Asperger au féminin
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Asperger au féminin



  1. #1
    vep
    Responsable des forums

    Asperger au féminin


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    Bonjour

    je sais qu'il y a ici quelques personnes un peu intéressées par le sujet alors je me permets de poser la question ici :

    Je viens de recevoir une invitation pour une conférence.
    Et dans la plaquette de présentation je lis ça :

    Nous aborderons ainsi les caractéristiques des femmes Asperger, les questions de l’orientation sexuelle et de la dysphorie de genre, et la théorie de l’autisme comme « forme extrême du cerveau masculin ».
    je n'avais jamais entendu parler de cette théorie ! Vous connaissez ?
    J'avoue que je suis très surprise du lien fait entre autisme et genre (plus précisément entre autisme et identification sexuelle)

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    Dernière modification par vep ; 09/06/2015 à 11h16.

  2. #2
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Il y a Simon Baron-Cohen qui a développé une théorie empathisation-systémisation.

    Lire aussi ici.

    Or here.

    As-tu lu le livre de Rudy Simone Aspergirls : Empowering Females with Asperger Syndrome ? Il a été traduit en plusieurs langues, dont la langue française avec le titre L'Asperger au féminin.

    Tu peux aussi lire les sites/blogs de femmes Asperger, par exemple Les tribulations d'une Aspergirl.

    Pour en revenir à ce "lien" avec le genre :

    Dans le spectre autistique, il y a le syndrome d'Asperger. Une petite proportion de personnes autistes sont Asperger (dans le DSM-V, le syndrome d'Asperger est inclus dans les TSA, contrairement au DSM-IV, ce qui a animé quelques débats). Les personnes Asperger n'ont pas de retard de langage, et peuvent avoir un QI égal ou supérieur à la moyenne (syndrome d'Asperger et haut potentiel ne sont pas incompatibles).

    Les personnes Asperger, comme elles n'ont pas de retard de langage, peuvent souvent arriver à compenser leur handicap (difficultés aux interactions sociales, non-hiérarchisation-priorisation des informations, difficultés à saisir certaines figures rhétoriques (métaphore, ironie, sous-entendue, langage implicite) et à apprécier et comprendre le langage non verbal). Elles y arrivent en rationalisant (avec leur mémoire, leur capacité à analyser, et leurs connaissances scientifiques, notamment si elles s'intéressent aux sciences du comportement et/ou du langage).

    La personne Asperger, avec pas ou peu d'empathie (ce qui est remis en question), aura alors plus souvent tendance à systémiser, à traiter comme des faits, à rechercher les similarités entre deux situations (pour s'y adapter, y adopter un comportement adéquat). Exemple : une personne pleure, et on est censé la consoler. C'est souvent spontané chez une personne non autiste, alors que ce ne l'est pas souvent chez une personne Asperger, qui va raisonner pour éventuellement aboutir à la conclusion "Je dois la consoler" et "Je dois la consoler de telle manière", la manière pouvant parfois être maladroite.

    De plus, les personnes Asperger peuvent ne pas avoir appris certaines habiletés sociales à avoir avec les personnes non autistes. Par exemple, souvent, quand une personne non autiste se fâche ou s'énerve parce qu'elle a un problème, la personne Asperger (qui n'a pas appris une certaine habileté sociale) va souvent essayer de chercher/suggérer des solutions au problème, alors que la personne non autiste attend de la compassion. Heureusement, les personnes Asperger sont capables d'apprendre les habiletés sociales.

    Mais cela se fait par une rationalisation donc systématisation "Dans tel type de situation avec telles données, je dois adopter tel comportement." alors qu'une personne non autiste n'a pas besoin de tout ce raisonnement, l'empathie aidant.

    Une conséquence est que le syndrome d'Asperger devient alors un handicap invisible. Les personnes ne connaissant pas les TSA trouveront souvent la personne parfois bizarre, mais ne verront pas ses difficultés, surtout si elle a de bonnes notes à l'école.

    Les femmes Asperger arrivent plus à s'adapter dans les interactions sociales que les hommes Asperger, ce qui fait que leur syndrome d'Asperger passe encore plus inaperçu. On remarque déjà cette différence entre femmes non autistes et hommes non autistes.

