Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être
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Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être



  1. #1
    invite881cd0dd

    Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être


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    Bonjour à tous!

    Je suis en train de commenter un passage de la Volonté de puissance de Nietzche, où l'auteur transforme le "cogito ergo sum" de Descartes en "cogito ergo est". J'ai compris que Nietzche est en désaccord avec Descartes car selon lui, le cogito est une sorte de tautologie, on invente le "je" qui n'est en réalité qu'une espèce d'outil grammatical. Nietzche écrit que le cogito permet seulement d'affirmer l'existence de "l'être dans son activité représentative". Or les représentations étant changeantes, instables, la certitude fondamentale de l'être est donc fausse puisque ce par quoi il est défini, c'est-à-dire son activité représentative, nécessite un objet de la représentation et est ainsi relatif.
    Est-ce que ce que j'ai compris vous semble juste? Y a t-il une contradiction quelque part?

    J'ai surtout un problème pour comprendre la dernière partie
    Ce qui est clair en soi c'est que la représentation n'est pas un état stable, identique à soi-même, est relatif (il faut que la chose conditionnée, la pensée, ait un contenu pour être la pensée). Telle est pourtant la certitude fondamentale de l'être! Or la représentation affirme justement le contraire de l'être. Mais cela ne prouve pas qu'elle ne soit pas vraie.
    Qu'est-ce "la chose conditionnée"? La pensée mais pourquoi "conditionnée"? Est-ce que la certitude fondamentale fait référence à l'existence de soi-même selon descartes, qui serait à l'origine de tout sauf de sa propre origine, c'est-à-dire qui serait absolu tout en fondant tout le reste? Dans ce cas-là, dans la dernière phrase, que désigne le elle? La représentation ou la certitude?


    Merci d'avance pour vos réponse.

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  2. #2
    invite7863222222222
    Invité

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Bonjour,

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    Qu'est-ce "la chose conditionnée"?
    Ici la chose conditionnée désigne la première partie de la proposition : "je pense, donc je suis", soit le "je pense", car Nietzsche dit et critique que le cogito affirme que penser est une condition pour être.

    Les philosophes conceptualisent beaucoup, mais c'est plus un effet littéraire (voir un problème de traduction) qu'autre chose.

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    Est-ce que la certitude fondamentale fait référence à l'existence de soi-même selon descartes, qui serait à l'origine de tout sauf de sa propre origine, c'est-à-dire qui serait absolu tout en fondant tout le reste?
    Pour moi, la certitude faisait référence à la certitude que la représentation est un état stable.

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    La représentation ou la certitude?
    Pour moi, la représentation.

  3. #3
    inviteb3f6b757

    Thumbs up Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    D'une critique de l'ego cartésien laissant place à une conception de l'immanence,

    ȵ Pour Descartes, le cogito est quelque chose d'unique.
    ȵ Toute l'information transite par la glande épinale et produit ce que l'on conçoit comme la pensée unifié.
    ȵ Le dualisme cartésien consiste donc à dire qu'il y a le corps et l'esprit qui sont deux entités distinctes, mais la conscience qui est l'esprit est une chose unique qui a une unique volonté.

    ȵ Nietzsche s'oppose totalement à cette idée, pour lui le ''je'' n'est qu'une illusion du langage.
    ȵ Le moi est dans les faits constitués d'une multitude d'instincts qui sont dans un combat incessant pour déterminer le plus fort.
    ȵ Comme la vie, le moi est un combat perpétuel entre des forces différentes.
    ȵ La volonté de puissance est en tout et le monde pour Nietzsche n'est constitué que d'apparence.
    ȵ Nous croyons que nous sommes un moi unique et le langage nous y invite, sauf que dans les faits c'est un grand nombre d'instincts qui nous constituent et le moi unifié ne l'est que parce que certaines forces l'emportent sur les autres à certains moments.

    ȵ Pour Descartes, le je n'est pas la cause de la pensée ; mais ontologiquement, la pensée se réduit au je.
    ȵ Donc la pensée est unifiée, ce qui n'est pas le cas chez Nietzsche.
    ȵ Il s'agit de se défaire de notre condition de prisonniers des lois grammaticales.
    ȵ Penser est une action, toute action pose un sujet actif, donc penser pose un sujet actif.
    ȵ Le sujet actif est ici le quelque chose dont les logiciens devraient pouvoir se passer.
    ȵ Car le sujet actif ne fait pas venir les pensée quand il le veut se sont elles qui viennent à lui.
    ȵ Que le sujet soit celui qui pense ce n'est pas aussi évident que le laissait croire le doute cartésien quand il affirmait je pense donc je suis.
    ȵ Pour Nietzsche, les pensées s'imposent par leur puissance propre, si mon attention est attiré vers un objet particulier de la pièce c'est que sa présence aura triomphé sur les autres, mais puisque la lutte est incessante, ma pensée est dirigée d'un instant à l'autre, d'un objet à l'autre.

