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Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre ?



  1. #931
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?


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    Citation Envoyé par Jiav
    Qu'appelles-tu "non manipulable"?
    Faire des prédictions avec.

    Même si on ne connaît pas les décimales d'un nombre comme , on peut répondre à la question "quelle est la n-ième" pour tout n. Qui plus est cela se décrit avec un algorithme dont la description est finie. Le symbole contient d'une certaine manière cet algorithme. Le symbole résume une certaine connaissance commune, dont les algorithmes permettant d'en calculer des caractéristiques le distinguant de tout autre nombre.

    S'il existe un nombre réel non compressible, par définition il n'existe pas d'algorithme de longueur finie permettant d'ssocier à n la n-ième décimale.

    Si la prédiction de quelque chose dépend de ce nombre, le mettre sous forme symbolique est bien sûr possible, mais trompeur, car le symbole ne contient rien qui permette de traduire la prédiction en quelque chose de mesurable, de testable.

    Prenons un cas tel que chaque mesure impliquant ce nombre dépende d'une "partie" du nombre, mais qu'aucune autre mesure passée ou future ne dépendent de cette même partie. Alors, mettre un symbole sur le nombre ne sert à rien, ni avant la mesure (pas d'algo te donnant la partie pertinente du nombre), ni après (pas d'application prédictive de la partie du nombre que tu as acquise). (*)

    Dire que l'on peut "manipuler" le nombre sous forme symbolique est une arnaque, parce que le symbole est une coquille vide. Je préfère le voir comme "non manipulable".

    Le même truc s'applique pour l'infini des ordinaux. Si on l'appelle "bip" ça ne sert à rien, parce que "bip+1" est un non-sens, un objet symbolisé mais qui n'a pas de sens mathématique. Le symbole est non manipulable, on ne peut pas l'entrer dans quelque chose qui ait un sens.

    Cordialement,

    (*) L'interprétation d'Everett des mondes multiples est un peu comme ça. Chaque "présent" est peut-être le début du développement d'un nombre réel non compressible, dont les binales sont liées aux débranchements successifs du passé. La connaissance des binales "passée" ne te donne aucune information sur "tes" binales futures... (En fait le problème est sur la notion de "ton" futur...)

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    Dernière modification par invité576543 ; 29/06/2006 à 06h08.

  2. #932
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Bonjour,

    Citation Envoyé par mmy
    Même si on ne connaît pas les décimales d'un nombre comme , on peut répondre à la question "quelle est la n-ième" pour tout n. Qui plus est cela se décrit avec un algorithme dont la description est finie. Le symbole contient d'une certaine manière cet algorithme. Le symbole résume une certaine connaissance commune, dont les algorithmes permettant d'en calculer des caractéristiques le distinguant de tout autre nombre.
    Oui, je te suis parfaitement sur ce point, mais est-ce que tu admets que l'algorithme qui calcule exactement ne peut pas être mis sous la forme d'une fonction qui serait exploitée à différentes étapes d'un algorithme séquentiel ?
    Citation Envoyé par mmy
    S'il existe un nombre réel non compressible, par définition il n'existe pas d'algorithme de longueur finie permettant d'ssocier à n la n-ième décimale.
    S'il existe ... mais peux tu exhiber un seul exemple ?

    Citation Envoyé par mmy
    Prenons un cas tel que chaque mesure impliquant ce nombre dépende d'une "partie" du nombre, mais qu'aucune autre mesure passée ou future ne dépendent de cette même partie. Alors, mettre un symbole sur le nombre ne sert à rien, ni avant la mesure (pas d'algo te donnant la partie pertinente du nombre), ni après (pas d'application prédictive de la partie du nombre que tu as acquise).
    Et oui, mais le problème c'est que tu es d'abord obligé de postuler l'existence d'un infini intrinsèque. Une infinité de décimales, cela peut "s'imaginer", mais pas se formaliser ... sauf à l'aide de symboles. Donc quelque part, il me semble que ton raisonnement se mord la queue, non ? D'un autre côté, tu pourrais dire qu'il est un peu facile pour moi de postuler l'inexistence de quelque chose qui ne peut être observé, alors qu'on peut "l'imaginer".

    Cordialement,
    Argyre

  3. #933
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par mmy
    1)A partir de ce sont des infinis de plus en plus grands.

    2)Le point amusant est que l'ensemble (?) des ordinaux eux-mêmes est munissable d'un ordre total, mais pourtant ne peut pas appartenir à une classe quelconque d'ordinal. Les ordinaux, pris tous ensembles, présentent une sorte d'infini ordonnable qui dépasse tout infini ordonnable. Une sorte d'infini de la notion d'infini, inattrapable...

    Cordialement,
    Bonjour mmy,

    1) je crois que tu fais une erreur ou que ton propos est ambigu

    la notion de grandeur renvoie, je crois, à celle de cardinal.. et oméga (désolé je sais pas imprimer la lettre) a le même cardinal que 2 x oméga

    2) est -ce que tu fais allusion au paradoxe de Burali-Forti ?

    Concernant une question posée plus haut, les alephs supérieurs à aleph 0 sont (là encore je ne suis pas sûr) dit inaccessibles... parce qu'on ne peut démontrer que alph 1 est égal à 2 puissance aleph zero (hypothèse du continu)

  4. #934
    invite73192618

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    S'il existe ... mais peux tu exhiber un seul exemple ?
    Le nombre omega de Chaitin
    C'est à cause de lui que je m'intérroge sur la non "manipulibilité" des réels incalculables: omega est incalculable mais reste parfaitement défini. A partir du moment où c'est défini on peut imaginer jouer avec. Par exemple on pourrait définir un omega1 construit non pas sur la condition d'arrêt des MT, mais sur la condition d'arrêt des MT avec oracle, puis un omega2 en introduisant des oracles de second niveau, etc. tous ces omegas sont alors tous parfaitement défini mais toujours aussi incalculables.

    Est-il alors impossible de répondre à des questions "manipulant" les omega, par exemple omega=?omega1, ou encore est-ce que l'ensemble des réels non calculables correspond à l'ensemble des omega?

    On s'écarte du sujet et on manque de compétence (mes exuses si ce n'est pas le cas!). Je vais aller poser la question aux matheux

    mmy => effectivement mes connaissances sont insuffisantes pour a permière réponse... je me renseigenrais un de ces 4

    quantat => tu mentionnes oméga mais ce n'est pas le même right?

  5. #935
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Jiav
    Le nombre omega de Chaitin
    C'est à cause de lui que je m'intérroge sur la non "manipulibilité" des réels incalculables: omega est incalculable mais reste parfaitement défini.
    Bonjour,

    Quand tu dis qu'il est "parfaitement défini", il est en fait défini par une suite de symboles constituant sa définition, donc on revient vers le symbolique. Et cela ne prouve pas qu'il puisse être représenté par une suite infinie de chiffres. Encore une fois, on ne peut pas démontrer que cette suite existe, d'autant plus qu'il n'est pas calculable.
    C'est en tout cas comme ça que je vois les choses.

    Cordialement,
    Argyre

  6. #936
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par quantat
    Bonjour mmy,

    1) je crois que tu fais une erreur ou que ton propos est ambigu

    la notion de grandeur renvoie, je crois, à celle de cardinal.. et oméga (désolé je sais pas imprimer la lettre) a le même cardinal que 2 x oméga
    Bonsoir,

    Je ne parlais pas de grandeur, mais de la simple notion de théorisation des maths. Veux-tu dire que si on acceptait un infini réel, alors ce serait limité aux cardinaux? (Au passage tous les cardinaux sont représentés dans les ordinaux il me semble.)

    2) est -ce que tu fais allusion au paradoxe de Burali-Forti ?
    Très exactement!

    Concernant une question posée plus haut, les alephs supérieurs à aleph 0 sont (là encore je ne suis pas sûr) dit inaccessibles... parce qu'on ne peut démontrer que alph 1 est égal à 2 puissance aleph zero (hypothèse du continu)
    Ca, c'est une question sur les cardinaux...

    Cordialement,

  7. #937
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Argyre
    S'il existe ... mais peux tu exhiber un seul exemple ?
    Bonsoir,

    Tu sais très bien que c'est une question piège. L'axiome du choix permet d'en "exhiber" un exemple, sans le construire. C'est à ça qu'il sert, ce fichu axiome; à contourner le piège de la question d'exhiber un nombre sans le construire.

    C'est un axiome en math. Cela peut être un axiome en physique. Il se peut (indécidable!) qu'il existe une constante physique incompressible, mais dont la connaissance totale est nécessaire à la connaissance totale de l'univers.

    Ta position consiste, entre autre, à refuser cette existence. Mais c'est indécidable, il me semble...

    Et oui, mais le problème c'est que tu es d'abord obligé de postuler l'existence d'un infini intrinsèque.
    Je suis d'accord que l'existence d'une constante physique incompressible implique vraisembablement l'admission d'un infini dénombrable "réalisé" (qui existe "dans la réalité"). La question de l'existence d'un infini "réalisé" est indécidable et philosophique, non?

    Cordialement,

  8. #938
    GillesH38a

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Argyre, je pense que tes questions sont trompeuses : tu cherches à prouver que l'Univers est algorithmique en montrant qu'on n'arrive pas à définir une loi non algorithmique. Mais tu assimiles justement la réalité de l'Univers avec les lois que nous utilisons pour le décrire. C'est justement là le point délicat, et le côté circulaire de ton raisonnement.

    On pourrait justement t'objecter que le fait que nous n'ayons toujours pas réussi à trouver une description algorithmique EXACTE de l'Univers semble indiquer au contraire qu'il pourrait avoir une nature profondément non algorithmique, que par nature nous ne savons pas exprimer par des lois, ou même simplement par une description conceptuelle.

