribunal de la vie":

    Citation Envoyé par Nietzsche
    [...]nous sommes devenus inaptes à vivre, à voir et à entendre d’une façon simple et juste, à saisir avec bonheur ce qu’il y a de plus naturel, et jusqu’à présent nous ne possédons pas même la base d’une culture, parce que nous ne sommes pas persuadés qu’au fond de nous-mêmes nous possédons une vie véritable. Émietté et éparpillé çà et là ; décomposé, en somme, presque mécaniquement, en une partie intérieure et une partie extérieure ; parsemé de concepts comme de dents de dragons, engendrant des dragons-concepts ; souffrant de plus de la maladie des mots ; défiant de toute sensation personnelle qui n’a pas encore reçu l’estampille des mots ; fabrique inanimée, et pourtant étrangement active, de mots et de concepts, tel que je suis j’ai peut-être encore le droit de dire de moi : je pense, donc je suis, mais non point : je vis, donc je pense. L’ « être » vide m’est garanti, non point la « vie » pleine et verdoyante. Ma sensation primitive me démontre seulement que je suis un être pensant, mais non point que je suis un être vivant, que je ne suis pas un animal, mais tout au plus un cogital. Donnez-moi d’abord de la vie et je saurai vous en faire une culture ! — C’est le cri que poussera chaque individu de cette première génération. Et tous les individus se reconnaîtront les uns les autres à ce cri. Qui donc voudra leur donner cette vie ? (Considérations Inactuelles II)
    C'est la bêtise même que fustige alors Nietzsche, de penser qu'il faille démontrer les causes de la vie pour que cette vie soit effective. La pensée n'est pas seulement douteuse comme concept, elle ne récuse pas l'hypothèse selon laquelle elle puisse être une nécessité "instinctive": "la plus grande partie de la pensée consciente doit aussi être rangée parmi les activités de l'instinct, y compris la pensée philosophique"(§3).

    Encore une fois, c'est de l'utilité pour la vie que réclame Nietzsche, ce qui lui fait dire en (§4), non sans ironie, que "les jugements les plus faux (les jugements synthétiques a priori sont du nombre) nous sont les plus indispensables [...] au point que renoncer au jugement faux serait renoncer à la vie, nier la vie. Que le non-vrai soit une condition de la vie".

    On comprend alors quel est le problème des fondements métaphysiques selon Nietzsche : ils sont tautologiques et derrière un discours sur ce que les choses sont "véritablement", elles ne disent que comment elles doivent être. Elles ne permettent pas de dépasser le statut de point de vue. Et pour l'expliquer, Nietzsche y ajoute des facteurs psychologiques : "amour de sa propre philosophie", égocentrisme, naïveté, prise de pouvoir, sur-réaction...

    Or, si la vertu se dit sur l'exemple de ces philosophes, savants, artistes, etc. (qui se sont trompés ou ont rusé de multiples façons) alors il faut en conclure que cette même vertu est antinomique, ou plutôt, le non-vertueux, l'immoral, doivent alors être considéré comme des éléments constitutif de cette même vertu. Or, pour élucider cela, nous dit Nietzsche, il faut prendre cette hypothèse très au sérieux. Et donc, il faut de véritables "esprits libres". Or, l'époque de Nietzsche a encore du mal à dépasser ce stade...

    Donc, concernant ce Cogito, la question qui se pose est la suivante : comment doit-on considérer le statut du "je" et de la "pensée"? Et encore de là l'existence? Le "je" de Nietzsche n'est rien a priori, il est une faute originelle (de raisonnement) qui s'est cristallisé. On ne trouve pas "je" ou "moi", on l'invente. La grammaire nous fait croire qu'on trouve quelque chose, mais comme pour Kant et sa "nouvelle faculté", cette faute appartient à une "époque où l'on ne savait pas encore faire la différence entre "trouver" et "inventer!" Et à chaque fois que nous essayons de réfuter la faute, nous retombons dans la faute même. Pourtant, la réfutation est irrésistible

    "Quelque chose" est toujours présupposé, mais ce quelque chose, on ne peut pas le trouver. Il est toujours déjà interprété et posé quelque part, entaché d'une histoire dont le sens nous est en partie caché, il nous faut donc le reconstruire. On peut certes en faire le diagnostic, retracer une généalogie de l'erreur, mais en cela, on aurait tort de prétendre trouver une vérité. On ne ferait qu'imposer une interprétation dominante. Car on ne choisit pas d'oublier l'histoire de notre éducation. On peut juste en prendre conscience pour la nier. Mais est-ce assez pour être libre? "Un tel "esprit libre" est-il possible?", se demandait déjà Nietzsche dans l'introduction de Humain, Trop Humain.

