J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !
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J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !



  1. #1
    andretou

    J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !


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    Bonjour à tous
    Dans la fameuse expérience de pensée du chat de Schrödinger, il est établi que, tant que l'on n'a pas ouvert la boîte, le chat est dans un état dit superposé, combinaison linéaire des états vivant et mort.
    Mais si je décide de refaire l'expérience en me mettant à la place du chat, et que à la fin de l'expérience je suis toujours vivant, est-ce qu'on doit dire que quand j'étais dans la boîte j'étais, comme le chat, dans un état superposé ? Pourtant, à chaque instant j'étais dans un état bien défini, soit dans l'état vivant, soit dans l'état mort, mais jamais dans une superposition d'états...
    Faut-il comprendre que du point de vue de l'observateur qui ouvre la boîte à la fin de l'expérience, j'étais dans un état superposé vivant/mort, tandis que de mon point de vue je n'ai jamais cessé d'être dans l'état vivant ?
    Mais dans ce cas, cela signifie-t-il que la superposition d'état ne fait que caractériser le point de vue de l'observateur qui ignore l'état réel du système, alors que l'état du système reste parfaitement déterminé à chaque instant comme dans mon expérience ?

    Merci d'avance pour votre aide sur le concept de superposition d'états.

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    La grossièreté et l'invective sont les armes préférées d'une pensée impuissante.

  2. #2
    Deedee81
    Modérateur

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Salut,

    Citation Envoyé par andretou Voir le message
    Dans la fameuse expérience de pensée du chat de Schrödinger, il est établi que, tant que l'on n'a pas ouvert la boîte, le chat est dans un état dit superposé, combinaison linéaire des états vivant et mort.
    Mais si je décide de refaire l'expérience en me mettant à la place du chat, et que à la fin de l'expérience je suis toujours vivant, est-ce qu'on doit dire que quand j'étais dans la boîte j'étais, comme le chat, dans un état superposé ?
    L'équation d'évolution de la mécanique quantique est linéaire. C'est là la difficulté. Tu n'es pas en mesure de savoir si tu étais dans un état superposé ou pas car les composantes superposées évoluent indépendamment.

    Tu peux voir ça comme ça, je donne la superposition quantique et une évolution possible :
    |couic> + |je suis vivant>
    |couic> + |je suis vivant, pas mort du tout>
    |couic> + |je suis vivant, pas mort du tout, je suis dans un état bien défini>
    ouverture de la boite, une chance sur deux d'avoir (processus de réduction)
    |je suis vivant et je l'ai toujours été> (mais tu te trompes car tu n'as pas accès à toute l'information)

    Notons que tel quel cette expérience pose deux difficultés :
    1) Pourquoi la mesure se ferait-elle au moment de l'ouverture de la boite puisque toi-même tu fais une telle mesure (de toi-même) ?
    2) La réduction ci-dessus.... n'est pas linéaire, elle viole l'équation d'évolution

    Avant de voir ça, réglons le sort de la superposition quantique. Est-elle subjective (elle ne fait que traduire une description humaine, elle dépend de l'observateur) ou objective (la même pour tous). Seule manière de savoir ça, par l'expérience. On peut savoir si un système physique est dans état superposé (il y a des observables, des opérateurs, correspondant à une telle mesure). La manière la plus simple/connue étant l'observation des interférences dans une expérience de type Young. Et ce résultat est objectif : tout le monde peut constater les franges d'interférences enregistrées (ou pas) par l'appareil.

