A diffuser!
Suite aux récentes coupes budgétaires dans le budjet de la recherche
publique, les chercheurs, doctorants et post-doctorants de l'Institut
Cochin se mobilisent. Ils organisent un enterrement symbolique de la
recherche publique francaise, le 10 avril au Pantheon.
Voir cette adresse:
http://recherche-en-danger.apinc.org/
http://recherche-en-danger.apinc.org...?id_article=46
Si vous êtes à Paris ou dans le coin, sortez vos blouses blanches!
L'APPEL DE COCHIN
Il faut sauver la recherche scientifique française !
Texte adopté en assemblée générale, le 4 avril 2003, par le personnel des laboratoires de recherche de l'Institut Cochin
Une série de choix politiques a amené la recherche scientifique française dans une situation si catastrophique que sa survie même en est compromise.
Les choix des gouvernements qui se sont succédé depuis plusieurs années ont amené le budget de la recherche à un niveau dérisoire, incompatible avec les exigences de la compétition internationale. Un exemple : en 2002, le budget du NIH (National Institute of Health, équivalent de l'Inserm), était 50 à 60 fois supérieur à celui de l'INSERM (1), pour un rapport de populations de 5. Le gouvernement actuel vient de frapper ce budget 3 fois de suite. Fin 2002, une première baisse des budgets 2003 du CNRS et de l'INSERM a été décidée, au moment même où, pris dans les mêmes difficultés économiques, les Etats-Unis choisissaient, d'augmenter le budget du NIH de 15% ! En mars 2003, une baisse de 2% des dépenses publiques françaises a été décidée, répartie inégalement selon les secteurs. Pour le secteur de la recherche, cette baisse n'a pas été de 2% mais de plus de 9%. A cette annulation de crédits se sont immédiatement rajoutés 20% de gels de crédits (au cas où de futures annulations seraient nécessaires en cours d'année), ce qui porte à environ 30% la diminution de crédits réellement disponibles pour les organismes de recherche (tout cela, hors salaires, bien entendu). Mais comme environ la moitié de ces crédits servent à faire face à des dépenses incompressibles (batiments, fluides, frais d'animalerie), la diminution de crédits de fonctionnement disponibles pour les équipes est supérieure à 50 % ! Nous ne sommes donc pas face à une petite réduction de 2%, mais face à une baisse catastrophique, qui risque d'arrêter de nombreuses recherches.
Dans quel état sont les équipes de recherche, au même moment ? Elles sont mal en point, pour des raisons qui ne sont pas récentes, mais qui vont en s'aggravant. L'équilibre de ces équipes de recherche tient sur 3 pieds, d'importance égale : chercheurs, ITA (ingénieurs+ techniciens+ administratifs), et étudiants (doctorants + post-doctorants). Depuis des années, cet équilibre est de plus en plus compromis par la réduction systématique, inexorable, du nombre d'ITA, compromettant très sérieusement le fonctionnement des équipes et des Instituts. Quant aux étudiants, il semble que tout soit fait pour les décourager de se tourner vers la recherche, et ils commencent, hélas, à avoir bien compris ce message. Leur travail de thèse (temps plein, intense, productif, à bac+6 à + huit) est rémunéré au niveau du SMIC, et pour certaines bourses, sans couverture sociale. Mais surtout, la récompense de ces efforts est un risque de plus en plus élevé de se retrouver au chômage à la fin de leur cursus, lorsqu'ils auront 32-35 ans (risque exceptionnellement haut pour ce niveau d'études). C'est en bouchant leur avenir, en leur proposant des moyens de travail incompatibles avec la compétition internationale, qu'on favorise la fuite de jeunes talentueux, formés au terme de longues études, vers les pays qui, investissent dans la recherche et récolteront les fruits des fausses économies de la France sur son dispositif de recherche.
Lorsque, dans ces conditions, le gouvernement continue d'affirmer que la recherche reste une priorité, les équipes de recherche ont le sentiment qu'on se moque d'elles.
Certains pensent que le Plan Cancer démontre la bonne volonté du gouvernement en faveur de la recherche. De la recherche clinique et appliquée dans ce domaine, oui, tant mieux. Mais dans l'Institut National du Cancer qui sera le fer de lance de ce plan, il n'y aura pas de recherche fondamentale. Et la plaquette officielle souligne bien que le fonctionnement de cet Institut sans recherche fondamentale préfigure la réorganisation de la recherche en France. Comment peut-on oublier que les scanners et l'IRM utilisés par les cancérologues aujourd'hui sont construits sur des principes mis au point dans des laboratoires de physique fondamentale, qui ne se préoccupaient pas du cancer ? Et au-delà, comment faire semblant d'ignorer que la plupart des avancées majeures de la recherche biomédicale viennent de découvertes fondamentales ?
