Bonjour / Bonsoir.
Je ne sais pas si vous en avez entendu parler mais il y a une thèse qui a connu un certain succès dans les médias dernièrement. Il s'agit de la thèse de Priscille Touraille, consacrée au dimorphisme sexuel dans l'espèce humaine, et qui attaque cette question sous l'angle de l'anthropologie évolutive. Cette thèse a été soutenue en 2005 et publiée en 2008 sous forme d'un livre.
Je vais essayer de résumer le propos de l'auteur, tout en gardant à l'esprit que les médias généralistes sont mauvais en vulgarisation scientifique :
L'auteur part du constat que la mortalité en couche est plus importante chez les femmes de petite taille que chez les femmes de grande taille, elle en conclut donc que l'évolution aurait du favoriser les femmes plus grandes. Or les femmes restent plus petites en moyenne que les hommes, alors qu'il est censé s'exercer sur elles une pression sélective qui favorise les grandes tailles. Elle postule donc que ce paradoxe s'explique par une inégalité alimentaire, c'est à dire que les hommes se seraient accaparés les protéines et les aliments les plus riches, créant ainsi une pression sélective qui favoriserait cette fois les femmes de plus petite stature, qui ont des besoins nutritionnels plus réduits que les grandes.
Nous avons discuté de cette hypothèse sur un autre forum, la discussion était assez animé, et j'ai vivement attaqué cette thèse. Je pense avoir été convaincant, mais je me suis demandé : ne suis-je pas allé un peu vite en besogne ?
Donc je voudrais confronter mon raisonnement à des gens calés en évolution pour qu'on me dise si je n'ai pas dit trop de bêtises Voici le discours que j'ai tenu :
http://www.rfi.fr/science/20171124-j...-nutritionelle« Le bassin est dit « adapté » à la bipédie chez la lignée Homo mais il n’est pas adapté à l’accouchement, poursuit la chercheuse. Le seul moyen qu’il le soit, est de grandir. Et ce sont sur les femmes que s’exercent les pressions de sélection naturelle pour augmenter de taille ». « C’est vraiment là-dessus que repose mon argumentaire, insiste-t-elle : si ce sont effectivement les femelles qui « drivent » l’évolution de l’espèce vers une grande taille, elles devraient être, dans le sens des modèles de la biologie de l’évolution, plus grandes, ou au moins aussi grandes, que les hommes »
Les raisonnements du type "l'évolution aurait nécessairement du conduire à ça" ou même "l'évolution aurait du favoriser tel caractère et pas tel autre" sont toujours très scabreux. C'est prendre le problème à l'envers voire une vision finaliste de l'évolution.
Le système est tellement complexe et chaotique - des centaines de millions d'organismes infiniment variés interagissent entre eux et avec leur environnement, pendant des centaines de millions d'années - qu'il est illusoire de prétendre trouver un caractère qui n'a pas été favorisé mais qui AURAIT DU l'être, et plus encore de faire une prédiction sur le facteur qui expliquerait pourquoi il ne l'a pas été.
Et c'est encore plus compliqué dans le cadre obstétrical, puisque les avantages et désavantages évolutifs de la mère et de l'enfant sont intriqués.
Le second raisonnement qui me pose problème c'est celui-ci :
http://www.rfi.fr/science/20171124-j...-nutritionelle« Moi, je suis partie du constat, argumente la chercheuse au téléphone, que d'une part, il n’y avait pas d’hypothèse convaincante du point de vue des sciences de l’évolution pour expliquer le dimorphisme sexuel de stature dans l’espèce humaine.
Là encore c'est prendre le problème complètement à l'envers. L'existence d'un dimorphisme n'est pas étonnante. Il n'y a pas besoin d'expliquer qu'il y ait une différence - le dimorphisme sexuel existe dans à peu près toutes les espèces sexuées, et il s'explique sans problème par la sélection sexuelle. C'est la stricte égalité qui serait surprenante. Par exemple on a pas besoin de chercher une explication à pourquoi la Terre est plus grosse que Mars ou que Vénus. Par contre si un jour tu trouves un système planétaire où toutes les planètes ont des tailles strictement identiques, là oui tu m'appelles. Là la NASA pourra faire une conférence de presse
Surtout que pour les primates le mâle est plus grand que la femelle chez presque toutes les espèces, donc l"hypothèse la plus parcimonieuse c'est que ce dimorphisme a été hérité de nos vieux ancêtres communs. Pas besoin de chercher des explications farfelues.
Mon raisonnement est-il valide ? Est-ce que la thèse que j'attaque est défendable du point de vue de l'évolution ? Qu'en pensez-vous ?
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