Des chercheurs ont soutenu l'hypothèse d'une collision catastrophique, de la présence passée d'un océan sous la surface, en s'appuyant notamment sur la faible cratérisation de Pluton.
Ces dernières semaines et surtout dans les jours encadrant le 14 Juillet, la sonde New Horizons nous a livré un flux régulier d'informations nouvelles sur Pluton, Charon, et des petites lunes les accompagnant. On a pu s'étonner, dans les premiers gros plans, de n'observer quasiment aucun cratère. Une surface indemne d'impacts est la preuve indiscutable qu'elle a été fraîchement remaniée, ce qui impliquerait que les plaines de Tombaugh Regio soient très jeunes au regard de l'histoire planétaire, probablement âgées de moins d'une centaine de millions d'années. A priori, c'est assez surprenant.
Lorsque l'on observe Pluton à une résolution suffisante pour repérer des détails d'environ 1 kilomètre de large, on constate une absence flagrante de cratères.
Une des possibilités serait qu'un impact catastrophique, entre ce que sont maintenant Pluton et Charon, ait créé un océan sous la surface du premier. Cet océan pourrait avoir été à l'origine d'une tectonique des glaces.
les scientifiques ont envisagé comment un choc entre deux corps de même taille aurait engendré le couple Pluton/Charon, et comment des effets de marée réciproques pourraient avoir été à l'origine d'un océan interne, alors qu'ils se trouvaient encore dans une phase d'équilibrage rotationnel induit par ces marées.
Les premiers résultats issus du survol de Pluton cadrent-ils avec ces théories ?
L'hypothèse la plus consensuelle pour expliquer comment Pluton ait pu posséder une lune de presque 1/10 de sa masse, est celle d'une ancienne collision catastrophique entre deux corps de tailles équivalentes. La collision aurait arraché une importante masse de débris de la surface de Pluton, tandis que Charon se formait à partir du plus grand fragment intact de l'impacteur et agrégeait le reste des débris. Certaines recherches annexes étudient si les petites lunes peuvent être des restes de débris du disque d'accrétion à l'origine de Charon.
Des essais de modélisation on montré qu'une percussion oblique entre deux corps rocheux de taille similaire, avec des manteaux de glace, pourrait produire Pluton, Charon ainsi qu'un disque d'accrétion constitué de minuscules lunes glacées, et cela avec un chauffage minimal des débris.
les scientifiques soulignent que le choc n'a pas besoin d'être très violent entre les deux proto-planètes pour créer le système comme celui que nous voyons aujourd'hui.
Le meilleur modèle actuel de collision implique deux objets de taille relativement égale se percutant à environ 1 km/s. Il y aurait eu une collision relativement "douce", qui aurait pu chauffer Pluton de quelques dizaines de degrés Celsius seulement.
L'objet qui devient Charon serait essentiellement constitué de la matière de l'impacteur qui serait resté relativement intact après la collision. Ceci reste conforme avec le fait que la densité moyenne de Charon est sensiblement différente de celle de Pluton.
Si les deux corps étaient d'une composition habituelle pour des objets de notre système solaire, ils devaient contenir des roches silicatées avec une quantité donnée de matières radioactives. S'ils sont entrés en collision il y a très longtemps , et qu'ils étaient alors encore chauffés par la désintégration de leurs éléments radioactifs, il est envisageable que quelques dizaines de degrés supplémentaires produit par le choc aient été suffisantes pour créer un océan interne. Même si quelques dizaines de degrés ne sont pas tout à fait assez élevées pour créer un océan, l'étape suivante de l'évolution du couple implique un ballet orbital entre la planète naine et sa lune principale évoluant dans le temps. Après la collision, les deux monde agissent l'un sur l'autre. Leurs orbites asynchrones exercent des forces qui ralentissent leurs rotations respectives. La première étape est atteinte lorsque Charon, stoppant sa rotation, conserve toujours sa même face orientée vers Pluton. C'est exactement la situation que nous connaissons actuellement entre la Terre et la Lune, cette dernière nous montrant toujours la même face, alors que l'inverse n'est pas vrai. La deuxième étape, est un double état synchrone, lorsque le corps le plus grand tombe lui-même dans cette situation par rapport à son satellite.