    Nous n'aurions accès qu'à une "interface " algorithmique de l'Univers, comme le cerveau est capable d'effectuer des algorithmes (opérations, tris...) sans être lui-même nécessairement au départ de nature algorithmique (pas de MT associée de manière évidente).

    Cordialement

    Gilles

  9. #939
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par chaverondier
    Pour pouvoir l'affirmer, il faudrait:
    * donner une définition opérationelle de la notion d'état de conscience (définition grâce à laquelle on pourrait construire un appareil émettant un signal sonore chaque fois qu'une entité possède un état de conscience)
    * donner une définition opérationelle de la notion de souffrance (définition grâce à laquelle on pourrait construire un appareil émettant un signal sonore chaque fois qu'une entité souffre)
    * réaliser de nombreux tests permettant de vérifier que l'affirmation ci-dessus est systématiquement vérifiée (le signal détectant la présence de souffrance s'accompagne systématiquement d'un signal détectant la présence d'un état de conscience). BC
    Bonjour Chaverondier,


    Pardonnez-moi de vous répondre un peu tardivement mais je n’en avais pas le loisir jusqu’alors.

    Ce que vous dites me paraît juste et pose le problème de l’observation de la réalité psychique, de sa nature et de son accessibilité pour la science.

    Vous conviendrez aisément qu’entre un picotement de nez et une douleur comme celle produite par la ponction lombaire –qui est très loin, sans doute, de la pire douleur possible mais qui était suffisante, je l’ai dit, pour me faire sortir du coma- il y a une différence d’ordre quantitatif plus que d’ordre qualitatif. Vous conviendrez peut-être aussi qu’une rage de dents présente une intensité douloureuse moindre que celle produite par la ponction mais supérieure à celle produite par le picotement ... Pour moi, en tout cas, nier l’aspect quantifiable de la réalité psychique associée au picotement, à la rage et à la ponction lombaire serait nier la douleur elle-même. Cet aspect quantifiable inhérent à la douleur est aussi inhérent au plaisir comme il est inhérent à l’effort.

    Le problème se pose quand on parle du statut physique de cette réalité quantifiable. On pourrait par exemple considérer l’effort comme équivalent à une quantité d’énergie. Il existe des formes d’exercices (soulever des poids de telle masse, pédaler à telle vitesse…) qui se prêtent aisément aux tests et permettent d’associer l’intensité d’un ressenti à une quantité d’énergie dépensée. Mais va-t-on dire que l’intensité de ce ressenti lié à la quantité de travail fourni c’est une quantité d’énergie physique dont on a la mesure en joules ? Bien sûr que non car cela serait nier la nature psychique de l’effort ! Va-t-on dire alors que l’intensité de ce ressenti c’est une quantité d’énergie psychique ? Il m’est arrivé pour ma part de l’affirmer même si je précisais que c’était métaphoriquement. Permettez-moi de me citer :

    Si l'énergie de la matière est hors du champ de ma connaissance, il est une autre réalité dont j'ai l'intuition immédiate et quasiment absolue, une réalité que j'appelle -métaphoriquement sans doute- énergie également. Non par simple caprice mais parce qu'elle me donne dans son immédiateté le sentiment même de l'énergie physique, parce qu'elle m'en donne l'idée première de puissance quantifiable. L'énergie électrique, je sais ce que c'est en touchant le fil de clôture sous tension dans la "poignée de châtaignes" que je reçois. L'énergie calorique, je sais ce que c'est en plongeant ma main dans l'eau trop chaude dans le gant de douleur cuisante qui l'enserre. L'énergie "gravifique", je sais ce que c'est dans la crispation de mon bras, dans l'affaissement pénible de mon épaule quand je porte d'une main la valise très lourde. Or, cette énergie-là dont la conscience m'est immédiatement donnée, qui n'existe que par ma conscience et par qui ma conscience seule peut-être existe, cette énergie-là n'est pas a priori dans les atomes. Elle n'a rien non plus de "spirituel", elle est plus grossière peut-être, plus brute, plus stupide que l'énergie "matérielle" qui au moins informe et structure la matière...(réponse à Quetzal du 18/12 à 9H17 dans le fil « que déduire de notre existence ? »)

    Quelque pertinent que soit « humainement » ce que j’ai écrit, cela ne peut être acceptable pour un physicien. Il reconnaît plusieurs types de forces mais il ne connaît qu’une réalité qui se puisse nommer énergie même si elle peut prendre différentes formes (mécanique, électrique, chimique,thermique, atomique…). Dans le cas de l’effort par exemple, il conviendra qu’une énergie thermique (l’effort, ça dépense des calories) va se transformer en énergie mécanique (tension des fibres musculaires) qui va accomplir un travail (poids soulevé par exemple). Mais la supposée énergie psychique : l’effort en lui-même, le physicien ne l’apercevra pas. La seule chose dont il puisse convenir c’est qu’elle existe pour un autre observateur que lui dans d’autres repères que les siens et qu’elle existe comme une réalité quantifiable, même si elle n’est pas mesurable avec son unité de mesure, le joule en l’occurrence. Il peut convenir que cette énergie augmente si le travail effectué augmente et si la dépense calorique augmente ou diminue dans le cas inverse. Pourquoi cela gênerait-il le physicien de convenir que l’effort est une forme particulière de l’énergie qu’on pourrait appeler alors rigoureusement l’énergie psychique puisque cette forme n’existe que pour un observateur à l’intérieur du système que le physicien observe et que cet observateur n’a pas une réalité matérielle autre que celle du système observé ?

    Evidemment si le physicien est un être humain –ce qu’on peut toujours espérer- il conviendra qu’un observateur hypothétique à l’intérieur du corps observé, ce pourrait être lui-même et qu’alors non seulement il peut mais il doit reconnaître que la conscience a réalité sous forme énergétique de la même façon que la réalité matérielle. Un physicien qui ne reconnaîtrait pas cela pourrait torturer sans scrupules de façon horrible un sujet d’expérience. Les hurlements de sa victime, les torsions de son corps ne lui paraîtraient rien qu’une forme mécanique particulière de réactions aux actions opérées sur lui.

    Entre un état de conscience d’intensité minimum, celui par exemple qui suit immédiatement le réveil ou précède l’endormissement, et un état d’intensité maximum, celui qui fait perdre connaissance après une émotion ou une douleur trop forte, il y a une grande marge mais dans laquelle nous ne situons généralement pas les contenus actuels de notre conscience. Mais que nous ne les situons point n’empêche pas de considérer qu’ils ne s’en abstraient pas et qu’ils prennent précisément place sur une échelle graduée des tensions possibles. L’idée que j’ai développée sur le fil : « magnétoencéphalographie et origine des qualias » que tous ces contenus sont directement produits par la modulation de réalités affectives simples n’est évidemment pas du tout vérifiable par l’intuition. Je n’attends pas, bien entendu, que la science la prenne en compte. En revanche je serais assez rassuré d’entendre le discours scientifique suivant qui, peut-être, Chaverondier, pourrait vous convenir :

    « Il est tout à fait probable que le contenu de la conscience phénoménale soit induit par un algorithme d’informations. Il est indubitable d’autre part que ce contenu présente en partie des aspects quantitatifs qui se rapportent aux notions de douleur, de plaisir ou d’effort. La science, au moins au stade actuel de son développement, ne peut déterminer la nature de ses réalités qui échappent à son observation. Par conséquent elle ne saurait prétendre à une connaissance de la conscience phénoménale et elle laisse le soin aux diverses philosophies ou métaphysiques de tenir un discours sur elles. »

    Ce qui pourrait donc vous convenir, Chaverondier –vous me direz bien entendu ce que vous en pensez- ne convient pas du tout à plusieurs esprits sur ce forum. Ils vont décréter que le contenu de la conscience est et n’est qu’un ensemble d’informations. Reprenant l’affirmation de Labori (avec laquelle on ne peut qu’être d’accord) que « l’information n’a ni masse ni énergie », ils comptent ainsi éliminer de la conscience tout ce qui est de l’ordre du quantifiable -on pourrait dire aussi du concret- et en faire ainsi un phénomène tout aussi abstrait que celui par lequel agit et se transforme l’information dans les machines. Avec cette conception-là la réponse à la question de ce fil –telle qu’elle n’est pas exactement posée mais telle que tout le monde l’a comprise- ne fait aucun doute : oui, bien sûr, qu’un ordinateur pourra être conscient.

    Bien sûr que non. Telle est sans aucune espèce de nuance ma propre réponse. Un automate serait-il considérablement perfectionné, pourrait-il faire face à toutes les situations que rencontre l’expérience humaine, pourrai-il adopter dans celles-ci les comportements les plus inattendus n’aurait pas l’embryon de conscience du nématode, animalcule pourvu de 306 neurones et qu’on pense être sensible déjà à la douleur…

    Voilà, me direz-vous, une affirmation de croyant. Et vous n’aurez pas tort. Oui je crois, Chaverondier. Je crois et ma foi pourrait être dite religieuse car reliée ( de religere) à l’origine du monde. Une foi qui porte un très beau nom, Chaverondier, puisqu’il commence par le mot qui veut dire mère en latin comme si par une étymologie apparente s’exprimait en lui l’idée même d’engendrement et de fécondité, un mot qui commence par « mater » donc : le matérialisme.