    Après, oui, pas mal de personnes (hommes comme femmes) Asperger sont moins esclaves des stéréotypes du genre (il me semble que les personnes Asperger sont moins sujettes à certains biais cognitifs, comme les préjugés, les stéréotypes voire l'effet Barnum, étant donné que les personnes Asperger ont plutôt le sens du détail ; elles prennent plus facilement du recul face aux généralisations). Il y a même des personnes Asperger qui se déclarent asexuelles.
    Dernière modification par shokin ; 09/06/2015 à 12h22.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  3. #3
    Deedee81
    Modérateur

    Re : Asperger au féminin

    Salut,

    EDIT croisement avec shokin

    J'avais entendu une fois dans un documentaire qu'il y aurait un lien entre production de testostérone pendant l'embryogenèse et autisme.

    Donc, je suppose que dans cette optique, le genre doit influencer.

    En faisant une recherche sur "autisme testostérone" on trouve énormément de liens, dont certains sur cette théorie.
    Par exemple : http://www.psychomedia.qc.ca/autisme...sculin-extreme

    (je suis incapable de juger de la validité, je me suis juste rappelé de cette info).
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  4. #4
    vep
    Responsable des forums

    Re : Asperger au féminin

    Shokin,
    Oui ce que tu décris, je le savais. Il y a 4 fois plus d'autistes garçons diagnostiqués (ce qui ne veut pas forcément dire qu'il y a 4 fois plus de garçons autistes que de filles autistes puisque, comme tu le fais remarquer, celle ci passent plus souvent inaperçues, un peu comme dans le TDA/H ou la précocité intellectuelle d'ailleurs)
    Deedee, merci pour le lien c'est intéressant et rejoint ce que je viens de trouver dessus.

    Très intéressant l'article de simon Baron Cohen sur les cerveaux (empathisation / systématisation)


    Mais ce qui me pose question dans le programme de cette conférence c'est le lien entre "dysphorie de genre" (appelée avant "trouble de l'identité sexuelle) (qui peut donc conduire au transgenre) et autisme.

    J'ai regardé si je trouvais des infos, et oui, il apparaît bien qu'il y a plus de transgenre dans la population autiste.
    je l'ignorai complètement !

    Ici un article de Simon Baron Cohen qui en parle
    http://www.huffingtonpost.com/kyle-s...b_3896317.html

    bref, j'me coucherai moins bête ce soir
    Dernière modification par vep ; 09/06/2015 à 14h25.

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Il est possible que je m'arrête prochainement à Aix-en-Provene.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  7. #6
    vep
    Responsable des forums

    Re : Asperger au féminin

    Citation Envoyé par shokin Voir le message
    Il est possible que je m'arrête prochainement à Aix-en-Provene.
    Ca a l'air très intéressant et les intervenants semblent de qualité .
    Pour moi, c'est trop loin juste pour une conférence et surtout j'ai un autre impératif ce jour là


    (tu me feras un compte-rendu )
    Dernière modification par vep ; 09/06/2015 à 14h31.

  8. #7
    Deedee81
    Modérateur

    Re : Asperger au féminin

    Citation Envoyé par vep Voir le message
    J'ai regardé si je trouvais des infos, et oui, il apparaît bien qu'il y a plus de transgenre dans la population autiste.
    je l'ignorai complètement !
    Moi itou (malgré que j'aie pas mal fréquenté les transgenres). J'ai appris quelque chose
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  9. #8
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Nous n'arrêtons pas d'en apprendre.

    Pas de problème pour un compte-rendu.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  10. #9
    noir_ecaille

    Re : Asperger au féminin

    Attention toutefois (pour les néophytes) à ne pas amalgamer transgenre et autisme
    "Deviens ce que tu es", Friedrich W. Nietzsche

  11. #10
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    C'est Julie Dachez qui a principalement parlé. Bruno Gepner et Carole Tardif ont juste pris partiellement le relais lors des questions finales.

    Venons-en au fait :

    Julie Dachez commence à parler de son parcours et de ses expériences en sciences économiques et sociales, puis de son doctorat actuel en psychologie sociale (un des domaines qui me fascine pas mal, notamment pour comprendre les personnes non autistes ), ainsi que ses difficultés (détecter et comprendre l'implicite ; les interactions sociales) et ses facilités (lire et synthétiser). Elle rappelle que l'Asperger au féminin est plus subtil car passe encore plus inaperçu (le syndrome d'Asperger fait partie des handicaps invisibles). Quant à la répartition des deux genres (masculin et féminin, mais elle parlera plus tard plus en détail des "genres"), elle évoque le 4-1, mais qu'on est appelé à approcher la parité avec les prochaines améliorations des diagnostics, avec le fait qu'on en parle plus (même si pas encore assez)

