Une civilisation scientifique sans art - Page 2
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Une civilisation scientifique sans art



  1. #31
    inviteb276d5b4

    Re : Une civilisation scientifique sans art


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    Bonjour
    Citation Envoyé par Aigoual
    L’une des résolutions possible à cette émergence de l’idée que tout soit objet à l’exception de moi seul, est effectivement de reconnaître en l’autre la possibilité de disposer d’un moi à l’identique du mien.
    Ce n'est pas là la négation absolue de soi dont parle Nishida. Vu ainsi, l'autre est encore (re)connaissance objective, reconnu par le "moi". Mais pour reconnaître l'autre absolu en soi et se reconnaître en l'autre de la même manière, il faut dépasser le soi. Le soi ne peut être objet du soi car dans ce cas, il est un soi pensé pas le soi qui pense.
    En d'autres termes, le connu n'est pas le connaissant.

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  2. #32
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Ce n'est pas là la négation absolue de soi dont parle Nishida. Vu ainsi, l'autre est encore (re)connaissance objective, reconnu par le "moi".
    Oui, je ne connais pas Nishida, mais tel que tu en parles, c’est effectivement ce que j’avais cru comprendre.

    Quoi qu’il arrive, il semble difficile de se nier soi-même.
    Cela n’aurait pas beaucoup de sens, malgré les formidables succès d’une science qui pense le monde par l’objet seul.
    Tout peut se penser par l’objet, à l’exception de ce moi qui résiste, ainsi que Descartes en fait le constat lorsqu’il énonce l’impossibilité de le définir autrement que par la tautologie exprimée dans son fameux « je pense donc je suis. »

    Ce que tu exprimes ici, sous une autre forme :

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Le soi ne peut être objet du soi car dans ce cas, il est un soi pensé pas le soi qui pense.
    Un scientifique qui voudrait néanmoins dépasser cette impossibilité en réduisant le moi à l’objet, ne serait plus un scientifique, mais un scientiste qui, dans la foulée, se nierait lui-même, assez stupidement…

    En revanche, il est techniquement assez facile de ne pas reconnaître le soi de l’autre.
    Il suffit tout simplement d’entrer dans une pensée de type solipsiste où tout proviendrait de soi et reviendrait à soi, selon l’idée que, si moi je suis, le moi de l’autre reste définitivement improuvable.
    Qu’est ce qui pourrait différencier cet autre d’une mécanique sophistiquée faisant illusion ? En fait, rien…

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Mais pour reconnaître l'autre absolu en soi et se reconnaître en l'autre de la même manière, il faut dépasser le soi.
    Par dépassement de soi, je suppose que tu entends cet acte de foi (car il s’agit alors d’un véritable acte de foi, puisque reposant sur une hypothèse totalement indémontrable), qui consiste à reconnaître en l’autre un moi identique au mien.

    Il s’agit donc d’un dépassement en transcendance, de nature authentiquement religieuse au sens premier du terme (religare), autorisant à construire des communautés humaines (liens), là où il serait totalement impossible de les légitimer autrement, puisqu’il serait impossible de légitimer un autre qui ne serait qu’objet.

    Si donc je lis bien ce que tu dis de Nishida, on rejoint le rabbi Jeochouah ben Youssef (Jésus), qui fut probablement dans l’histoire de la philosophie humaine, le premier véritable penseur du sujet.

    Il n’est d’ailleurs à mon sens pas fortuit que l’émergence de cette pensée par le sujet se soit historiquement produite en parallèle de la pensée par l’objet que fut la philosophie grecque.
    Avec Socrate en clé de voute, fondateur d’une logique qui trouvera son assise définitive dans Descartes et sa méthode.

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    En d'autres termes, le connu n'est pas le connaissant.
    Ce qu’énonçait Descartes en instaurant l’absolue nécessité de la séparation entre l’observateur (sujet) et l’observation (objet)

    Sans cette impérative séparation, la connaissance du monde (l’accès au logos, à la science) devient définitivement impossible.

    Mais il ne faut pas oublier que la réciproque est vraie :
    sans l’objet pour faire obstacle à soi, la connaissance de soi devient également tout aussi rigoureusement impossible.
    Les solipsismes sont intellectuellement parfaitement recevables, mais tenter de les réaliser dans la réalité, revient à s’engager dans la voie d’un véritable effondrement de soi, jusqu’à l’anéantissement, par la folie et le suicide.
    La vie tragique de certains artistes en témoigne douloureusement.

    A l’inverse de ces destins tragique, c’est exactement ce que veut signifier Socrate lorsqu’il reprend à son compte la devise inscrite sur le temple de Delphes « connais-toi toi même… »
    Comme Descartes quelques siècles plus tard, il constate qu’au bout de la logique de l’objet, il y a soi.

    Objet et sujet sont irrémédiablement antagonistes, ils sont mutuellement scandale (éth. : ce qui fait obstacle) l’un de l’autre.
    Et pourtant, sans que nous sachions comment ni pourquoi, nous en sommes chacun d’entre nous, la réconciliation, de fait.

    C’est là où se trouve le mystère indépassable…
    … en tout cas, pour moi.

    Mais si quelqu’un à la réponse, je prends.

    Aigoual.