    Ensuite, le (1). Le fait est qu'on n'a pas définit ce qu'est la mesure. Et c'est plus compliqué qu'il n'y parait. Alors faisons simple : c'est une interaction physique avec un dispositif macroscopique. Toi, Andretou, tu es macroscopique (je n'ai pas vérifié mais je suppose que oui ). Le choix de "mesure" serait-il arbitraire ? Non, mais on a un petit quelque chose qui va nous aider : la décohérence quantique. Il est impossible d'isoler un système physique à 100%. Il y a des interactions avec les molécules d'air, les molécules de la boite, les photons environnement (lumière, chaleur, ondes radios et même le rayonnement fossile). En particulier pour un système macroscopique c'est des milliards de milliards d'interaction avec l'environnement à chaque seconde. Or toute interaction (toute mesure aussi d'ailleurs) est un processus d'intrication quantique, ici avec l'environnement. Mais nous, humain, n'avons pas accès à tout le détail de ces états intriqués de milliards de milliards de molécules. On n'observe qu'une chose : le chat, ou Andretou. Et on montre qu'en "coupant" ainsi l'information le système étudié va se comporte "comme si" il état classique, sans état superposé (les différentes possibilités "couic" ou "vivant" deviennent une incertitude statistique et plus une superposition quantique). Donc on peut dire en pratique que :
    - Pour nous humain, tout système macroscopique est mesuré par nous ou indirectement par l'environnement et nous le voyons dans un état définit car nous ne connaissons pas tout l'état du système et de son environnement
    - La superposition quantique existe toujours mais totalement mélangée (intriquée) avec l'environnement sans qu'on s'en rende compte
    (bon sur la mesure il y a moyen de pisser des pages et des pages (*) mais restons en là, c'est suffisant)
    (à titre technique utile car on voit souvent le terme même en vulgarisation, n'observer qu'une partie du système s'appelle état réduit ou matrice de densité réduite, la matrice de densité étant un outil regroupant les probabilités quantiques et les probabilités classiques, bien pratique en décohérence mais aussi en physique statistique en général).

    Evidemment dans l'expérience de Schrödinger, on ignore volontairement cette difficulté et on fait "comme si" il n'y avait pas de décohérence avant l'ouverture de la boite. Notons que Schrödinger évidemment ne connaissait pas la décohérence (elle ne fut introduite qu'en 1970 par Zeh, et développée ensuite par pleins de physiciens). Notons aussi que Serge Haroche a reçu le Nobel pour son étude de la décohérence et de ses "chats de Schrödinger" qui étaient en fait, justement, non macroscopiques : des photons (ce qui ralentit fortement leur décohérence car une particule seule est facile à isoler).

    Enfin, le (2).
    (*) comme je disais, la mesure c'est compliqué : on peut montrer que sans réduction aucun appareil de mesure ne.... mesure rien du tout !!!! Une curiosité quantique qui est assez casse bonbon vu ce (2) problématique. Je le signale à titre indicatif, inutile d'approfondir ça.

    Deux attitudes face à ça. On s'en fout et on dit "je m'en fous que moi-même je sois décrit par la mécanique quantique, je suis un être classique et macroscopique", et on utilise la réduction qui ma foi est un outil très pratique (impossible de travailler en pratique sans ça pour un physicien qui touche à des expériences liées à la MQ). C'est ce que fait l'interprétation instrumentale (l'interprétation de base, qui se trouve "sans le dire" dans presque tous les livres/cours de MQ) ou l'interprétation de Copenhague (= interprétation instrumentale plus une couche de philosophie).

    L'autre attitude : on jette la réduction au bac. La clef étant ce qui a été dit : "évolution linéaire et ignorance des autres composantes". L'état est et reste superposé.... mais on ne peut s'en rendre compte (d'autant que la décohérence rend impossible de vérifier la superposition quantique). Mais ça reste bizarre :
    - Même après l'ouverture tu restes "mort" + "vivant" sans pouvoir t'en rendre compte
    - C'est compliqué (propagation de la superposition quantique de proche en proche via les interactions)
    C'est ce que fait l'interprétation des états relatifs par exemple.

    En cosmologie quantique on est bien obligé d'en passer par là (par d'observateur extérieur pouvant provoquer une réduction de l'univers) mais les interprétations favorites sont plutôt les mondes multiples (qui est FAPP donc à usage très limité pour un théoricien), le relationnel ou les histoires consistantes. Moi je préfère les états relatifs mais je ne suis pas comme les autres

    Bon, il y a beaucoup de répétition par rapport à de nombreuses discussions sur le sujet, mais j'espère avoir été clair.
    Dernière modification par Deedee81 ; 26/01/2021 à 07h00.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  3. #3
    albanxiii
    Modérateur

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    L'observateur connaît son propre état, pas la peine d'aller plus loin, l'expérience de pensée est foirée.
    Not only is it not right, it's not even wrong!