    Cordialement.

  17. #16
    invitec3f63e10

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Salut Jamajeff

    Merci beaucoup pour ton message!!!

  18. #17
    invitec3f63e10

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Et Sartre, qu'est-ce qu'il en pense?

  19. #18
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Car, pour l'auteur, la "vérité" - encore faudrait-il en définir le sens - se retrouve dépourvue de tout argument lorsqu'elle ne sort pas vainqueur d'un combat qui puisse justifier sa puissance.
    La vérité peut revêtir selon Nietzsche la parure d'un a priori et est expliquée aussi comme résultat de passions (lorsqu'elle gagne le combat, ce n'est que grâce et par la volonté de puissance), ils s'évertuent vers leur "savoir" vers quelque chose qu'ils finiront par baptiser solennellement "vérités", écrit -il.

    Et Sartre, qu'est-ce qu'il en pense?
    Pour Sartre, je ne suis pas très loin d'être connaisseur sur la question mais c'est en relation avec les autres que mon existence prend sa source.

    Ainsi, le cogito pour Sartre n'est pas satisfaisant, la découverte de notre conscience est à mettre en relation avec la découverte de la conscience d'autrui : ce n'est que dans les relations avec les autres que je vais pouvoir finalement arriver à accéder aux caractéristiques propres à mon être.
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 13/10/2008 à 14h57.

  20. #19
    jamajeff

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par jreeman Voir le message
    La vérité peut revêtir selon Nietzsche la parure d'un a priori et est expliquée aussi comme résultat de passions (lorsqu'elle gagne le combat, ce n'est que grâce et par la volonté de puissance), ils s'évertuent vers leur "savoir" vers quelque chose qu'ils finiront par baptiser solennellement "vérités", écrit -il.
    Je suis d'accord avec vous. La parure en tant que la vérité est la paix par laquelle le guerrier se réconforte, toujours trop hâtivement, de ne plus devoir vaincre. En quelques sortes : "chassons la vérité, elle revient au galop". Mais celle-ci, chez l'esprit libre, n'éteint pas le feu de la "volonté de vérité" (volonté de puissance, de savoir...) comme volonté profondément métaphysique et morale, celle là même qui pousse au dépassement de celle-ci. Mais au nom de quoi?

    Gai savoir, §344:
    "Mais on aura déjà compris où je veux en venir, à savoir que c'est encore et toujours sur une croyance métpahysique que repose notre foi en la science, - que nous aussi, nous qui cherchons aujourd'hui la connaissance, nous les impies et antimétaphysiques, nous empruntons encore notre feu à l'incendie qu'une foi vieille de mille années a allumé [...]"


    En ce sens, l'interprétation de l'œuvre de Nietzsche par Heidegger, outre la question ô combien problématique (voire douteuse) de "l'achèvement de la métaphysique", est cependant intéressante en tant que la "volonté de puissance" et "l'éternel retour" y sont analysés pour la première fois dans un rapport de réciprocité, voire d'interdépendance. Ce qui (pré-)suppose une relative cohérence depuis La Naissance de la tragédie (dionysos et apollon) jusqu'à la Volonté de puissance... Lecture qui influença notamment des auteurs comme Michel Foucault, qui reprendra le thème nietzschéen de la "volonté de vérité" et de la "victoire sur soi", sous la forme du "souci du vrai"...

    D'autres, comme Derrida, on récusé cette interprétation, considérant que l'œuvre de Nietzsche devait être étudiée de façon parcellaire, comme un agrégat de pensées disparates. Présupposant donc, en ce cas, l'inexistence a priori d'une quelconque cohérence d'ensemble dans la pensée nietzschéenne. Chaque aphorisme serait alors comme un atome libre et indépendant... Outre cela il renverse, justement à mon sens, le propos de Heidegger sur Nietzsche comme "achèvement (accomplissement) de la métaphysique" (Nietzsche serait plutôt le dépassement de la métaphysique là où Heidegger en est,lui, l'achèvement).

    Dans une perspective nietzschéenne, cette question doit demeurer sous sa forme problématique, et surtout inachevée (contrairement à ce que prétendait Heidegger)...

