statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout
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statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout



  1. #1
    kite4life

    statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout


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    Bonjour à tous,

    J'ai toujours eu un intérêt très fort pour la science, et j'ai fait des études supérieures dans ce domaine (classe prépas, école d'ingé) mais je n'ai pas poussé les études en physique au niveau des théories les plus avancées comme la physique des cordes par exemple ou autres. Néanmoins ça m'intéresse à titre de curiosité.
    J'entends souvent parler de l'incompatibilité entre la mécanique quantique et la relativité générale, ainsi que de la recherche d'une théorie du "tout" mais sans trop comprendre quel est le statut actuel de la recherche scientifique.
    Notamment je souhaiterai savoir ou en est la recherche sur ce sujet entre ces 4 propositions :

    1) Nous disposons d'une ou plusieurs théories claires et mathématiquement consistantes qui permettent d'unir la relativité générale et la physique quantique (singularité d'un trou noir, big bang etc...) mais ces théories ne sont pas démontrées expérimentalement. Le développement de ces théories ne se résume plus qu'a en extraire une implication phénoménologique permettant leur testabilité.

    2) nous disposons de théories encore balbutiantes et présentant des inconsistances ou incomplétudes mais qui ont un potentiel pour devenir une théorie d'unification. Encore quelques rustines mathématiques et ça devrait fonctionner.

    3) Nous n'avons aucune théorie permettant cette unification.

    4) autre, et ma question n'a aucun sens


    Accessoirement, quel serait le statut de la théorie M dont j'entends souvent parler sans savoir de quoi il s'agit.

    Merci à tous ceux qui savent

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  2. #2
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Salut,

    Concernant l'incompatibilité entre relativité générale et mécanique quantique. Ce n'est pas tout à fait exact. Il est vrai que les formalismes sont profondément incompatibles, mais ça ce n'est que des soucis "techniques". Et pendant longtemps on ne voyait pas comment faire : l'équation de Wheeler-Dewitt https://en.wikipedia.org/wiki/Wheele...eWitt_equation (désolé, en français l'article est presque vide) qui quantifie directement la RG (quantification canonique) semblait insoluble (produits d'opérateurs au même point, ce qui est anormal, espace de Hilbert non défini, pas d'espace ni de temps dans l'équation).

    Mais la solution a été trouvée (par Ashtekar et ses continuateurs) : c'est la gravité quantique à boucles

    Concernant la notion de "théorie de tout". Il ne suffit pas d'avoir une gravité quantique. Il faut aussi que la théorie :
    1) unifie les quatre interactions fondamentales (ce qui ne veut pas dire juste les mettre ensemble, elles doivent dériver d'une symétrie fondamentale avec une interaction unique. On ne sait le faire que pour l'interaction électrofaible)
    2) est sans paramètres libres et sans "conditions initiales" si on l'applique à l'univers (ou plutôt ces conditions doivent être une conséquence de la théorie)

    Et on en est très loin. Concernant le (1), la seule théorie qui le fasse vraiment est la théorie des cordes, en partie aussi certains modèles de supersymétrie (comme SUGRA).
    Et le (2) on est nul part. Que ce soit la supersymétrie, les cordes ou autres.... il y a pleins de paramètre libres, pleins de modèles possibles (avec des conditions initiales aussi variées qu'il y a d'idées/de théoriciens)
    Et pire, on a souvent des tonnes de variantes pour les théories. Et ces théories étant techniquement difficiles (en particulier parce que tout ça décrit le même univers, et il est plus facile de donner le plan d'une maison en donnant les dimensions des murs qu'en donnant la position de chaque brique) aucune n'est totalement aboutie. La théorie M est une certaine approche (plus ou moins précise) des cordes (voir wikipedia) le M ayant été qualifié de "Membrane" (pour les branes), de Mystérieuse, de Magique , etc....

    Une autre difficulté est l'absence de données expérimentales claires allant au-delà des théories validées ou récoltées dans des conditions aussi extrêmes que la gravité quantique. Mais on voit poindre des espoirs de ce coté (plusieurs expériences en cours, elle ne trancheront pas tout mais permettront de progresser sérieusement).

