La refusabilité des projets pratiques
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La refusabilité des projets pratiques



  1. #1
    invite333943ff

    La refusabilité des projets pratiques


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    Bonjour,

    Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable. Karl Popper

    En émulation à Popper, Sylvain Lavelle, philosophe français à l'Université de Paris-Sorbonne, traite de la refusabilité d'un projet, ce qui pourrait se traduire par un critère de refusabilité.

    Un projet pratique n’est scientifique que s’il est refusable. Sylvain Lavelle.

    Ce critère postule « que seuls les projets techniques de la science, à l’exclusion des théories scientifiques, peuvent poser un problème moral ou être reconnus comme moraux, à condition d’énoncer les conditions d’un refus éthique possible » - tiré du résumé de l’article cité ci-dessous.

    Référence :
    Lavelle, Sylvain, « Éthique et technique dans les sciences expériementales. La refusabilité éthique des projets de recherche scientifique : de la perspective critique à la perspective dialiectique », Ethica Vol. 15 no 2 (2003) 83-123 - http://www.uqar.uquebec.ca/ethos/ethica.htm

    Question :

    Le critère de Lavelle est-il nécessaire et suffisant pour encadrer les sciences expérimentales ?

    Comme corollaire, le critère de Lavelle est-il utile pour construire une éthique des projets pratiques ?

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  2. #2
    merou

    Re : La refusabilité des projets pratiques

    Bonjour,
    La refusabilité d'un projet ne signifie nullement que ce projet est refusé systématiquement, par ailleurs , la refusabilité est toujours dérrière le principe de consensus surtout en matière d'éthique. S'il y a consensus tacite autour d'un projet, la notion de refusabilité ne vient meme pas à l' esprit , Un projet à l'état théorique ne met pas en danger les interets des différentes parties de la société , mais dés qu'on songe à le mettre en pratique, il y a levée de boucliers d'où le critère de refusabilité.

  3. #3
    invite333943ff

    Re : La refusabilité des projets pratiques

    Bonjour merou,

    Les questions posées sont en lien avec l'éthique. L'éthique en science appliquée. Ta réponse me satisfait mais pas à 100% (difficile à satisfaire celui-là, pourrais-tu penser), mais elle m'éclaire. Merci et je poursuis.

    Principe de consensus !
    J'aime bien cette formulation qui régit un comportement collectif. Mais un principe n'a pas force de loi. Aussi, où ce principe est-il appliqué ? À l'intérieur d'un labo, d'une université, d'une région, d'un pays, entre les nations ? J'ai en tête le cas d'une secte (malheureusement établit au Québec) qui se vantait de faire du clonage ... à l'étranger (enfin, là où les conséquences légales étaient absentes à ce moment - lieux me semble-t'il toujours inconnue - sans doute Utopia ou peut-être Ufopia ).

    Ma réponse. Ce "principe" doit être fortement teinté par les us et coutumes scientifiques que j'oserais qualifier de nationales. Exemple : l'avortement (ok, c'est pas très puissant comme argument), le clonage humain (ça c'est beaucoup mieux comme exemple puisque le clonage humain est rejeté partout). L'application du "principe " est sans doute le fait d'un système d'appréciation par les pairs. Ces mêmes pairs prendront en compte des critères qui leurs sont dictés par leur environnement géopolitique.

    Passage des "projets" de l'état théorique à la pratique
    Admettons que l'opposition à un projet soit nécessaire pour empêcher sa réalisation. Est-ce suffisant ? Il me semble que non. Tout dépendra encore ici des us et coutumes et donc du lieu ou le projet sera présenté. Un projet refusé dans un pays pourrait donc être accepté dans un autre pays. Cela pourrait même concerner des lieux plus rapprochés : régions, universités, labos.

    Passage du temps
    Un projet ne devient-il pas acceptable par le simple fait d'attendre le moment approprié ?

    Ma réponse : c'est fort possible. L'exemple du nucléaire me semble éclairant (sans jeu de mots). Des approchent théoriques à une certaine époque permettaient d'espérer le retraitement des déchets. Il me semble qu'aujourd'hui des projets ont eux lieux. Je pense au réacteur Superpheonix entre autre.

