La question est plus précisément : « Que veut dire : "proposition vraie" en mathématique » ?
Deux exemples :
Ex1.1) L'axiome « Par un point donné, on peut mener une et une seule parallèle à une droite donnée » est-il "vrai" ?.
Ex1.2) Dans le cadre de la théorie constitué des axiomes de la théorie de la géométrie euclidienne privée du 5ième postulat d'Euclide, L'axiome « Par un point donné, on peut mener une et une seule parallèle à une droite donnée » est-il "vrai" ?.
Ex1.3) Dans un modèle de la géométrie euclidienne, L'axiome « Par un point donné, on peut mener une et une seule parallèle à une droite donnée » est-il "vrai" ?.
Ex2) La phrase usuelle concernant le théorème d'incomplétude de Gödel (sous la plume de journalistes, de vulgarisateurs, de logiciens célèbres (J.Y. Girard, par exemple)) : « Proposition vraie indémontrable »
Je ne gloserai pas sur l'exemple Ex1 et ses variantes, il devrait suffire de lire ces 3 variantes pour comprendre l'ambiguïté ou l'inutilité du mot "vrai" dans ces variantes.
Les significations possibles de "proposition vraie" auxquelles j'ai pu penser sont (si vous en avez d'autres à proposer, je suis intéressé) :
S1) Une proposition "vraie" dans une théorie est une proposition démontrable dans cette théorie
S2) Une proposition "vraie" est une proposition valide dans tous les modèles d'une théorie donnée
S3) Une proposition "vraie" est une proposition valide dans au moins un modèle d'une théorie donnée
S4) Une proposition "vraie dans le modèle M" est une proposition valide dans le modèle M, d'une théorie donnée
La signification S1 est "acceptable" mais inutile (deux mots pour la même signification), l'exemple Ex2 deviendrait tautologiquement ridicule.
La signification S2 est "acceptable", mais d'après le théorème de complétude de Gödel, dans la logique du premier ordre, "vrai" et "démontrable" seraient équivalents et donc l'exemple Ex2 deviendrait logiquement ridicule.
La signification S3 est dérangeante, car une même proposition pourrait être considéré comme "vraie" et comme "fausse" conjointement (par exemple, on pourrait dire : "Dans la théorie des groupes, la commutativité est vraie", mais on pourrait aussi dire "Dans la théorie des groupes, la non-commutativité est vraie", cette solution me paraît donc condamnable.
La signification S4 me semble parfaite, à condition de citer explicitement le modèle dont on parle, or dans l'exemple Ex2, le modèle n'est, justement, pas cité.
Il est possible, avec beaucoup de mansuétude, de considérer que l'Ex2 est une forme abrégé de « Proposition vraie dans le modèle standard et indémontrable », lorsque l'on parle de l'arithmétique de Peano (AP ci-après), il existe bien un tel modèle standard (, muni des opérations usuelles), on peut d'ailleurs donner une définition purement mathématique de "standard" (il s'agit en fait du modèle premier de AP) ; mais dans le cadre du théorème d'incomplétude de Gödel, on parle de toutes les théories dans lesquelles on peut formaliser AP, or toutes ces théories n'ont pas de modèle standard, et si elle en ont, il n'est pas clairement identifié, et donc l'Ex2 ne veut plus rien dire.
Par exemple, soit le langage = langage de AP , où est un nouveau symbole de constante, soit la théorie dont les axiomes sont ceux de AP (dans le nouveau langage) plus les axiomes suivant, pour tout entier naturel : , par compacité, cette théorie est iso-consistante avec AP, le modèle standard de AP n'est pas un modèle de cette théorie, aucun modèle standard de cette théorie n'est clairement identifié, l'exemple Ex2, à nouveau, ne veut plus rien dire !
Pour conclure, je penche pour la signification et surtout l'usage S4 (je n'ai rien contre S2, à part qu'elle n'est pas claire), et condamne fermement l'Ex2.
-----