Votre rapport avec la mort.

[invited2627faa]

Bonjour, bonsoir à tous.

Je me pose beaucoup de questions sur la mort en général. N'étant pas archéologue ( je souhaite néanmoins le devenir ), j'aimerai savoir quels rapports vous " entretenez " avec la mort?

L'archéologie est un métier qui peut amener à rencontrer des défunts décédés depuis des siècles et des siècles.

Comment voyez-vous le fait d'exhumer des défunts? Comment appréhendez-vous ce contact avec la mort? Cela vous fait-il réfléchir? Cela vous laisse-t-il indifférent?

Il est vrai que c'est un sujet assez obscur pour moi, c'est pour cela que j'aurais juste voulu savoir votre point de vue sur l'association de votre métier avec le sujet aussi complexe qu'est la mort.

Amicalement,
NaturalLove
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[invitee0766b90]

Bonjour à tous. Ou plutôt, vu l'heure, bonsoir.
Et bonjour/ bonsoir spécialement à naturallove.
Bien que n'étant pas archéologue de formation, j'ai côtoyé des morts plusieurs fois, et spécialement durant trois campagnes de fouilles en grotte sépulcrale, un boyau qui mesurait, à la fin des fouilles, environ 1,6 m de haut au maximum, pour une largeur moyenne de 60 cm.
Dans un espace aussi confiné, les morts, même en morceaux, sont des interlocuteurs privilégiés. Ils ont des tas de choses à raconter. Et ils vous contredisent très rarement.
Et ils ne sont pas du tout agressifs. Beaucoup moins, en tout cas, que ceux qui parlent en leurs noms. Je ne pense pas leur avoir "manqué de respect", expression que je trouve énigmatique, quoiqu'en aient pensé ces vivants-là. Je ne pense pas leur avoir donné non plus un statut particulier.
Le fait qu'ils soient inhumés (ou pas!) est beaucoup plus important que le fait qu'ils soient morts.
Le mort que vous fouillez avec soin est un sujet d'étude.
Effectivement, il vous renvoie l'image de votre propre mort. Est-ce cela que vous craignez ? Je ne dirai pas que cette crainte soit malvenue, déplacée ou normale. C'est un fait culturel, dans une société qui bannit l'idée de mort. (Mais là, on va être hors-sujet, et je me demande si vous ne devriez pas aussi poster ce sujet, avec quelque modification, en "philosophie".)
Si vous ne pouvez pas passer ce stade, si vous restez dans l'affectif, ça ne vous empêche toutefois pas de "faire de l'archéologie": on ne fouille pas que des sépultures ! Mais cela risque de biaiser votre analyse. (Pas terrible, ça.)
Pour en revenir à ma petite expérience personnelle, je considère la mort comme une étape incontournable de la vie. Pour ce qui est du mort, entendons bien qu'en fouille, ce n'est plus qu'un assemblage de minéraux. On fouille des squelettes, pas des cadavres! Plus facile d'être détaché. Oscar, c'est un pote. Un pote âgé, même, en général, qui permet de cultiver son jardin intérieur.
(Ben oui, j'ai osé).
Sur ce, bonne nuit.

[invitef31e3c6a]

Ouf ! J'ai retrouvé l'intervention de Lola Bonnabel (archéo-anthropologue) qui s'exprimait en mars dernier dans L'excellllent Salon noir, émission de France Culture : http://www.franceculture.fr/player/r...r?play=4401717

Elle évoque ce qui est le sujet de ce fil - mais très rapidement - à 25:23, le reste n'en est pas moins intéressant pour autant et frôle le sujet.

[ansset]

la discussion n'est-elle pas in finé soit philosophique et/ou religieuse ?
je ne la refuse pas personnellement mais j'ai un doute sur son évolution ici, à moins de bien définir un cadre très précis.

[A voir en vidéo sur Futura]

[invite6fc61363]

Je viendrai répondre plus amplement ce soir, car ce sujet m'intéresse puisqu'il s'agit de mon domaine de prédilection, mais elle a bien sa place ici je pense, du moment qu'on reste dans l'archéologie et qu'on ne dévie pas sur des croyances.