  3. #33
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Mais si quelqu’un à la réponse, je prends.
    42.





    L'élégance aurait voulu que j'en reste à cette simple, mais complète réponse, mais je suis obligé d'ajouter : cette boutade n'est pas qu'une boutade (tiré du livre de Doug Adams : le guide du routard galactique), il y a des questions qui n'ont pas de réponse, d'autres sont la réponse est inaccessible, d'autres encore dont la réponse est incompréhensible, et enfin (j'espère) des réponses qui remettent en cause la question même, je crois que c'est le cas ici.

    Médiat
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  4. #34
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    42
    Quoi ? Koan...

    Aigoual.

  5. #35
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Quoi ? Koan...
    Non pas un koan (j'en suis fan), mais H2G2 : A la question pourquoi l'univers, la réponse est 42.
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  6. #36
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Je manque de temps en ce moment d'où mes réponses laconiques, mais si je développe un peu la fin de mon message de 05:56, je voulais dire que lorsque le développement d'une réflexion en arrive à un paradoxe (apparent ou réel) un mystère (profane ou religieux), une contradiction (formelle ou substancielle), il faut admettre que l'une des possibilité est la remise en cause complète de la réflexion, voire la suppression de la question (ce que fait la réponse "42" avec une certaine distanciation).

    Amicalement
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  7. #37
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    lorsque le développement d'une réflexion en arrive à un paradoxe (apparent ou réel) un mystère (profane ou religieux), une contradiction (formelle ou substantielle), il faut admettre que l'une des possibilité est la remise en cause complète de la réflexion, voire la suppression de la question (ce que fait la réponse "42" avec une certaine distanciation)
    A oui, je comprends.
    Enfin, pas H2G2 (ça, j’ai loupé un coche…) mais ta seconde réponse.
    Effectivement, ce n’est pas un koan.

    Il existe aussi une autre possibilité, c’est d’imaginer que la question reste intrinsèquement valide dans le même temps que la réponse soit intrinsèquement impossible.

    Cela signerait bien sûr une rupture dans la continuité de la logique.
    C’est, si tu t’en souviens, quelque chose de ce genre que nous avions envisagé dans un précédent fil (« inversion de la causalité, » je crois)

    A savoir que si toute réalité suppose une continuité de bout en bout qui lui donne un sens, le réel (l’en soi du tout) n’y est pas contraint et donc, tout en contenant tout les sens, n’en a aucun en particulier, y compris sa propre négation.

    Dans cette optique, rien n’interdit d’imaginer deux réalités (celle du sujet et celle de l’objet), chacune intrinsèquement cohérente, mais définitivement antagonistes entre elles.
    Il y aurait donc rupture de cohérence logique au point précis où l’on passerait de l’une à l’autre. Et sans logique, pas de logos…

    Ce serait ça, le mystère.

    Jusqu’au jour où, peut-être, à la manière dont les physiciens cherchent eux aussi leur fameux saint Graal de la grande unification, nous trouverons celle qui résout l’énigme de l’antagonisme du sujet et de l’objet.

    Pour ma part, j’aurais tendance à penser que si les physiciens parviendront un jour à leurs fins, nous ne parviendrons pas à celle du sujet et de l’objet, en raison de nos limitations strictement humaines d’espèce, un peu à la manière dont le crapaud ne peut concevoir les équations de la mécanique quantique en raison des limitations propres à son espèce.

    Mais bon, comme je ne peux pas avancer le moindre début de preuve logique (précisément…) à cette idée, je m’en tiendrais à ne pas en dépasser le stade de l’intuition dont on ne peut rien faire…

    … et 42, ça me va.

    Aigoual.

  8. #38
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Enfin, pas H2G2 (ça, j’ai loupé un coche…) mais ta seconde réponse.
    oops, à force d'intimité, on élève des frontières sans le savoir (bien que protégé de toute accusation d'innocence), H2G2 est le petit nom du livre (complètement déjanté) de Douglas Adams HitchHicker's Guide to the Galaxy.

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Effectivement, ce n’est pas un koan.
    Un de mes favoris : http://www.ashidakim.com/zenkoans/37...thesutras.html

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    A savoir que si toute réalité suppose une continuité de bout en bout qui lui donne un sens, le réel (l’en soi du tout) n’y est pas contraint et donc, tout en contenant tout les sens, n’en a aucun en particulier, y compris sa propre négation.
    Mais cela ne remet pas en cause le réel, mais, au choix, chacune des réalités causes de la singularité ou bien encore cette envie esthétique qui nous pousse à désirer cette continuité.

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Dans cette optique, rien n’interdit d’imaginer deux réalités (celle du sujet et celle de l’objet), chacune intrinsèquement cohérente, mais définitivement antagonistes entre elles.
    Non seulement rien ne l'interdit, mais rien n'impose que "nous en sommes chacun d’entre nous, la réconciliation, de fait", c'est dans ce besoin exprimé de réconciliation que je vois une tentation esthétique, et non une necessité logique. Tentation esthétique dont je me méfie, de peur qu'elle ne perde son statut, comme André Breton se méfiait de la tentation romantique.

