Pour en finir avec .
Bien sur ce titre n’est qu’une accroche marketing, et je n’en finirai sans doute avec rien, mais si j’arrive à me faire comprendre par quelques uns ce ne sera déjà pas si mal.
Remarque liminaire : les « objets » mathématiques et les relations qui les joignent ne se trouvent pas dans la nature, ce sont des définitions précises données par les mathématiciens, il n’est donc pas raisonnable de vouloir démontrer une définition ou une convention (qui n’est qu’une définition particulière), on peut, au mieux, les justifier.
Chapitre 1
Pré-requis admis : la multiplication des réels entre eux, la récurrence sur .
Idée intuitive : créer une notation pour indiquer pour x un réel quelconque, et n un entier naturel non nul, qu'on a multiplié x, n fois par lui-même (on comprend bien que multiplier un nombre 0 fois par lui-même n’a pas de sens (1 fois pourrait être discutable, mais en disant « le produit de n facteurs égaux à x », la réserve n’as plus de raison d’être)).
Définition mathématique (1) : on note le nombre défini par la relation de récurrence suivante :
On voit rapidement qu’avec cette définition (), mais que n’est pas pris en compte par cette définition (donc n'existe pas), pas plus que d’ailleurs.
Extensions possibles : on peut démontrer facilement (et c’est conforme à la définition intuitive) que , c'est-à-dire que l’application de dans définie par est un morphisme, et comme est un magma (associatif et commutatif), il s’agit donc d’un morphisme de magma (c'est-à-dire que si f est injective ( a les mêmes propriétés que est alors un isomorphisme). Une idée naturelle de prolongement est de passer de à , c'est-à-dire du magma au monoïde en ajoutant le 0.
Au niveau intuitif, cela n’a pas beaucoup de sens (cf.supra).
Au niveau de la définition mathématique(1), une très légère modification convient :
On peut remarquer que poser est la solution la plus « économique » (elle ne nécessite aucune modification de la condition de récurrence).
Au niveau du morphisme, c’est un peu plus compliqué : par définition du morphisme, il est obligatoire que l’image de l’élément neutre soit l’élément neutre. Pour x un réel différent de 0 et de 1, l’application est injective et l’image de ne contient pas 1 (normal pour un isomorphisme dont la source ne contient pas l’élément neutre), il n’y a donc pas le choix .
Pour , l’image de est {1}, il n’y a donc aucun problème pour poser .
Pour , l’image de est {0} (dont on peut remarquer que c’est un groupe multiplicatif dont l’élément neutre est 0 ), il me paraît donc possible de choisir ou , dans les deux cas la structure de monoïde (et même au-delà) est conservée (cependant, ils ne sont pas isomorphes) ; néanmoins il y a plusieurs arguments pour choisir :
a) Cohérent avec les autres valeurs de x (argument faible).
b) L’injection canonique du monoïde dans n’envoie pas l’élément neutre sur l’élément neutre (argument fort)
Dans cette optique, il semble donc plus naturel de poser
On peut se demander s’il est raisonnable d’envisager d’autres prolongements, les idées immédiates sont vers ou vers , malheureusement, dans ces deux cas, on perd complètement la définition intuitive et la définition par récurrence et comme on va retrouver la notion de morphisme dans le chapitre suivant, commençons celui-ci.
Chapitre 2
Pré-requis admis : , il existe un unique isomorphisme continu de groupe entre et , vérifiant , on notera l’isomorphisme réciproque. On admettra aussi un certain nombre de résultats analytiques concernant ces fonctions (continuité, dérivabilité, limites etc.).
Digression : pour a = 0, il faudrait avoir , et donc , et donc ne serait pas injectif. Même chose et même démonstration pour a = 1, ce qui explique que ces deux cas soient exclus.
On peut remarquer que pour un nombre entier n, (suivant la définition du chapitre 1) on peut aussi remarquer que par définition d’un morphisme de groupe.
On peut donc généraliser cette notation et poser (d’autant plus que l’on peut démontrer que et autres résultats bien connus ; je cite cet exemple car il sera utile plus bas)
Il va de soi qu’avec cette définition, une fois de plus, n’existe pas, cependant on a le droit de se poser des questions (c’est même souhaitable)
1) L’application peut-elle être prolongée par continuité quand a tend vers 0 ?
Pour , la seule façon de prolonger cette fonction constante par continuité est de poser
Mais on peut compliquer un peu.
2) L’application peut-elle être prolongée par continuité quand a tend vers 0 ?
La démonstration dépasse le cadre de ce petit texte, car il faudrait étudier plus en détail les fonctions exponentielles, mais comme et , pour assurer la continuité il faut, à nouveau, poser
Soyons fou (j'abandonne la notation , tout le monde à compris j'espère, et cela devient un peu lourd) :
3) L’application peut-elle être prolongée par continuité quand a tend vers 0 ? (f et g sont des fonctions continues qui tendent vers 0 quand a tend vers 0).
Exemple :
Il est facile de voir que cette dernière fonction est en fait une constante (), que la seule façon de prolonger par continuité est de poser (et en fait on peut choisir n’importe quel réel (et dans on peut même aller plus loin)).
Si on a le choix, ce cher Ockham nous conseille de nous raser de près et de choisir pour f et g les fonctions les plus simples possibles :
f(x) = 0 ; g(x) = x impossible n’existe pas
f(x) = x ; g(x) = 0 (c’est le cas 1) donne
f(x) = x ; g(x) = x (c’est le cas 2) donne
On voit donc que le plus raisonnable est de poser
Chapitre 3
Pré-requis : connaissance d’un peu de théorie des ensembles.
D’une façon générale, pour deux ensembles donnés et , il existe un ensemble de toutes les applications de dans (ce point nécessiterait une connaissance de ZF plus précise), ce nouvel ensemble, je vais le noter en attendant mieux.
Pour des ensembles finis non vides et le cardinal de est justement , au sens du chapitre 1, ce qui explique la notation .
Que se passe-t-il en particulier quand l’un voire, les deux ensembles sont vides ?
(démonstration laissée au lecteur, elle est sans problème par récurrence)
(dans une application, il faut associer un élément de l’ensemble d’arrivée à chaque élément (et il en existe) de l’ensemble de départ, comme l’ensemble d’arrivée est vide, c’est impossible, il n’existe donc pas telles applications)
(un peu plus subtile : comme l’ensemble de départ est vide, il n’y a rien à associer, et comme il n’y a qu’une façon de ne rien faire, le nombre d’application est 1)
(exactement le même raisonnement que ci-dessus, voir un peu plus d’explications ci-dessous)
La définition formelle d’une application entre deux ensembles est :
Soit et deux ensembles finis, une application de vers est un sous-ensemble de vérifiant :
.
Si est vide est vide, et l’ensemble vide (dans le rôle de ) vérifie bien l’axiome ci-dessus, l’ensemble vide est donc bien une application de dans , et c’est évidemment la seule.
Ici, il n’y a donc aucune ambiguïté (ni aucune convention à ajouter à la définition générale) : .
Pour conclure, on peut remarquer que les trois définitions ci-dessus sont compatibles pour les domaines communs, que seule la troisième contient intrinsèquement la définition de , que les deux autres définitions trouvent un prolongement naturel (plus naturel en tout cas) en posant, par convention, .
PS : désolé pour les 2000 fautes de frappes qui doivent rester.
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