    Les femmes Asperger passent encore plus inaperçues que les hommes Asperger en raison de divers facteurs :

    1. Leurs intérêts spécifiques sont plus socialement acceptables :

    Les femmes Asperger en général s'intéressent davantage aux sciences humaines, aux arts, aux animaux et à la littérature. Connaître les sciences humaines leur permet de s'adapter encore plus aux personnes non autistes, ou d'adapter la stratégie du caméléon. Elles (mais aussi les hommes Asperger) préfèrent le contact avec les animaux des autres espèces car leur langage est plus explicite, direct, sans sous-entendu, sans implicite, sans ironie. Au contraire, le langage des individus de notre espèce est rempli de métaphores (et autres tropes), de sous-entendus, d'implicites, de règles tacites, d'ironies, d'exagérations, d'euphémismes. Une personne autiste peut prendre les phrases au pied de la lettre, mais peut apprivoiser le second degré en apprenant les figures de style et diverses expressions (faire la manche, tirer les vers du nez, etc.).

    2. Les femmes Asperger sont de bonnes élèves qui intériorisent leurs difficultés :

    Elles peuvent plus facilement recourir au faux self, afficher une autre identité, si bien que certaines peuvent passer "plus neurotypiques que les neurotypiques". D'ailleurs, si vous étiez venus à la conférence, vous auriez pu être bluffés (étonnés) : à voir sa manière de parler, sa gestuelle, ses blagues glissées à légère dose, vous n'auriez sûrement pas pensé qu'elle était Asperger (de nouveau : le syndrome d'Asperger est un handicap invisible car les personnes Asperger font beaucoup d'effort pour se ressembler à la masse, rester discrètes, ne pas paraître "anormales").

    3. Comme pour les hommes Asperger, il peut y avoir des erreurs dues aux comorbidités :

    Des symptômes peuvent parfois faire penser à de la dépression, à la schizophrénie, au TDA/H, à la phobie sociale, à l'anxiété (hypervigilance face aux interactions sociales), au trouble bipolaire, à l'auto-mutilation (elle insiste pour dire que ce n'est pas un message d'appel à l'aide mais une manière de rendre la souffrance palpable), etc. Et il reste encore, en France entre autres, du chemin à parcourir pour parfaire les processus de diagnostic. Actuellement : le résultat de diagnostic peut varier d'un psychiatre à l'autre.

    Elle évoque une amie Asperger, qui compense beaucoup déjà jeune, puis décompense quand elle est seule chez elle. Elle encourage donc fortement à ne pas observer uniquement ce qui apparaît mais aussi les efforts (même s'ils sont moins visibles).

    Les femmes Asperger peuvent être fortement engagées du point de vue éthique. Elle parle d'une amie Asperger multimilitante (vegan, droits identiques des LGBT, etc.) et d'une anecdote récente : fortement secouée par la tragédie de Charleston, elle en parle sur FaceBook, mais est révoltée par l'absence de réaction de ses "amis" alors qu'il y a eu tout un ramdam "Je suis Charlie", et elle alors supprimé nombre de ses "amis" ; ceci pour illustrer qu'une personne Asperger peut aisément couper les ponts sans hésitation avec des personnes qui ne les satisfont pas sur le plan éthique ; en cela, les personnes Asperger rejoignent la forte exigence éthique (surtout exigence envers soi qui devient exigence pour autrui) des personnes dites surdouées.

    Les femmes Asperger (aussi les hommes Asperger) peuvent être fortement engagées car elles vivent le réel de manière crue, y compris le vécu d'autrui. Elles n'ont pas (ou peu) cette capacité à se mentir, à manipuler la réalité (ou à gommer/contourner les problèmes et les côtés plus sombres de la réalité, comme le font si facilement les personnes non autistes).

    Elle parle du triangle de François Sigaut égo-autrui-réel. Coupez-vous du réel, et vous obtiendrez l'aliénation culturelle ; Coupez-vous du réel et des autres, et vous obtiendrez l'aliénation mentale ; coupez-vous d'autrui, et vous obtiendrez l'aliénation sociale.

