L'une des conditions du développement durable serait la diminution mondiale des écarts de niveau de vie, dans une perspective pluriséculaire. On peut rêver d'une homogénéisation complète, mais je crains que si ceci se réalisait, l'humanité ressemblerait à une ruche, alors que justement c'est la diversité qui fait son charme. Donc, souhaitons l'égalité universelle des chances, mais pas celle des résultats, qui relève de l'utopie communiste.
Malheureusement, l'évolution actuelle de l'humanité ne va pas dans le sens souhaitable. Presque dans tous les pays, les écarts entre les plus et les moins riches se creusent et s'accompagnent de la séparation géographique des deux catégories, qui correspondent souvent aussi à des appartenances ethniques différentes. En politiquement correct on appelle "quartiers" les regroupements locaux des moins riches, qui apparaissent dans toutes les grandes agglomérations mondiales et dont l'isolement progressif fait penser à celui des ghettos, terme qui signifiait l'isolement imposé aux Juifs au moyen âge. Ces regroupements locaux secrètent des structures de pouvoir interne de type mafieux, qui se superposent à celles légales et s'efforcent de l'empêcher de fonctionner correctement. Étant des regroupements de pauvres, ces quartiers attirent mécaniquement les immigrants qui recherchent des logements économiques et qui contribuent à la ghettoïsation. Appelons, si vous voulez, ces agglomérations les "ghettos locaux", "favellas" sonnerait trop brésilien.
Le phénomène décrit se produit de façon similaire, mais à grande échelle et dû à d'autres causes, au niveau mondial. Certains pays se sont transformés peu à peu, à cause de leur retard économique, une colonisation et une décolonisation maladroites et coupables, une démographie galopante, une richesse minière inaccessible à la population, deux ou plusieurs ethnies incompatibles ou toute autre cause, en organisations de type mafieux mises en coupe réglée par des chefs d'état ou plusieurs chefs de faction qui méritent la qualification de criminels. Ces pauvres pays méritent le nom de "ghettos mondiaux".
Du côté des riches, il se produit un phénomène symétrique: les pays riches ont tendance à s'isoler de l'afflux des immigrants qui ont comme destination presque fatale les ghettos locaux et les individus riches se regroupent dans des quartiers "sécurisés", pour s'isoler de la criminalité vraie ou supposée des ghettos de pauvres. Ces actions augmentent l'isolement entre les deux populations.
La question est: peut l'humanité suivre un développement durable, alors que parmi tous les obstacles qui tendent à l'en empêcher, figurent ces ghettos qui sont, eux, en développement continu et apparemment durable? Ce sont, de petits furoncles à grands abcès, capables de gangrener la société mondiale, déjà mal en point!
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