TEMPS ET MATIÈRE (1)
I) Définition du temps physique
Le temps consiste en transformations matérielles.
En dehors de conceptions métaphysiques qui font du temps une réalité extérieure au monde, une réalité absolue du domaine des dieux et du destin, le temps n'existe pour nous qu'en tant qu'apparaissent des successions ordonnées d'événements. Il y a d'ailleurs adéquation entre notre perception du temps et la réalité physique : on dit par exemple que le temps s'écoule, par analogie avec le spectacle d'un fleuve, comme le faisaient les Anciens. Or cette perception est tout à fait en accord avec le second principe de la thermodynamique : le fleuve ne retournera jamais vers sa source, parce que celle-ci représente un état d'énergie plus élevé (aux deux sens du terme) que celui de la plaine.
Ces transformations, cycliques ou non, par conséquent mettent en jeu des transferts d'énergie. Qui dit mobilisation d'énergie, implique nécessairement déperdition d'énergie : c'est le rendement de l'opération. Imaginons à l'inverse un monde où tout serait parfaitement gelé (zéro absolu). Aucun transfert d'énergie n'y est théoriquement possible. Par conséquent les choses demeurent en l'état, et donc le temps est aboli, puisque aucun événement n'est plus possible. Dans l'absolu, si même le mouvement interne des atomes s'arrêtait, aucun vieillissement ne serait envisageable.
On peut s'en faire une image approchée plus sensible en imaginant les spationautes endormis de "2001 Odyssée de l'espace". Pour eux, en état d'hibernation, le temps n'existe pas, puisqu'il ne parvient pas à leur conscience d'une part, mais même vu extérieurement à ceux-ci, le temps ne s'écoule pratiquement plus pour eux ; de par le ralentissement semblable à la mort de leur métabolisme, le vieillissement organique est retardé, figé.
Ceci nous apprend d'ailleurs un principe tout à fait général, conforme aux déductions de Carnot : plus un corps, quel qu'il soit, puisque les composés organiques ne sont matériellement pas différents en nature atomique des matériaux inorganiques, est "froid", moins il cède d'énergie au milieu ambiant. Ceci reste donc vrai pour le vivant.
[Par conséquent, pour que la matière puisse devenir vivante, il est indispensable que la nature offre un certain jeu, au sens où la mécanique présente un jeu nécessaire à son fonctionnement, ici transposé au temps physique. C'est là une question où physique cosmologique et métaphysique se rejoignent : pour que le vivant apparaisse, il était donc indispensable que soit créé, en un "creuset", un état de l'univers moins stable, donc sujet aux transferts d'énergie, que celui, "idéal" mais rigide, d'avant le Big Bang, lequel, rappelons-le, n'est qu'une élucubration, puisqu'il aboutit à une impossibilité théorique, mais qui, comme le concept de Dieu, a la vertu opératoire de laisser la question de "l'avant" en suspens. Ceci est un débat encore trop lointain.]
I) Relation entre temps et énergie
On objectera peut-être que, de même que la nature se régénère à chaque printemps, de même il est possible d'inverser la déperdition d'énergie, en se nourrissant, par exemple.
Ceci est intéressant mais ne considère pas le système dans sa globalité. L'énergie nécessaire est indiscutablement fournie à l'intérieur d'un système plus vaste, donc apparemment gratuite. Dans l'exemple précédent, il s'agit de l'énergie solaire. Or celle-ci n'est pas inépuisable, pas plus que des réserves de pétrole. Certes, il est surprenant de voir combien le bilan d'échanges et de transformations aussi multiples et importantes met en définitive peu d'énergie en branle. Le soleil fournit une part de son énergie à la plante, laquelle la retransmet à l'insecte, qui la restitue à l'oiseau, qui la rétrocède au prédateur, lequel à sa mort redonnera aux bactéries leur butin. Celles-ci à leur tour fourniront de l'énergie à la plante, etc. C'est pourquoi le monde habituel nous apparaît relativement stable : les orbites des planètes varient peu, et le bilan d'une explosion genre Hiroshima (chaleur, radiations, souffle, etc.) montre qu'un seul gramme de matière se volatilise, "disparaît" en énergie pure. Il y a donc indiscutablement déperdition, bien que globalement lente, à l'intérieur du système solaire. De même on pourrait transposer à la galaxie, puis au Grand Attracteur, puis à l'univers entier.