On considère que la transition vers un état synchrone pour Charon, a été quasi-instantanée, l'évolution vers la double synchronisation Pluton/Charon aurait pris, elle, beaucoup plus de temps. Cela tient à la façon dont la collision s'est produite. Cela aurait pris environ une cinquantaine d'années pour que Charon atteigne son état synchrone, mais sans doute plusieurs millions d'années pour que Pluton et Charon aient stoppé leurs rotations mutuellement. Il faut beaucoup de temps pour qu'un système atteigne la stabilité des orbites circulaires avec un blocage complet de double synchronicité.
Nous avons vu avec les lunes glacées dans le système solaire que les forces de marée qu'exercent sur elles les planètes géantes peuvent être suffisantes pour entraîner une activité géologique
La même chose n'est pas vrai pour Pluton en raison de l'absence de planète géante à proximité, mais il pourrait y avoir une autre possibilité.
La période de quelques millions d'années après que Charon se soit synchronisé avec Pluton, alors que la planète naine n'était pas encore dans la même situation, offre les conditions physiques permettant l'apparition d'un océan sous la surface de Pluton. Les effets de marée d'un corps sur un autre vont dépendre de quatre paramètres, le ratio des masses entre le corps principal et sa lune, la distance entre ce corps et sa lune, l'excentricité de l'orbite de la lune autour du corps principal et la différence entre la période de rotation du corps principal et la période orbitale de sa lune.
Les forces de marées sont inversement proportionnelles au cube de la distance séparant les astres. Mais aussi, plus l'excentricité de l'orbite est élevée (en d'autres termes plus la modification de la distance entre le corps principal et sa lune se produit au cours d'une orbite), plus le stress provoqué par les marées sera important (les frictions dans les couches de matériaux génèrent un échauffement). Tant que la période de rotation et la période orbitale ne sont pas synchronisées, alors le déséquilibre du renflement asymétrique dû aux marées sera suffisant pour déformer ces astres.
Pour les planètes géantes avec de minuscules lunes en orbite, le rapport de masse est de 10 000 pour 1. Cela signifie que la géante gazeuse ne sera presque pas affectée par la lune, tandis que la lune va être considérablement impactée par son écrasant parent. Pour une lune en orbite autour d'une géante gazeuse, l'effet le plus important sera son excentricité orbitale. Si la lune est dans une orbite excentrique, la distance entre la planète et de la lune change sur son trajet orbital, et ainsi de la hauteur du renflement de marée change cycliquement.
Ce n'est pas le cas pour le système Pluton-Charon, où le rapport de masse entre le corps parent et sa lune est beaucoup plus inhabituel. Charon est la plus grande lune du système solaire par rapport à un corps parent. De fait, Pluton est seulement dix fois plus massif que Charon, soit un ratio unique de 10 pour 1.
Au cours des millions d'années, le transfert de mouvement entre Pluton et Charon a finalement abouti à un système verrouillé en une double synchronisation, chacun des corps présentant toujours sa même face à l'autre et tournant autour d'un barycentre extérieur à la planète naine.
Si nous regardons la période où Pluton et Charon s'installent dans un état synchrone mais n'ont pas encore atteint leur double synchronicité, la distance entre ces astres est petite, le rapport de masse assez équilibré, et le décalage entre la période de rotation de Pluton et la période orbitale de Charon va être important. Le résultat est une combinaison parfaite pour que, non seulement Charon subisse des déformations par effets des marées, mais aussi Pluton. En théorie, cela pourrait être suffisant pour avoir amené Pluton, initialement légèrement chauffé par ses radio-éléments, à un astre suffisamment chaud pour posséder un océan de subsurface. Une fois que que celui-ci est apparu, l'astre, en se refroidissant, ne vas pas redevenir aisément un monde sans océan et sans l'activité en découlant. Ce type de monde aura très probablement une boucle de rétroaction tendant à la préservation d'une masse liquide en profondeur.