La France a besoin d'une recherche fondamentale de qualité ?et pas seulement en biologie ou en physique-, mais le gouvernement semble penser différemment. En effet, on entend dire : "la recherche publique française n'offre pas assez de retour sur investissement". Mais peut-on accepter que tout s'évalue en terme de valeur ajoutée ou de retour sur investissement ? Dire cela aujourd'hui, n'est-ce pas s'apprêter à dire demain que l'éducation (ou les malades, les retraités, les personnes handicapées) n'offre pas assez de retour sur investissement ? Il semble bien que ce qui est en train de se jouer pour la recherche s'inscrive dans un cadre beaucoup plus large, celui de la privatisation des services publics au sein de l'OMC (2). Les citoyens français sont-ils favorables à une privatisation générale des services publics, et en particulier de la recherche fondamentale ?
Ce qui se prépare, ce ne sont pas de petites difficultés temporaires, mais c'est la mort annoncée de la recherche publique de notre pays. Cela concerne l'avenir de la France, cela concerne tous les citoyens de ce pays.
(1) Le budget du NIH était de 23,6 milliards de $ en 2002 et il est de 27,3 milliards de $ en 2003 ; celui de l'INSERM pour 2002 était de 0,445 milliards d'euros, et si rien n'est fait, il passera à 0,311 milliards d'euros en 2003 ! (2) Les propositions pour la renégociation de l'AGCS (Accord Général pour le Commerce des Services), dans le cadre de l'OMC, devaient être déposées pour le 31 mars, date qui vient d'être repoussée au 14 avril.K... sans avenir?Appel des doctorants et post-doctorants de l'Institut Cochin pour sauver la Recherche publique en France.
Les récentes coupes budgétaires dans le financement de la recherche publique (décret n° 2003-226 du 14 mars 2003) ont soulevé une vive inquiétude de la part des personnels, qui voient mal comment maintenir une recherche de qualité dans ce contexte. Les doctorants et post-doctorants de l'Institut Cochin souhaitent inscrire leur mouvement de contestation dans un cadre plus large. En effet, cette nouvelle coupe de crédits, si elle frappe par son ampleur sans précédent et l'opportunisme mesquin de son annonce au lendemain de la guerre, ressort d'une logique générale de privatisation de la Recherche de notre pays. Aujourd'hui, nous refusons cette logique.
Depuis des années, la part de financements privés augmente dans les budgets des laboratoires, et celle du financement public ne cesse de diminuer. Qu'il s'agisse d'entreprises ou de fondations, leur apparente contribution à l'innovation accompagne en réalité la frilosité des pouvoirs publics à prendre en charge cet effort. Conséquence, la thématisation de la recherche scientifique autour de sujets qui intéressent les investisseurs l'oriente inévitablement vers les pôles porteurs de marchés, et étouffe progressivement toute possibilité d'une recherche fondamentale libre. La Science est un outil de liberté pour l'Homme. Elle s'exerce par la recherche fondamentale qui permet d'accroître les connaissances et la compréhension du monde, et qui est aussi le socle indispensable d'une recherche appliquée de qualité.
Le désengagement de l'Etat touche directement les doctorants (BAC +5) et post-doctorants (BAC + huit) qui représentent le tiers du personnel des laboratoires. Ils sont plongés dans une situation précaire à plusieurs titres :
SMIC pour les 75 % de doctorants rémunérés.
Statuts sociaux souvent inexistants, car nombre de bourses n'offrent ni cotisation ni protection sociale, ce qui constitue une forme de travail au noir légalisé.
Perspectives d'avenir inexistantes : 4 ans après leur thèse, 39 % des jeunes docteurs formés dans les laboratoires de l'INSERM sont sans emploi (source INSERM).
Nous avons choisi cette voie par passion, sans compter notre temps pour faire avancer nos recherches. Nous demandons à avoir les moyens concrets de travailler. Nous demandons à sortir d'une situation où la recherche publique sait avoir besoin de nous comme petites mains, mais ne se donne pas les moyens de nous recruter par la suite et d'assurer ainsi sa pérennité. Nous voulons, enfin, que chacun ouvre les yeux sur l'absurdité d'une logique de privatisation de la Science qui condamne la recherche publique et sacrifie la recherche fondamentale.
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