    ȵ Ce sont des instincts donc ils n'ont pas nécessairement été vécus dans notre vie puisque Nietzsche laisse une grande place à l'atavisme dans sa philosophie, c'est-à-dire qu'il faut un long élevage pour instaurer des manières de pensées, pour que des instincts gagnent en force comme par exemple le ressentiment chrétien qui nous oblige à dissimuler nos instincts forts, forces réactives dont Socrate se voit être la figure, et nous oblige à penser comme la masse et donc de la manière dont les faibles voient la société.
    ȵ Les instincts sont des pulsions comme la pulsions de vie et celle de mort, mais ils sont aussi le monde en tant que tel, car chez Nietzsche tout est Volonté de puissance.
    ȵ Ce principe tient autant au vivant qu'au non vivant, tout est en relation dominant-dominé, le je n'y échappe pas.
    ȵ Tout instinct est apparence, l'apparence est le monde, donc quand je parle de détermination du plus fort, je veux simplement dire qu'un instinct triomphe à un instant, déterminant ainsi mon monde à un moment donné ; ma pensée, le moi comme impression d'une unicité qui n'existe dans les faits pas.

    ȵ Le plus important est surtout l'idée que le je est vu comme une entité ontologique chez Descartes, ce que Nietzsche réfute soutenant que Descartes n'a pas assez douté et que c'est le langage qui par ses limites nous trompe, mais dont on ne peut se départir pour son utilité sociale et pour ne pas se perdre dans un monde sans aucun repère.

    ȵ Comment pourrais-je savoir qu'il ne s'agit pas d'un "vouloir", d'un "sentir" ?
    ȵ Nietzsche veut simplement dire qu'en posant le je comme cause de la pensée il faut déjà avoir tranché la question de savoir ce que c'est que penser, sinon nous resterons toujours dans l'incertitude, ce ne pourrait être qu'une illusion de notre volonté, ou même une simple intuition sans aucune base solide.

    ȵ Nietzsche réfute le principe de cause à effet, c'est pourquoi le je ne peut être cause de la pensée, il faut poser un autre principe qui dans son cas est celui de la Volonté de puissance, donc la lutte des instincts.
    ȵ La pensée n'est pas vraiment cause d'elle-même, puisqu'une chose ne peut être sa cause et son effet, sauf peut-être Dieu selon les scholastiques.
    ȵ Puisque Nietzsche remplace le principe de cause efficiente par celui de lutte, la pensée devient plutôt la domination de l'instinct le plus fort à un certain moment ; on pourrait donc dire que la pensée est cause d'elle-même, puisqu'en fait elle s'impose plutôt que d'être créée par un individu, mais puisque c'est de la philo les mots sont important.
    ȵ C'est celui qui s'impose aux autres qui devient conscient, celui qui sera le plus fort, l'instinct le plus puissant.
    ȵ Pour bien comprendre il faut cependant garder en tête que chez Nietzsche le monde n'est qu'apparence, donc lutte des instincts, tout est instinct, il n'y a pas de réalité au sens ou on l'entend habituellement, car chez lui tout est dans un constant mouvement ; l'homme, par le langage, perd la multitude de ces instincts ; il ne pourra percevoir ce qu'est le monde que par l'attitude tragique, mais là c'est un autre sujet.

  4. #4
    invite7863222222222
    Invité

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Citation Envoyé par Causalement Voir le message
    le monde pour Nietzsche n'est constitué que d'apparence
    [...]
    l'apparence est le monde
    Il me semble plus exacte de dire "la représentation du monde" et non "le monde" sinon cela ferait de Nietzsche un solipciste ce qu'il n'était pas.

    Citation Envoyé par Causalement Voir le message
    Nietzsche réfute le principe de cause à effet
    Je comprends cela dans ce sens : il réfute ce principe comme moteur de la volonté de puissance. Mais si tu as des précisions je suis preneur .
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 08/11/2009 à 14h50.