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Il y aurait donc rupture de cohérence logique au point précis où l’on passerait de l’une à l’autre. Et sans logique, pas de logos…
    C'est à cette conclusion que je ne me sens pas contraint.

    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Ce serait ça, le mystère.
    Et je ne prétends pas l'avoir résolu pour autant.



    Citation Envoyé par Aigoual Voir le message
    Jusqu’au jour où, peut-être, à la manière dont les physiciens cherchent eux aussi leur fameux saint Graal de la grande unification, nous trouverons celle qui résout l’énigme de l’antagonisme du sujet et de l’objet.
    Tu devines déjà que ce Graal a pour moi la substance de celui d'Indiana Jones
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  9. #39
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Aïe… Tu vas me faire souffrir : c’est en anglais !
    Je vais quand même faire l’effort.

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Mais cela ne remet pas en cause le réel, mais, au choix, chacune des réalités causes de la singularité ou bien encore cette envie esthétique qui nous pousse à désirer cette continuité.
    Oui, c’est vrai, j’avais oublié : les scientifiques ne parlent pas de « réalités » mais de « singularités. »
    Ce qui leur permet de maintenir l’idée (ou l’esthétique, comme tu dis) de continuité du réel.

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Non seulement rien ne l'interdit [la discontinuité du réel], mais rien n'impose que "nous en sommes chacun d’entre nous, la réconciliation, de fait", c'est dans ce besoin exprimé de réconciliation que je vois une tentation esthétique, et non une nécessité logique. Tentation esthétique dont je me méfie, de peur qu'elle ne perde son statut, comme André Breton se méfiait de la tentation romantique.
    Oui, je suis d’accord avec toi pour dire que vouloir le maintien de cette continuité du réel est une tentation esthétique plus qu’une nécessité logique non démontrée.

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    C'est à cette conclusion que je ne me sens pas contraint.
    Je comprends ce que tu veux dire.
    Il y a cependant bien contraintes, à deux niveaux :

    La première, c’est que, même s’il s’avérait qu’il y ait rupture de continuité logique, nous serions malgré tout dans la nécessité de persister à penser en logique(s)
    Ici, ce n’est plus une question d’esthétique, mais de limite intrinsèque à ce que nous sommes.
    Nous sommes condamnés par « nature, » à donner du sens, même en l’absence de sens.
    Et pourtant, rien n’indique que l’en-soi (le réel) en possède un.
    Il est au contraire bien plus probable qu’il n’en ait aucun.
    C’est nous qui lui conférons ce(s) sens qu’il n’a pas.

    La seconde, c’est que malgré cette rupture probablement indépassable de continuité entre le sujet et l’objet, je constate que je suis.
    Je suis contraint de constater que je suis, alors qu’en toute logique, je ne devrais pas être, puisqu’il y a (probable) rupture intrinsèque.
    Et ça, ce n’est pas du tout esthétique…

    En fait, le soupçon d’esthétisme s’adresse davantage aux tentations réductionnistes.
    Soit venant du scientiste qui, pour refuser l’idée « inesthétique » de rupture, tente de réduire le sujet à l’objet.
    (Ha ! Si la mécanique du monde était enfin totalement achevée…)
    Soit à l’inverse, venant du solipsisme de l’artiste (en particulier romantique, selon Breton) qui tente de réduire cet insupportable obstacle de l’objet à soi.
    (Ha ! Si le monde entier n’était qu’amour et non résistance inerte et imbécile à ce que je suis…)

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Et je ne prétends pas l'avoir résolu pour autant.
    Ben moi non plus.

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Tu devines déjà que ce Graal a pour moi la substance de celui d'Indiana Jones.
    Allons bon… L’a fait quoi celui-là ?
    (j’ai honte, ch’uis nul, me souviens plus du film…)

    Aigoual.

  10. #40
    inviteb276d5b4

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Bonjour
    Citation Envoyé par Aigoual
    Je suis contraint de constater que je suis, alors qu’en toute logique, je ne devrais pas être, puisqu’il y a (probable) rupture intrinsèque.
    Et ça, ce n’est pas du tout esthétique…
    Au contraire, je trouve ça de toute beauté. La "rupture" est magnifique, et nous, sommes "continuité de la discontinuité".

    C'est l'opposition qui rend possible notre nature biologique. Nous sommes créés et créons de manière dialectique.
    Platon déja distinguait cette rupture quand il dit de l'Instant qu'il est situé entre le mouvement et le repos.
    L'Instant de la discontinuité est purement spatial, non temporel.
    Pour être véritablement une expression du monde par l'être et expression de l'être par le monde, la rupture est nécessaire.

    Elle incarne le fait historique, socio-historique même, unique, irréitérable, un Présent tout autant éphémère qu'éternel. Dans cette continuité qui est pour nous téléologique, la rupture fait que chaque Instant est en lui-même une fin et un commencement.

    La rupture est nécessaire car elle est aussi paradaxolement sa propre négation absolue, la relation. Et comment pourrait-il y avoir des formes et des trans-formations sans relation et rupture ?
    Sans discontinuité, le monde phénomènologique est impossible.

  11. #41
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Au contraire, je trouve ça de toute beauté. La "rupture" est magnifique, et nous, sommes "continuité de la discontinuité."
    Une esthétique de la rupture ?
    Pourquoi pas ?
    Ca me plait bien, comme idée.
    C’est notamment de celles que je peux ressentir en face de certaines œuvres de Picasso.