Ce qui par contre est beaucoup plus intéressant dans la remarque précédente, c'est qu'elle met en évidence le fait qu'un transfert d'énergie permet de placer un corps quelconque dans un état d'énergie plus élevé qu'il n'est à un moment donné. En fait, lorsque une voiture au repos accélère, elle utilise de l'énergie qu'elle prélève sur l'essence qu'on lui a fournie. Ce faisant, il faut remarquer qu'elle précipite la dégradation de l'essence, par rapport à l'évolution naturelle qu'aurait suivie celle-ci en dehors de l'explosion provoquée dans le moteur. Il y a donc équilibre.
Si l'on comprend ces deux idées de base : le temps est une dépense d'énergie, et un corps quelconque peut acquérir plus d'énergie que ce dont il disposait au départ, il faut admettre qu'il est donc possible d'influer sur le temps propre d'un objet particulier, soit qu'on ralentisse le temps de celui qui prélève de l'énergie, soit qu'on accélère le temps de celui qui en cède.
Cette remarque prend toute son importance et sa réalité quand on l'applique à la théorie de la relativité.
III) Énergie et Relativité
Partant de la constatation de l'isotropie de la lumière (cf. plus bas), Einstein en vient à déduire que les règles peuvent être plus courtes (ou plus longues) et les horloges ralentir (ou accélérer) selon le référentiel où l'on se trouve. De là vient également l'anecdote (encore plus ou moins virtuelle) de l'astronaute qui, parti deux ans à une vitesse proche de la lumière, retrouve sa planète vieillie de deux cents ans. On voit qu'on arrive à la même conclusion, ralentissement ou accélération du vieillissement, par la compréhension de ce qu'est le temps.
En effet, celui qui absorbe de l'énergie du milieu extérieur augmente par là même sa provision, par rapport à celle qu'il doit normalement restituer à un milieu ambiant donné. C'est par exemple le cas des mésons "pi" créés dans la haute atmosphère, dont la durée de vie en laboratoire n'est que de quelques millionièmes de seconde, et ne devrait autoriser de trajet qu'inférieur à quelques centaines de mètres. Or on enregistre des mésons "pi" naturels parvenus depuis l'espace jusqu'à l'intérieur de la croûte terrestre. Notons tout de suite que cette acquisition d'énergie n'est pas linéaire : elle est d'autant plus difficile que d'une part on arrive, dans le cas de la vitesse, à une limite de transmission (les échanges se faisant à la vitesse de la lumière, lorsqu'on se trouve à ladite vitesse, il n'y plus d'échange accrescent possible) ; d'autre part la déperdition, toujours selon Carnot sera "exponentiellement" d'autant plus grande qu'on se trouvera à un potentiel élevé.
Remarquons tout d'abord de ce qui précède que la vitesse est un des témoins du niveau d'énergie d'un corps. Par exemple, dans le cas de la voiture, le fait qu'elle parvienne à une certaine vitesse par rapport à l'état de repos initial, montre qu'elle a acquis de l'énergie. Lorsqu'elle se stabilise à une vitesse de croisière, elle ne dépense plus l'énergie du milieu ambiant (au sens exprimé plus haut de dégradation de l'essence), en dehors bien entendu, de celle consacrée aux frottements parasites. Mais qu'elle vienne à heurter un obstacle au repos, tel un mur, et elle restituera l'énergie emmagasinée, sous forme de bruit (ondes sonores), déformation des solides (énergie de forme communiquée au mur, au véhicule) et chaleur.
Même lorsque l'acquisition d'énergie se fait "sur place", il y a augmentation de la "vitesse interne" des molécules. C'est pourquoi on observe qu'une pompe à vélo s'échauffe, du fait de l'augmentation des chocs de molécules dans l'air comprimé, énergisé par les muscles de l'utilisateur. C'est pourquoi aussi on observe une plus grande liberté des composants d'un corps donné quand on lui communique de l'énergie, sous forme de chaleur entre autres. En ce qui concerne l'eau par exemple, on passera par apport d'énergie, de la glace à l'eau liquide, puis à la vapeur d'eau (gaz), enfin au plasma.