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    invite881cd0dd

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Merci beaucoup pour vos réponses qui sont venues beaucoup plus rapidement que je ne le pensais (remarquez, ça m'arrange).

    Je suis également curieuse de savoir ce que vous (Causalement)entendez par
    Nietzsche réfute le principe de cause à effet
    et si vous êtes d'accord avec Jreeman ou pas pour mon hésitation sur
    Est-ce que la certitude fondamentale fait référence à l'existence de soi-même selon descartes, qui serait à l'origine de tout sauf de sa propre origine, c'est-à-dire qui serait absolu tout en fondant tout le reste?
    Encore une fois merci!

  7. #6
    invite881cd0dd

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Ah oui, j'ai oublié de préciser pourquoi la réponse de Jreeman me trouble.
    Pour moi, la certitude faisait référence à la certitude que la représentation est un état stable.
    Or d'après ce que j'ai compris à la lecture des Méditations (mais il se peut que je me trompe), Descartes s'accorde à dire que les reprsentations nous trompent et qu'elles sont changeantes. Il cite ainsi plusieurs exemples comme le morceau de cire solide, qui sent les fleurs et qui résonne quand on le frappe, prend une toute autre apparence quand il fond. Mais peut-être suis-je en train de confondre apparence et représentations? Est-ce la même chose?

  8. #7
    invite7863222222222
    Invité

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    Il cite ainsi plusieurs exemples comme le morceau de cire solide, qui sent les fleurs et qui résonne quand on le frappe, prend une toute autre apparence quand il fond.
    Pour Descartes, l'ontolongie ne doit pas se fonder sur les apparences, pour lui les choses sont au delà des représentations, grâce à l'entendement (l'exemple de la cire : http://www.cde4.com/fra/respedago/philosophie/1800.htm)

    Pour Nieztsche, en quelque sorte, ce qui existe, ce sont les représentations, et non ce qu'elles désignent, qui sont des objets instables.

    Dans l'exemple de la cire, si on considère la matière créée par un processus humain et non naturel, peut-on appeler cela de la cire ? Ce n'est pas évident : nos représentations ne permettent jamais de désigner clairement ce qui existe en soi.

  9. #8
    invite881cd0dd

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Pour Nieztsche, en quelque sorte, ce qui existe, ce sont les représentations, et non ce qu'elles désignent, qui sont des objets instables.
    Mais est-ce que Descartes affirme que les représentations sont stables (bien que possiblement fausses)? N'est-ce pas plutôt l'âme ou l'esprit qui produit ces représentations qui est stable et permanent?

  10. #9
    invite7863222222222
    Invité

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    Mais est-ce que Descartes affirme que les représentations sont stables (bien que possiblement fausses)?
    La représentation par l'esprit, l'entendement (et non la perception) sont pour lui stables.
    Voici un extrait de Descartes :
    L'intelligence cherche la régularité d'une pluralité de faits; ce qui en eux pourrait être constant et universel
    Pour Nietzsche, rien ne dit qu'il y a quelque chose d'universel derrière cette représentation par l'esprit.
    Dernière modification par invite7863222222222 ; 08/11/2009 à 16h57.

  11. #10
    invite881cd0dd

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Au temps pour moi, c'est bien que je confondais deux notions différentes. Merci de m'avoir accorder de votre temps Jreeman.
    En attendant une réponse de Causalement, (un peu plus de connaissances de nietzche ne me fera certainement pas de mal).

    Bonne soirée à vous.

  12. #11
    invite7863222222222
    Invité

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    Citation Envoyé par rosarum Voir le message
    Au temps pour moi, c'est bien que je confondais deux notions différentes.
    Si tu confondais, c'est bien justement parceque Nietzsche a relevé que ce n'était pas clair chez Descartes.

    Pour lui, Descartes dans sa réflexion sur l'ontologie des choses, s'est embarrassé, empêtré de barrière inutile notamment avec sa conception dualiste du corps et de l'esprit.

    Toujours pour lui, faire l'hypothèse d'un monde de concepts construits et fait pour l'homme est tout à fait arbitraire et inutile, et cela a des implications aussi dans le domaine de la métaphysique .

  13. #12
    invite0e01a430

    Re : Nietzche critiquant le cogito; sa conception de l'être

    bonsoir, je dois également étudier et je n'arrive pas à formuler le probleme philosophique de ce texte. Merci pour votre aide.

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