    Les femmes Asperger sont des proies faciles parce que, d'une part, elles ne décodent pas/peu l'implicite et que, d'autre part, elles n'envoient pas les bons signaux. Elles sont donc naïves et influençables, ce qui en fait des victimes potentielles, à l'instar des personnes dites surdouées. Le contact avec les personnes perverses narcissiques est donc fortement à éviter parce que celles-ci pourront plus facilement profiter de la naïveté, de l'hypersensibilité et de la mésestime de soi.

    En ce qui concerne les troubles alimentaires, elle parle d'une comorbidité de 12% avec l'anorexie (Gilbert et al. 1995). Mais les causes sont différentes : il ne s'agit pas d'une recherche de minceur mais d'une recherche de routine (donc elles peuvent négliger la diversité des repas).

    Certaines femmes Asperger sont des personnes extrasensorielles (ainsi que des personnes dites surdouées). Elle évoque une amie Asperger surdouée qui aurait eu un flashback des bourreaux au Pérou. Non, son amie n'avait pas pris de LSD. Bon, celle-ci sait que beaucoup de personnes sont sceptiques et n'en parle qu'à très peu de personnes alors (celles qui ne la prendront pas pour une "folle").

    Venons-en au genre. Elle évoque la variance de genre, qu'il n'y a pas juste les hommes hétérosexuels et les femmes hétérosexuelles, mais aussi les LGBT, les agenres (qui ne basent pas leur identité sur le genre). Que cette variance est 7.59 fois plus élevée chez les personnes avec troubles du spectre autistique (Strang et al. 2014). Sur 224 enfants/adolescents, 7.8 % sont autistes (de Vries et al. 2010). Beaucoup de personnes Asperger se sentent agenrées (ou asexuelles). Elle parle de dysphorie du genre, le fait que des personnes n'ont pas l'orientation sexuelle conforme à certaines normes (en l'occurrence la norme hétérosexuelle). L'orientation sexuelle est diversifiée (hétéro-, homo-, a-, bi-, pan-, etc.-sexuelle) dans la population en générale et encore plus chez les personnes Asperger.

    Les femmes Asperger sont parmi les personnes au croisement des minorités donc des plus atypiques.

    Ensuite, elle parle de la théorie de l'empathisation-systémisation de Simon Baron-Cohen, de l'autisme en tant que forme extrême du cerveau masculin. Car, de la même manière que les femmes ont plus de capacité d'empathisation que les hommes et ceux-ci plus de capacité de systématisation que celles-là, les personnes non autistes ont plus de capacité d'empathisation que les personnes autistes et celles-ci ont plus de capacité de systématisation ("si alors", la méthode hypothético-déductive) que celles-là. Il est vrai que les personnes Asperger utilisent plus régulièrement, voire au quotidien, la démarche scientifique, détectent plus facilement certains biais, alors que, en général, les personnes non autistes (sauf peut-être les personnes dites surdouées) n'ont pas tendance à utiliser la démarche scientifique au quotidien (notamment dans leurs interactions sociales).

    Elle termine par la neurodiversité : l'autisme (mais aussi les orientations sexuelles différentes, et autres atypicités) sont des fonctionnements différents et "différent" (de normes sociales) n'implique pas "pathologique". Elle préfère donc encourager la neurodiversité (l'hétérogénéité) plutôt qu'une société homogène (l'homogénéité, une norme sociale ?) qui discriminerait socialement les individus hors normes (qu'ils l'aient choisi ou non). Elle oppose modèle médical (le handicap est intrinsèque à l'individu, qui doit alors s'adapter à l'environnement) et modèle social (le handicap est une résultante de l'environnement, et c'est celui-ci que nous devons adapter aux personnes avec handicap). Elle évoque enfin l'émergence d'un mouvement militant français pour la neurodiversité, Alliance Autiste, puis de terminer avec les difficultés de collaboration que rencontrent les personnes autistes entre elles, justement de leur difficultés aux interactions sociales. Que les personnes autistes peuvent aussi essayer de "sortir de l'online" (où il n'y a pas toutes les interactions sociales, le langage non verbal à gérer).
    Dernière modification par shokin ; 24/07/2015 à 18h27.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  12. #11
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Passons aux questions du public (de 70-80 personnes) :

    1. Une femme qui se dit active pour les personnes surdouées (avec ou sans syndrome d'Asperger) demande comment encourager des personnes au diagnostic Asperger ?

    Julie : C'est compliqué. Mais on peut encourager avec : le besoin de réponses, le manque d'autonomie de la personne Asperger.