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    C'est l'opposition qui rend possible notre nature biologique. Nous sommes créés et créons de manière dialectique.
    Platon déjà distinguait cette rupture quand il dit de l'Instant qu'il est situé entre le mouvement et le repos.
    Oui, mais ici, la rupture dont tu parles ici semble plus proche de ce que je nommais, dans cet autre fil où nous échangions avec Médiat, « écart. »

    Le fait que l’en-soi du réel nous soit inaccessible ne signifie pas que le lien qui nous y attache n’existe pas.

    Si tu m’autorises à reformuler ta phrase, cela donnerait donc quelque chose comme :
    « Platon déjà distinguait cet écart [d’avec l’en-soi du réel], quand il dit de l'Instant qu'il est situé entre le mouvement et le repos. »

    Pour saisir l’instant, il faut l’abstraire du réel et cette abstraction fait écart, non rupture.
    Si nous étions en totalité dans le réel, nous serions dans la totalité du temps, et l’instant n’aurait plus de sens.

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    L'Instant de la discontinuité est purement spatial, non temporel.
    Ce qui fait que, si la logique est source de cet écart, mais elle n’est pas en rupture avec elle-même.
    Il n’y a pas « discontinuité. »

    Lorsque la pomme tombe de l’arbre, le trajet qu’elle fait dans l’espace n’est pas discontinu.
    Il n’y pas un instant où elle se trouve attachée à l’arbre, et l’instant suivant où elle se retrouverait à des milliers de kilomètres de là.
    Non, dans l’instant qui suit, elle est juste un peu plus bas, en cohérence logique avec les lois de l’univers...

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Pour être véritablement une expression du monde par l'être et expression de l'être par le monde, la rupture est nécessaire.
    En revanche ici, oui, il semblerait bien que la rupture dont tu parles soit la même à laquelle je faisais allusion.
    A savoir l’antagonisme entre l’objet et le sujet se faisant mutuellement scandale l’un l’autre, sans pourtant jamais être capable de se réduire l’un par l’autre.

    Mais je reconnais volontiers qu’une fois correctement identifiée, cette rupture puisse posséder une véritable esthétique, un peu à la manière des tableaux de Picasso dont je parlais plus haut.

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Elle incarne le fait historique, socio-historique même, unique, irréitérable, un Présent tout autant éphémère qu'éternel. Dans cette continuité qui est pour nous téléologique, la rupture fait que chaque Instant est en lui-même une fin et un commencement.
    Ici, nous revenons à l’idée de l’en-soi d’un réel qui, même s’il possède tous les sens, n’en n’a aucun en particulier, et qui même s’il contient tous les commencements et toute les fins, n’a lui-même ni commencement ni fin.

    Oui, cette idée me va.

    En revanche, fais peut-être attention (si tu permets et sans t’offenser…) à tes envolées lyriques, parce que le lien avec l’historique ou le socio-historique me semble inutilement surajouté.

    On dirait du Lacan dans le texte !

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    La rupture est nécessaire car elle est aussi paradoxalement sa propre négation absolue, la relation. Et comment pourrait-il y avoir des formes et des trans-formations sans relation et rupture ?
    Alors oui, sous réserve de revenir à l’écart, plutôt qu’à la rupture.
    La relation devient nécessaire avec l’écart.
    Sans écart, plus besoin de renouer avec la relation, puisqu’il n’y a plus rien à relier (plus de distance)

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Sans discontinuité, le monde phénoménologique est impossible.
    Même chose : Sans « écart » d’avec le réel, le monde phénoménologique est impossible.

    Oui, absolument.
    Sans écart, l’objet que l’on souhaite observer ne se distingue plus du réel qui le contient, il n’y a donc plus d’observation possible, donc plus de phénomène et par là même, plus de science.

    En revanche, il faut impérativement maintenir une certaine continuité logique pour que l’observation ait lieu (donc le phénomène, donc la science, etc.)

    Ce qui signifie que, contrairement à ce que tu proposes, la discontinuité interdit bien le monde phénoménologique. Il n’y a plus de paradoxe.

    Or, c’est précisément ce que je suppose être entre le sujet et l’objet :
    Une rupture (une discontinuité) qui interdit le phénomène et donc ne pourra jamais être résolu par aucun savoir humain…

    Sauf à ce que je sois démenti, bien sûr…

    Aigoual.

  12. #42
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Bonjour Aigoual,

    Je reviens sur certains points de tes interventions, car je ne suis pas certain de bien comprendre (je précise par avance, que, dans ce qui suit, je n’inclus pas les mathématiques dans « science »).

    Je vais commencer par un inventaire des ruptures/discontinuités/écarts possibles dans une vision à trois niveaux (modèle, perception, réel en-soi) ; en con-fondant les deux premiers niveaux, on ne changerait pas grand chose, quelques uns des cas ci-dessous seraient cependant plus difficile à décrire (je me dispense des cas mettant en jeu Modèle et Réel en-soi, « sauter » par dessus la perception n’apportant pas grand chose).