    C’est vrai qu’il y a peut-être plusieurs matérialismes. Je lisais récemment dans une revue publiée sur le net un article intitulé : « le nouveau matérialisme », un article qui défendait des thèses assez voisines de celles de Jiav ou de l’ « idéaliste » Algyre. Il y aurait donc un nouveau matérialisme comme il y a une nouvelle philosophie ou une nouvelle cuisine. Le mien date certainement un peu plus. Mais m’est avis qu’il peut encore servir. Il s’articule sur l’idée simple que tout dans l’univers (et en particulier la conscience) est produit par la matière. Mais il s’articule aussi sur l’idée que cette matière n’est pas quelconque et que si cette matière était un peu différente de ce qu’elle est l’évolution qui conduit à la conscience n’aurait jamais eu lieu. Il n’y a pas à chercher la raison de cela dans une réalité autre que la matière elle-même. Mais il n’y a pas non plus à faire de la matière –sinon en la déconsidérant- un vague substrat interchangeable, une sorte de lego ou de meccano, qui n’est là que pour donner assiette à des réalités qui existeraient sans elle. Les intervenants sur ce fil n’ont pas besoin de déclarer leur idéalisme pour témoigner de leur mépris envers la matière. Il suffit qu’ils disent que la conscience émergera tôt ou tard dans les machines de la complexité des algorithmes. Dire que la conscience émerge de la complexité c’est bien dire qu’elle n’émerge pas de la matière. Ce n’est pas nier la nécessité d’un support matériel sans doute mais c’est dire que ce support n’est présent que pour permettre un tissu de relations, de connexions par lesquelles s’élaborent les algorithmes. Les caractéristiques propres, précises, universelles de la matière que la science ne cesse de découvrir n’intéressent pas les « algorithmistes ». Qu’il y ait trois forces fondamentales ou cinq, que les relations de ces forces soient déterminées par tels paramètres plutôt que tels autres, peu leur en chaut.

    Cela m’importe au contraire même si les chiffres des choses n’ont pas encore livré à la science beaucoup de leurs secrets. Mon imagination très réduite ne me laisse pas apercevoir d’autres voies à l’apparition de la conscience que celle que la matière a prise sur cette terre et cette voie me semble tracée par une particularité que la matière aurait universellement. Ce qu’on aperçoit d’elle dans les galaxies les plus lointaines nous montre jusqu’alors qu’elle évolue pareillement partout, qu’elle y fabrique les mêmes produits : les atomes de la table de Mendeleiev. Sans doute ne peut-on exclure par exemple que la vie soit apparue ailleurs (et donc ensuite la conscience) en partant d’un alphabet de bases (guanine, cytosine… je ne me souviens plus des deux autres) différent de celui qui existe dans absolument tous les êtres vivants connus de cette terre. La science n’exclut jamais l’existence de ce qu’elle n’a pas découvert encore et n’empêche personne de rêver à l’inouï. Mais il faut bien à un moment donné se forger une opinion sur le réel. Peut-être vous contentez-vous comme moi, Chaverondier, de lui donner la forme de ce que la science nous en déjà fait connaître…

    Cordialement,

    Clément

  10. #940
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par clementdousset
    « Il est tout à fait probable que le contenu de la conscience phénoménale soit induit par un algorithme d’informations. Il est indubitable d’autre part que ce contenu présente en partie des aspects quantitatifs qui se rapportent aux notions de douleur, de plaisir ou d’effort. La science, au moins au stade actuel de son développement, ne peut déterminer la nature de ces réalités qui échappent à son observation. Par conséquent elle ne saurait prétendre à une connaissance de la conscience phénoménale et elle laisse le soin aux diverses philosophies ou métaphysiques de tenir un discours sur elles. »
    Bonjour,

    Long message très intéressant, mais qui laisse un peu sur sa soif. L'articulation de la thèse est un peu difficile à suivre, à cause de deux virages exposés un peu vite (vu du lecteur que je suis).

    Le premier virage est celui lié à la relation entre science et les notions de douleur, plaisir ou effort. Une première question est cette notion de "nature de réalité": qu'est ce que cela veut dire? Il y a -t-il des sensations ou états de conscience dont la "nature de réalité" a été déterminée? (Les couleurs? Le jaune par exemple? La faim? La libido?) Si oui, comment s'établit la frontière entre les sensations qui ont une "nature de réalité" déterminée par la science, et les autres?

    Autre question, est-ce que justement la magnéto... et autres techniques d'observations du fonctionnement du cortex, associées à l'observation du comportement (y inclus les indications verbales du patient quand à son introspection) ne sont pas des observations qui n'échappent pas à la science?

    (L'autre virage est celui entre matérialisme et, à ce qu'il semble, une matière particulière liée à la conscience, mais ce sera pour un prochain épisode...)

    Cordialement,

  11. #941
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par mmy
    Bonjour,

    Long message très intéressant, mais qui laisse un peu sur sa soif. L'articulation de la thèse est un peu difficile à suivre, à cause de deux virages exposés un peu vite (vu du lecteur que je suis).

    Le premier virage est celui lié à la relation entre science et les notions de douleur, plaisir ou effort. Une première question est cette notion de "nature de réalité": qu'est ce que cela veut dire? Il y a -t-il des sensations ou états de conscience dont la "nature de réalité" a été déterminée? (Les couleurs? Le jaune par exemple? La faim? La libido?) Si oui, comment s'établit la frontière entre les sensations qui ont une "nature de réalité" déterminée par la science, et les autres?

    Autre question, est-ce que justement la magnéto... et autres techniques d'observations du fonctionnement du cortex, associées à l'observation du comportement (y inclus les indications verbales du patient quand à son introspection) ne sont pas des observations qui n'échappent pas à la science?

    (L'autre virage est celui entre matérialisme et, à ce qu'il semble, une matière particulière liée à la conscience, mais ce sera pour un prochain épisode...)

    Cordialement,
    Bonjour Michel,

    "Un long message aux virages rapides..." La hantise de nous autres, intervenants sur ces forums, c'est de savoir si on est trop long ou pas assez. Le nombre des messages que j'ai écrits pour futura est ridiculement petit par rapport à d'autres mais leur contenu est déjà suffisamment étoffé pour que je ne puisse pas le rappeler à chaque fois. Sur deux points que tu abordes, question du quale ("le jaune") et de la magnétoencéphalographie, j'ai lancé une petite discussion : "magnétoencéphalographie et origine des qualia" où se trouvent au moins les trois quarts de ce que j'ai rédigé pour Futura. Je viens de vérifier ce dont j'avais vaguement l'impression, c'est que tu n'es jamais intervenu sur ce fil. Je ne sais donc pas ce que tu en as lu. Si tu n'en as rien lu et que tu n'as pas le temps de tout parcourir, lis au moins les messages 46 et 47("suggestion sur l'origine des sensations") et fais moi part de tes demandes d'éclaircissement ou des objections que tu penses déjà pouvoir me faire. A bientôt.
    Cordialement.

    Clément

  12. #942
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par clementdousset
    fais moi part de tes demandes d'éclaircissement ou des objections que tu penses déjà pouvoir me faire.
    Bonjour,

    J'avais lu la moitié de la discussion, dont les messages cités. Je les ai relus. Mais je ne trouve rien qui réponde vraiment à mes questions. En particulier qui éclaircirait le deuxième virage.

    Le problème principal que je vois, une objection d'une certaine manière, est qu'il manque la partie principale du fonctionnement du cerveau. Tu cites Laborit, mais pas l'une de ses phrases clé: la fonction du cerveau est d'agir, pas de penser ou de ressentir. Tu te concentres sur la sensation et la conscience. Mais ce ne sont, à mon sens, que des intermédiaires, des étapes d'un traitement qui a pour but la décision et l'action.

    Ma position est, à ce que je comprends de celle des autres, proche de celle de Jiav. Mais elle inclus une vision du traitement de l'information (mes excuses pour ce terme tabou) qui va des entrées (sensations primaires) aux muscles, à l'action (1). Aller de la sensation au quale n'est que la moitié, au plus, du chemin. Pour qu'une description de la conscience me satisfasse, il faut qu'elle inclut le rôle de la conscience dans la décision et l'action, le "je" qui décide, et pas seulement le "je" qui perçoit... Ou encore, les qualia ne sont que des outils, des étapes, dont l'existence ne peut s'expliquer que par leur rôle dans le processur de décision menant à l'action.

    Cordialement,

    (1) La notion de flot d'information entrante (via les sens) et la notion d'information sortante (commande des muscles) ne me pose pas de problème spécifique; la notion de signal semble adaptée pour ces cas. La notion d'information à l'intérieur même du cortex est plus complexe, je l'admets. Néanmoins, cela me semble plus simple de penser à un fonctionnement allant de l'information à l'information en passant par un traitement algorithmique, que d'ajouter une hypothèse de passage via "autre chose"...

  13. #943
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par mmy
    Bonjour,

    J'avais lu la moitié de la discussion, dont les messages cités. Je les ai relus. Mais je ne trouve rien qui réponde vraiment à mes questions. En particulier qui éclaircirait le deuxième virage.

    Le problème principal que je vois, une objection d'une certaine manière, est qu'il manque la partie principale du fonctionnement du cerveau. Tu cites Laborit, mais pas l'une de ses phrases clé: la fonction du cerveau est d'agir, pas de penser ou de ressentir. Tu te concentres sur la sensation et la conscience. Mais ce ne sont, à mon sens, que des intermédiaires, des étapes d'un traitement qui a pour but la décision et l'action.

    Ma position est, à ce que je comprends de celle des autres, proche de celle de Jiav. Mais elle inclus une vision du traitement de l'information (mes excuses pour ce terme tabou) qui va des entrées (sensations primaires) aux muscles, à l'action (1). Aller de la sensation au quale n'est que la moitié, au plus, du chemin. Pour qu'une description de la conscience me satisfasse, il faut qu'elle inclut le rôle de la conscience dans la décision et l'action, le "je" qui décide, et pas seulement le "je" qui perçoit... Ou encore, les qualia ne sont que des outils, des étapes, dont l'existence ne peut s'expliquer que par leur rôle dans le processur de décision menant à l'action.