    Donc, on est dans le 2. C'est beaucoup plus que "balbutiant" (beaucoup de travaux très élaborés) mais beaucoup de théories/modèles pas complets. Mais le "encore quelques rustines" risque fort de prendre quelques décennies....... avec de la chance.
    Dernière modification par Deedee81 ; 24/05/2023 à 08h23.
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  3. #3
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Bonjour,

    je vais apporter un avis un peu différent.
    On parle souvent d'incompatibilité entre la gravitation et la mécanique quantique, mais ce problème admet plusieurs résolutions. L'une est celle évoquée par Deedee, mais elle souffre de nombreux problèmes, en particulier elle n'est pas (encore?) capable de reproduire de la physique qui ressemble à celle que l'on observe en 4 dimensions. De plus Hawking a montré que les trous noirs ont une température et une entropie, et une théorie de la gravitation quantique devrait expliquer cela, ce qu'encore une fois la gravité quantique à boucle n'arrive pas.

    Une autre approche est celle proposée par Maldacena il y a plus de 20 ans : l'holographie exhibe une dualité entre une théorie de la gravitation quantique et une théorie de jauge (l'exemple le plus connu étant AdS/CFT). Plus précisément, par gravitation quantique il pense à la théorie des cordes, qui jusque là n'avaient pas de définition non perturbative indépendante, alors que les théories de jauge sont très bien définies (au moins pour les physiciens... du côté des maths ça avance lentement mais sûrement). De plus la théorie des cordes admet des solutions qui ressemblent à la physique en 4 dimensions telle qu'on la connaît, en plus de donner une dérivation microscopique de l'entropie des trous noirs, qui concorde parfaitement avec le résultat de Hawking. Je pense que ce sont les raisons principales qui font que c'est l'approche la plus étudiée en ce moment.

    Je crois que cela répond à vos questions : oui nous avons des théories de la gravitation quantique, mais elles font de nombreuses prédictions dans des régimes qui ne nous sont pas accessibles pour le moment dans les accélérateurs.

    Pour ce qui est de la théorie M c'est encore autre chose. On connaît une théorie classique en 11 dimensions, la supergravité, qui devrait être la limite classique d'une théorie quantique, baptisée la théorie M. Elle a aussi des connexions très profondes avec les théories des supercordes via les dualités. On connaît donc quelques limites de cette théorie sans savoir comment la définir. Enfin c'était le statut il y a 20 ans, il y a des conjectures que cette théorie serait l'hologramme d'un modèle de mécanique quantique matricielle (voir "BFSS") et il y a pas mal de recherche actuelle qui étudie cette question.

  4. #4
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Salut,

    Citation Envoyé par Antonium Voir le message
    On parle souvent d'incompatibilité entre la gravitation et la mécanique quantique, mais ce problème admet plusieurs résolutions. L'une est celle évoquée par Deedee, mais elle souffre de nombreux problèmes, en particulier elle n'est pas (encore?) capable de reproduire de la physique qui ressemble à celle que l'on observe en 4 dimensions.
    C'est juste (pour diverses raisons d'ailleurs) et d'ailleurs aussi le cas de toutes les approches (pour les cordes les raisons sont très différentes).

    Citation Envoyé par Antonium Voir le message
    De plus Hawking a montré que les trous noirs ont une température et une entropie, et une théorie de la gravitation quantique devrait expliquer cela, ce qu'encore une fois la gravité quantique à boucle n'arrive pas.
    N'oublions pas Bekenstein (qui a précédé Hawking) Mais le reste est faux. La gravité quantique à boucle l'explique très bien. Contrairement aux cordes d'ailleurs (en fait si, elle le fait aussi mais pour les trous noirs extrémaux uniquement, enfin, à ma connaissance, la situation a peut être évolue). Il y a beaucoup d'articles sur le sujet, voir celui-là par exemple : https://arxiv.org/pdf/gr-qc/0407052.pdf
    Un auteur plus connu https://arxiv.org/abs/gr-qc/9603063 moins technique (mais avec des références).

    L'holographie est une des approches (il y en a beaucoup des approches en fait) mais elle n'est pas sans défaut. Elle ne s'applique que dans certains cas : comme les trous noirs justement ou pour l'univers à des espaces de anti-DeSitter (ce qui n'est pas du tout l'espace-temps correspondant à notre univers qui est plutôt de type Friedemann ou Desitter). Et la généralisation se fait encore attente. Elle est toutefois séduisante pour de nombreuses raisons (ce qui est aussi le cas des autres approches d'ailleurs, même si ce n'est pas les mêmes raisons. Ma correspondance AdS/CFT par exemple est absolument incroyable !).
    Sur tout ça voir cette excellente synthèse :
    https://www.pourlascience.fr/sd/phys...emps-24865.php
    (attention, article payant)

    Pour le reste on est d'accord.