    J’avais, dans un autre fil, parlé de distance, cela tombe bien, la notion de continuité et a fortiori d’écart (ou de rupture) s’expriment très bien en terme de distance.

    Distance entre perception et réel en-soi : par nature inconnaissable, donc difficile de décréter qu’elle n’est pas nulle, c’est à dire qu’il y a rupture.

    Distance entre modèle et perception : par nature perceptible, cette distance est connue comme étant non nulle, par exemple, dans le cas de la mécanique newtonienne et de notre perception moderne. Cette distance est la mesure de la qualité d’une théorie scientifique.

    Pour la suite, la notion de discontinuité est plus simple à manipuler que celle de distance, mais on peut passer de l’une à l’autre (que les mathématiciens me pardonnent cet à-peu-près). Définition naïve de la continuité : les images de deux éléments proches sont proches.

    Discontinuité entre réel et perception : bien sur, de par la nature inconnaissable du réel, une éventuelle discontinuité n’est pas aisée à déterminer, on peut cependant imaginer que deux (là j’ai un problème de vocabulaire) événements/phénomènes/objets différents du réel ne soit perçus comme identiques, seule une évolution de notre perception (par un changement de modèle par exemple), pouvant mettre en évidence cette différence (qui est donc, in fine, une discontinuité entre ancienne et nouvelle perception (expérience de Michelson et Morley))

    Discontinuité entre modèle et perception : le cas le plus riche, bien sur, l’exemple le plus frappant est la dualité onde/corpuscule de la nature de la lumière, personnellement, nous en avons déjà discuté, ce cas ne me perturbe pas, le modèle étant tout aussi assumé en tant que tel que l’emprise qu’il a sur la perception.

    Tu fais aussi allusion à la discontinuité intrinsèque de la perception (on pourrait aussi mettre cela sur le compte du continu et du discret) :
    Citation Envoyé par Aigoual
    Sans écart, l’objet que l’on souhaite observer ne se distingue plus du réel qui le contient, il n’y a donc plus d’observation possible, donc plus de phénomène et par là même, plus de science.
    Si je comprends bien ce que tu veux dire, et même si je suis globalement d’accord, ce n’est pas si net que cela, les longueurs d’onde de la lumière visible ne présentent pas de rupture, et pourtant nous distinguons bien plusieurs couleurs ; même si la frontière entre un homme petit, un homme moyen et un homme grand est floue, même si chacun d’entre nous peut avoir une opinion différente de son voisin, à chaque cas particulier, nous sommes tous capable de faire cette catégorisation (même si elle n’est pas satisfaisante).

    Je reviens sur le cas particulier sujet / objet, là encore sous réserve que j’ai bien compris : tu dis que le « Je » en-soi (hors du logos) n’est pas le « Je » du logos, ce qu’un autre a écrit : Je est un autre. Sans remettre en cause cette distinction, je n’adhère pas à :
    Citation Envoyé par Aigoual
    La seconde[contrainte], c’est que malgré cette rupture probablement indépassable de continuité entre le sujet et l’objet, je constate que je suis.
    Je suis contraint de constater que je suis, alors qu’en toute logique, je ne devrais pas être, puisqu’il y a (probable) rupture intrinsèque.
    Pour prendre un exemple un peu ras des pâquerettes, un cylindre se projette sur un plan sous la forme d’un cercle et sur un autre sous la forme d’un rectangle, faut-il dire qu’il y a rupture dans l’en-soi intrinsèque du cylindre, ou dans mes visions de ce cylindre ?
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  13. #43
    Médiat

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Ooops, j'ai oublié de préciser ce que je voulais dire à propos du Graal d'Indiana Jones : c'est du cinéma .
    Je suis Charlie.
    J'affirme péremptoirement que toute affirmation péremptoire est fausse

  14. #44
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Je reviens sur certains points de tes interventions, car je ne suis pas certain de bien comprendre.
    Probablement parce que j’ai fait quelque chose de très mal :
    Je n’ai pas pris soin de définir les termes que j’utilise.
    Et ça, ce n’est pas bien du tout, parce que je pressens effectivement un désaccord qui, s’il n’est pas correctement identifié, risque de nous faire tourner en rond, sans jamais nous comprendre.

    Il me faut donc m’expliquer sur mon vocabulaire, avec à ta charge (si tu le souhaites !) de m’indiquer les termes normés en usage par les scientifiques (tu sais, un peu comme tu m’avais fait remarquer que « singularité » convenait mieux que « réalité » dans le monde de la science)

    Alors, allons-y.

    Par « écart, » j’entends la nécessaire distance qui sépare l’observateur de l’observation.
    Sans cet écart, l’observation devient impossible, puisque l’observateur et son objet ne sont plus qu’un.
    La science exige donc cet écart, au moins depuis Descartes.

    Par « distance, » j’entends l’évaluation de l’écart.
    C’est elle qui permet de définir les marges d’erreurs ou de tolérances.
    Selon les modèles (observation), la marge acceptable est plus ou moins grande.
    Mais elle existe toujours, puisqu’il y a toujours écart.

