Je serais incapable de lister toutes les astuces que les ingénieurs ont imaginé pour essayer d'augmenter la vitesse des avions depuis l'invention du moteur à réaction au tournant des années 1930-40. Avec des développement comme le Messerschmitt Me 262 et le missile balistique V-2, l'imédiate après guerre a été une période d'incroyable effervescence dans les bureaux d'études du monde entier, pas seulement en Russie et aux États-Unis.
La solution que tente de concrétiser Reaction Engines Limited n'a été inventé qu'en 1982, par Alan Bond, et n'a pas été expérimentée depuis, sur aucun appareil. Entendons-nous bien, il y a eu des essais dans les années 80 et 90, avec le cycle KLIN et l'ATREX-500, mais rien qui ressemble de près ou de loin au SABRE ni au SCIMITAR. C'est une solution tout à fait originale. Il est donc logique que ce soit REL, la compagnie qui a la meilleure expertise dans ce domaine, qui envisage le vol hypersonique plutôt qu'Airbus qui a déjà fort à faire avec les avions à turboréacteurs.
Si Airbus et Boeing ne se lancent pas dans le supersonique, c'est parce qu'ils n'ont aucune idée de la solution à apporter aux problèmes auxquels ont dû faire face les ingénieurs qui se sont cassés les dents sur la question du vol hypersonique civile. Peut-être que REL tient finalement cette solution. Du moins ils semblent en être convaincu, au même titre que certains ingénieurs principalement Américains et Australiens sont aujourd'hui convaincu que les superstatoréacteurs que l'on développe depuis le projet Hyshot pourront un jour faire de même.
Personnellement, je ne peux m'empêcher de penser que les idées du moteur à réaction pré-refroidi (precooled jet engine) d'une part, et du moteur à réaction profondément refroidi (deeply-cooled jet engine) d'autre part, ont l'air bien plus réalistes.
Tant qu'on aura pas testé les échangeurs de chaleur développé par REL, aucun motoriste au monde ne voudra mettre quelques centaines de millions d'euros pour explorer ce nouveau domaine en grande partie inexploré, à mi-chemin entre l'aéronautique et l'astronautique.
Ce n'est pas parce que les années 60 n'ont pas trouvé les solutions pour concrétiser ces rêves de navettes et de stations spatiales, ou de voyages supersoniques ou hypersoniques que les ingénieurs ont arrêté de penser que ce serait génial si on pouvait diviser par 5 ou 10 le temps de voyage aux antipodes.
Les limites de la biosphère et les contraintes énergétiques ne sont qu'un faux problème. Ces contraintes ne signifient pas que la mise en orbite à peu de frais et/ou les compagnies aériennes possédant des avions hypersoniques sont des chimères... Le problème est celui de la connaissance. On n'a encore aucune certitude quant à la solution à apporter à ces 4 problèmes : réchauffement climatique, crise de l'énergie, vol hypersonique civil, mise en orbite pas chère. Pour le sujet qui nous occupe, les moteurs SABRE et SCIMITAR sont justes de nouvelles tentatives.
Il n'y a rien d'étonnant à ce que les années 50 et 60 ont été si optimistes, quand on observe la quantité phénoménale de solutions qui avaient été théorisées par les ingénieurs, tout autant de territoires inexplorés de l'aéronautique, qui ont tous été invalidées au regard des capacités techniques et les connaissances disponibles à l'époque.
À mon sens, cet argument que les ingénieurs de REL pèchent par optimisme ne tient pas. À ce compte-là autant décréter immédiatement un retour massif aux voyages transcontinentaux de passagers en bateau. Ou encore, pourquoi ne pas critiquer l'optimisme des médecins qui trouveraient une nouvelle manière de soigner le cancer.
Tu vas sans doute me dire que tu approuves le fait que cette nouvelle piste du moteur à réaction prérefroidi soit explorée, mais en même temps, tu sembles abandonner tout espoir que cette solution soit enfin la bonne. Je connais ton pessimisme à ce sujet, mais ne trouves-tu pas que passer constamment d'un avis (oui c'est bien de chercher dans cette voie) à l'autre (non, ça ne sert à rien, tout a été tenté dans les années 50-60), est plutôt déroutant ?
Pas plus difficile que d'envisager un écran faisant office de hublot derrière le siège des passagers. Encore moins difficile que d'imaginer des pilotes atterrir "aux instruments" pendant un épisode météo défavorable. Il est sûrement envisageable de remplacer le hublot par des caméras extérieures. Si on peut le faire pour les passagers on peut le faire pour les pilotes.
Cordialement.
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