    Etant donné le foisonnement des approches ou des approches "dérivées".... j'estime que celui qui veut vraiment faire des recherches :
    - Doit faire un choix qui correspond avant tout à ses goûts (faut pas se fixer sur les avancées théories et encore moins l'expérimental, il est trop tôt pour ça)
    - Potasser l'état de l'art (ce qui peut être vaste même en se restreignant à une approche précise)
    (moi je travaille sur la recherche d'une méthode de quantification résolvant les derniers problèmes techniques des méthodes actuelles. Je travaille avec la géométrie analytique, les algèbres, les fibrés.... Mais je suis loin d'aboutir, pour peu même que j'aboutisse)
    Dernière modification par Deedee81 ; 24/05/2023 à 09h15.
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  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Effectivement, je ne connaissais pas ces travaux, merci ! C'est étrange, j'entends souvent dire en conférences que la LQG ne reproduit pas la thermodynamique des trous noirs, je pensais qu'ils parlaient de la dérivation microscopique de l'entropie...

  7. #6
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Citation Envoyé par Antonium Voir le message
    Effectivement, je ne connaissais pas ces travaux, merci ! C'est étrange, j'entends souvent dire en conférences que la LQG ne reproduit pas la thermodynamique des trous noirs, je pensais qu'ils parlaient de la dérivation microscopique de l'entropie...
    Bizarre en effet. Tu aurais une référence ?
    (de fait, en LQG on n'a toujours pas la formulation mousse de spins, en 2+1D si mais pas en 3+1D, ce qui est gênant et implique diverses astuces pour les quelques applications, c'est peut-être ce qui est contesté ?? Je connais les bases de la théorie mais pas le détail pour les TN, donc je n'en suis pas sûr)
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  8. #7
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    C'est en général par oral... Mais il y a par exemple cette review de Harlow : https://arxiv.org/abs/2304.10367, il en parle dans la footnote 2 en page 3. Je n'en sais pas vraiment plus, je demanderai la prochaine fois que j'assisterai à un talk de LQG...

  9. #8
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Merci,

    Bizarre ça !!!! Le soucis de la forte déconnexion des communautés de théoriciens (rares sont ceux qui maîtrisent les deux "mondes" : boucles et corde) ????
    Par contre le problème "low energy" cité est exact.
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  10. #9
    Archi3

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    si la question est de savoir si on dispose d'un formalisme cohérent qui répondrait en principe à toutes les questions de la gravité quantique, mais qui manque juste de confirmations expérimentales, un peu comme la RG en 1916, qui n'avait guère que le calcul de l'avance du périhélie de Mercure (qui pouvait aussi s'expliquer par d'autres perturbations car en fait n'importe quel écart à la loi Newtonienne d'une masse ponctuelle va faire précesser le périhélie), mais qui contenait tout l'appareillage théorique pour développer les applications et les comparer à de futures observations, je pense qu'on peut dire que non. Les théories proposées actuellement sont attirantes intellectuellement mais ne répondent pas à toutes les questions, et elles sont incompatibles entre elles. Il n'y en a aucune qui s'impose comme étant la seule cohérente logiquement, sinon ça serait facile de choisir. On est plutot à mon avis sur la situation pré 1905 de la RR, avec des idées plus ou moins confuses par Poincaré, Lorentz, sur ce qu'on pourrait modifier dans la mécanique classique , mais sans théorie encore achevée. (ou la mécanique quantique des années 20).

    Sauf que ça s'est débloqué bien plus vite pour les théories du début du XXe siècle ...

  11. #10
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    C'est bien dit tout ça.

    Citation Envoyé par Archi3 Voir le message
    Sauf que ça s'est débloqué bien plus vite pour les théories du début du XXe siècle ...
    Je suppose que c'est lié aux difficultés tant théoriques/mathématiques qu'aux difficultés expérimentales.
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  12. #11
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    J'aimerais ajouter une autre précision par rapport aux cordes, qui s'applique probablement aussi aux autres approches de la gravité quantique.