    Par « discontinuité, » j’entends une rupture logique intrinsèque à l’observation (exemple de la pomme qui tomberait ailleurs que là où elle doit tomber)

    C’est à mon sens là que se trouve notre différence de vue.
    Selon moi, la discontinuité (ou rupture) n’est pas…

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    ... Distance entre perception et réel en-soi : par nature inconnaissable, donc difficile de décréter qu’elle n’est pas nulle, c’est à dire qu’il y a rupture…
    … Ici, il n’y a pas rupture.
    La continuité, même inaccessible de bout en bout, est préservée.

    Le fait qu’il ait écart n’induit pas nécessairement discontinuité logique.
    Et ceci, peu importe que l’écart nous est imposé par la méthode ou par l’outillage utilisé.
    Nos progrès techniques tendent à réduire toujours davantage l’écart.
    Mais la méthode nous rappelle que l’outil absolu restera toujours absolument interdit.

    Par « rupture, » j’entends donc une discontinuité intrinsèque dans la logique qui nous permet d’observer.
    Il s’agirait d’une rupture de cohérence du réel qui ne serait pas due à l’écart, mais bien au réel lui-même, qui ne respecterait plus les lois que nous aurions nous-mêmes observées pour qu’il soit ce qu’il est.

    On peut deviner ce type de rupture dans l’instant immédiat qui suit le big-bang (ou qui le « précède, » encore que cette notion de précession n’ait plus aucun sens), puisque toutes les lois de la physique sont alors prises en défaut.
    On peut également suspecter, comme tu l’envisages, une rupture intrinsèque dans la dualité onde/corpuscule, même s’il me semble plutôt que cette rupture n’est pas irréductible (au moins sur le papier. Problème : comment vérifier ?)

    Et puis, il y a cette rupture que je suppose indépassable entre le sujet et l’objet.
    Avec cette question à laquelle la science est incapable de répondre :
    Pourquoi suis-je moi et non pas un autre ?
    Fut-il mon frère jumeau ou mieux encore, mon clone ?

    Pour la science, les autres comme moi sommes tous objets, ce qui ne lui pose aucune difficulté.
    Elle peut effectivement s’exprimer aisément sous la forme :

    Citation Envoyé par Médiat Voir le message
    Le « Je » en-soi (hors du logos) n’est pas le « Je » du logos, ce qu’un autre a écrit : Je est un autre.
    Seulement ici, il n’y a pas rupture, mais écart.

    En revanche, le fait que je sois moi et pas un autre ne peut plus se résoudre par l’écart.
    Je peux éventuellement l’accepter pour les autres, après tout, pourquoi pas ?
    Mais pas pour moi…
    Moi, je résiste…
    Et, dans cette résistance, mieux vaut encore tenter de réduire la totalité de l’univers à ce que je suis, plutôt que de me soumettre à la certitude d’échouer à me dissoudre en lui.
    C’est cette réduction que l’on nomme solipsisme.

    Pour ma part, je préfère tenir compte de la résistance que m’oppose l’objet (ou l’autre), symétrique à celle que je lui oppose, sans vouloir absolument maintenir la cohérence du réel, soit par réduction de l’objet au sujet, soit par réduction du sujet à l’objet.

    Seulement ce refus des réductions mutuelles a un prix :
    Celui de l’acceptation d’une rupture intrinsèque dans la continuité du réel entre moi et le reste du monde objectal.

    C’est ça qu’il est désagréable d’admettre, parce qu’autant indémontrable que for peu esthétique…

    Aigoual.

  15. #45
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    L'autre est objet tant qu'il n'y a pas de reconnaissance du "tu" par le "je".
    […]
    "Nishida affirme qu'ultimement, ce qui rend possible la relation "je-tu" est l'auto-négation absolue. En se niant soi-même, le "je" reconnait l'autre comme personnalité. Cette reconnaissance est l'accomplissement de l'auto-négation puisque ce faisant, le "je" devient véritablement lui-même:"le "je" est un "je" en voyant le "tu" comme un "tu", tandis que le "tu" est un "tu" en voyant le "je" comme un "je"".
    […]
    Les notions qui viennent brièvement d'être évoquées aboutissent à celle "d'éveil à soi", qui est le point culminant de la relation "je-tu". Comme le répète inlassablement Nishida, l'éveil à soi consiste à "voir en soi l'autre absolu" et, inversement, à "se voir dans l'autre absolu".
    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    Ce n'est pas là la négation absolue de soi dont parle Nishida. […] il faut dépasser le soi. Le soi ne peut être objet du soi car dans ce cas, il est un soi pensé pas le soi qui pense.
    Ces deux notions d’auto-négation absolue et de dépassement de soi peuvent prêter à confusion si elles ne sont pas précisées.
    Elles sont ce que d’autres nomment « renoncement. »

    Si j’y reviens, c’est parce qu’il ne faudrait pas assimiler le renoncement et la réduction dont je parle dans mon message précédent.

    Bob a raison : renoncer, ce n’est pas réduire, bien au contraire.

    Ce n’est non seulement pas la même chose, mais les deux mouvements sont même diamétralement opposés, avec des finalités définitivement incompatibles.

    J’essaie de trouver un peu de temps pour développer plus avant ce soir.

    Aigoual.

