BONJOUR !
Pour une fois, je vous propose de lire un texte d'une personnalité et de deviner non pas l'auteur (qui est moyennement connu) mais son positionnement intellectuel. Est-ce un philosophe ou un scientifique ?
MORCEAUX CHOISIS
Que certains puissent espérer se construire un avenir dans la science sur cette base, c'est à dire dans la perspective d'une besogne itérative, médiocrement rémunérée et passivement acceptée, sous prétexte d'une garantie de survie sans perspective pionnière est choquant et méprisable plusieurs égards. Rien ne se produit en sciences, ni dans aucun domaine de la création, sans l'enthousiasme et la générosité qui ignorent les voies balisées et les horizons murés.
Fermer à de jeunes scientifiques enthousiastes et excellemment formés l'accès de postes occupés par des exécutants écornifleurs, ataraxiques, inadaptés dès le départ et atones jusqu'à l'arrivée trente à quarante ans plus tard, ne mérite non plus ni égard, ni patience.
Peut-on parler d'un déficit de réflexion philosophique dans les sciences de la vie ?
En vérité la biologie ne s'est jamais relevée des coups philosophiques que lui a porté Descartes en lui donnant une base purement et simplement mécaniste (les animaux machine). Ce mythe fut maintenu avec plus ou moins de bonheur par la pensée athée du XIX siècle. Au XX, ni Alain ni Sartre n'ont reconnu au phénomène vital une spécificité ontologique digne de leur scrutation métaphysique ou existentielle. Cette indignité fut même affichée par certains biologistes. En 1962, Ernest Kahane, porte parole du milieu matérialiste et réductionniste écrivait un ouvrage dont le titre provocateur était ÎLa vie n'existe pas'. Si la vie n'existe pas pourquoi solliciter le financement d'une recherche biologique qui a justement pour objectif de l'analyser et de la comprendre ?
Sur un autre registre tout aussi détestable, chacun connaît les avatars lyssenkoistes de la génétique. Ces errements ne furent pas réservés la URSS totalitaire. Nombre de biologistes français influents à l'époque égarés par leurs passions politiques aprioristes les partagèrent sans aucune base expérimentale sérieuse. Tandis que dans l'espace de liberté intellectuelle qui caractérise la science anglo-saxonne, des biologistes préservés de tout préjugé politique fondaient la génétique moderne, notre pays en fut provisoirement écarté.
La responsabilité du chercheur est claire et précise et il aura à en rendre compte. S'il arrivait que l'outil scientifique ne soit plus confié aux plus aptes, mais aux plus besogneux, les pouvoirs publics qui ne tirent pas de bénéfices immédiatement exploitables de la recherche fondamentale auraient tôt fait d'appliquer à juste titre des méthodes de contrôle drastique au détriment de l'esprit même de la recherche.
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