    Et l'éthique dans tous cela ?
    Cela n'est pas clair ni évident. L'éthique est la recherche de la bonne action dans l'épreuve qui se présente au chercheur (la personne comme cas général). Présenter son projet au jugement de ses pairs est sans doute une démarche éthique forte et c'est admettre une forme de faillabilisme (à la Popper mais par-delà la critique de la théorie elle-même) par la possibilité du rejet qui pèse sur le projet. Évidemment, un rejet pour des raisons strictements économiques (on n'a pas assez d'argent - désolé) ne signifie nécessairement pas que le projet est inacceptable sur le plan éthique.

    L'éthique est aussi évolutive : ce qui était pris pour une valeur hier ne le sera pas forcément demain et vice et versa : ce qui tend à donner du poid au "principe" du consensus.

    Le critère de Laveille est-il nécessaire ? Je répondrais maintenant par un oui. Un projet doit-être refusable pour cadrer avec la démarche scientifique et le faillabilisme.

    Le critère de Laveille est-il suffisant ? Là, je suis porté à répondre par non. Refuser un projet ne garanti pas qu'il ne se réalise pas. Et ça, c'est rien pour me rassurer.

  4. #4
    invite9bb9377f

    Re : La refusabilité des projets pratiques

    Passage du temps
    Un projet ne devient-il pas acceptable par le simple fait d'attendre le moment approprié ?

    Ma réponse : c'est fort possible. L'exemple du nucléaire me semble éclairant (sans jeu de mots). Des approchent théoriques à une certaine époque permettaient d'espérer le retraitement des déchets. Il me semble qu'aujourd'hui des projets ont eux lieux. Je pense au réacteur Superpheonix entre autre.
    Quelles sont les règles sous-jacentes à l'acceptation d'un projet pratique ? La fin semble souvent plus importante que les moyens, même devant des aberrations comme le nucléaire et ses déchets.


    L'éthique et l'orgueil ne peuvent cohabiter, il me semble.

    Bonne soirée

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    invite333943ff

    Re : La refusabilité des projets pratiques

    Citation Envoyé par abo
    Quelles sont les règles sous-jacentes à l'acceptation d'un projet pratique ?
    Ce problème est abordé de la manière suivante par Lavelle :

    l'abstention d'un acte technique jugé mauvais du point de vue de l'éthique implique un renoncement moral à certaines expériences pourtant cruciales en vue de la connaissances scientifique.
    (exemple : un neurologue qui voudrait par une expérience faire l'association des fonctions du corps humain avec les aires du cerveau renoncera à une expérience (jugée mauvaise) qui aurait pour effet de détruire des neurones chez un sujet. Le renoncement à l'expérience décrite implique une longue route pour parvenir autrement à l'acquisition des connaissances recherchées).

    Du point de vue de Lavelle, la solution réside dans le critère de refusabilité éthique (ce qu'il nomme aussi la malifiabilité par symétrie au critère de falsification de Popper). Le critère de refusabilité éthique exige que les personnes (les chercheurs) précisent les conditions de validité de leur prétentions morales. Plus précisement, un individu doit spécifié six points (voici une tentative de résumer le texte de Lavelle) :
    1. La règle pratique de son projet énonçant pour certaines situations les diverses fins techniques, stratégiques et morales.
    2. L'idéal éthique.
    3. L'ensemble des conséquences (bonnes ou mauvaises) concrètes, diverses et prévisibles du projet pratique.
    4. Les conditions pour lesquelles les conséquences pratiques sont jugées globalement plus bonnes que mauvaises et en définitive permettent de reconnaître le projet comme étant moral.
    5. Les obligations impliquées par la fin morale du projet pratique.
    6. À quelles conditions l'individu seul ou pour d'autres individus pourraient-ils être amenés à renoncer à l'aspect moral du projet pratique ?

    Par ailleurs, le sujet de la refusabilité éthique des projets pratiques est d'actualité. En janvier dernier (2006), il s'est tenu un congrès ayant pour sujet "L'interdiction des sciences"; rien de moins ! (article en version anglaise article en version française). Les recherches de Lavelle m'apparaissent donc d'actualité et donnent une partie de la réponse aux questions que les panelistes se posaient. Oui, une théorie scientifique est sur le fond toujours morale. Oui, les projets pratiques sont susceptibles d'être immoraux ! D'où l'intérêt du critère de la refusabilité éthique avancée par Lavelle.

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