    On en parlait beaucoup comme destinée à être une théorie du tout il y a 20-30 ans. J'ai l'impression que les ambitions aujourd'hui sont plus modestes. Etudier la physique de ces objets étendus dans l'espace nous a appris beaucoup sur les modèles de gravitation, de théories de jauge, sur la symétrie conforme, et j'en passe. Cette connaissance est maintenant souvent employée dans des contextes où les cordes ne sont pas fondamentales (voir "effective string theory"), dans des contextes de physique statistique et matière condensée où les théories conformes en deux dimensions jouent un rôle important, ou encore dans l'étude des "scattering amplitudes" en théorie des champs sans référer à la gravitation.

    Ce n'est pas rare d'aller à une conférence "sur les cordes" sans qu'un seul des intervenants ne parle de ces petits objets unidimensionnels. On peut voir de nombreuses références dans ce "talk" de Polchinski (voir page 4) : https://arxiv.org/pdf/1512.02477.pdf, où il explique que des physiciens de divers horizons se retrouvent à contribuer aux cordes. Je recommande la lecture de ce document pour voir que le point de vue de l'un des contributeurs principaux à l'élaboration de cette théorie n'est pas celui d'un aliéné enfermé dans son imagination comme on peut parfois le lire...

    Je vais finir sur une quote entendue en conférence "string theory might not be the theory of everything, but it is for sure a theory of something".

  13. #12
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Citation Envoyé par Antonium Voir le message
    J'aimerais ajouter une autre précision par rapport aux cordes, qui s'applique probablement aussi aux autres approches de la gravité quantique.
    Je confirme aussi pour la partie que je connais. Mais je pense que c'est du coté des cordes que c'est le plus marqué. Peut-être aussi un effet de l'ampleur de la communauté dans ce domaine (plus de têtes, plus de résultats, mais ce n'est peut-être que mon impression)

    J'aime bien la citation finale

    Et "l'élaboration de cette théorie n'est pas celui d'un aliéné enfermé dans son imagination comme on peut parfois le lire...", il y en a vraiment qui pensent ça ?
    (note que je ne suis pas du métier donc je n'ai pas beaucoup d'échos du côté collègues )
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  14. #13
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Et "l'élaboration de cette théorie n'est pas celui d'un aliéné enfermé dans son imagination comme on peut parfois le lire...", il y en a vraiment qui pensent ça ?
    Oui, je le vois souvent sur internet mais aussi chez les physiciens (principalement de ceux qui travaillent dans d'autres domaines). Mais c'est bien d'avoir de la critique, c'est comme ça que la science avance.

  15. #14
    stefjm

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Citation Envoyé par Antonium Voir le message
    Oui, je le vois souvent sur internet mais aussi chez les physiciens (principalement de ceux qui travaillent dans d'autres domaines). Mais c'est bien d'avoir de la critique, c'est comme ça que la science avance.
    Blague entendu dans les labo :

    Alors, il en est où ton moteur à graviton, énergie du vide, énergie noire, matière noire, etc...?
    Moi ignare et moi pas comprendre langage avec «hasard», «réalité» et «existe».

  16. #15
    ThM55

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Je ne sais pas si vous consultez souvent Physical Review D (section PR pour hautes énergie, gravitation, cosmologie). C'est intéressant depuis qu'ils ont mis une partie significative en "accès ouvert".

    Je remarque que les articles publiés concernant les cordes, la LQG, l'unification, la supergravité etc.... ne sont plus vraiment majoritaires. Ils n'ont pas disparu mais la majorité est relative à des trucs plus phénoménologiques mais tout de même assez théoriques, comme la violation de CP dans divers types de désintégrations, des anomalies relatives au modèle standard non confirmées (càd à 2 ou 3 sigmas), les tetraquarks, les profils possibles d'ondes gravitationnelles, les trous noirs, des modèles de matière noire, etc. Bref je pense des choses qui ont plus de chance de recevoir des confirmations expérimentales dans un avenir pas trop lointain.

  17. #16
    Antonium

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Il me semble que les articles plus théoriques sont plutôt publiés dans JHEP…

    Sur ArXiv il y a différentes sections pour hep/th (theorie) et hep/ph (phéno), et gr/qc (gravitation), et toutes sont très actives (plusieurs dizaines d’articles par jour, dont un bon pourcentage finit dans des journaux)

    Donc pas sûr qu’il y aie un déclin de la théorie pure par rapport à la pheno…

  18. #17
    kite4life

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Je vous remercie à tous, ça fait plaisir de voir autant de réponse sur un sujet aussi pointu.
    La fin de me dépasse un peu mais je pense pouvoir me faire une idée de là où ça en est.