  4. #4
    Deedee81
    Modérateur

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par albanxiii Voir le message
    L'observateur connaît son propre état, pas la peine d'aller plus loin, l'expérience de pensée est foirée.
    Ah tiens, pour une fois je ne suis pas d'accord. Enfin, partiellement. Ca arrive rarement entre nous

    - D'un point de vue pratique, c'est exact. Et il est vrai qu'en physique c'est souvent la seule chose qui compte.
    - D'un point de vue théorique, un système physique ne peut connaitre son propre état entièrement. C'est même un résultat démontré issu de la logique quantique (je n'ai pas noté la référence, j'avais lu ça il me semble dans l'encyclopédie de Stanford de philosophie sur la mécanique quantique relationnelle. Mais de toute façon, cela semble évident). Et c'est même la clé qui permet d'expliquer pourquoi l'utilisation de la réduction ne pose pas de problème pratique alors qu'elle est incompatible avec l'équation d'évolution.

    Mais ce n'est qu'un détail Les explications ci-dessus me semblent assez complètes.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  5. A voir en vidéo sur Futura
  6. #5
    andretou

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Si je simplifie l'expérience au maximum de sorte qu'il n'y a plus qu'un noyau radioactif dans la boîte, tant que je n'ouvre pas la boîte est-ce qu'il faut admettre que le noyau n'est ni désintégré ni non désintégré, mais qu'il se trouve dans un autre état qui est la combinaison linéaire des états désintégré/non désintégré ?
    La grossièreté et l'invective sont les armes préférées d'une pensée impuissante.

  7. #6
    Deedee81
    Modérateur

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Salut,

    Citation Envoyé par andretou Voir le message
    Si je simplifie l'expérience au maximum de sorte qu'il n'y a plus qu'un noyau radioactif dans la boîte, tant que je n'ouvre pas la boîte est-ce qu'il faut admettre que le noyau n'est ni désintégré ni non désintégré, mais qu'il se trouve dans un autre état qui est la combinaison linéaire des états désintégré/non désintégré ?
    Oui. Il est dans un tel état superposé si du moins l'interaction avec son environnement est faible (ce qui est généralement le cas pour un noyau atomique avant de se désintégrer).
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  8. #7
    andretou

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Cela signifie que, entre le début et la fin de l'expérience, mon noyau va changer d'état 2 fois : d'abord quand je ferme la boîte, puis quand j'ouvre la boîte.
    Mais ces changements d'états ne modifient pas l'énergie du noyau (puisque l'énergie du noyau est la même au début et à la fin de l'expérience, même s'il s'est désintégré).
    Aussi, comment un système peut-il changer d'état sans variation d'énergie ?
    La grossièreté et l'invective sont les armes préférées d'une pensée impuissante.

  9. #8
    FC05

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par albanxiii Voir le message
    L'observateur connaît son propre état, pas la peine d'aller plus loin, l'expérience de pensée est foirée.
    En fait l'expérience suppose la présence de variables cachées, donc forcément ça ne colle pas.
    "La réalité c'est ce qui reste quand on refuse d'y croire" P.K. Dick

  10. #9
    Deedee81
    Modérateur

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Salut,

    Citation Envoyé par andretou Voir le message
    Cela signifie que, entre le début et la fin de l'expérience, mon noyau va changer d'état 2 fois
    Non une seule fois, rappelle toi ce que j'ai dit dans le message 2 : la réduction pose problème. Elle n'est pas "physique" dans le sens où il n'y a pas modification réelle de l'état du système. D'ailleurs même l'interprétation de Copenhague considère que la réduction est juste une "mise à jour de nos connaissances", bon, formule un peu passe-partout mais qui montre bien que considérer la réduction comme un processus physique est problématique
    (il existe toutefois des théories avec réduction physique, mais c'est plus que des interprétations : la théorie est modifiée !!!! C'est en cours de test expérimental)
    Les interprétations sans réduction posent moins de difficulté (dans le sens : moins de pièges de raisonnement), mais elles sont malheureusement plus "exotiques" (dans le sens "éloigné de l'intuition classique")

    Par contre il y a bien UNE modification : la désintégration (à modéliser par des superpositions quantiques qui compliquent tout, mais on peut considérer une seule composante pour en parler (*)) qui modifie bien l'énergie du noyau (l'excédent part dans la particule émise).

