Bonjour
je tente de lancer un fil sur un titre un peu abscons, sans savoir si il y a vraiment matière un débat, à partir d'une réflexion que je me suis faite sur la dynamique générale de la société industrielle, et plus particulièrement sur une caractéristique qui dépasse un peu le problème devenu assez populaire de "croissance vs décroissance (voire effondrement)".
Cette question m'est venue à partir de l'analyse de l'origine des difficultés financières de beaucoup d'universités (dont celle où je travaille), difficultés en partie (certes pas seulement) dues à une dérive de la masse salariale, due à ce qu'on appelle techniquement le "glissement vieillesse technicité", ou GVT, qui est le fait que les salaires individuels ont tendance à monter avec le temps , avec la montée en grade, et donc à faire croitre la masse salariale.
Dans un régime stationnaire où le nombre d'embauches et de départs en retraite est constant, ça ne pose pas de problème, car l'augmentation de chaque salaire est exactement compensée, au bout, par le fait que les retraités partent avec un salaire maximal et sont remplacés par un jeune avec un salaire minimal, ce remplacement compensant l'augmentation de salaire pendant la carrière. Comme une vis d'Archimède, ou la gamme de Shephard , les salaires augmentent en restant globalement constant.
mais ceci coince quand il n'y a plus ou pas assez de départs en retraite, parce que là l'essentiel de la population vieillit sans avoir de remplacement, donc les salaires montent en "étranglant" le budget. Or c'est précisément ce qui se passe depuis quelques années, surtout dans les matières scientifiques, car il y a eu très peu d'embauches dans les années 74 à 84, sous le septennat de Giscard d'Estaing en particulier, et donc très peu de départ 35 ans plus tard. Pas spécialement pour une mauvaise volonté politique, mais parce que l'université a considérablement augmenté dans les années 60 avec le baby boom d'après guerre, et surtout les évolutions sociologiques majeures qui ont amené des générations de fils d'ouvrier et d'agriculteurs à des études supérieures, et qu'avec l'embauche d'enseignants pour la plupart jeunes, les besoins étaient saturés. (Le phénomène a moins touché les disciplines littéraires car les âges d'embauche sont plus variés, on passe plus de temps à soutenir une thèse et il n'est pas rare d'embaucher des enseignants ayant eu déjà une carrière dans le secondaire, ce qui tend à étaler la pyramide des âges et donc l'âge des départs en retraite).
En dernière analyse, il s'avère donc que les difficultés actuelles de l'université sont la conséquence d'oscillations transitoires dues à un régime initial fortement variable, comme on peut l'observer dans la fermeture d'un circuit électrique par exemple avec une tension "échelon".
La durée caractéristique d'une oscillation est celle d'une génération, environ 35 ans, et on est très loin d'avoir pu "amortir" l'oscillation initiale (pire, les difficultés financières conduisent même à différer le remplacement des quelques départs en retraite , en creusant le phénomène au lieu de l'amortir).
A la réflexion , ce problème me semble ne pas concerner que l'université, mais aussi tous les déploiements assez massifs qui ont eu lieu après les années 60. On a le même phénomène avec les centrales nucléaires par exemple : on en a construit plein pendant les années 70, puis quand on en a eu assez on arrêté..et maintenant elles arrivent toutes en fin de vie à peu près en même temps, et il semble très difficile de les remplacer : on parle d'un effet "falaise".
On pourrait à mon avis en dire autant de plein d'infrastructures industrielles, par exemple l'écroulement du pont de Gênes a été attribué à des infrastructures vieillissantes, pour la plupart également construites dans les années 50 ou 60.
Par delà l'épuisement progressif 'lent" des ressources , il me semble qu'il y a une difficulté liée à l'absence d'état stationnaire et à la gestion d'oscillations de relaxation... Qui n'auront d'ailleurs probablement pas le temps de se relaxer avant que les ressources n'aient forcément décru.
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