Salut a tous,
J'ouvre ce fil pour essayer de resumer mes pensées et questionnements sur deux choses distinctes : la notion d'indiscernabilite en mécanique quantique et la phénoménologie de statistique quantique qui, a priori, sont deux choses différentes meme si identifiées l'une a l'autre en permanence. Il est probable que mes interventions récentes sur le sujet en ai agace plus d'un et je souhaite preciser au mieux ma pensée dans ces lignes.
- Indiscernabilite : a ce que j'en comprends, la notion d'indiscernabilite en MQ revet un caractère absolu, avec lequel j'ai assez de mal d'ailleurs, et apparait lorsqu'on a des particules identiques que l'on ne peut pas "tagger" pour identifier une particule donnée par rapport a d'autres; elles sont alors dites indiscernables (par opposition conceptuelle aux particules classiques considérées comme toujours discernables meme si parfaitement identiques). L'utilisation de ce caractère absolu semble recquerir a priori une description potentiellement complete (via l'utilisation d'un ECOC adapte; Ensemble Complet d'Observables qui Commutent).
- Statistiques quantiques : les statistiques quantiques sont observées de fait pour deux types de particules et sont résumées par les statistiques de Fermi-Dirac et de Bose-Einstein qui en substance interdisent d'avoir deux particules dans le meme état quantique (décrit par un ECOC) dans le premier cas et favorisent un grand nombre de particules dans le meme état quantique pour le second.
Je me permets de faire une digression et de définir ce que veut dire "identique" (selon moi) :
- Identique : deux particules sont identiques si leur état quantique peut être décrit par le meme ECOC et que le spectre de chaque observable de cet ECOC est le meme également.
Deux particules sont alors identiques et discernables si elles sont décrites par les memes ECOC et spectres et si il existe au moins une observable individuelle qui est conservée au cours du temps par la dynamique de l'ensemble du système i.e. , .
Dans le cas d'un système de deux particules identiques discernables, l'hamiltonien du système en question commute par ailleurs avec l'opérateur permutation des identités ou labels des particules i.e. on echange littéralement tous les nombres quantiques caractérisant l'état de la particule 1 avec ceux de la particule 2 et on voit que le résultat est le meme.
En utilisant les règles de symétries usuelles de la mécanique quantique, avec l'opérateur de permutation des labels qui commute avec le hamiltonien du système implique qu'ils partagent des vecteurs propres. Ainsi, comme cela est rationalise dans le Landau-Lifshitz de MQ, il est naturel de chercher des vecteurs d'états qui sont soit symétriques soit anti-symétriques sous la permutation de deux particules. Faire un choix de la valeur propre de l'opérateur permutation sélectionne un type de particule (pour ce système a deux particules) qui est soit fermionique soit bosonique.
Lorsqu'on passe a N particules identiques et potentiellement discernables, avoir l'hamiltonien du système qui commute avec n'importe quel permutation de particules implique que le vecteur d'état le plus general satisfait une parastatistique (ou la valeur propre choisie pour chaque permutation est "aléatoirement" 1 ou -1 et non tout le temps la meme). On peut imposer, pour simplifier, que la valeur propre choisie est toujours la meme (cela nécessite un apport extérieur plus ou moins justifie base sur le postulat de symmetrisation ou le théorème spin-statistique qui relie alors un type de valeur propre a un type de statistique).
Ainsi, il me semble qu'il n'est absolument pas nécessaire pour N particules d'être indiscernables pour être décrites par un état complètement (anti)symétrique; avoir des particules identiques mais discernables (saupoudre d'une hypothèse sur l'homogénéisation des valeurs propres de l'opérateur de permutation) me semble largement suffisant et coller d'avantage avec ce qu'on fait en pratique.
Cela permet de justifier par exemple :
- l'utilisation d'états complètement antisymétriques pour des electrons libres avec spin et sans interaction ou, par exemple, si deux electrons sont dans un état de projection de spin different alors ils sont clairement discernables (physiquement aussi discernables que si l'un était peint en bleu et l'autre en rouge).
- l'utilisation d'états complètement (anti)symétriques pour des systèmes d'atomes libres sans interaction (pour faire simple) a temperature finie. La encore, deux atomes pourraient avoir des états d'excitation differents qui leur conféreraient une taille et une masse (entre autres) différentes, les rendant parfaitement discernables en principe.
Contrairement a ce qui est souvent preche, je pense qu'un systèmes d'atomes a temperature finie a de nombreuses representations possibles en terme de statistiques quantiques (qui attrait a la "rigueur" avec laquelle on souhaite imposer le caractère identique de deux particules) qui n'a aucune espèce d'importance d'un point de vue experimental puisque la cardinalite (ou une mesure adaptée) de cet ensemble de classes d'equivalences décroît avec la temperature pour au final devenir unique a très très basse temperature. Il est donc a la discretion de chacun de décrire un système de N particules composites a temperature finie comme il le souhaite, bien que la classe d'equivalence la plus vague offre l'avantage de ne pas avoir a se soucier d'une redefinition successive de l'ensemble des classes d'equivalence dans le systeme.
Notons enfin que l'ensemble du raisonnement ci-dessus attrait a une physique dont l'ontologie est basee sur des particules pour lesquelles il faut determiner si elles sont les memes et ce que cela veut dire. Cela est très different d'une ontologie basée sur l'existence d'un champ dont les excitations harmoniques élémentaires sont les particules; qui sont d'office identiques et obtiennent directement (moyennant certaines contraintes) une statistique quantique associée. Cela étant, les gens de la physique quantique des basses energies le savent très bien, il est tout a fait possible de construire un champ a partir d'une particle-based ontology (parfois appelé champ de Schrodinger (cf. Le Bellac, Mécanique Quantique)) dont les particules sont les excitations en passant dans la representation dite de seconde quantification pour des particules suivant une statistique quantique parfaitement (anti)symétrique (via une representation type determinant de Slater). Ainsi, la ou d'un point de vue fondamental, la notion d'un champ d'hydrogène ne fait pas beaucoup de sens, si l'on choisit d'opter pour une description d'un système d'atomes d'hydrogène comme étant complètement (anti)symétrique (et libre pour faire simple) et bien un tel objet peut être construit et est d'une certaine manière aussi fondamental que le champ électronique du Model Standard de la Physique des Particules.
Vos remarques sur ces reflexions sont plus que les bienvenues .
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