    2) est sans paramètres libres et sans "conditions initiales" si on l'applique à l'univers (ou plutôt ces conditions doivent être une conséquence de la théorie)
    Et le (2) on est nul part. Que ce soit la supersymétrie, les cordes ou autres.... il y a pleins de paramètre libres, pleins de modèles possibles (avec des conditions initiales aussi variées qu'il y a d'idées/de théoriciens)
    Est-ce que je peux comprendre qu’aucune théorie ne décrit le moment précis du début de l’univers (dit big bang) ? Que les théories existantes présupposent des conditions initiales et donc ne commencent à décrire l’univers qu’a l’instant « t+1 » mais pas à t=0 précisément ?

    Merci.

  19. #18
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Salut,

    Citation Envoyé par ThM55 Voir le message
    Bref je pense des choses qui ont plus de chance de recevoir des confirmations expérimentales dans un avenir pas trop lointain.
    +1

    Forcément puisque là on est en plein les pieds dedans. Idem angles des neutrinos (encore à préciser), moment magnétique anomal problématique du muon (l'anomal anormal ), durée de vie du neutron, taille du proton et quelques autres expériences sympas (états intriqués en chute libre, oscillations mécaniques en état de superposition quantique)..... C'est en effet tout ça que j'évoquais ci-dessus dans mon "on voit poindre des espoirs". Evidemment impossible d'intuiter sur ce que ça va donner. Mais on suit tous ça de près
    (quelques recherches sur l'axion, la cartographie de l'énergie noire.... là pas impossible d'avoir des choses intéressantes mais une percée m'y semble moins probable)

    Mais bien entendu, comme l'évoque Antonium ci-dessus, tout dépend de ce qu'on cherche ou ce qu'on entend par "statut de la recherche" : théorique, expérimentale ou leurs liens.

    Citation Envoyé par kite4life Voir le message
    Est-ce que je peux comprendre qu’aucune théorie ne décrit le moment précis du début de l’univers (dit big bang) ? Que les théories existantes présupposent des conditions initiales et donc ne commencent à décrire l’univers qu’a l’instant « t+1 » mais pas à t=0 précisément ?
    C'est plutôt l'inverse Il y a TROP de théories et on ne sait pas démontrer les conditions initiales/hypothèses des modèles.

    Notons que presque toute (ou toute ?) les théories de gravitation quantique n'ont pas d'instant 0, il y a un avant big bang, le t=0 devient juste une transition entre l'avant et l'univers qu'on connait.

    Malheureusement il y a une plusieurs théories capables d'aborder le sujet (il ne faut pas se fixer que sur les boucles et les cordes, en théorie quantique des champs plus ou moins mariée avec la RG on a toutes sortes de choses, j'ai même déjà vu des approches très "ad hoc" construites avec le "super espace", très spéculatif ça).
    Et chaque théorie permet de construire de nombreux modèles selon les hypothèses choisies.
    Et chaque modèle donne un début/avant big bang différent.

    Bref, ça fait beaucoup et même à un point tel que ça doit couvrir à peut près tous les trucs qu'on puisse imaginer pour l'avant big bang.

    Mais bien entendu, beaucoup ont leur solution préférée. Moi j'adore un modèle issu de boucles (ce n'est pas le plus courant, le plus courant étant le modèle avec rebond, très appréciés par Rovelli par exemple) : une transition du second ordre (comme les ferromagnétiques) entre un état chaotique (pas de temps macroscopique bien défini), à un état tel qu'on le connait. Le paramètre d'ordre n'étant évidemment pas la magnétisation mais le temps. Moi je trouve ce modèle très satisfaisant d'un point de vue conceptuel mais c'est très certainement une question de goût. Et j'insiste en disant que c'est mon préféré mais pas nécessairement le "bon". Je l'avais vu décrit dans des comptes tendus d'une conférence il y a une vingtaine d'années, je n'ai même pas d'article sous la main là dessus. Sur quelques trucs (assez peu) je ne suis pas toujours dans le "mainstream"

    Y a encore beaucoup de travail
    Dernière modification par Deedee81 ; 25/05/2023 à 07h16.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  20. #19
    coussin