    (*) rien n'est jamais simple en MQ. Sais-tu que dans mes livres de MQ, tout ce dont on discute est.... dans le tome VII !!!!! Pas dans le I (où on ne discute que de résultats d'expériences réelles et de manière purement factuelle en vue d'une modélisation mathématique). J'estime qu'on ne peut vraiment comprendre la MQ (en utilisant les expériences de pensée, etc...) qu'en étant d'abord devenu un véritable expert de la MQ (au sens technique et math). Contrairement à d'autres théories (certains aspects de la mécanique classique comme les "forces" peuvent être interprétés, mais pas besoin d'être un grand expert pour ça). Ceci étant dû au fait que la MQ décrit un monde TRES éloigné de la physique "du quotidien". Et impossible de comprendre la MQ sans comprendre ce monde, impossible de comprendre ce monde par des raisonnements classiques et on a donc que deux outils : l'expérience et les maths.

    C'est assez frustrant (**) et ça donne des discussions parfois compliquées et interminables (mais ça reste passionnant )

    (**) a ce sujet si quelqu'un comprend les interprétations modales, je suis preneur. Je les ait toujours trouvé profondément obscures..... et ça m'énerve.

    Citation Envoyé par FC05 Voir le message
    En fait l'expérience suppose la présence de variables cachées, donc forcément ça ne colle pas.
    Ah, là c'est moi qui ne comprend pas. Quelle expérience fait cette supposition ??
    Dernière modification par Deedee81 ; 28/01/2021 à 06h37.
    "Il ne suffit pas d'être persécuté pour être Galilée, encore faut-il avoir raison." (Gould)

  11. #10
    FC05

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Celle à laquelle tu repondais ...

    Celle de ddtout.

    En se plaçant à l'intérieur, il devient une variable cachée, vu qu'il a connaissance de l'état du système avant l'ouverture.
    Son expérience de pensée se situe donc du côté "Einstein" dont on sait expérimentalement qu'il ne fonctionne pas.
    "La réalité c'est ce qui reste quand on refuse d'y croire" P.K. Dick

  12. #11
    Matmat

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Qu'on se place dans la boite ou qu'on place le chat de Schrödinger c'est la même expérience de pensée , dans les deux cas on place un être vivant conscient de sont état.

  13. #12
    FC05

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Ce n'est pas un vrai chat, c'est LE chat de Schrodinger.

    En plus l'époque les chats n'étaient pas encore des "animaux sensibles".
    "La réalité c'est ce qui reste quand on refuse d'y croire" P.K. Dick

  14. #13
    ornithology

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    C'était a une époque prévégane.
    Ou sont les particules? On est la! On est la! (deux fentes de Young)

  15. #14
    stefjm

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Les lapins gardaient leurs pattes chez le boucher pour prouver qu'ils n'étaient des chats.
    Ne pas manger les abats de carnivores...
    Moi ignare et moi pas comprendre langage avec «hasard», «réalité» et «existe».

  16. #15
    chaverondier

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par andretou Voir le message
    La superposition d'état ne fait que caractériser le point de vue de l'observateur qui ignore l'état réel du système, alors que l'état du système reste parfaitement déterminé à chaque instant comme dans mon expérience ?
    cf. Curie-Weiss model of the quantum measurement process 2002
    Armen E. Allahverdyan, Roger Balian, Theo M. Nieuwenhuizen
    What is called a quantum “state”, whether pure or mixed, gathers our information on the considered system: it does not characterize this system by itself, but its statistical ensemble. Accordingly, the consistency of quantum mechanics requires a measurement to be analyzed as a statistical process involving many similar experiments with all possible outcomes.
    Il y en a un modèle plus récent de la mesure quantique par les même auteurs (lui aussi très intéressant), mais il fait 201 pages (au lieu de 4 hors sommaire).

    cf. aussi Oscillation de Rabi à la frontière classique-quantique et génération de chats de Schrödinger 2004, Alexia Auffeves Garnier, LKB (Lhomond) - Laboratoire Kastler Brossel