    ----------

    Sur la question du statut du sujet, entre Descartes et Nietzsche, il serait intéressant de voir le livre "La Philosophie de Nietzsche" de Eugen Fink (qui fut élève de Heidegger, disciple et Husserl); étant donné l'importance du "sujet transcendantal" en phénoménologie (un sujet intentionnellement cogital). La phénoménologie de Fink permettrait-elle le dépassement ou, pour le moins, un éclaircissement de l'antinomie nietzschéenne? La 4e de couverture est, en tout cas, prometteuse:

    "Eugen Fink repense Nietzsche à la fois à partir de toute la tradition philosophique et en direction d’une pensée neuve et métaphilosophique. Hegel, Marx, Husserl et Heidegger accompagnent discrètement cette tentative d’interprétation ouvrante. Remontant jusqu’à la pensée poétique d’Héraclite et anticipant le proche et le lointain avenir, Fink fait surgir l’intuition centrale du penseur de la mort de Dieu et de la volonté de puissance, du nihilisme et du retour éternel du même. Car Nietzsche qui essaie de dépasser la philosophie et la métaphysique, vise à montrer que tout sens est intérieur au monde, le monde lui-même n’ayant pas de sens, puisqu’il se déploie comme jeu."
    Cordialement.
    Dernière modification par jamajeff ; 14/10/2008 à 12h43.

  21. #20
    invite7c43f855

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Bonjour,

    N'oublions pas, avant de suivre les critiques de Nietzsche envers Descartes, que ce dernier à exposer ses idées dans un contexte historique largement dominé par la religion et les théories radicales des théologiens. Affirmer: Cogito ergo sum , était déjà "en-soi" particulièrement osé et risqué. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que Descartes s'est exilé et que ses travaux était déconsidérés par une grande partie de ses contemporains comme l'ont pu être ceux d'un Feyerabend. Les remises en cause du"penser" traditionnel n'ont que rarement eu un bon accueil.
    Cogito ergo sum , c'est je pense donc je suis, et non j'existe. Cela sous-tend la qualité ontologique de l'énoncé. D'ailleurs, cela pourrait également se traduire par : Je suis parce que je pense. Il y a une idée de causalité directe entre la pensée et l'être. Un caillou ne pense pas mais il existe, matériellement. Le caillou n'a pas de réalité ontologique pour Descartes. C'est là toute la définition de l'idéalisme, à mon sens. Ce qui n'est pas en mesure de prendre conscience , n'est pas .
    Je pense que c'est sur ce point, entre autre, que Niezsche a voulu débattre. Pour ce dernier, l'homme est en devenir... Deviens ce que tu es, disait-il. Il y a chez lui une concetion (déjà) spatio-temporelle qui se confronte à l'image d'immuabilité du "Je" cartésien. Cette mobilité du "Je" n'est d'ailleurs pas nouvelle. Héraclite n'était-il pas déjà dans ce genre de discours?
    L'affrontement courtois entre Descartes et Nietzsche (de leurs deux formes de pensées , pour parler plus précisement) repose donc moins sur la définition même du "Je" que sur la faille naissante en cette fin de XIX eme siècle entre gnoséologie et herméneutique. Autrement dit, au premier degré: entre ceux qui prônent que "Je" peut être défini par un énoncé , et ceux qui pensent que ce même "Je" est trop dépendant des phénomènes extérieurs pour être défini une fois pour toute. Et au second degré: Entre ceux qui se basent sur une théorie de la connaissance qui aurait le même langage pour les "geisteswissenschaften" et les "naturwissenschaften" , et ceux qui insisteront pour découvrir une nouvelle forme d'approche sémiologique plus adaptée à nos connaissances actuelles.

  22. #21
    jamajeff

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par Neutralino Voir le message
    Bonjour,

    N'oublions pas, avant de suivre les critiques de Nietzsche envers Descartes, que ce dernier à exposer ses idées dans un contexte historique largement dominé par la religion et les théories radicales des théologiens. Affirmer: Cogito ergo sum , était déjà "en-soi" particulièrement osé et risqué. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que Descartes s'est exilé et que ses travaux était déconsidérés par une grande partie de ses contemporains comme l'ont pu être ceux d'un Feyerabend. Les remises en cause du"penser" traditionnel n'ont que rarement eu un bon accueil.
    Cogito ergo sum , c'est je pense donc je suis, et non j'existe. Cela sous-tend la qualité ontologique de l'énoncé. D'ailleurs, cela pourrait également se traduire par : Je suis parce que je pense. Il y a une idée de causalité directe entre la pensée et l'être. Un caillou ne pense pas mais il existe, matériellement. Le caillou n'a pas de réalité ontologique pour Descartes. C'est là toute la définition de l'idéalisme, à mon sens. Ce qui n'est pas en mesure de prendre conscience , n'est pas .
    Je pense que c'est sur ce point, entre autre, que Niezsche a voulu débattre. Pour ce dernier, l'homme est en devenir... Deviens ce que tu es, disait-il. Il y a chez lui une concetion (déjà) spatio-temporelle qui se confronte à l'image d'immuabilité du "Je" cartésien. Cette mobilité du "Je" n'est d'ailleurs pas nouvelle. Héraclite n'était-il pas déjà dans ce genre de discours?
    L'affrontement courtois entre Descartes et Nietzsche (de leurs deux formes de pensées , pour parler plus précisement) repose donc moins sur la définition même du "Je" que sur la faille naissante en cette fin de XIX eme siècle entre gnoséologie et herméneutique. Autrement dit, au premier degré: entre ceux qui prônent que "Je" peut être défini par un énoncé , et ceux qui pensent que ce même "Je" est trop dépendant des phénomènes extérieurs pour être défini une fois pour toute. Et au second degré: Entre ceux qui se basent sur une théorie de la connaissance qui aurait le même langage pour les "geisteswissenschaften" et les "naturwissenschaften" , et ceux qui insisteront pour découvrir une nouvelle forme d'approche sémiologique plus adaptée à nos connaissances actuelles.
    Bonjour,

