Bonjour,
Hasard du calendrier, j'ai 3 articles qui viennent de sortir coup sur coup sur des sujets un peu différents, tous concernant l'évolution humaine. Voici quelques mots à leur propos (en français, les articles sont en anglais) et des liens. Bonne lecture à ceux qui seront intéressés.
Balzeau A., Rougier H. : New information on the modifications of the neandertal suprainiac fossa during growth and development and on its etiology. American journal of physical anthropology.
Voici un lien vers le communiqué de presse du cnrs : http://www2.cnrs.fr/presse/communique/3045.htm
RESUME : Dans le cadre de cette étude, la plate-forme AST-RX, qui comprend le micro-scanner le plus performant dans un muséum au monde, a été utilisée pour caractériser les structures internes les plus fines de l’os occipital de fossiles et en particulier de l’enfant néandertalien La Ferrassie 8, décédé vers 2 ans.
L’étude démontre que la fosse sus-iniaque des Néandertaliens se définit dès l’enfance comme une dépression avec des spécificités de surface externe de l’os et un amincissement unique du diploë, la couche centrale de l’os. Il apparaît aussi que le schéma de développement et les causes d’expression des dépressions observées chez les Hommes modernes sont différents. Pour la première fois, des caractéristiques de très petites dimensions de la structure interne osseuse ont été caractérisées chez les Néandertaliens ce qui a permis de valider que la fosse sus-iniaque est un trait dérivé de cette espèce. Cette recherche montre l'intérêt de l'application de technologies de pointe à l'étude des fossiles et permettra d'identifier des spécimens même très fragmentaires pour mieux comprendre notre passé.
Balzeau A., Grimaud-Hervé D., Détroit F., Holloway R.L., Combès B., Prima S. 2013 : First description of the endocast of Cro-Magnon 1 and study of brain variation and evolution in anatomically modern Homo sapiens. Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris 25, 1-18.
RESUME : La paléoneurologie est un champ de recherche important dans le cadre des études sur l’évolution humaine. Les variations de taille et de forme de l’endocrâne sont en effet utiles pour différencier les différentes espèces d’homininés, alors que les asymétries cérébrales sont reliées au comportement et aux capacités cognitives. Pourtant, notre connaissance de l’évolution et de la variation du cerveau d’Homo sapiens, depuis l’apparition de notre espèce, est très lacunaire. Dans un premier temps, nous détaillons l’anatomie et les asymétries (en proposant une méthode innovante de quantification de ces dernières) de l’endocrâne de Cro-Magnon 1, un des représentants européens les mieux conservés et les plus anciens des Hommes anatomiquement modernes, qui n’avait encore pu être analysé. Puis, une étude comparative entre un échantillon de spécimens fossiles et actuels d’Homo sapiens est effectuée. Bien qu’un substrat anatomique commun soit présent, certaines différences de taille et d’organisation ont été observées entre ces deux échantillons. Ces résultats illustrent la plasticité du cerveau au sein de notre espèce et documentent une variabilité anatomique encore inconnue.
Balzeau A. : Thickened cranial vault and parasagittal keeling, correlated traits and autapomorphies of Homo erectus? Journal of Human Evolution.
RESUME : Homo erectus sensu lato (s.l.) est une espèce clé au sein du registre fossile, étant l'une des premières découvertes et peut être la mieux documentée, mais aussi en raison de sa grande extension chronologique et ayant joué un rôle dans les premières migrations humaines hors du continent africain. Nous testons ici deux caractères supposés autapomorphes pour l'espèce H. erectus, en l'occurrence une épaisseur plus importante de la voûte crânienne et la présence de carènes parasagittales. Plus généralement, nous discutons la définition de ces caractères, ainsi que leur expression et variation chez les hominidés. Nous observons que la partie supérieure de la voûte chez H. erectus n'est pas plus épaisse en valeurs absolues que chez les Hommes modernes fossiles, alors que les valeurs pour Broken Hill et Petralona sont dans la variation observée chez H. erectus. Par ailleurs, cette partie anatomique n'est pas significativement plus épaisse en valeurs relatives en comparaison avec Pan paniscus. Nos résultats montrent aussi que l'épaisseur crânienne ne doit pas être utilisée pour proposer des hypothèses sur l'attribution sexuelle de spécimens fossiles d'homininés. Nous montrons aussi que la relation entre les reliefs sur la surface externe de la voûte, les carènes parasagittale et l'éminence bregmatique, ainsi qu'avec l'épaisseur osseuse est complexe. Dans ce contexte, le statut autapomorphe pour H. erectus des deux caractères analysés peut être rejeté.
Néanmoins, nous avons identifié plusieurs schémas de distribution de l'épaisseur crânienne pour la partie supérieure de la voûte. Le schéma de distribution de l'épaisseur osseuse observé chez H. erectus, chez P. paniscus et probablement chez les australopithèques, premiers représentants du genre Homo et Homo ergaster/erectus africains comme nous avons pu l'observer sur quelques spécimens ici, apparait être partagé entre ces espèces et serait un caractère plésiomorphe au sein des hominidés. Au contraire, nous avons aussi identifié deux états apomorphes différents pour ce caractère, respectivement chez les Néandertaliens et chez Homo sapiens.
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