  17. #16
    BrainMan

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par Deedee81 Voir le message
    Oui. Il est dans un tel état superposé si du moins l'interaction avec son environnement est faible (ce qui est généralement le cas pour un noyau atomique avant de se désintégrer).
    Question bête.
    Si on emploi dans cette expérience de pensée un atome radioactif, c'est bien parce-qu'à tout moment, sa probabilité de désintégration est la même ?
    Il ne suffit donc pas d'attendre 1000 ans avec un atome dont la demie-vie est de 30 secondes pour être certain qu'il s'est désintégré (et le chat millénaire qui va avec).
    Tant qu'on n'a pas ouvert la boite, on ne sait pas.

    Donc, si j'utilise cette fois 1 milliard d'atomes radioactifs (ce qui en fait un bien petit observateur certes), à tout moment, la probabilité qu'il se produise une désintégration est beaucoup plus grande, mais ça ne change rien....ou pas ?
    Normalement, même 1000 ans après, on devrait avoir le même résultat qu'avec 1 atome ou pas ?

  18. #17
    Archi3

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Il y a deux difficultés fondamentales :
    a) notre représentation du monde est celle dont nous avons conscience. Or il n'y pas de théorie scientifique de la conscience, c'est à dire qu'il n'y a pas de théorie qui permette d'affirmer qu'un certain assemblage d'atomes, de molécules, ou quoi que ce soit de plus exotiques (supercordes attachées à des D branes..) produise de la conscience ou non. Nous ne savons donc pas le lien entre le monde perçu et le monde réel.

    b) on a tendance à imaginer les fonctions d'onde comme "réelles" mais ça pose des difficultés insurmontables, en particulier car il existe des formalismes (Heisenberg, et en fait toute la théorie quantique des champs) où ce n'est pas la fonction d'onde qui évolue mais des opérateurs. On peut retrouver une équivalence avec l'idée d'un état qui évolue en associant l'opérateur à un "état initial" ... que personne ne connait.
    Je vais prendre un exemple simple : le chat de Schrödinger est composé comme tous les êtres vivants de 80 % d'eau. Il y a donc plein de molécules d'eau contenant des atomes d'hydrogène qui sont à l'intérieur, donc "localisés" avec une précision d'au moins 10 cm, et meme bien plus car on imagine que chaque molécule est à un endroit précis du chat, peut etre avec des fluctuations quantiques de l'ordre de la longueur d'onde de Broglie mais c'est minuscule. On pense donc que ces atomes d'hydrogène sont "quelque part" avec une précision non pas infinie (c'est interdit par le principe d'incertitude ) mais tres bonne, de l'ordre du nm.

    Posons nous la question maintenant de à quoi a ressemblé la fonction d'onde caractérisant un des protons constituant une des molécules d'eau du chat ? ces protons existent depuis le début de l'Univers, 13,7 milliards d'années. Pendant les premiers milliards d'année , ils ont existé sous forme d'un gaz de particules libres sans entrer dans une combinaison chimique. Or c'est un résultat élémentaire de mécanique quantique (premiers chapitres du Cohen Tannoudji) qu'un paquet d'onde s'étale forcément avec le temps à cause du principe d'incertitude. En partant d'un paquet d'onde "minimal" avec ∆r∆p= h/2π on trouve un étalement minimal au bout d'un temps t (∆r^2 + (t h/2πm∆r)^2) ^1/2 d'extension minimale (h t/2 pi m)^(1/2) : à l'échelle d'un temps cosmologique. chaque proton aurait du s'étaler sur une extension de l'ordre de 100 km. Pas énorme à l'échelle de l'Univers mais quand meme bien plus grand que la taille du chat ! qu'est ce qui l'a "rélocalisé" ? il n'y a pas eu d'appareil de mesure, donc de projection du paquet d'onde ! et pourtant des structures bien plus petites que 100 km existent partout , des grains de poussières interstellaires, etc ....

    Donc la fonction d'onde ne peut pas être "réelle". Comme disait Bohr, la fonction d'onde ne fait que résumer l'information (incomplète) qu'on a sur le système, mais toute tentative d'imaginer "l'état réel" du monde conduit à des paradoxes.