  16. #46
    inviteb276d5b4

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Bonjour
    Citation Envoyé par Aigoual
    Ici, nous revenons à l’idée de l’en-soi d’un réel qui, même s’il possède tous les sens, n’en n’a aucun en particulier, et qui même s’il contient tous les commencements et toute les fins, n’a lui-même ni commencement ni fin.
    C'est un peu ça. Nishida emploie l'expression "d'auto-détermination sans déterminant".

    Citation Envoyé par Aigoual
    En revanche, fais peut-être attention (si tu permets et sans t’offenser…) à tes envolées lyriques, parce que le lien avec l’historique ou le socio-historique me semble inutilement surajouté.

    Il n'y a absolument pas d'offense, toutes critiques sont toujours les bienvenues. Elles font parties de l'opposition naturelle du débat.

    Je n'ai pas cherché à être lyrique mais précis en ce qui concerne la spatialisation de l'Instant. C'est cet Instant, qui s'auto-détermine (car s'il était déterminé par autre chose il ne serait pas le Présent), qui est le lieu où le temps vient s'établir pour y disparaître aussitôt. Ce n'est pas nous qui traversons le temps, c'est lui qui nous traverse. Nous devons je pense, nous même nous considérer comme "lieu", en tant que fait (et un fait est toujours historique) d'une nature qui consiste à vivre en mourant. C'est en ce sens je crois, que doit être comprise l'irreversibilité du temps et où finalement "la mort est/n'est pas la vie".


    "écart" et "rupture".

    Je pense que la "rupture" incarne l'absolu. Elle n'est pas pensée mais exprimée de manière intuitive; en ce sens elle précède le temps, elle agit avant la forme. Elle appartient au spatial.

    L'écart est chose pensée, il est relatif, déja forme passée ou futur, il appartient au temporel.

    Citation Envoyé par Aigoual
    Ces deux notions d’auto-négation absolue et de dépassement de soi peuvent prêter à confusion si elles ne sont pas précisées.
    Elles sont ce que d’autres nomment « renoncement. »
    S'il y a renoncement, c'est juste d'une manière de voir "l'identité" de l'individuel et de l'universel. Nishida parle lui "d'auto-identé absolument contradictoire".

    L'auto-négation absolue n'est pas à comprendre à partir du soi mais du monde. c'est ainsi que Nishida par exemple exprime le Présent; comme une auto-négation absolue du passé et du futur.
    Expliqué la philosophie de Nishida n'est pas chose facile, Il y a à la fois l'utilisation permanente du doute cartésien qu'il pose comme fondement de la pensée objective et la philosophie expérientielle de Nâgârjuna qui elle nie tout substratum et parle de "coproduction conditionnée". Il y a intrinséquement, dans ce qu'il appelle "la logique du basho(lieu)", la logique du concept et du renoncement à ce concept. La négation absolue et négatrice mais pas négative. Une affirmation n'étant finalement qu'une somme de négations. En ce sens, la négation absolue est/n'est pas l'affirmation absolue.


    "l'en-soi inconnaissable".

    C'est Kant qui déclara ceci en opposition à Descartes. Inconnaissable par inférence, par un quelconque intermédiaire, un substratum, là d'accord. Mais ensuite ?
    Ca s'arrête là ? Ben oui, Kant se débarrasse du problème et s'en remet à la science. Mais seule la philosophie peut étudier ce qu'est la réalité, être une ontologie de la réalité, pas la science de l'objet seul.
    L'en-soi se doit d'être vécu. Même la science sans le vouloir le montre. La mesure quantique fait perdre l'intrication...
    Pour l'homme, l'en-soi se révèle quand on ne mesure pas. C'est la pratique de la non-attention. Ici la pratique est véritable, ce n'est pas faire une expérience, c'est être l'expérience où "ce qui exprime est ce qui est exprimé". Là se trouve le véritable individuel.

  17. #47
    invite309928d4

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par Bob Trebor Voir le message
    (...)
    , Kant se débarrasse du problème et s'en remet à la science. Mais seule la philosophie peut étudier ce qu'est la réalité, être une ontologie de la réalité, pas la science de l'objet seul.
    Pour l'homme, l'en-soi se révèle quand on ne mesure pas. C'est la pratique de la non-attention. Ici la pratique est véritable, ce n'est pas faire une expérience, c'est être l'expérience où "ce qui exprime est ce qui est exprimé". Là se trouve le véritable individuel.
    Bonjour,
    Kant ne se débarasse pas du problème et il fait même un usage de l'en-soi comme fondement de la liberté.
    L'en-soi est conçu par Kant comme quelque chose qui s'exprime directement (nous sommes ce que nous sommes) mais ce "quelque chose" n'est pas l'objet des sciences lesquelles ne traitent que de ce que nous percevons (phénomène). Il y a distinction entre le "Je" comme Moi (la perception d'un ego, d'une image de soi avec la distance à soi) et le "Je" comme sujet transcendantal (l'immédiateté du "je suis").

    Mais je ne vois plus trop le rapport au sujet initial...
    Bob, Aigoual, Médiat, de quoi parle-t-on exactement ?