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Citation Envoyé par Deedee81 Voir le message
    C'est plutôt l'inverse Il y a TROP de théories et on ne sait pas démontrer les conditions initiales/hypothèses des modèles.
    Oui, pondre une théorie n'est pas le plus difficile.
    Je me souviendrais toujours de la soudaine éruption de publications "théoriques" sur arXiv le jour suivant les neutrinos supraluminiques de l'expérience OPERA

  21. #20
    Archi3

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    c'est une discussion qu'on avait déjà eue, mais je trouve que le paysage de la physique théorique des interactions fondamentales commence (d'un strict point de vue factuel et sociologique, pas "sur le fond") à s'écarter de ce qui faisait la caractéristique de la démarche scientifique, une compétition entre théories tranchées par l'expérience, pour revenir aux caractéristiques des pratiques religieuses, c'est à dire une compétition entre théories, mais sans validation par l'expérience : ce qui se traduit in fine par tout un écosystème de pensées coexistant mutuellement, sans possibilité théorique de trancher, et où les adhésions se font plutôt par des préférences personnelles, des aspects esthétiques, ou des contextes historiques (quelle éducation on a eu - ou avec qui on a fait sa thèse), et où on va plus valider les modèles à partir du nombre d'adhérents que par des arguments logiques forts. C'est un point de vue personnel bien sûr.

  22. #21
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Archi3, tu as raison. Et les difficultés expérimentales ne sont sans doute pas étrangères à ce travers (qui reste intéressant, déblayer le terrain c'est pas si mal) (*). Mais soyons clair, à part peut-être quelques "fanatiques" personne ne voit tous ces travaux comme étant la vérité révélée. On sait très bien que ce n'est pas du tout validé.

    (*) ça et la démographie, huit milliards d'habitants ça fait une proportion de physicien en proportion donc beaucoup d'idées, de travaux.

    Quant aux préférences personnelles, la physique ayant tellement progressé (même hors du sujet présenté ici, dans le cadre de la physique validée), il est devenu inévitable de faire des choix pour vraiment approfondir (qu'on m'indique un spécialiste de la physique des matériaux, qui soit spécialiste de cryptographie quantique et aussi spécialiste de relativité générale Ca doit pas courir les rues). C'est vrai d'ailleurs de toutes les disciplines (chimie, biologie, etc....) Sans compter qu'il est humain et normal de préférer certaines idées théoriques (avant validation/réfutation évidemment)

    Et pour le sujet, ma fois, faut juste être patient
    Dernière modification par Deedee81 ; 25/05/2023 à 08h56.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  23. #22
    ThM55

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Je n'ai pas fait de statistiques et je ne prétends pas qu'il y a un vrai déclin. Mais même sur Arxiv/hep-th on n'a pas une majorité sur ces sujets (d'ailleurs à la réflexion il me semble que les article de PR-D en accès libre sont ceux qui sont repris dans Arxiv, pas vérifié non plus). Sur les 50 récents je n'en vois qu'un seul qui, d'après son titre, parle spécifiquement de supercordes.

  24. #23
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Il est certain que sur l'ensemble des publications en physique, ces sujets (actuellement) spéculatifs restent une minorité. Heureusement d'ailleurs. Sinon je m'inquiéterais sérieusement.
    (quand je dis "certains", c'est en voyant les références aux publications dans les revues et aussi via ArXiv dans certains des groupes, j'avais regardé en MQ par exemple.
    On pourrait bien entendu faire l'exercice avec Physical Reviexe, google scholar, etc... mais je doute qu'on y voie une différence importante)
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  25. #24
    Morrslieb

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Bonjour,

    1) Nous disposons d'une ou plusieurs théories claires et mathématiquement consistantes qui permettent d'unir la relativité générale et la physique quantique (singularité d'un trou noir, big bang etc...) mais ces théories ne sont pas démontrées expérimentalement. Le développement de ces théories ne se résume plus qu'a en extraire une implication phénoménologique permettant leur testabilité.
    En ce qui concerne la théorie des cordes, je pense qu'on est plutôt au point 1) du premier message. Ceci dit, il faut comprendre qu'en realité, il y a cinq théories des cordes plutôt qu'une seule. Ces théories sont reliées entre eux par des dualités, mais elles ne sont pas toutes au même niveau mathématiquement. Par exemple, la type IIB est mathématiquement mieux établie (via la géométrie algébrique) que la type IIA. On suppose qu'il y a une théorie encore plus fondamentale à la base des cinq théories des cordes, la M-théorie, mais elle n'est pas encore connue. Le plus gros problème de la théorie des cordes, pas mentionné au point 1), est qu'elle prédit une multitude d'univers différents. En principe, on devrait analyser tous les univers prédits par la théorie des cordes pour voir s'il y en a un qui correspond à notre univers. Or, c'est impossible à faire avec les ordinateurs actuels: le nombre d'univers à analyser est trop énorme. Normalement, on arrive assez aisément à trouver des modèles qui donnent le bon spectre de particules. Mais dès qu'on essaie de reproduire les constantes de couplages, les masses, et autres paramètres, ça commence à foirer.