    Cordialement,

    (1) La notion de flot d'information entrante (via les sens) et la notion d'information sortante (commande des muscles) ne me pose pas de problème spécifique; la notion de signal semble adaptée pour ces cas. La notion d'information à l'intérieur même du cortex est plus complexe, je l'admets. Néanmoins, cela me semble plus simple de penser à un fonctionnement allant de l'information à l'information en passant par un traitement algorithmique, que d'ajouter une hypothèse de passage via "autre chose"...
    Comment faire ? Je m'aperçois que je m'adresse à des gens qui ont l'esprit complètement transformé, j'allais dire perverti, par l'informatique. La douleur n'est pas de l'inforrmation, ça n'est pas quelque chose qui préexiste à la conscience. La douleur ça est, c'est un pur étant. Et la conscience, ça vient par cet étant même. La connaissance de la douleur c'est vraiment la co-naissance de la conscience. La conscience n'est pas une entité a priori qui existerait de façon figée et dans laquelle entrerait la douleur et dont elle ressortirait. La conscience c'est l'enveloppe de la douleur qui croît avec elle et qui décroît avec elle. Quand on sent plus rien, il n'y a plus de conscience. Et quand on sent très fort il y a beaucoup de conscience. Est-ce qu'il y a de l'intelligence à ce moment-là? mais on s'en fiche de l'intelligence, on s'en fiche. L'intelligence, y a des machines pour ça et, je le veux bien, les connexions des neurones peuvent faire une machine. Mais même dans le cerveau ça n'est pas la machine qui sent. la preuve c'est qu'lle peut fonctionner sans que vous ne sentez rien (cas du somnambulisme par exemple) ou que vous pouvez sentir sans qu'elle fonctionne. Lorsque vous sentez une douleur qui se prolonge, il n'y a pas de travail cybernétique, il y a une modulation de nature constante. Bien sûr que les neurones fonctionnent alors mais il ne fonctionnent pas comme les conducteurs d'informations constituant un algorithme, ils fonctionent comme des modulateurs synchronisés d'oscillations qui produisent une forme unique dont l'existence se prolonge. Tu te dis en recherche de la façon dont sont prises les décisions mais si tu n'as pas compris l'aspect énergétique de la conscience, si tu persistes à en faire un ordinateur de chair un peu plus perfectionné que les ordinateurs de métal, à quoi bon chercher plus loin!

    Cordialement,

    Clément

  14. #944
    invité576543
    Invité

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    [mode = méta]

    Citation Envoyé par clementdousset
    Je m'aperçois que je m'adresse à des gens qui ont l'esprit complètement transformé, j'allais dire perverti, par l'informatique.
    Ce type de rhétorique te met dans une catégorie bien particulière d'intervenants dans les fora... Si tu n'as rien de mieux pour répondre aux critiques, ce n'est peut-être pas la bonne place ici...

    [/méta]

    La douleur n'est pas de l'inforrmation, ça n'est pas quelque chose qui préexiste à la conscience. La douleur ça est, c'est un pur étant.
    Bonjour,

    Pas pour moi. La douleur c'est (au moins) quelque chose qui module les actions: c'est un simple constat. Avoir mal à une articulation amène à choisir des actes, des mouvements, qui minimisent l'usage de l'articulation. Ca module les comportements plus complexes, comme éviter les dangers qui amèneraient à une fuite rendue difficile par la blessure. Etc. La douleur a une fonction. Qui plus est, dans mon vocablaire personnel, les seuls facteurs d'une décision sont des informations (1) et des jugements de valeur (des buts, des évaluations de situations, de futurs, ...). En tant qu'intervenant dans la décision, la douleur est une sorte de mélange d'information et de jugement de valeur. La notion de "pur étant" est totalement ortogonale à ce genre d'analyse.

    Tu te dis en recherche de la façon dont sont prises les décisions mais si tu n'as pas compris l'aspect énergétique de la conscience, si tu persistes à en faire un ordinateur de chair un peu plus perfectionné que les ordinateurs de métal, à quoi bon chercher plus loin!
    Je ne comprens pas "persister à en faire". Et je n'ai certainement pas compris "l'aspect énergétique de la conscience", qui, même après lu ce que tu écris, m'apparaît toujours comme une suite de mots sans sens.

    Le point que je cherchais à faire est plus simple que ce à quoi tu sembles répondre. Il y a plusieurs manières d'aborder le fonctionnement cérébral. L'une est l'introspection. Mais une autre est simplement le comportement vu de l'extérieur. Et là, les actes, les décisions sont premières. On ne peut pas se limiter à l'introspection, pas plus qu'on peu se limiter au comportement visible de l'extérieur.

    Tu proposes une chaîne qui va de la sensation aux qualia, ces derniers étant relatifs qu'à l'introspection. Mais pour l'aspect comportemental, il faut que tu complètes par une chaîne qui va des qualia, de la conscience, aux décisions, aux commandes des muscles, et in fine aux actes visibles, au comportement.

    Il y a des chaînes (arc réflexes) qui vont de la détection (chaleur intense) à la commande musculaire directe. Pas de qualia, pas de conscience. Et pourtant c'est une fonction du système nerveux. Une partie importante des neurones de l'organisme participent à des fonctions "inconscientes", pilotant divers muscles en fonction de divers capteurs (système végétatif, ...). Dans un autre ordre d'idée, ce que font les trois/quatre couches de neurones de la rétine commence à être bien analysé. Et on sait qu'il y a des zones importantes du cerveau dont la seule fonction est de s'occuper des signaux qui viennent de la rétine pour les "présenter" différemment, indépendamment de toute décision.

    Tes descriptions ne s'occupent que d'une toute petite partie du fonctionnement dusystème nerveux pour en tirer des conclusions de grande portée. Maintenant, si tu faisais l'inverse, c'est à dire partir des fonctions simples de certains ensembles de neurones, et d'en faire un modèle général... Ensuite on peut se poser la question si le modèle général peut AUSSI expliquer la conscience, les qualia, etc. Et c'est seulement une réponse négative qui pourrait amener à rechercher une explication distincte à la conscience, aux qualia, distincte de celle appliquée aux fonctions plus élémentaires du système nerveux (fonctions constatée en dehors de toute instrospection, comme chaînes capteurs-muscles).

    Mais tu cites des systèmes nerveux très simples (nématode, j'imagine que tu parles de Caenorhabditis elegans, les nématodes forment un groupe plus riches que les mammifères...), de manière qui suggère que même avec si peu de neurones il y a quelque chose de spécial. Mais dans ce cas, faire la même chose avec un support non biologique ne pose pas de problème majeur. C'est quoi alors? la même chose ou pas la même chose? Bien sûr, tu peux dire, "ce n'est pas la même chose, parce que l'un est biologique et l'autre pas". Bien sûr, tu peux dire "le biologique est unique, et donc constitue une classe à lui tout seul". Et alors? Invoquer l'unicité du biologique pour en "déduire" que cela a quelque chose de particulier ici et maintenant est une évidence, mais ne permet aucune conclusion sur le futur ou sur des ailleurs lointains.

    Cordialement,

    (1) Ce genre d'approche est un peu comme en physique, où poser une relation donne en même temps la définition des termes. "décision" et "information" sont pour moi définis par la relation indiquée. En particulier, une "information" est ce qui intervient dans une décision et qui est relié à la situation pré-existante à l'action; les jugements de valeurs interviennent dans l'analyse de la situation anticipée postérieure à l'action.
    Dernière modification par invité576543 ; 01/07/2006 à 20h07.

  15. #945
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par mmy
    [mode = méta]





    Mais tu cites des systèmes nerveux très simples (nématode, j'imagine que tu parles de Caenorhabditis elegans, les nématodes forment un groupe plus riches que les mammifères...), de manière qui suggère que même avec si peu de neurones il y a quelque chose de spécial. Mais dans ce cas, faire la même chose avec un support non biologique ne pose pas de problème majeur.
    Bonjour mmy,

    Eh bien, si. Fabriquer une entité qui souffre comme peut-être le Caenorhabditis elegans pose pour moi un problème majeur et, je dirai même plus, présente une impossibilité majeure. Pourquoi ? parce que la douleur n’est pas pour moi le produit d’un processus algorithmique mais une forme particulière que prend l’énergie à l’intérieur d’un système d’où émerge un sujet. C’est en ce sens que je dis que le sujet ou la conscience commence avec la douleur.

    Evidemment cette conscience, pour notre nématode, est bien rudimentaire. Aucune représentation du monde, aucune représentation de lui-même n’existe. Le nématode qui fuit une source de chaleur n’a certainement pas pour moi la conscience de fuir une source de chaleur mais,existe alors, sur un plan que je me sens obligé d’appeler la conscience du nématode, la décroissance d’un état pénible.

    Comment et pourquoi passe-t-on d’un système physique où la douleur ne peut pas apparaître (cas de n’importe quelle machine et cas aussi, à mon sens, des organismes vivants dépourvus de neurones, donc au moins des animaux unicellulaires et des végétaux) à une entité apte à la souffrance ? C’est bien entendu une question essentielle. Je n’y ai pas apporté de réponse. Dans ma suggestion sur l’origine des sensations, j’essaie seulement d’expliquer et d’illustrer le principe par lequel toute la diversité et la richesse du monde sensible pourrait se constituer à partir de cette réalité affective simple, cet « affect primal variant d’une intensité de douleur pure à une intensité de plaisir pur ».

    Maintenant je ne vois pas trente six possibilités, j’en vois trois.

    1-dans la première, l’affect primal ou plus précisément les forces primales (car il faudrait en concevoir au moins une passive pour les ressentis et une active pour l’action, l’effort) n’existent pas. Tout ce qui connstitue ce qu’on appelle la conscience est réductible à des algorithmes. Et l’on construira « plus tard » ou l’on a construit « ailleurs » des machines qui ont leurs humeurs sur les « fora », des maux de tête et des peines de cœur, de l’angoisse métaphysique, du cynisme ou des scrupules, des états d’âme, des débats de conscience, de la pusillanimité ou du courage, de la veulerie ou de la résolution. Car il n’y a aucune raison de s’arrêter et, si vous voulez discuter sur le point de savoir si des machines assurément sensibles sauraient ou non , pourraient ou non prendre des décisions, je vais vous faire plaisir, mmy, ce sera sans moi.

