Bonjour,
La théorie des probabilités me semble avoir un statut un peu particulier dans le corpus scientifique, et j'en suis arrivé à penser qu'il y a avait, grossièrement, trois approches distinctes.
1) La théorie des probabilités est une théorie mathématique, à l'instar de la théorie des groupes, de la topologie, etc.
C'est une théorie basée sur des axiomes (e.g., Kolmogorov), dont on dérive des théorèmes.
C'est la présentation "usuelle", celle de l'enseignement et de la vulgarisation.
2) La théorie des probabilités est une application concrète de certaines théories mathématiques.
Et donc d'une certaine manière elle fait partie de la physique ou du moins des "sciences de la nature", à l'instar de la théorie de la relativité restreinte, ou la physique quantique.
Les théories mathématiques sous-jacentes sont la théorie des ensembles finis (dénombrement) ; et la théorie de la mesure (cas infinis). Dans le premier cas, les axiomes sont ceux de la théorie des ensembles, la notion clé étant celle de cardinal. Dans le second cas, les axiomes portent sur des structures appelées espaces mesurés (ensemble E + sous-ensemble particulier S de P(E) --une tribu-- + une fonction de S dans R); à comparer avec la topologie dont les axiomes portent sur les structures d'espaces topologiques (ensemble E + sous-ensemble particulier de P(E)).
La théorie des probabilités est alors une application particulière de ces théories-là, un modèle utilisé pour des phénomènes naturels dans lequel intervient le "hasard". (Il est à noter que c'est la seule des trois approches qui nécessite le concept très difficile de hasard.)
À l'appui de cette approche, il est facile de voir que tous les exercices donnés en terminale dans le cadre de "la théorie des probabilités" sont des exercices de dénombrement, habillés par un cas concret.
3) La théorie des probabilités est une logique.
Elle parle de règles d'inférence, et permet de dériver des assertions "démontrées" à partir d'autres assertions démontrées ou d'axiomes (ceux-ci étant alors indépendants de la logique elle-même). C'est une logique floue, une extension de la logique booléenne (qu'on y trouve comme cas particulier, avec les probabilités 1 pour vrai et 0 pour faux).
C'est alors un ensemble de méthodes pour procéder à des déductions au sein d'un corpus de connaissances. Ces méthodes traitent essentiellement de l'information, des "valeurs de vraisemblance" des assertions auxquelles sont appliquées cette logique. Une probabilité est alors subjective, et n'a aucun sens en dehors d'un corpus d'assertions. C'est essentiellement une théorie de l'information, si ce n'est la théorie de l'information.
C'est l'approche de Jaynes, et de nombre de Bayesiens.
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Alors, théorie mathématiques, logique ou théorie physique ? Par exemple, quelle est des trois approches celle qui semble conceptuellement préférable, la plus formatrice pour les concepts, pour la présentation de cette théorie dans l'enseignement ?
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