  18. #48
    invite64c4b5da

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Pour en revenir a la question initiale, ne pourrait on dire qu'arts plastiques et sciences ont toutes deux besoin d'un fort mecanisme de creation pour se developper et donc une civilisation scientifique serait souvent artistique car s'appuyant sur les memes fondements (civilisation permettant l'eveil des gens a la curiosite, la creation,...).
    Mais bon, je suppose qu'il existe plein de contre-exemples, mais je me dis que lorsque notre seule motivation est survivre jusqu'au lendemain, il est plus dure de creer.

  19. #49
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Citation Envoyé par bardamu Voir le message
    Mais je ne vois plus trop le rapport au sujet initial...
    Bob, Aigoual, Médiat, de quoi parle-t-on exactement ?
    Le sujet initial, c’est de savoir si une civilisation purement scientifique est possible sans art.

    Si l’art, comme je le suppose, appartient exclusivement à l’individu et la science exclusivement à l’objet, il est inévitable que l’on traite du rapport du sujet à l’objet et réciproquement.

    Et si, toujours comme je le suppose, cet antagonisme et autant irréductible qu’impossible à dépasser, il nous faut bien évoquer les différentes voies pour y faire face, tant au niveau individuel que collectif (puisqu’il s’agit de civilisations)

    Honnêtement, j’ai bien la conviction que nous sommes au cœur de la question posée et non en digressions.

    De toute manière, comme pour tout ce qui touche la philosophie, ce n’est pas l’objet qui nous donnera les réponses.
    Ce n’est pas lui qui est digne d’intérêt.
    C’est le sujet qui le pense.
    C’est ce dernier qui m’intéresse, parce qu’il me concerne directement, moi et les autres.

    Aigoual.

  20. #50
    Aigoual

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Salut Bob,

    Zut, j’ai pas le temps ce soir.
    C’est dommage, ton message me plaisait bien, même si ce n’est pas mon vocabulaire.

    Je n’ai pas le temps non plus de développer sur le renoncement.
    Je voulais juste vérifier que le renoncement consistait à renoncer au réductionnisme, là où le réductionnisme tentait d’éviter l’obligation du renoncement.

    C’est symétrique, mais ce n’est pas seulement un propos esthétique.
    Ca fonctionne.

    A plus,

    Aigoual.

  21. #51
    inviteb276d5b4

    Re : Une civilisation scientifique sans art

    Bonsoir
    Citation Envoyé par bardamu
    Kant ne se débarasse pas du problème et il fait même un usage de l'en-soi comme fondement de la liberté.
    Ca je suis bien d'accord, la liberté par l'expression de l'individualité.
    Citation Envoyé par bardamu
    L'en-soi est conçu par Kant comme quelque chose qui s'exprime directement (nous sommes ce que nous sommes) mais ce "quelque chose" n'est pas l'objet des sciences lesquelles ne traitent que de ce que nous percevons phénomène).
    D'accord, nous avons là l'opposition sujet objet. Mais il faut une dimension, un "lieu" pour que cette opposition s'établisse.
    Citation Envoyé par bardamu
    Il y a distinction entre le "Je" comme Moi (la perception d'un ego, d'une image de soi avec la distance à soi) et le "Je" comme sujet transcendantal (l'immédiateté du "je suis").
    Oui mais, en partant du sujet comme le fait Kant, l'immanence pensée, donc objet du soi, demande une transcendance pour l'expression du "je suis". Cette séparation fait que, ici, l'existence n'est pas l'essence. Le connu n'est pas le connaissant. Il n'y a pas de véritable individualité. Quand je dis que Kant laisse tomber le problème, je parle de la réalité. Qu'est ce que la réalité ? Ben... c'est un "en-soi" inconnaissable. Et depuis Kant, tout ceux qui tente d'approcher la question sont reléguer dans la plus vulgaire métaphysique. Je suis d'accord avec Nishida pour dire que la philosophie de Kant est la philosophie du "soi scientifique". Mon avis est qu'elle exprime une immanence objectivée qui demande une transcendance subjectivée. Finalement, on ne sort pas du soi... psychologique, et donc de l'objet. Mais je ne dis pas que j'ai raison, c'est un point de vue.
    La philosophie devrait avoir ce point commun avec la religion où l'immanence peut être ou ne pas être ou est/n'est pas la transcendance. Descartes imagina une philosophie qui part de l'extérieur, Kant lui, de l'intérieur, mais aucune des deux ne part du milieu; du monde. Aucune des deux ne part de l'Instant qui s'auto-détermine en fait absolu.
    Citation Envoyé par Aigoual
    Si l’art, comme je le suppose, appartient exclusivement à l’individu et la science exclusivement à l’objet, il est inévitable que l’on traite du rapport du sujet à l’objet et réciproquement.
    Salut Aigoual.
    J'ai conscience de mon cruel manque de développement mais je suis comme toi en manque de temps et aussi en manque de mots pour reformuler du Nishida correctement dans un langage plus "occidental", mais j'y travaille.

    Comme tu le disais précedemment, le scientifique est un individu. Il y a donc une part commune à l'artiste et au scientifique, c'est l'intuition. Même si le scientifique essaie de l'enfouir sous une tonne d'objectivité, elle est bien là.
    D'ailleurs, lorsqu'elle disparait, artiste et scientifique n'avance plus et sont enfermés dans leur modèle. l'intuition devient passive et n'a plus sa fonction de "perception agissante".

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