    2-Dans la deuxième possibilité, l’affect primal produit par les variations d’intensité d’un champ induit par les oscillations neurales existerait à un niveau supra-atomique (par exemple au niveau d’un micro-organisme inclu dans la structure cérébrale) c’est à dire seulement organique. Il ne serait aucunement lié à la structure des atomes , aux forces (nucléaire forte et nucléaire faible) qui inter-agissent entre les quarks ou entre les hadrons. Bref l’affect ne serait aucunement lié à la structure fondamentale de la matière, il ne l’ »affecterait » pas, ne serait-ce que le temps d’exister (et surtout pas bien sûr le temps d’y rester en mémoire… la mémoire non pas intellectuelle bien sûr mais affective justement). Eh bien alors on pourrait tout à fait concevoir que l’on construise une machine où les affects seraient produits artificiellement, des modules fixes et interchangeables joueraient le rôle des atomes, sinon des molécules. Cette deuxième solution reviendrait en fait à la première.

    3-Et puis il y a une troisième possibilité. Vous pressentez sans doute laquelle et vous comprenez sans doute maintenant pourquoi je suis attaché à l’idée d’une matière dont la structure intime ne serait pas quelconque et pourrait dans certaines conditions, celles qui existent justement dans le système d’un animal à neurones, actualiser des propriétés décisives….

  16. #946
    Philder

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par clementdousset
    [...]
    parce que la douleur n’est pas pour moi le produit d’un processus algorithmique mais une forme particulière que prend l’énergie à l’intérieur d’un système d’où émerge un sujet. C’est en ce sens que je dis que le sujet ou la conscience commence avec la douleur.

    [...]

    Comment et pourquoi passe-t-on d’un système physique où la douleur ne peut pas apparaître (cas de n’importe quelle machine et cas aussi, à mon sens, des organismes vivants dépourvus de neurones, donc au moins des animaux unicellulaires et des végétaux) à une entité apte à la souffrance ?

    [...]

    3-Et puis il y a une troisième possibilité. Vous pressentez sans doute laquelle et vous comprenez sans doute maintenant pourquoi je suis attaché à l’idée d’une matière dont la structure intime ne serait pas quelconque et pourrait dans certaines conditions, celles qui existent justement dans le système d’un animal à neurones, actualiser des propriétés décisives….
    Bonjour Clement,

    Personnellement ta position ne me parait pas très claire. D'abord j'ai du mal a voir ou tu fais la distinction entre la douleur "ressentie" par C. Elegans et celle d'une bactérie par exemple. Pour moi c'est du pareil au même, réseau de neurones ou pas, car comme l'a dit mmy, la douleur est essentiellement une information servant a décider d'une action (en l'occurence afin d'éviter certaines situations). Alors que ce soit le nematode s'éloignant d'une source de chaleur (je ne sais pas si c'est un bon exemple mais bon) ou une bactérie qui va fuir un gradient d'un composé qui lui est toxique, c'est du pareil au même.
    AMHA la douleur c'est avant tout un "signal" émis lorsque un évènement porte atteinte à l'intégrité d'un être vivant (pour certaines perturbations en tout cas). Et cette vision de l'intégrité peut être reliée à l'intégrité de l'organisation de l'être vivant. C'est dans cette perspective que l'on peut s'abstraire de la matière, dans le sens ou le vivant se caractériserait par un principe organisationnel et non pas par une implémentation matérielle (bien qu'il faut nécessairement une telle implémentation pour supporter l'organisation, ce qui n'exclut pas une implémentation sous forme d'états electronique "virtuels").
    Je placerai donc cette notion de douleur dans un aspect organisationnel du vivant, organisation qui est basée sur la circularité et l'autoréférence, et surtout dans un principe de décision d'action.
    Car effectivement a notre echelle humaine, on peut observer la douleur et l'analyser comme un qualia, mais comme l'a souligné mmy, le qualia n'est qu'un intermédiaire dans la perception-action, et j'ajouterai meme que la douleur n'existe que dans cette perspective.

    Par contre je suis assez d'accord sur le lien que tu fais entre la douleur et la conscience ou le sujet, mais je dirais plutot que la perpeption de l'organisme comme un tout organisé, et donc la perception des perturbations de cette organisation (dont fait partie la douleur) ainsi que l'action compensatrice associée, sont les bases (lointaines) de la conscience et du sujet.

    Sinon ta 3eme possibilité me semble tout a fait speculative, je ne vois pas sur quoi elle peut s'appuyer.

  17. #947
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Bonjour,

    Citation Envoyé par mmy
    Je suis d'accord que l'existence d'une constante physique incompressible implique vraisembablement l'admission d'un infini dénombrable "réalisé" (qui existe "dans la réalité"). La question de l'existence d'un infini "réalisé" est indécidable et philosophique, non?
    Voilà qui me parait résumer parfaitement la situation.

    Citation Envoyé par Gillesh38
    On pourrait justement t'objecter que le fait que nous n'ayons toujours pas réussi à trouver une description algorithmique EXACTE de l'Univers semble indiquer au contraire qu'il pourrait avoir une nature profondément non algorithmique, que par nature nous ne savons pas exprimer par des lois, ou même simplement par une description conceptuelle.
    Il me semble que la physique, et tout particulièrement la mécanique quantique, repose sur des principes et des lois mathématiques d'une remarquable exactitude au niveau de la prédictibilité, non ? (statistiquement parlant)
    Certes, il reste encore de nombreuses questions et problèmes, mais imagines un peu les personnages d'un jeu de type wargames (Age of empires par exemple, ou warcraft) en train d'essayer de trouver l'algorithme qui gère leur propre univers. C'est une véritable gageure !
    Tout ce qu'on peut espérer, c'est de découvrir des lois simples, des invariants, des principes généraux, mais de là à découvrir l'algorithme en entier, ça me parait utopique. Et c'est effectivement ce qui semble se passer.
    Et donc, je comprends ton point de vue, mais j'ai l'impression que la balance penche dans l'autre sens : rien pour l'instant ne semble indiquer qu'il existe quelque chose qui ne soit pas algorithmique.
    Il faudrait comme le suggère MMY trouver un infini réalisé par exemple. Mais ce serait indécidable ...
    En attendant, ne trouvez vous pas remarquable que cette théorie qui repose sur des hypothèses d'une étonnante simplicité soient aussi difficile à invalider ?
    Par ailleurs, je suis étonné de ne pas trouver dans la littérature de théorie qui refuse comme je le suggère l'existence d'un "infini réalisé" ? Quelqu'un connaît-il des travaux dans ce domaine ?

    Cordialement,
    Argyre

  18. #948
    inviteb271042d

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Bonjour,

    Voilà mon point de vue d'informaticien, donc totalement perverti, sur l'un des rapports possibles entre conscience, intelligence et action.

    Il me semble que l'une des occupations principales du système nerveux, même chez des animaux simples, est de trier, cataloguer et classer l'information.

    Sur la base de ces "classements" ce que l'on désigne par "instinct" "entrainement" et "apprentissage" consiste à déclencher ou pas une action lorsqu'une "différence" dans le classement est percu :

    ex : perception d'une chaleur soudaine => action de retrait rapide
    perception d'une continuité de couleur ' ex vert' => debut de la nutrition pour un ruminant par exemple.

    Dans un post "Dims up et seduction" j'avais indique que notre système nerveux avait probablement ete selectionné pour trouver agréable des repetitions légèremment imparfaites.

    Si l'informatique obtient des succès en I.A. c'est parce que l'informatique sait très bien imiter ce fonctionnement de classement/décision. A ce sujet les limitations sont avant tout techniques ( celà ne veut pas dire qu'elles soient simples à régler ).

    Par contre si l'informatique ne rencontre que des succès limités c'est que pour l'instant, l'informatique n'arrive pas à coordonner plusieurs modèles de traitement dont chacun reproduit bien la coordination classement/decision.

    Est ce que cette limitation est definitive ?
    C'est celà qui se cache derrière toutes les discussions sur la MQ ou le point oméga.

    Peut être ou peut être pas. Il me semble que seule une preuve négative partielle pourrait être apporté. Quelque chose comme : Suite au projet untel, il s'avère impossible de coordonner les algorithmes A et B à l'aide du dispositif testé.
    Bref on est, dans l'etat actuel de nos connaissances, dans l'indécidable.
    Celà n'indique pas que la religion ou le mysticisme est la seule porte de sortie.
    Une autre possibilité existe : celle de coordonner plusieurs dispositifs informatiques à l'aide de technologies non informatiques ( en clair analogique ).
    Est ce possible : peut être mais de toutes façon pas avant longtemps.

  19. #949
    inviteb271042d

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Pour ceux, qui comme moi, n'aime pas trop le dolorisme teinté de religiosité (*)voici quelques thèmes de réflexions plus gauloises ( et pas forcément triviales ) sur l'IA, les blues brothers et la seduction

    http://forums.futura-sciences.com/sh...ight=seduction

    (*)Bon ok j'attaque gratuitement. Mais avez vous remarqué que les attaques contre l'informatique, au nom d'une certaine idée de la liberté, viennent souvent d'un fond pétri de religiosité...
    ...en général celà constitue le préalable à la dénonciation d'autres "horreurs" : recherche sur les cellules foetal...liberté des moeurs....contraception..

    On est bien loin de l'IA je suis d'accord...

    Quoique ...

    Si l'on commence à admettre la souffrance comme possibilité de définition du vivant comment pourrais t on vouloir se libérer de la souffrance ? Comment aussi voudrait on collaborer avec des machines ?