    Une autre personne répond, qui se dit maman mais qui a été diagnostiquée Asperger relativement tardivement : [le diagnostic peut être utile pour]

    - se reconnaître, (donner un nom à ce qu'on observe et qui nous lèse)
    - confirmer (ou infirmer) nos soupçons, lever les doutes,
    - mieux se connaître,
    - le soulagement (de ne pas être autre chose),
    - trouver d'autre outils d'adaptation et d'autonomisation moins fatigants.

    [Rajouté par une autre personne dans la salle juste avant la question 6 : Mais le diagnostic combiné Asperger-surdouance est moins aisé actuellement, non seulement à cause de la comorbidité mais aussi à cause de la définition instable de la douance (en plus, on se chicane encore sur les termes à utiliser : douance, surdouance, haut potentiel, etc. déjà qu'il y a discussion sur le mot "intelligence" et quiproquos sur des tests QI non adaptés aux personnes autistes).]

    2. Une mère d'un Asperger lui demande de parler de ses besoins spécifique :

    Préfère les rencontres 1-1, pas en groupe. Mais est aussi active pour qu'on se comprenne mieux mutuellement (par exemple entre une personne autiste et une personne non autiste), pour qu'on fasse connaître le syndrome d'Asperger. Elle rajoute qu'elle passe la grande majorité de son temps seule chez elle, y compris pour son doctorat (aménagement particulier).

    3. Une femme demande si elle préfère rencontrer des personnes Asperger :

    Oui, clairement. Elle a peu de contacts avec des personnes non autistes. Les personnes autistes sont plus tolérantes, plus directes, cherchent à échanger et partager de l'information, pas à parler pour ne rien dire ou juste faire la conversation (parler pour ne rien dire) comme les personnes non autistes.

    4. Une mère d'une Asperger lui demande si elle a des accès de colère et comment elle les gère :

    Petite, elle en avait : de la colère due à des situations non voulues ; des larmes lors des imprévus.
    Grande : la colère est très brève, passe vite à la tristesse.

    5. Bruno Gepner demande pourquoi cette scission entre TSA et non-TSA ? (alors qu'on sait qu'il y a des continuums, des spectres, et non des limites claires et nettes)

    Par confort sémantique seulement (seulement dans l'usage des mots).

    6. Une femme demande comment elle fait pour gérer les tensions :

    Elle dit qu'elle pratique une forme de relaxation basée sur la pleine conscience.

    7. Une femme lui demande si elle a bénéficié d'aménagements à la fac' (l'université) :

    Elle précise qu'elle n'était pas encore diagnostiquée à ses débuts universitaires. Elle mentionne qu'elle a fait une partie de ses études universitaires en Espagne, où il n'y avait pas de contrôle des présences. Donc elle était libre d'y aller quand elle voulait (seulement quand nécessaire, rarement). Elle travaille mieux seule chez elle. Elle rajoute qu'il peut y avoir des difficultés si l'établissement ne reconnaît pas le syndrome d'Asperger et les difficultés qu'il implique ou n'entre pas en matière pour prévoir des aménagements adaptés.

    8. Une mère d'une Asperger lui parler des SESSAD et lui demande ce qu'elle en pense :

    De nouveau, c'est compliqué. Elle n'y a pas eu recours. [C'est compliqué notamment entre le besoin d'être aidé et les interactions sociales que ça peut impliquer. Et une personne Asperger peut être relativement réticente à ce qu'une personne vienne chez elle.]

    9. Une femme demande comment les parents ont vécu cela ?

    Sa mère démunie car elle voyait la souffrance que les autres ne voyaient pas. Elle surprotégeait. Sa sœur a plutôt salué la lueur de compréhension apportée par les connaissances et le diagnostic sur le syndrome d'Asperger.

    10. Une femme lui demande si elle a utilisé des traitements forts :

    Non, pas besoin. Refus du bumétanide qu'on lui a proposé.

    11. Une femme lui demande comment on peut aider une personne Asperger non "haut potentiel" :

    Elle lui répond : pourquoi forcer une personne Asperger à sortir de chez elle si elle ne le veut pas et, à plus forte raison, si elle n'en a pas besoin. Cela dit, elle évoque le job coaching, et aussi le fait que le social est inévitable dès qu'on sort de chez soi, qu'il nous "suit" en tous temps, donc que c'est une difficulté qui guette sans cesse la personne Asperger (notamment pour l'emploi, l'autonomie financière, la recherche d'emploi...), comme un petit diable malin.

