Oui, on peut en effet dire que tous ceux qui ne sont pas scientifique connaisse mal LA vérité dans le domaine considéré. Et je remet bien la majuscule sur l'article (pour bien indiquer qu'elle est unique), mais en explicitant bien le terme.
LA vérité ce n'est pas la Vérité. Je désigne par LA vérité, qui est unique mais avec un vé minuscule le consensus de l'époque, c'est à dire l'orthodoxie (de ortho = droit, doxa = pensée). On peut dire que la République des Science propose un consensus dans chaque domaine qui représente ce qu'un esprit DOIT en penser pour penser droit. J'insiste bien sur le caractère nécessaire et moralement contraignant. Vous pouvez penser par exemple que les atomes n'existent pas : du point de vue de la loi, vous en avez le droit (dans les limites évoquée plus bas), mais dans la République des Science, ce n'est plus licite. Comme je parle de consensus, l"idée est donc que ça tend à l'unicité. Bien sûr, il y a des domaines encore mal consolidés pour lesquels plusieurs énoncé sont admis (par exemple, pendant un temps aviez le droit de penser que le taux d'expansion était de 50 km/s/Mpc ou de 100 km/s/Mpc. Aujourd'hui vous ne pouvez pas vous éloigner beaucoup de 70 km/s/Mpc).
Et je définie la Vérité avec un V majuscule, comme l'objet conceptuel, par essence inconnaissable, mais qui doit absolument être posé comme existant, duquel les vérités successives qui font l'objet de consensus à travers le temps s'approchent, ou tournent autours, au fur et à mesure des avancés scientifiques.
Quand je parle de la République des Science comme l'institution qui légifère sur le vrai, il s'agit donc de LA vérité. Et pour répondre à la première question, oui cette vérité là intéresse hautement non seulement le juge (pénal ou civil), mais aussi le législateur et le gouvernement et pour finir tous les acteurs d'une société, à de multiple niveau.
C'est en fonction de cette vérité consensuelles qu'on évalue les enfants à l'école, et donc toute la méritocratie scolaire est fondé sur le fait que cette vérité a une grande valeur, au point d'imposer aux enfants de passer près d'une dizaine d'années à l'assimiler. Cette vérité est la pierre de touche de la valeur sociale de l'individu, à égalité avec ses aptitudes comportementales.
Toute la vie économique qui touche aux choses naturelles (agriculture, mines, industrie, plus une grande partie des services) ne peut fonctionner sans cette vérité, qui sert d'étalon dans de nombreux rapports contractuels (par exemple, si vous achetez une mine d'or, vous allez d'abord demander l'expertise d'un géologue). Ça concerne les sociétés privés comme l'administration du territoire et des personnes. Dans le domaine judiciaire ça va concerner tout le domaine de l'expertise (de l'estimation d'un dol à l'élucidation d'un crime par la police scientifique). S'il y a contentieux, l'hurluberlu qui argumente sur la base des quatre éléments d'Aristote n'aura pas grain de cause face à celui qui se base sur la nature atomique de la matière. C'est du moins le consensus social sur la question : face à deux énoncés contradictoire sur la réalité, il nous parait plus juste de laisser à la science le dernier mot.
edit: une illustration humoristique et par l'absurde des différentes demandes sociales de sciences (Blog de Boulet)
Et si c'était vrai ?
Plus généralement, si on s'accord à séparer ce qui est de l'ordre du Bien (la morale, et au delà la politique, comme définition des buts à atteindre) et ce qui relève du Vrai (la science), un rapport déficient des individus à la vérité ne leur permet pas de s'accorder sur les moyens d'atteindre collectivement les buts posés par la morale et la politique. C'est un profond facteur de discorde.
Et donc, vu que la Science est au cœur du consensus social, celui qui s'en éloigne, en perd non seulement le fruit pour lui même, mais manque à ses devoirs de citoyen. Je ne pense pas qu'on puisse délaisser l'idéal d’honnête homme sans en payer collectivement le prix.
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