    Je suis sur qu'il y avait aussi des doloristes qui luttait contre la péridurale, contre l'accouchement sans douleur....

    Voilà le seul avantage c'est que celà me convaint une fois de plus qu'en défendant l'usage de la technologie c'est la liberté du vivant que l'on défends.

    @+

  20. #950
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Philder
    Bonjour Clement,

    Personnellement ta position ne me parait pas très claire. D'abord j'ai du mal a voir ou tu fais la distinction entre la douleur "ressentie" par C. Elegans et celle d'une bactérie par exemple. Pour moi c'est du pareil au même, réseau de neurones ou pas, car comme l'a dit mmy, la douleur est essentiellement une information servant a décider d'une action (en l'occurence afin d'éviter certaines situations). Alors que ce soit le nematode s'éloignant d'une source de chaleur (je ne sais pas si c'est un bon exemple mais bon) ou une bactérie qui va fuir un gradient d'un composé qui lui est toxique, c'est du pareil au même.
    AMHA la douleur c'est avant tout un "signal" 1 émis lorsque un évènement porte atteinte à l'intégrité d'un être vivant (pour certaines perturbations en tout cas). Et cette vision de l'intégrité peut être reliée à l'intégrité de l'organisation de l'être vivant. C'est dans cette perspective que l'on peut s'abstraire de la matière, dans le sens ou le vivant se caractériserait par un principe organisationnel et non pas par une implémentation matérielle (bien qu'il faut nécessairement une telle implémentation pour supporter l'organisation, ce qui n'exclut pas une implémentation sous forme d'états electronique "virtuels").
    Je placerai donc cette notion de douleur dans un aspect organisationnel du vivant, organisation qui est basée sur la circularité et l'autoréférence, et surtout dans un principe de décision d'action.
    Car effectivement a notre echelle humaine, on peut observer la douleur et l'analyser comme un qualia, mais comme l'a souligné mmy, le qualia n'est qu'un intermédiaire dans la perception-action, et j'ajouterai meme que la douleur n'existe que dans cette perspective.

    Par contre je suis assez d'accord sur le lien que tu fais entre la douleur et la conscience ou le sujet, mais je dirais plutot que la perpeption de l'organisme comme un tout organisé, et donc la perception des perturbations de cette organisation (dont fait partie la douleur) ainsi que l'action compensatrice associée, sont les bases (lointaines) de la conscience et du sujet.

    Sinon ta 3eme possibilité me semble tout a fait speculative, je ne vois pas sur quoi elle peut s'appuyer 2.
    Bonjour Philder,

    1-Lorsque tu appuies sur la touche i de ton clavier, la pression que tu exerces établit un contact électrique et fait entrer une information dans ton ordinateur. Cette information entraîne une action de la machine dont le résultat tangible est l’affichage de la lettre i sur l’écran. Lorsque dans ta cuisine tu mets la main par mégarde sur une plaque de cuisson brûlante on peut dire que la chaleur qui active les détecteurs sensoriels de ta peau fait entrer une information dans ton corps et entraîne un comportement réactif : tu retires la main. Si tu dis que la sensation de brûlure que tu as ressentie consécutivement à l’action thermique est une information, je n’ai rien a priori contre. Là où je ne suis pas d’accord c’est quand on répond à la question ; « qu’est-ce que la douleur ? » par : « c’est une information » comme si en répondant cela on avait résolu la question de la douleur (et plus généralement de la conscience sensible ou phénoménale). Si la douleur c’est toujours et ce n’est qu’une information, alors je ne vois pas ce qui empêcherait en théorie de dire que l’appui sur la touche n’entraîne dans mon ordinateur une infime et particulière douleur. En tout cas l’idée de construire une machine sensible et par conséquent consciente n’apparaît plus du tout absurde.

    Lorsque tu écris : « la douleur est avant tout un signal » je trouve que cela participe de la même confusion. Lorsque tu entends une sonnerie de téléphone diras-tu que cette sonnerie est avant tout un signal ? Non, elle est avant tout une émission d’ondes acoustiques. Ce qu’est la douleur « avant tout », je ne suis pas plus à même que d’autres de le dire. Seulement je ne veux pas en rester à la tautologie : « la douleur, c’est la douleur. Point. » . Ce que j’avance seulement c’est que la douleur est une réalité qui n’existe que sur le plan de la conscience. Ce qui ne veut pas dire –si paradoxal que cela soit- que nous soyons conscient de la douleur pure. Si tu as bien compris ma « suggestion sur l’origine des sensations » tu as vu que, pour moi, la réalité pure de la douleur, « l’affect primal » entrait dans la composition de sensations qui, même si elles sont douloureuses, ne sont jamais perçues comme des sensations de douleur pure puisque leur origine corporelle (douleur à l’index plutôt qu’au majeur) et leur particularité distinctive (sensation de brûlure plutôt que de pincement) est inscrit de façon en quelque sorte insécable par la conscience dans la globalité du quale. Cette réalité qui n’existe que sur le plan de la conscience a cependant d’analogue avec des réalités physiques comme les forces ou l’énergie de varier de façon quantitative. On peut associer justement la variation graduée d’une grandeur physique (la température d’un liquide comme dans mon exemple du doigt trempé dans l’eau chaude) et le degré de douleur ressenti. Que représente « avant tout » pour le sujet cette variation quantitative ? Je dirais qu’elle est associée nécessairement et en quelque sorte mécaniquement à un désir « négatif ». Plus je souffre, moins je veux être. Tu me diras : « et le masochisme ? » Oui, évidemment, mais je parle de la douleur pure, « primale », susceptible d’entrer avec d’autres, comme le plaisir, dans des réalités psychologiques secondaires complexes où son sens ne peut que dévier. Mais un homme confronté à l’épreuve de la souffrance limite, s’il n’a pas une extrême énergie (l’effort, aussi primal pour moi que la douleur, peut seul en contrecarrer l’effet), choisit la mort. En associant ainsi un désir négatif à la douleur (et positif, bien sûr, au plaisir) je n’ai pas besoin de faire du désir une force primale d’une autre nature. Il me suffit de penser qu’il existe consécutivement à l’existence de la douleur et du plaisir.

    2-Tu me dis que mon troisième point est purement spéculatif. Bien sûr. Mais mes spéculations sont liées à des réflexions qui m’apparaissent de bon sens. D’abord je ne pense pas qu’on puisse sortir d’un « algorithmisme » qui finalement ravalerait l’homme (après l’animal) au rang d’une machine si on n’accepte pas l’existence de ces affects « primaux ». Et si ces affects « primaux » sont en relation de cause à effet avec une modulation magnétique (celle consécutive aux oscillations neurales) je ne vois pas comment ils pourraient ne pas provenir de réactions à un niveau au moins intramoléculaire.

    Je me suis déjà élevé contre l’idée d’une séparation définitive entre le monde des atomes, des particules qui les composent et des forces qui interagissent en eux et le monde de la neurobiologie qui aurait son commencement aux macromolécules. Maintenant c’est vrai que puisque l’on ne connaît pas précisément leur interférence on peut en dire et on a dit certainement n’importe quoi. Mon ignorance sur ce plan est très grande. Je sais seulement que des physiciens travaillent sur la façon dont les couches d’électrons pourraient servir de mémoire à des informations de type analogique, du même genre par exemple que celles qui existent sur une bande magnétique audio ou vidéo. Ce type de recherches sur lesquelles certains ici ont sans doute des lumières m’intéresse beaucoup. Et puisqu’on en est à parler de mes spéculations, peut-être me permettras-tu d’en évoquer une sur la mémoire où la matière sub-atomique aurait justement à jouer un rôle.


    (à suivre)

  21. #951
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Pour Philder (suite)

    Dans ma « suggestion sur l’origine des sensations » j’avais développé une comparaison entre l’image de télévision et le contenu de la conscience sensible. J’y reviens un instant. Une image de télévision analogique est induite par une section d’onde d’une longueur donnée (15000 km environ). Cette onde présente une fréquence modulée et c’est la particularité de cette modulation (révélée par le démodulateur) qui va induire la particularité de l’image affichée sur l’écran. Il y a une durée comprise entre 50 et 150 millisecondes pendant laquelle le champ magnétique cérébral va être modulé d’une certaine façon par les oscillations synchronisées des neurones et c’est la particularité de cette modulation qui va induire ce qu’on peut appeler le contenu de conscience instantané et qu’on peut confondre avec la perception d’une image télévisée fixe. Dans un assez long message, Mmy, auquel tu fais référence, insiste sur le fait que, pour lui, le contenu de la conscience sensible est pour une très grande part analogique. Il ne montre même pas de façon déterminée la limite où l’on passerait définitivement de l’analogique continu au symbolique discret. Tu auras peut-être remarqué que j’ai répondu à ce message de Mmy en soulignant la convergence de ma façon de voir sur ce point.

    Il semblerait que parmi les oppositions entre les intervenants, il y en ait une qui existe entre ceux qui privilégient le discret-symbolique-numérique dans le contenu de la conscience et ceux qui insistent sur son aspect analogique et continu. Je voudrais qu’on trouve au moins sur ce point ma position claire. L’activité cérébrale comporte assurément des événements discrets : un neurone est actif ou inactif, un potentiel d’action circule dans un axone ou il ne circule pas, un neurotransmetteur est libéré ou il n’est pas libéré. Mais sur le plan de la conscience phénoménale, l’analogique est premier.