  19. #18
    BrainMan

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par Archi3 Voir le message
    Pas énorme à l'échelle de l'Univers mais quand meme bien plus grand que la taille du chat ! qu'est ce qui l'a "rélocalisé" ? il n'y a pas eu d'appareil de mesure, donc de projection du paquet d'onde ! et pourtant des structures bien plus petites que 100 km existent partout , des grains de poussières interstellaires, etc ....
    Tout ce qu'on peut en conclure, il me semble, c'est que la relocalisation d'un objet délocalisé n'est pas affectée par une limite en terme d'espace et de temps.
    On admet depuis longtemps maintenant qu'il puisse exister des photons corrélés sur des distances arbitrairement grandes.
    Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant ici.
    D'autre part, vous pensez que cet étalement des objets, puisqu'elle est possible, est une généralité.
    Je ne le pense pas, tout dépend du fait qu'il soit capable et ait l'opportunité ou non d'entrer à nouveau en relation avec d'autres objets et donc de perdre cet état de délocalisation (ou sa forme onde si vous préférez cette vision des choses).

    Donc la fonction d'onde ne peut pas être "réelle". Comme disait Bohr, la fonction d'onde ne fait que résumer l'information (incomplète) qu'on a sur le système, mais toute tentative d'imaginer "l'état réel" du monde conduit à des paradoxes.
    On est d'accord que la fonction d'onde est un objet mathématique, mais la dualité onde/corpuscule est bien une réalité.

  20. #19
    Archi3

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par BrainMan Voir le message
    On admet depuis longtemps maintenant qu'il puisse exister des photons corrélés sur des distances arbitrairement grandes.
    Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant ici.
    précisément, on se représente les photons comme étalés dans l'espace (sur des distances arbitrairement grandes qui peuvent atteindre des milliards d'années lumières) et qui se "relocalisent" au moment où on les détecte, par exemple en interagissant avec un pixel d'un détecteur d'un télescope.

    C'est déjà assez bizarre en soi comme "processus physique", mais ça l'est encore plus appliqué à la matière. On a quand même envie de penser qu'une molécule d'eau sur un grain interstellaire est bien "localisée", mais il n'y a rien en mécanique quantique qui explique quand et pourquoi cette localisation a eu lieu (et il n'y a ni "mesure" ni "détecteur" sur ce grain !)

    On est d'accord que la fonction d'onde est un objet mathématique, mais la dualité onde/corpuscule est bien une réalité.
    non ça n'a rien d'une "réalité", ce sont des mots que nous posons sur nos représentations imparfaites du monde.

  21. #20
    BrainMan

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par Archi3 Voir le message
    précisément, on se représente les photons comme étalés dans l'espace (sur des distances arbitrairement grandes qui peuvent atteindre des milliards d'années lumières) et qui se "relocalisent" au moment où on les détecte, par exemple en interagissant avec un pixel d'un détecteur d'un télescope.

    C'est déjà assez bizarre en soi comme "processus physique", mais ça l'est encore plus appliqué à la matière.
    Non, il n'y a rien de "bizarre" là dedans, c'est juste que l'apparence des choses vous parait incongru.
    Qui plus est, et ça ne regarde que moi certes, mais je vous livre ici un point de vue possible sans vous en préciser les détails afin éviter d'aller à l'encontre de la charte, il existe (et ça n'engage que moi) possiblement une manière d'interpréter tout ça, sans même passer par les "bizarreries" que vous citez.

    Qui plus est, on n'a pas l'habitude que les objets du monde macroscopique se comportent de cette manière, ce qui explique plus facilement la question du bizarre, que d'acter qu'il existerait des phénomènes physiques que l'on pourrait qualifier d'intrinsèquement normaux et que d'autres seraient par eux-mêmes bizarres.
    La bizarrerie ou la normalité ne sont pas des propriétés de la matière, mais une conception arbitraire d'un observateur.

    non ça n'a rien d'une "réalité", ce sont des mots que nous posons sur nos représentations imparfaites du monde.
    Et pourtant, la notion de réalité prend bien ici tout son sens.
    On constate réellement par l'observation que la matière se comporte à l'échelle microscopique (et pas que), de deux manières différentes.
    Comme une particule ou comme une onde (pas comme une onde mathématique attention).