    Elle insiste sur le fait qu'on peut avoir une vie sociale via l'internet (par exemple : être actif sur des forums, sur des blogs, des sites de réseaux, etc.). Après tout, l'internet est un espace de partage (d'informations notamment). Et le fait qu'il n'y y ait pas (ou peu) d'interactions sociales (le langage non verbal notamment) à gérer fait de l'internet une sorte de paradis pour les personnes Asperger.

    12. Une femme lui demande de parler des rapports entre autisme et troubles alimentaires :

    Elle ne se prononce pas car elle n'en a pas en particulier, et qu'elle ne veut pas dire de bêtises. [Oui, les personnes Asperger préfèrent se taire plutôt que dire des bêtises. Il y a une sorte de perfectionnisme, d'exigence envers soi, voire d'exhaustivité. À l'opposé, une personne non autiste peut aisément se satisfaire d'un travail "mal fait" (aux yeux d'une personne Asperger et/ou surdouées), du moment qu'il est fonctionnel.]

    Bruno Gepner rajoute qu'il peut y avoir des troubles alimentaires dus à une alimentation pas assez diversifiée. Et pour cause, divers personnes Asperger sont relativement sélectives : elles peuvent ne pas apprécier certaines textures d'aliments, certaines couleurs, ou opérer une sélection plus réfléchie (basée sur des critères éthiques).

    13. Un homme demande "Oui, soutenir les personnes autistes (Asperger comprises donc) pendant quelques mois. Et après ?" Doit-on envisager des tuteurs à vie ?

    De nouveau, c'est compliqué. Est-ce qu'une personne Asperger peut, avec ses difficultés dues aux troubles du spectre autistique, devenir autonome "une fois pour toute" ? Certaines, oui, peut-être. Mais pour bien d'autres, c'est compliqué.

    En bref, on n'a pas encore les réponses à ces questions. Il y a une certaine impression d'être démunis par rapport à certains défis.

    14. Une mère d'un Asperger demande si on peut quand même lui faire acquérir de l'autonomie :

    Oui, mais il faut sortir de la vision des apprentissages par tranches d'âges. Le rythme d'apprentissage des personnes autistes est différent (de celui des personnes non autistes), hétérogène (peut devenir très mature sur certaines aptitudes, mais beaucoup moins sur d'autres ; alors que le rythme d'apprentissage des personnes non autistes est plus homogène) et diversifié (varie d'une personnes autistes à l'autre).

    Fin des questions, il est 20h00. Julie propose aux personnes Asperger qui le veulent de participer à des recherches sur le syndrome d'Asperger (par l'entremise d'entretiens en face à face), en indiquant leur prénom, leur nom et leur adresse électronique sur une feuille.

    Carole Tardif nous indique qu'il y aura une réunion le vendredi 6 novembre 2015 dans ce même lieu, où l'on parlera de l'oculométrie (eye tracking ; les personnes Asperger (et autistes, de manière plus générale) ne regardent pas les mêmes détails lors d'interactions sociales, ont des mouvements des yeux différents).
    Dernière modification par shokin ; 24/07/2015 à 18h32.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  13. #12
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Bon, voilà. J'ai retranscrit ce qui a été dit. Vous ne serez pas forcément d'accord en tout point avec.

    Il y a encore beaucoup de questions sans réponses.
    Il y a un grand travail de sensibilisation à faire.
    Il y a de la neurodiversité parmi les personnes Asperger. Julie Dachez n'en est qu'une parmi tant d'autres.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  14. #13
    vep
    Responsable des forums

    Re : Asperger au féminin

    Merci beaucoup pour ce compte-rendu Shokin

    Je suis impressionnée que tu aies fait cette route pour une conférence !
    Et c'est très sympa d'avoir pris le soin de prendre des notes aussi complètes



    Tiens autre chose :
    Quelqu'un a t-il vu le film "le monde de Nathan" ?
    On m'en a dit beaucoup de bien.

  15. #14
    shokin

    Re : Asperger au féminin

    Bah, j'ai pris le train. Et je suis relativement en vacances ces temps-ci. [Et je m'autorise de plus grandes distances en train, il faut bien que je visite la France (et d'autres pays). Je ne me suis pas encore arrêté à Nantes, Bordeaux, Toulouse, etc. ]

    Autrement, la conférence dont Carole Tardif nous a parlé requiert une inscription au bas de cette page.