    Je m’explique de façon extrêmement rudimentaire et simple. Supposons une sensation S0 induite par l’oscillation d’un neurone unique N0. Cette oscillation d’une fréquence donnée F0 engendre une variation d’amplitude P0 de la puissance du champ magnétique représenté par une courbe M0. Cette courbe est une sinusoïde régulière. La distance entre deux sommets est fixe et a pour valeur LO. Je suppose maintenant qu’un deuxième neurone N1 entre en activité et se mette à osciller de façon simultanée avec le premier. Comme apparemment les potentiels d’action produits par l’activité de tout neurone varient tous avec la même amplitude, ce nouveau neurone N1 engendre une variation d’amplitude P0 qui s’additionne à la première variation. L’amplitude de la courbe M1 résultant de l’oscillation des neurones sera double de la courbe M0, la distance entre deux sommets restant fixe et de mesure L0. Maintenant si le deuxième neurone entre en activité avec un léger décalage de phase DP. La courbe M2 résultante présentera alors une irrégularité périodique et la distance de deux sommets sera successivement de LO+DP et de LO-DP, la modulation d’amplitude, elle, restant constante.

    Dans le premier cas (la simultanéité) on peut dire que la sensation S1 aurait un degré d’intensité double de la sensation S0 tout en ayant exactement la même qualité. Dans le second cas, on pourrait dire que la sensation S2 aurait la même intensité que la sensation S0 mais n’aurait pas la même qualité. Tu vas me dire que les choses sont assurément plus complexes que cela. Mais oui, bien sûr. Mais peut-être pas dans leur principe. Et au niveau extrêmement simpliste d’explication que je donne, je comprends en tout cas comment on passe d’une succession de deux événements discrets : les entrées en activité successives des deux neurones à un changement qui est sans doute brusque mais qui ne s’accompagne pas d’une discontinuité là où il se produit. Il n’y a pas rupture de la courbe M.

    Une autre façon de m’expliquer : je reviens à la télévision. Je suppose une image extrêmement simple : l’écran du téléviseur est coupé verticalement en deux parties égales. La moitié gauche est noire, la moitié droite est blanche. L’image présente donc bien une discontinuité forte. On passe sans degrés intermédiaires du noir au blanc. Mais la modulation du signal vidéo synchronisé avec le balayage de l’écran de gauche à droite conduit peut-être à un changement brusque au milieu de l’écran mais il n’y a pas, au milieu de l’écran, une interruption du signal. En bref, et pour interrompre ces explications aussi maladroites sans doute que fastidieuses, la conscience que nous avons de la discontinuité ne me paraît pas liée à des discontinuité vraies au niveau de la conscience.

    Cela n’empêche pas que les algorithmes de la machinerie cérébrale interviennent sans cesse dans la constitution du champ de conscience. Mais j’espère avoir été assez clair pour te montrer la distinction entre justement l’espace de ces algorithmes et l’espace continu à la fois de la modulation magnétique inductrice et de la réalité affective qu’elle induit.

    Pourquoi est-ce que je parle de tout cela à propos de la mémoire ? parce que je pense qu’il y a une mémoire qu’on pourrait appeler –en simplifiant bien sûr- numérique et une mémoire analogique. Cette distinction de deux mémoires n’est pas nouvelle. Proust distingue déjà la mémoire involontaire ou affective, celle des « intermittences du cœur » et la mémoire volontaire ou intellectuelle. Ma distinction est d’ailleurs fortement inspirée par la sienne.

    La mémoire numérique correspondrait à des algorithmes dont les éléments premiers sont des symboles. Comme les éléments de cette mémoire sont discontinus, les matériaux de cette mémoire seraient discontinus. Cette discontinuité serait de nature chimique. En simplifiant de façon évidemment stupide, on pourrait associer tout élément de l’algorithme à une molécule stockée en mémoire à l’endroit qu’il faut, par exemple sur tel maillon d’une chaîne équivalent à une séquence d’ADN. Rappelle-toi le début du message : quand tu appuies sur la touche i, le i ne fait pas que s’afficher sur l’écran, il est aussi placé en mémoire dans un algorithme qui le restituera comme la première lettre du mot information dans la phrase qui commence par : »lorsque tu appuies… » etc. inutile de m’expliquer plus.

    La mémoire analogique à laquelle je crois (non pas à la place de l’autre mais à côté ou en plus), c’est tout autre chose. Elle est liée au sort de la modulation qui induit le champ de conscience à un moment précis. On peut très bien penser que cette modulation disparaît sitôt née. Ce serait un peu comme l’ondulation causée par un caillou jeté dans un étang. Un instant passe et en passe avec lui la mémoire sur l’eau redevenue placide. On peut aussi penser –et c’est mon cas- que cette modulation se conserve totalement, exactement et à vie dans l’espace cérébral. C’est à dire qu’on aurait une mémoire totale (analogique, bien sûr). Tu me diras : mais l’amnésie, ça existe !Bien sûr mais il n’a jamais été prouvé que l’amnésie –si définitive qu’elle soit- ce soit la perte des « engrammes » de l’information. Ce qui est assuré, c’est que c’est la perte du moyen de se souvenir, ce qui n’est pas la même chose. Au fond ce qu’on perd ce sont les moteurs (algorithmes ? ) de recherche et non les objets recherchés. En tout cas on peut très bien considérer que le contenu de la mémoire numérique peut se désagréger et se perdre mais pas celui de la mémoire analogique. Je vais même beaucoup plus loin et je dis que, si on est conscient du présent, c’est qu’on parvient à oublier, à oblitérer une mémoire sans cesse actuelle. Le passé ne « sombre » pas dans l’oubli, il est constamment « maintenu » dans l’oubli, ce qui n’est pas du tout la même chose. Et si justement nous parvenons à être conscient de ce qui apparaît bien comme une actualité c’est parce que la force qui maintient le passé dans l’oubli a une certaine limite, qu’il y a une durée du présent (50 à 150 millisecondes) pendant lesquelles la force affective est supérieure à la force évidemment non consciente qui tend à enfouir le présent dans le passé. On parle beaucoup des pertes de mémoire. Ne devrait-on pas parler aussi des pertes d’oubli ? Enfant sensible, je m’évertuais souvent à bannir de ma conscience des cauchemars, des scènes traumatisantes qui venaient parfois me hanter avec une précision cruelle des détails… Si l’on passe une bonne part de sa vie à tenter de se souvenir, on en passe peut-être une autre à essayer d’oublier. Dans l’un et l’autre cas on se trouve confronté à des forces qui nous prouvent alternativement l’éloignement dans lequel le passé est maintenu et l’intégralité de sa survie. Je ne te parle pas bien entendu des expériences d’hypermnésie vécues ou non sous hypnose, je doute qu’elles puissent te convaincre, si nombreuses qu’elles soient. Mais laisse divaguer ta mémoire. Laisse-là partir dans toutes les directions. Retrouve un ancien jour, une particularité de lieu, d’atmosphère ou d’odeur. Vois comme son authenticité indicible s’impose, en même temps que la résistance qui la fait aussitôt refluer du présent. Si ton impuissance te décourage, va dehors. Il fait chaud mais il y a un peu de brise. Lis ou relis Proust à l’ombre mobile des grands arbres :
    « l’impression fut si forte que le moment que je vivais me sembla être le moment actuel …je croyais que le domestique venait d’ouvrir la fenêtre sur la plage et que tout m’invitait à descendre me promener le long de la digue à marée haute ; la serviette que j’avais prise pour m’essuyer la bouche avait précisément le genre de raideur et d’empesé de celle avec laquelle j’avais eu tant de mal à me sécher devant la fenêtre, le premier jour de mon arrivée à Balbec, et, maintenant devant cette bibliothèque de l’hôtel de Guermantes, elle déployait, réparti dans ses pans et dans ses cassures, le plumage d’un océan vert et bleu comme la queue d’un paon. Et je ne jouissais pas que de ces couleurs mais de tout un instant de ma vie qui les soulevait… »

    Quoi qu’il en soit, si cette mémoire totale existe réellement, le nombre d’informations que chaque instant suppose oblige à concevoir un autre mode d’archivage que celui fourni par le classement de protéines. Il faut que la conscience du présent passe à l’intérieur d’atomes où pourrait se mettre en place, d’une façon qu’il appartient aux physiciens de dire, une continuité d’inflexions modulées inaltérablement…On en revient donc pour la survie de l’expérience consciente comme pour la compréhension de son existence même à la structure intime et spéciale de la matière…

    Excuse-moi d’avoir été un peu long et d’avoir divagué beaucoup,

    Amicalement,

    Clément

  22. #952
    GillesH38a

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Argyre
    Il me semble que la physique, et tout particulièrement la mécanique quantique, repose sur des principes et des lois mathématiques d'une remarquable exactitude au niveau de la prédictibilité, non ? (statistiquement parlant)
    A part que

    1)elle repose sur une règle REELLEMENT aléatoire (par exemple la succession de mesures du spin d'un électron sur deux axes orthogonaux donnera une suite complètement aléatoire de 0 et de 1 qui ne deviendra jamais périodique, même dans un système isolé, ce qui est sauf erreur de ma part impossible avec un automate à nombre fini d'états)

    2) qu'elle est incapable d'être formalisée sans faire appel à une "méta-notion" intuitive et non formalisable, la mesure. Il n'y a pas d'algorithme permettant de décider si oui ou non, un système physique effectue une mesure, et pourtant il est essentiel de le savoir pour appliquer la meca Q.



    Et donc, je comprends ton point de vue, mais j'ai l'impression que la balance penche dans l'autre sens : rien pour l'instant ne semble indiquer qu'il existe quelque chose qui ne soit pas algorithmique.
    et bien si, les deux notions précédentes : définition exacte d'une mesure et caractère aléatoire.

  23. #953
    invitea20bed5c

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par transhuman
    Voilà le seul avantage c'est que celà me convaint une fois de plus qu'en défendant l'usage de la technologie c'est la liberté du vivant que l'on défends.
    Bonjour,

    à première vue le progrès technique semble positif pour les hommes (dire la même chose pour le vivant est osé...). Pourtant le progrès va de paire avec l'augmentation de la consommation d'énergie (du moins tant que l'on reste dans le cadre d'une société de consommation).