Si nous pouvions trouver des traces de tectonique qui indiquent que Pluton a pu avoir un océan dans le passé, il est possible qu'il en subsiste quelque chose sous la surface. En effet, si cet océan a été amené à geler, tous les matériaux anti-gel tels que les sels et l'amoniaque ne s'intégreraient pas à la glace mais resteraient dans la phase liquide, augmentant ainsi leurs concentrations. Finalement, vous obtenez un océan qui, en se recouvrant d'une banquise de plus en plus épaisse, augmente en proportion sa capacité à résister au gel. Plus la proportion de glace s'élève en surface, plus la masse liquide restant en profondeur gèlera difficilement.
Le résultat est que même si les forces de marée ont cessé leurs apports en énergie thermique depuis des millions d'années, il reste envisageable qu'une partie d'un paléo-océan demeure encore actuellement liquide sous la surface de Pluton.
Si Pluton avait un océan interne, cela pourrait être suffisant pour provoquer une tectonique de plaques de glaces. Il ne serait pas impossible alors que nous puissions voir des caractéristiques semblables à celles que nous voyons sur la croûte d'Europa, et qui possède elle-même un océan sous la banquise qui le recouvre. Sa croûte est revêtue d'éléments linéaires distinctifs et de crêtes doubles. Même si nous n'avons encore rien vu de tels sur Pluton, nous pourrions éventuellement en voir une version moins spectaculaire quand d'autres images nous parviendrons de New Horizons. Il est également possible que nous voyions toute la panoplie habituelle de défauts, de crêtes et de rides existants sur toute planète solide avec un passé tectonique actif.
Trouver ces manifestations linéaires sur Pluton serait des éléments nécessaires indiquant, qu'à un moment quelconque de son histoire, il a été un monde actif, avec un océan interne. Ce pourraient être seulement des reliques géologiques du passé, si nous pouvions trouver un morceau de surface assez ancien pour les préserver.
Il est également possible que nous puissions fixer des contraintes sur la structure intérieure de Pluton en observant attentivement sa forme globale.
Charon apparaît également comme un monde bien peu cratérisé, en tout cas bien moins qu'une simple lune morte ne devrait l'être. Il est possible de lui imaginer une certaine activité géologique. Pour l'instant, nous sommes aussi à la recherche d'éléments linéaires à sa surface pouvant en attester.
Que doit-on penser de cette théorie ?
Au vu des meilleures images que nous avons déjà obtenu de la surface de pluton, il me semble que la très faible cratérisation constatée au départ, ait évolué vers une réalité plus nuancée. On s'aperçoit, en fait que Pluton a subi nombre d'impacts, mais que ceux-ci sont bien souvent pratiquement effacés par des processus érosifs restant à déterminer. C'est ici que la théorie d'une tectonique des glaces, attestant de l'existence, dans un passé plus ou moins éloigné d'un océan interne, intervient comme explication. Sans être en mesure de réfuter catégoriquement cette hypothèse, je pense qu'une simple activité de surface liée, à la migration saisonnière des glaces et les interactions avec l'exosphère, sont susceptibles d'agir de façon significatives dans l'effacement des traces d'un bombardement météoritique dont, en plus, nous ne connaissons pas forcément très bien l'intensité dans le temps.
Quelques lignes de failles semblent bien apparaître à l'ouest de Tombaugh Regio, mais leurs implications dans la structure interne de Pluton restent à évaluer...
Ce post n'est pas totalement une création originale. Il résulte du croisement de sources multiples et d'hypothèses personnelles dont la valeur scientifique réelle demeure incertaine.
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