Fossilisation

[alaink]

Bonjour,
je me demandais quel etait l'etat des recherches sur le(s) mecanisme(s) de fossilisation (mineralisation) proprement dit.

S'agit-il d'un mecanisme de "moulage" superficiel de tissus morts ou bien quelque chose de plus subtil , à l'echelle moleculaire?

Par exemple existe-t-il des fossiles "récents" (quelques décennies). Y a t-il un "age minimal" pour un fossile?

Existe-t-il des fossilisations partielles (un bout d'os petrifie d'un seul coté peut-etre, ou bien sur une profondeur faible)?

Enfin, plusieurs recherches paleontologiques utilisent des analyses statistiques de populations d'animaux disparus, connus uniquement par leur fossiles. La rarete et la variete des conditions permettant la fossilisation n'introduit-elle pas forcemment des biais? Comment cela est-il pris en compte?

Desole pour la rafale de questions, mais pour une fois qu'on tient un specialiste...
-----

[invite207f8801]

Bonjour,

Les mécanismes de la fossilisation restent encore un peu mystérieux, mais les géochimistes ont fait de grands progrès en ce domaine. Le "moulage" superficiel est en effet une possibilité. En ce cas, l'objet d'origine (os, coquille, voire parties molles) est détruit et le vide qui en résulte est rempli de sédiment qui se transforme en roche. Cela peut donner des fossiles assez frustes, mais aussi des choses d'une précision inattendue (par exemple moulages endocrâniens naturels, où la roche reproduit fidèlement l'aspect du cerveau, qui lui a disparu).
Plus souvent sans doute, il se produit des transformations à l'échelle moléculaire, avec remplacement plus ou moins complet des molécules d'origine par d'autres venant du milieu dans lequel le reste animal ou végétal se trouve après enfouissement dans des sédiments. On peut ainsi obtenir des fossiles complètement transformés en silice. Le phénomène de fossilisation peut être assez rapide à l'échelle géologique. Au congrès où j'étais à Oxford la semaine dernière, Clive Trueman, un géochimiste, a affirmé que la fossilisation était un phénomène qui se réalisait en environ 10 000 ans. D'un point de vue chronologique, la limite n'est pas facile à placer. Il exise des fossiles très anciens très bien conservés, et des fossiles plus récents qui ne le sont pas. Pour les spécimens les plus récents, on parle parfois de "subfossiles" (ex: les oiseaux et lémuriens géants de Madagascar, dont certains n'ont guère que quelques centaines d'années d'ancienneté).
La fossilisation partielle peut exister. Je me souviens avoir vu en Thaïlande, il y a quelques années, un tronc d'arbre fossile qui était silicifié à une extrémité et carbonisé à l'autre. Mais c'est plutôt rare.
Votre remarque sur l'utilisation des statistiques est exacte. Vu que beaucoup d'organismes échappent plus ou moins complètement à la fossilisation, cela introduit des biais dans les statistiques que l'on peut faire. Elles peuvent être à peu près fiables si on se restreint à des calculs à l'intérieur d'un même gisement, ou d'une même formation géologique. Dès lors qu'on compare des assemblages fossiles un peu éloignés dans le temps, les risques d'erreur augmentent. On a ainsi raconté pas mal de choses fausses sur le prétendu déclin des dinosaures vers la fin du Crétacé, en comparant des sites d'âges différents qui n'avaient pas été échantillonnés de la même manière. Tout cela me rappelle un auteur anglo-saxon dont j'ai oublié le nom qui disait (traduction approximative) qu'il existe trois sortes de mensonges: les mensonges, les mensonges éhontés et les statistiques...

Eric Buffetautz