    A travers la modification du climat le progrès technique va peut-être détruire la race humaine. Cela pourrait être en effet bénéfique pour la liberté du vivant.

    Oui je fais dans le dramatique, mais ta "croyance" dans le progrès me parait elle aussi un peu excessive.

    Cordialement,

    Gilles

  24. #954
    Galuel

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par gillesh38
    A part que

    1)elle repose sur une règle REELLEMENT aléatoire (par exemple la succession de mesures du spin d'un électron sur deux axes orthogonaux donnera une suite complètement aléatoire de 0 et de 1 qui ne deviendra jamais périodique, même dans un système isolé, ce qui est sauf erreur de ma part impossible avec un automate à nombre fini d'états)

    2) qu'elle est incapable d'être formalisée sans faire appel à une "méta-notion" intuitive et non formalisable, la mesure. Il n'y a pas d'algorithme permettant de décider si oui ou non, un système physique effectue une mesure, et pourtant il est essentiel de le savoir pour appliquer la meca Q.


    et bien si, les deux notions précédentes : définition exacte d'une mesure et caractère aléatoire.
    Bien vu apparemment.

    Ne faut-il dès lors pas considérer qu'il est tout simplement impossible de ne pas considérer l'observateur comme partie prenante de l'expérience ?

    Et comme ultimement l'observateur c'est celui qui prend connaissance... de moi même ?!

  25. #955
    clementdousset

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Tout petit complément à ma réponse à Philder. Il a trait à la terrible maladie d'Alzeimer (qui me touche de très près). Celle-ci a au moins le pauvre avantage de fournir un argument de poids à mon idée d'une mémoire analogique dont le contenu serait maintenu par un ensemble de mécanismes et de forces hors de la conscience. C'est comme si peu à peu et d'une façon qui révèle sans doute leur organisation et leur jonction ces mécanismes étaient attaqués et qu'au fur et à mesure de ces attaques le malade retrouvait des "situations de conscience" anciennes qui parasitaient la situation présente. Le malade d'Alzeimer nous étonne autant par ses pertes de la mémoire immédiate que par ses retrouvailles avec un passé d'enfance. Retrouvailles maladives bien sûr parce qu'elles ne sont pas la prise de conscience de souvenirs mais la réactualisation confuse d'états de conscience anciens qui brouillent bien évidemment la notion du réel. La maladie d'Azeimer qui m'apparaît de façon évidente comme une maladie de la mémoire numérique me révèle à la fois que cette mémoire est secondaire par rapport à la mémoire analogique et que sa première raison d'être est de s'édifier contre cette mémoire afin de permettre la conscience structurée et actualisée du vécu réel.

  26. #956
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par gillesh38
    A part que

    1)elle repose sur une règle REELLEMENT aléatoire (par exemple la succession de mesures du spin d'un électron sur deux axes orthogonaux donnera une suite complètement aléatoire de 0 et de 1 qui ne deviendra jamais périodique, même dans un système isolé, ce qui est sauf erreur de ma part impossible avec un automate à nombre fini d'états)
    Bonjour Gilles,

    Tu dois déjà connaître ma réponse ?
    Pour l'aléatoire, il suffit d'une fonction pseudo-aléatoire. Certes, en théorie, c'est périodique, mais en pratique, pour certaines fonctions, il faut attendre des milliards de milliards de milliards de tirages (et j'en passe) avant de retomber dans le cycle. Autant dire qu'il n'est pas possible de démontrer qu'il n'y a pas de cycle !

    Citation Envoyé par gillesh38
    2) qu'elle est incapable d'être formalisée sans faire appel à une "méta-notion" intuitive et non formalisable, la mesure. Il n'y a pas d'algorithme permettant de décider si oui ou non, un système physique effectue une mesure, et pourtant il est essentiel de le savoir pour appliquer la meca Q.
    Sur ce point aussi, tu connais ma réponse, très simple : on ne connait pas l'algorithme, certes, mais rien ne permet de dire qu'il n'y en a pas un. En tout cas, tu n'as toujours pas réussi à me convaincre de son inexistence.

    Cordialement,
    Argyre

  27. #957
    LeLama

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Argyre
    Bonjour Gilles,

    Tu dois déjà connaître ma réponse ?
    Pour l'aléatoire, il suffit d'une fonction pseudo-aléatoire. Certes, en théorie, c'est périodique, mais en pratique, pour certaines fonctions, il faut attendre des milliards de milliards de milliards de tirages (et j'en passe) avant de retomber dans le cycle. Autant dire qu'il n'est pas possible de démontrer qu'il n'y a pas de cycle !
    Bonjour Argyre. Le pseudo-aleatoire n'a absolument rien a voir avec l'aleatoire. On ne sait pas mathematiquement produire de suite deterministe ayant les caracteristiques statistiques d'un tirage aleatoire.

    Le fait est que dans la physique quantique les resultats de certaines experiences sont *vraiment* aleatoires. C'est justement ce a quoi Einstein ne croyait pas. Si je me souviens bien, c'est l'experience d'Aspect qui a permis de montrer qu'il n'y avait pas de variable cachee. Ce n'est donc pas qu'on n'a pas trouve de loi parce qu'elle est trop compliquee. C'est qu'on a demontre theoriquement par une etude statistique qu'il n'existait pas de loi explicative (moyennant des hypotheses raisonnables: les probabilites qu'on calcule peuvent etre controlees par des densites de probabilite, etc..).

    L'aleatoire quantique est donc tout a fait different de l'aleatoire qui apparait quand tu laisses tomber une piece sur la tranche sans savoir si ce sera pile ou face. Dans le premier cas, c'est *vraiment* aleatoire, dans le deuxieme cas, cela correspond au fait qu'il y a des donnees qu'on ne connait pas.

  28. #958
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Bonjour,

    Citation Envoyé par LeLama
    Bonjour Argyre. Le pseudo-aleatoire n'a absolument rien a voir avec l'aleatoire. On ne sait pas mathematiquement produire de suite deterministe ayant les caracteristiques statistiques d'un tirage aleatoire.
    Pas d'accord, la définition d'une fonction pseudo-aléatoire est précisément d'obtenir les caractéristiques statistiques d'un tirage aléatoire ! D'ailleurs, on peut faire une expérience très simple : on met en place un système informatique qui produit une suite de 0 et de 1 de façon pseudo-aléatoire et on met également en place un système physique qui fournit une suite de 0 et de 1 selon le résultat d'une expérience de MQ obéissant à un tirage aléatoire. D'un point de vue statistique, il n'est pas possible de les différencier. Ou alors il faut effectuer des milliards de milliards de tirages pur vérifier la cyclicité, ce qui est infaisable en pratique. Et si on ne sait pas les différencier, on ne peut pas prouver que le mécanisme à l'oeuvre ne serait pas un tirage pseudo-aléatoire.

    Citation Envoyé par LeLama
    C'est justement ce a quoi Einstein ne croyait pas. Si je me souviens bien, c'est l'experience d'Aspect qui a permis de montrer qu'il n'y avait pas de variable cachee.
    Oui, on en a déjà beaucoup discuté avec Gilles et d'autres. L'expérience d'Aspect démontre qu'il n'y a pas de variable cachée locale, mais elle n'élimine pas la possibilité d'avoir des variables cachées globales. D'ailleurs, en MQ, la fonction d'onde reste attachée aux 2 particules même si elles se sont éloignées l'une de l'autre (c'est une onde !). Donc, implicitement, on suppose qu'il y a une information globale qui permet de décrire simultanément les 2 particules. A priori, la MQ décrit suffisamment bien le système, il ne reste donc qu'à rajouter la fonction pseudo-aléatoire.

    Cordialement,
    Argyre

  29. #959
    LeLama

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par Argyre
    Pas d'accord, la définition d'une fonction pseudo-aléatoire est précisément d'obtenir les caractéristiques statistiques d'un tirage aléatoire !
    Ben non. Choisis une suite pseudo aleatoire u_n de 0 et de 1.
    Il existe des nombres a_0....a_r tel que Proba(u_(k+r+1)=0 sachant u_k=a_0,u_(k+1)=a_1, u_(k+r)=a_r) different de 1/2.

    Maintenant pour une suite aleatoire, cette proba vaut toujours 1/2 quel que soit le choix des a_i.

    Donc les deux suites ont des proprietes statistiques differentes.

  30. #960
    invite06fcc10b

    Re : Un "ordinateur pensant" serait-il doué de libre arbitre?

    Citation Envoyé par LeLama
    Ben non. Choisis une suite pseudo aleatoire u_n de 0 et de 1.
    Il existe des nombres a_0....a_r tel que Proba(u_(k+r+1)=0 sachant u_k=a_0,u_(k+1)=a_1, u_(k+r)=a_r) different de 1/2.

    Maintenant pour une suite aleatoire, cette proba vaut toujours 1/2 quel que soit le choix des a_i.

    Donc les deux suites ont des proprietes statistiques differentes.
    Rebonjour,

    Certes, tu as parfaitement raison, mais la propriété que tu énonces n'est pas calculable en pratique. Quand on fait référence à une fonction pseudo-aléatoire, on s'intéresse surtout à la probabilité simple d'obtenir une certaine valeur et dans le cas qui nous occupe elle vaudrait 0,5 en pratique. Mais quoi qu'il en soit, le plus important, c'est qu'il n'est pas possible expérimentalement de distinguer une fonction pseudo-aléatoire d'un aléatoire pur, et que donc il est possible que ce soit bien une fonction pseudo-aléatoire qui soit à l'oeuvre en MQ.
    D'ailleurs, comme je l'ai déjà signalé, certains chercheurs ont proposé de chercher cette fonction pseudo-aléatoire !

    Cordialement,
    Argyre

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