Il y a donc corrélation également entre le niveau d'énergie et le degré de liberté des composants d'un matériau quelconque. Remarquons encore que ce plus grand degré de liberté concerne des corps matériels de plus en plus ténus, au point qu'on en arrive à hésiter entre particule et onde, dans le cas des photons par exemple. Seul ce genre de particules est autorisé "naturellement" à approcher la vitesse luminique.
Si l'on se rappelle par ailleurs que l'ensemble des corps matériels que nous connaissons sont tous issus d'une dégénérescence énergétique par rapport à un matériau de base (l'hydrogène, dans la loi de Prout - Langevin), on s'aperçoit que notre monde tient dans un domaine possible de jeu de la dégradation entre matériaux, par rapport à une référence que l'on pourrait induire et caractériser, de façon convergente, en remontant jusqu'à la limite indiquée par la vitesse de la lumière, dans le rapport entre masse, vitesse et énergie.
En effet, s'il faut apporter, dépenser, de l'énergie pour obtenir une transmutation vers le "haut", à rebours de la dégénérescence (de l'oxygène vers l'hydrogène par exemple), il le faut également pour obtenir des matériaux hyper lourds, qui ne durent d'ailleurs que quelques millionièmes de seconde, avant de restituer l'énergie reçue en trop par rapport à l'équilibre du milieu ambiant, et de retomber dans un état plus stable. Il s'agit là de la limite inférieure du domaine, qui va actuellement de la lumière au plutonium, ou même à l'élément 112. Notons cependant que les éléments radioactifs sont au-delà du point neutre bas de la dégénérescence. Cette limite inférieure est un indicateur de l'évolution énergétique de l'univers. Il serait sans doute intéressant de calculer les conditions d'un monde où l'existence durable de tels matériaux serait possible.
Mais cette référence d'où serait issue toute la matière, y compris la lumière, quelle peut-elle être ?
IV) Univers matériel
C'est ici qu'il me semble opportun de réhabiliter aujourd'hui la notion d'éther. Cette notion est tombée en désuétude depuis un siècle, après la publication par Einstein de sa théorie de la Relativité. Or lorsqu'on lit cet ouvrage, et d'autres, on trouve non une réfutation de cette idée, mais que selon Einstein, elle était inutile pour décrire le comportement isotrope de la lumière dans le vide (c'est à dire que la lumière a une vitesse constante quel que soit le sens de déplacement de la source ou de l'observateur lui-même). Si l'on poursuit plus attentivement, on constate qu'Einstein explique comment se comporte la lumière, mais non ce qu'est la lumière.
L'isotropie de la lumière, démontrée par l'expérience de Michelson, est "décrite" de l'extérieur par les formules de Lorentz, exposées et utilisées par Einstein. Selon ces formules, les coordonnées d'espace et de temps sont proportionnelles à 1 / V (1 - v2/c2). Quand v tend vers la vitesse de la lumière c, le dénominateur s'annule, et l'expression devient infinie, d'où impossible à atteindre. Comme le dit Einstein lui-même, l'adéquation de la formule à la réalité n'est pas étonnante, car elle a été écrite de façon à intégrer l'isotropie de la lumière.
Le fait d'enfermer la réalité dans un réseau théorique permet de déduire et prévoir un certain nombre de propriétés et de comportements de la matière et du monde, ce qui explique le succès de cette théorie, mais n'en fait pas pour autant un instrument de compréhension.
La définition de l'éther que je propose donc, en tenant compte de ce qui a été dit plus haut sur le caractère de plus en plus ténu des éléments de plus en plus énergisés, consiste en ce que celui-ci serait bel et bien de la matière, mais imparticulée, un peu, pour reprendre une image, ce que le verre amorphe est à un réseau cristallin. La mise en forme de ce substrat serait le résultat d'ondulations traversant l'univers à une fréquence ad hoc, à l'instar de ce qui se passe dans certaines cellules photoélectriques : une fréquence adéquate déclenche le capteur.
Cette idée d'éther ne me semble pas plus farfelue, même si elle n'est pas étayée scientifiquement de ma part, que les dimensions pléthoriques ou les super cordes qui fleurissaient dernièrement (super cordes qui pourraient ici réapparaître en tant qu'ondes mentionnées plus haut).
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