    Voir ce petit résumé ici, qui je trouve est plutôt bien fait : https://www.techno-science.net/definition/8014.html

  22. #21
    chaverondier

    Re : J'ai refait l'expérience du chat de Schrödinger !

    Citation Envoyé par Archi3 Voir le message
    précisément, on se représente les photons comme étalés dans l'espace (sur des distances arbitrairement grandes qui peuvent atteindre des milliards d'années lumières) et qui se "relocalisent" au moment où on les détecte, par exemple en interagissant avec un pixel d'un détecteur d'un télescope. C'est déjà assez bizarre en soi comme "processus physique", mais ça l'est encore plus appliqué à la matière.
    En fait, la métaphore du chat de Schrödinger (plus qu'une simple métaphore puisque les effets d'interférence caractéristiques d'un état non propre de la grandeur observée sont mesurables sur des systèmes mésoscopiques) sert à poser le problème de la mesure quantique. Quand et par quel processus physique détaillé un système en état quantique superposé vis à vis d'une grandeur observée est-il réduit à l'un des états propres de l'observable en question ?

    Pour ma part, une réponse satisfaisante à cette question me semble être apportée par Allahverdyan, Balian et Nieuwenhuizen sans avoir à sortir du cadre de la physique quantique statistique conventionnelle. Cf. Understanding quantum measurement from the solution of dynamical model 2013,
    Armen E. Allahverdyan, Roger Balian, Theo M. Nieuwenhuizen

    Le problème de la mesure quantique
    If a measurement is treated as a quantum physical process, in which the tested system interacts with an apparatus, the superposition principle seems to preclude the occurrence of a unique outcome...
    ...How can quantum mechanics, with its superposition principle, be compatible with the fact that each individual run of a quantum measurement yields a well-defined outcome ?...Is it possible to describe the whole apparatus, and also its dynamics, i. e., the dynamics and outcome of the measurement, by quantum mechanics itself ? It is this question that we shall answer positively in the present work.
    La solution proposée par Allahverdyan, Balian et Nieuwenhuizen
    The quantum measurement problem, to wit, understanding why a unique outcome is obtained in each individual experiment, is currently tackled by solving models.

    A flexible and rather realistic quantum model is introduced, describing the measurement of the z-component of a spin through interaction with a magnetic memory simulated by a Curie–Weiss magnet, including >> 1 spins weakly coupled to a phonon bath. Initially prepared in a metastable paramagnetic state, it may transit to its up or down ferromagnetic state, triggered by its coupling with the tested spin, so that its magnetization acts as a pointer. A detailed solution of the dynamical equations is worked out, exhibiting several time scales. Conditions on the parameters of the model are found, which ensure that the process satisfies all the features of ideal measurements.
    Concernant l'interprétation de la fonction d'onde comme un objet réel, j'ai fini (avec difficulté) par accepter (tout comme vous, comme l'indique l'un de vos précédents messages) le point de vue positiviste :
    What is called a quantum “state”, whether pure or mixed, gathers our information on the considered system. It does not characterize this system by itself, but its statistical ensemble. Accordingly, the consistency of quantum mechanics requires a measurement to be analyzed as a statistical process involving many similar experiments with all possible outcomes.
    cf. Curie-Weiss model of the quantum measurement process 2002, Allahverdyan, Balian, Nieuwenhuizen

    Nota : ce deuxième document, moins récent que le premier, offre cependant l'avantage d'une prise de connaissance plus abordable du modèle de mesure quantique proposé en raison de sa petite taille : il n'y a que 4 pages à lire.

    Bien que court (donc rapidement lu), il contient les ingrédients de la modélisation exploitée dans le premier document beaucoup plus long (201 pages). Qui plus et, cet article court est lisible moyennant un petit nombre de prérequis (ou leur acquisition préalable) en physique statistique (ensemble de spins en interaction de Ising, approche du champ moyen et bains de phonons de Debye).

    Ces prérequis peuvent s'acquérir (si on ne les a pas déjà) via physique statistique, introduction de Christian et Hélène Ngô.

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