    Oui, pour des conférences sur l'autisme (et certains autres sujets), j'essaie de prendre le plus de détails, dans le but d'en faire profiter toutes les personnes qui n'ont pas pu y aller, pour le partage libre et non marchand des savoirs.

    Je n'ai pas encore vu Le Monde De Nathan.
    Pardon, humilité, humour, hasard, tolérance, partage, curiosité et diversité => liberté et sérénité.

  16. #15
    noir_ecaille

    Re : Asperger au féminin

    Merci shokin

    Vraiment intéressant Je ne pensais pas les Asperger capables d'autant de "plasticité sociale" malgré leur trouble. C'est quand même "spécial" et bien que ce ne soit pas un appel à la pitié, il y a certainement une forme de souffrance dans cette interaction sociale "forcée"...
    "Deviens ce que tu es", Friedrich W. Nietzsche

  17. #16
    Runjulia

    Re : Asperger au féminin

    Bonsoir,

    Je me sens à l'étroit encore une fois dans une tendance (très actuelle) à diviser plutôt que rassembler. Les statistiques ne disent pas tout, elles disent certaines choses dans les études épidémiologiques mais certainement pas à en tirer des conclusions trop catégoriques et trop générales.
    Attention à l'acception "théorie de genres" qui est une très mauvaise acception française de l'expression anglophone (de un cela n'a strictement rien avoir avec la biologie ou la "pré-destination" sexuelle, ou la différentiation des cellules sexuelles). Il s'agit d'une différentiation sociale et culturelle et de représentation. Arrêtons de chercher des différences là où il n'y en a pas. En imagerie, leurs cerveaux sont strictement identiques, la différentiation est sociale et culturelle.

  18. #17
    noir_ecaille

    Re : Asperger au féminin

    Citation Envoyé par Runjulia Voir le message
    En imagerie, leurs cerveaux sont strictement identiques, la différentiation est sociale et culturelle.
    Je ne me prononce pas sur la théorie des genres -- de ce que j'en perçois :
    - d'une part nous sommes à la fois juge et parti en prise direct, de quelque façon que ce soit
    - d'autre part le "gender" anglais n'est pas aussi neutre que notre genre grammatico-philosophique : cela s'explique notamment parce que neutre et masculin ne font qu'un en français, mais qu'en anglais le genre non-neutre/sexué (féminin ou masculin) est relativement plus rare donc beaucoup plus emphatique, d'où une transposition malaisée entre les deux langues -- allant même jusqu'à un they "singulier" pour les "indéterminés" se revendiquant tels ^^;

    Cela mis à part, je reviens sur :
    Citation Envoyé par Runjulia Voir le message
    En imagerie, leurs cerveaux sont strictement identiques, la différentiation est sociale et culturelle.
    La question est en fait ouverte, car nonobstant les aspects culturels humains, nous sommes des animaux. Or il existe bel et bien des comportements sexuées comme par exemple les instincts reproducteurs, avec des tendances statistiques plus ou moins fortes selon l'espèce, le sexe, et le trait comportemental étudié.

    Au-delà ou avant la Sexualité (le concept), il y a le Sexe et sa physiologie dont on n'a toujours pas exhaustivement fait le tour.

    D'où ce fil de discussion : http://forums.futura-sciences.com/ne...e-cerveau.html
    "Deviens ce que tu es", Friedrich W. Nietzsche

  19. #18
    Runjulia

    Re : Asperger au féminin

    Oui bien sûr noir_ecaille, ne nous méprenons pas sur la question et surtout ne nous égarons pas dans des différences de "genres" alors que le spectre est en soi suffisamment large pour troubler plus d'une étude.

    Donc, je dis "simplement" n'ajoutons pas une sorte de "caractéristique" inutile et stérile à ce qui est déjà tellement diversifié, multiformes, avec des degrés d'intégration sociale aussi différents qu'interloquant, des expériences de vie intégrée ou non avec des vécus tout aussi différents ! Gardons-nous des stéréotypes pour des vies très différentes après tout.
    Comme je le disais dans une autre discussion: Asperger ne veut pas dire "d'office' que l'on vit mieux son autisme ou que l'on est mieux intégré.
    Même Asperger présente un spectre extrêmement large de typologie comportementale, avec plus ou moins d'incapacités (verbales, organisationnelles, spatio-temporelles, physiques, mentales dues aux obsessions).

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