    En fait, Nietzsche critique d'abord la prétention analytique du Cogito cartésien, celle à partir de laquelle on prend, de façon trompeuse, un "je pense" comme une causalité du "je suis". Cette démonstration étant trompeuse dans la forme. C'est, pour Nietzsche, une fausse démonstration.
    A une époque où la logique aristotélicienne était encore "le vestibule de toutes les sciences" (cf. Kant), et dont la rhétorique était encore imprégnée via Schopenhauer, on comprend qu'un énoncé tel que le "Cogito" ne pouvait valoir comme démonstration étant donné que le "je pense donc je suis" cache une prémisse qui est sa condition de validité.
    En effet, si on l'examine sous la forme d'un syllogisme "bien formé", cela donne:

    tout ce qui pense est dit étant
    et je est pensant
    donc je est étant

    On voit alors ce qu'une telle démonstration a de tautologique et de vide pour Nietzsche. Mais en effet, à l'époque de Nietzsche, de forte influence neo-kantienne, la nécessité de la démonstration n'implique plus la nécessité du démontré. Un terme connote toujours mais ne dénote plus nécessairement, de sorte que la coupure est radicale entre le signifiant et le statut ontologique du signifié.

    C'est en suite que se pose la question du contenu, particulièrement ce "je" énigmatique...

    En ce sens, c'est moins l'intention de Descartes que critique Nietzsche, mais la prétention analytique qui s'était figée en une sorte de formule magique. C'est cela que Nietzsche passe sous le marteau. Ce qu'il en reste pour Nietzsche, c'est l'affirmation de la vie : "accordez-moi de la vie et je vous donnerai de la pensée", disait-il. Il y a un fond qui échappe à toute déduction...

    Il est à noter que Husserl, par exemple, a repris la méditation cartésienne dans un certain sens. Et, à mon grand étonnement, son entreprise n'est pas incompatible avec le propos de Nietzsche.

    Cordialement.
    Dernière modification par jamajeff ; 04/12/2008 à 12h55.

  23. #22
    invite7c43f855

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Jamareff:

    J'ai l'impression que nous disons la même chose avec une approche différente, c'est d'ailleurs tout à fait interessant. Plus l'angle d'une problématique s'élargit, plus s'éclaire la problématique elle-même. Il y a en effet différentes façons, je pense, d'aborder les reflexions de Nietzsche sur Descartes. Toutefois, je reste persuadé que toute analyse ne peut se faire que dans la "prise en compte" simultanée de l'historicité des énoncés. je note au passage le rappel à Husserl, il y a trop longtemps que je ne m'y suis plus plongé. NB...

  24. #23
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Il y a un fond qui échappe à toute déduction...
    Bonjour,

    plutôt que de formuler l'idée de Nietschze ainsi, je la formulerais plutôt par : il n'y a pas de fond qui puisse vraiment être déduit.

  25. #24
    jamajeff

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par jreeman Voir le message
    Bonjour,

    plutôt que de formuler l'idée de Nietschze ainsi, je la formulerais plutôt par : il n'y a pas de fond qui puisse vraiment être déduit.
    En effet, la vie, la volonté,etc. ne se déduisent pas d'un calcul de propositions... Elles se posent par le fait même, dans l'acte.

  26. #25
    invite7863222222222
    Invité

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Citation Envoyé par jamajeff Voir le message
    Elles se posent par le fait même, dans l'acte.
    Si l'on veut.

  27. #26
    invitec3f63e10

    Re : La conscience: Nietzsche contre Descartes

    Waw! Je ne comprends rien là! Vous êtes des vrais philosophes!

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