[Bill_Kelso]

Je viendrai répondre plus amplement ce soir, car ce sujet m'intéresse puisqu'il s'agit de mon domaine de prédilection, mais elle a bien sa place ici je pense, du moment qu'on reste dans l'archéologie et qu'on ne dévie pas sur des croyances.

et la Ruine Mystère Madame ? elle va restée mystérieuse encore longtemps ???

[invitee0766b90]

la discussion n'est-elle pas in finé soit philosophique et/ou religieuse ?
je ne la refuse pas personnellement mais j'ai un doute sur son évolution ici, à moins de bien définir un cadre très précis.

Oh que non, je ne pense pas que la question soit uniquement religieuse. La mort est une chose bien trop sérieuse pour que la religion en soit la seule locutrice!!
Au passage, une pensée pour Adèle.

[invite6fc61363]

et la Ruine Mystère Madame ? elle va restée mystérieuse encore longtemps ???

Oui il faut faire durer le suspense !

Pour en revenir au sujet, le contact que j'ai avec "la mort", en tant qu'archéologue, est assez récurrent. Tombes à inhumation ou incinérations, monuments funéraires : c'est assez varié et les divers types de sépultures s'abordent totalement différemment. Evidemment je ne vais parler que de mon point de vue, tous les archéologues ne voient pas "la mort" à laquelle nous sommes confrontés dans notre travail de la même façon (certains détestent ça d'ailleurs).

Comment voyez-vous le fait d'exhumer des défunts?

Totalement athée (cela peut jouer, même chez certains archéologues !) cela ne me pose pas de souci en soi, surtout en archéologie préventive. C'est d'ailleurs ce que je réponds souvent aux personnes qui me posent la question : si nous n'intervenons pas, les sépultures seront de toute façon détruites par les engins de BTP. Notre objectif est de les étudier afin qu'elles puissent nous en apprendre plus sur une population à une époque donnée. C'est d'ailleurs un passé commun à nous tous, précieux, qui vaut plus que de se retrouver démantelé dans le godet d'une pelle mécanique sans respect aucun. Finalement, le contexte funéraire est "presque" ce qui nous en apprend le plus sur le monde des vivants. Les pratiques funéraires, notamment les rituels et la mort en général ont durant des siècles fait partie de la vie quotidienne. La mort était moins tabou, moins cachée qu'actuellement, plus ritualisée donc et peut-être plus "acceptable" que maintenant...

Comment appréhendez-vous ce contact avec la mort? Cela vous fait-il réfléchir? Cela vous laisse-t-il indifférent?

J'aborde la fouille d'une sépulture avec l'oeil technique bien-sûr, mais aussi avec énormément de respect. Bien évidemment, de "la personne" ne reste qu'un squelette, qu'une "coquille vide", mais elle a vécu, donc j'ai le respect pour cette vie mais aussi pour les informations que le défunt va, malgré lui, nous apporter. Il y a une forme de gratitude...
Cela fait forcément réfléchir, même si en général on a peu de temps pour cela (enfin si on réfléchit ! mais plus "scientifiquement" que "philosophiquement"), mais si je commence à développer cet aspect là on va vraiment sortir du sujet

Je n'ai pas la même approche des incinérations, du respect toujours, bien évidemment, mais c'est moins "concret", moins "naturel" et j'ai d'ailleurs, à ce propos, le même genre de réflexions concernant les incinérations actuelles.

En fait je me rends compte que le sujet est très vaste et que je pourrais écrire tout une prose mais comme cela risque de devenir HS, je vais m'arrêter là (je suis modo je dois montrer l'exemple sapristi !)

[ansset]

je te comprend mieux Lokelani.
c'est peut être le titre qui m'a rendu mefiant.
si c'est ta passion ou ton boulot, alors il est plus en rapport avec la vie qu'avec la mort.
je m'explique.
en examinant un squelette ou une partie, on cherche à comprendre indirectement la vie et l'environnement de cet ancètre d'ou le respect que tu exprimes.

[invite179e6258]

le livre de Charlotte Roberts (Human remains in archaeology : a handook) aborde les questions d'éthique.