Inflation, c'était le bon temps
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Inflation, c'était le bon temps



  1. #1
    invite554578cf

    Inflation, c'était le bon temps


    ------

    Salut à tous,

    j'ai ouvert un fil récemment sur la question des constantes durant l'inflation, et j'ai quelques interrogations sur cette phase.

    Comme base de discussion j'ai trouvé cette vulgate par ce cher Hubert (et franchement c'est pas mal du tout) : http://www.astropolis.fr/articles/hi...27univers.html

    Il y a plusieurs choses qui me troublent, bien sûr. La première peut-être c'est de considérer que la Gravitation agit dès le début sous sa forme liée avec les trois autres interactions. C'est un postulat ? une proposition ? Si la gravitation émerge je vois mal comment elle peut agir avant d'émerger.

    à noter que la brisure de symétrie matière/antimatière expliquée comme la transition de phase de l'eau, wahou j'ai trouvé ça chouette. C'est là qu'on voit qu'Hub est vraiment un bon médiateur scientifique

    Bon, en fait je ne vais pas y aller par quatre chemins, voilà le topo :

    En lisant la phase inflationnaire détaillée comme ça, ça me fait surtout penser à un GROS run d'un programme très ambitieux, où, en une fraction de seconde, les lignes de codes s'enchaînent jusqu'à générer ce qu'on a envie d'appeler un Univers. Pourquoi TOUT se joue si vite ? Pourquoi en moins d'une seconde la plupart des germes des mystères sont déjà plantés et surtout pourquoi est-ce que c'est "si rapide" (si on demande par rapport à quoi, bin au temps de Planck par exemple) ? Quand je lis les étapes de l'inflation j'ai vraiment l'impression d'entendre les vieux crissements de silice des cassettes Amstrad (mais en plus rapide ). Est-ce une transposition malheureuse ?

    -----

  2. #2
    Gilgamesh
    Modérateur

    Re : Inflation, c'était le bon temps

    J'ai beaucoup de mal avec cette façon de présenter les choses, qui consiste à mettre le Big Bang avant l'inflation, alors que pour les auteurs de la théorie de l'inflation, il en est une conséquence. Ce qui ne constitue pas un mince détail.

    Dans cette page sur le première seconde, on a un instant zéro avec plein de point d'interrogation, inconnaissable, car protégé par le mur de Planck. Tout est là, on sait pas pourquoi, et puis paf, inflation.

    Dans la présentation de la théorie de l'inflation par Guth, Linde ou Susskind, on ne parle jamais d'instant zéro ni de mur de Planck. Le scénario qu'ils proposent est a mon sens beaucoup plus fluide, et intelligible de bout en bout. On postule un état du vide de haute énergie, qui de ce fait est en inflation. L'expansion inflationnaire est dû au fait dans l'équation d'état du vide la pression est l'opposée de la densité d'énergie, ce qui injecté dans la 2e équation de Friedmann génère un univers de De Sitter. C'est à dire :

    a ~ eHt

    avec a le facteur d'échelle
    H le taux d'expansion tel que : H² = Λ/3
    avec Λ la constante cosmologie, c'est à dire la densité d'énergie du vide, qui génère une gravité répulsive
    t le temps

    A noter que cette solution est aussi un attracteur pour notre univers de basse énergie.

    La théorie quantique des champs calcule que Λ doit être de l'ordre de la densité de Planck. On ne peut que constater que ce n'est pas le cas. La théorie de l'inflation postule simplement que ces états du vide de haute énergie existent. Et les conséquences en sont le multivers inflationnaire. Et du même coup, on se retrouve avec deux états du vide possibles : un qui est postulé, de haute énergie, un qui est constaté, de basse énergie. Tout système tend vers un état de plus basse énergie, et le multivers décroit donc de place en place. La décroissance du niveau zéro du vide provoque la fin de l'inflation, la gravité n'est plus répulsive et l'énergie est injectée dans les champs de matière, avec production d'un plasma chaud et dense, ce qu'on appelle le réchauffement (reheating en anglais) qui génère une pression positive et donc une gravité attractive. Le taux d'expansion H qui part d'une valeur très élevée décroit maintenant très fortement, mais de moins en moins au fur et à mesure que la matière se dilue avec l'expansion. Le Big Bang chaud est donc la conséquence de ce changement d'état du vide.

    On a ensuite la succession de régime dynamique suivant :

    a ~ t1/2, quand l'énergie relativiste (E = pc) domine, c'est l'ère radiative

    puis

    a ~ t2/3, quand l'énergie non-relativiste (E = mc²) domine, c'est l'ère de matière

    jusqu'à ce que la densité de matière passe en dessous de la densité d'énergie résiduelle du vide (la valeur actuelle de Λ) ce qui fait tendre à nouveau la solution vers

    a ~ e√Λ t

    Ce scénario a l'immense intérêt d'expliquer le Big Bang au lieu d'en faire un problème des Origine soigneusement "plancké" derrière ce mur de l'inconnaissable auquel on donne un statut métaphysique à mon avis suspect.

    Expliquer le Big Bang c'est à dire 1) expliquer l'origine du taux d'expansion très élevé de l'univers 2) expliquer l'origine de la matière. Dans la théorie classique (non inflationnaire), il faut postuler que le taux d'expansion est infini (ou très très grand), alors même que la densité infinie (ou très très grande) de matière/rayonnement le freine infiniment (ou très très fortement). C'est extrêmement inconfortable.

    On explique également que l'univers ait exactement la densité critique car le régime dynamique d'un univers de De Sitter le fait tendre vers cette valeur dans la phase inflationnaire. Dans la théorie classique il faut postuler cette valeur, alors qu'elle a une mesure nulle.

    La théorie du multivers inflationnaire permet également d'expliquer naturellement les divers "fine tunning" des théories fondamentales qui les rendent si étrangement favorable à l'émergence d'une complexité par intégration de l'argument anthropique. Le Big Bang étant maintenant non plus un événement unique, mais un élément pris dans un ensemble innombrables, l'idée qu'il naisse au moins un univers fécond abritant un observateur conscient cesse d'être un mystère.
    Dernière modification par Gilgamesh ; 07/04/2019 à 13h20.
    Parcours Etranges

  3. #3
    invite554578cf

    Re : Inflation, c'était le bon temps

    Merci Gilgamesh. Je vais étudier ta réponse avant d'y réagir, ça va prendre un peu de temps. A première vue je suis pas déboussolé, et je pense voir à peu près de quoi tu parles. Si j'ai bien compris, j'avais personnellement rangé cette théorie du côté un peu de celles des cordes avec les 10^500 univers auxquels je reproche d'être trop pratiques. Mais j'ai bien conscience que toute explication, en l'état, est pratique, justement. Donc en tirer des conclusions ontologiques, c'est too much.

    On peut aussi ajouter, et c'est aussi un peu ton propos je crois, que c'est cette présentation en arborescence jusqu'à 10^-27 sec (je crois) qui donne l'impression d'un programme, on l'a représenté comme ça.

    Bref, je reviens plus tard et merci encore

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