    Et le (2) on est nul part. Que ce soit la supersymétrie, les cordes ou autres.... il y a pleins de paramètre libres, pleins de modèles possibles (avec des conditions initiales aussi variées qu'il y a d'idées/de théoriciens)
    Juste une petite précision concernant la théorie des cordes: il y a plein de modèles possibles mais pas plein de paramètres libres. En effet, les paramètres en théories des cordes peuvent en principe être fixés, souvent (directement ou indirectement) via la méthode du "moduli stabilization". En principe, le seul paramètre libre en théorie des cordes correspond à la longueur de la corde.


    On en parlait beaucoup comme destinée à être une théorie du tout il y a 20-30 ans. J'ai l'impression que les ambitions aujourd'hui sont plus modestes.
    Moi j'ai l'impression qu'au contraire les ambitions sont encore plus grandes . En effet, la théorie des cordes s'est intégrée non seulement dans de nombreux autres domaines de la physique, tels que mentionnés par Antonium, mais elle a aussi permet des découvertes et des avancées dans beaucoup de domaines des mathématiques. Par exemple, elle est à la base de la découverte de la "mirror symmetry", le "no-ghost theorem" a permis de prouver la conjecture du "Monstruous Moonshine", via les réseaux et les courbes elliptiques elle touche même à la théorie des nombres et la cryptographie, etc.

    Je remarque que les articles publiés concernant les cordes, la LQG, l'unification, la supergravité etc.... ne sont plus vraiment majoritaires. Ils n'ont pas disparu mais la majorité est relative à des trucs plus phénoménologiques mais tout de même assez théoriques, comme la violation de CP dans divers types de désintégrations, des anomalies relatives au modèle standard non confirmées (càd à 2 ou 3 sigmas), les tetraquarks, les profils possibles d'ondes gravitationnelles, les trous noirs, des modèles de matière noire, etc. Bref je pense des choses qui ont plus de chance de recevoir des confirmations expérimentales dans un avenir pas trop lointain.
    Ce déclin en intérêt pour les théories physiques très théoriques a effectivement commençé depuis la découverte du boson de Higgs déjà. En effet, la découverte du boson de Higgs a déclenchée un intérêt accru pour la phénoménologie. J'ai entendu parler d'un chercheur en gravitation quantique dans un institut de Max Planck en Allemagne qui avait, il y a quinze ans, une équipe de vingt chercheurs, alors qu'aujourd'hui, il n'en a plus que deux. C'est triste quand même .

  26. #25
    Deedee81
    Modérateur

    Re : statut de la recherche scientifique sur la théorie du tout

    Salut Morslieb;

    Citation Envoyé par Morrslieb Voir le message
    via la méthode du "moduli stabilization". En principe, le seul paramètre libre en théorie des cordes correspond à la longueur de la corde.
    Je ne connaissais pas. J'ai fait quelques recherches mais j'ai peu trouvé et du ..... vraiment pointu.
    Aurais tu une explication on va dire en quelques paragraphes, vulgarisée, expliquant ce que c'est ? (en lien ou ici, si tu as le temps bien sûr)

    EDIT je viens de lire l'introduction d'un des articles, intitulé "What are moduli and why do we want to stabilize them?". ARRRGGGG j'ai rien pigé !!!!
    Mais si ce n'est pas "aisément" explicable, laisse tomber, je ne suis pas assez calé en "cordes".

    Citation Envoyé par Morrslieb Voir le message
    alors qu'aujourd'hui, il n'en a plus que deux. C'est triste quand même .
    Cela me fait dire qu'en fin de compte, une statistique précise serait vraiment intéressante pour avoir une vue globale de l'évolution de la recherche en physique. Sans doute pas facile à faire.
    Dernière modification par Deedee81 ; 25/05/2023 à 13h26.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

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