J’ai à peu près 30 pages à vous écrire sur le sujet sida. Par où commencer ?
J’ai 41ans et suis de formation scientifique. Je suis séropositif depuis au moins oct1986, j’ai failli mourir, ça n’est plus le cas. Les avancées thérapeutiques ne m’intéressent pas plus que cela, je les estiment suffisantes en ce qu me concerne ( peut-etre que je ne suis pas difficile, mais d'une part il faut voir d'où je viens et enfin il est certain que les messages de prévention font quelque part retenir l’idée que rien n’a changé alors qu’au contraire tout a changé en ce qui nous concerne. )
Quelques idées fausses ou trompeuses que j’ai décelées dans le très long forum précédent, certains venant de la modération elle-même.
Un internaute écrit : “ 25% des séropositifs ne se protègent pas ( un modérateur souligne cette phrase et demande les sources ) : c’est faux la très grande majorité des séropositifs ne se protègent pas : au moins 60% des homosexuels séropositifs contre 20% des homosexuels séronégatifs. Ces chiffres sont en augmentation chez les homosexuels, plus entourés par la maladie et qui en voient les effets reculer; Une enquete annuelle anonyme est réalisée, à laquelle je réponds à chaque fois, et les résultats sont accessibles.
J'ai une hypothèse, qui n'est qu'une hypothèse : le maintien de la protection encore elevée chez les homosexuels tient non à la peur de la maladie qu'à la préservation de l'image de responsabilité que cette communauté devant la société : sa réaction n'est pas extensible à celle du reste de la population masculine. Les femmes au contraire se protègent peut-être plus car elles sont désormais en première ligne : je prévois des tensions genre guerre des sexes !
Chez les hétérosexuels, les chiffres, eux aussi en baisse, sont plus difficiles à analyser, le préservatif étant avancé en général comme un argument de séduction (“ moi je suis sérieux” ), pour être ensuite abandonné de façon difficile à mesurer
L’autre contre-vérité concerne les moyens financiers mis au service de la science, ils sont dérisoires, la lutte contre le sida a choisi la prévention et non le remède..1/4 du budget de G Bush inscrite dans la lutte contre le sida concerne un plan pour l’abstinence à promouvoir dans les écoles ! La recherche publique sida représente en France 30 centimes d’Euros par français et par an, et n’a cessé de diminuer depuis 10ans où elle atteignait 1 Euro.
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Les séropositifs survivent et donc s’accumulent : ce n’était pas le cas avant.
Le nombre des nouvelles contaminations est relativement mal mesuré ( les gens à risques vont de moins en moins au dépistage , si bien que les données brutes recueillies lors des tests doivent être corrigées par des facteurs incertains sur la quantité de personnes échappant au test : on estime celle-ci en fonction de prospectives, par exemple, 50% des gens entrant en stade sida “découvrent” leur sérpositivité à cette occasion = ils sont séropositifs depuis plus de 7ans et n’avaient fait aucun test : on a ainsi une photo du passé sur le nombre des gens qui ont refusé le test, mais par contre on n’en a pas sur l’évolution récente, on sait simplement qu’ils sont plus nombreux, on verra pourquoi ).
L’épidémie évolue vers les femmes pour des raisons connues de tout le monde, les autres catégories ayant fait le plein plus tot. Si aucun plainte ou presque n’a été observée dans les milieus homosexuels pour des raisons de transmission du vih, il n’en va pas de même chez les femmes. Phénomène très intéressant à étudier que cette réaction totalement opposée entre les homosexuels solidaires et les hétérosexuels qui se font des procès. L’épidémie atteignait peu les hétérosexuels, d’où la “surprise” d’être contaminé , renforcée par le faux discours que tout le monde mettrait le préservatif, alors que évidemment ce sont d’abord les séropositifs qui ne le mettent pas , entraine la judiciarisation de la maladie. En réaction, les personnes à risque ne vont “évidemment” plus au test.
Le nombre de contaminations nouvelles subit 2 effets très contradictoires :
les trithérapies ne guérissent pas du vih, et les personnes à charge virale faible restent contaminantes, oui mais environ 1000 fois moins ( ce qui explique peut-être le fait que les homosexuels séropositifs traités soient presque tous barebackers affichés, aux antipodes de l’impression médiatique laissé par le milieu homosexuel : un site bareback homo compte entre 10 fois et 20 fois plus de membres que les militants d’act-up, seule connue du grand public, mais coquille vide de la réalité). Les nouvelles contaminations sont moins le fait des pratiques que le résultat de l’ignorance de leur statut par desséropositifs dont la chargen’est alors pas sous controle. J’ai lu, mais je n’ai plus la source, étude québecquoise je crois, qu’on estime que plus de 90% des contaminations proviennent de la minorité des séropositifs non traités.
La survie des malades liée au progrès médical joue en revanche contre la prévention puique les séropositifs se protègent 3 à 4 fois que les séronégatifs.
La judiciarisation liée à la peur qui se répand empeche les gens d’aller au dépistage, et les gens séropositifs à risque “innocents” ( = qui vivent dans” l’espoir” de l’ignorance de leur statut ) sont les plus dangeureux car eux portent des charges virales élevées.
D’une manière générale, le VIH est de moins en moins tueur ( 350 morts en France cette année dont beaucoup d’immigrés arrivés trop tard pour être sauvés , contre 6500 en 1995, malgré le nombre croissant de séropositifs ), et donc les gens se protégeront de moins en moins, car l’information n’est pas du tout la clef qui explique l’épidémie, mais le rapport entre le risque personnel et l’impératif sexuel qui dépasse largement la volonté humaine.
Aucune politique préventive ne pourra éradiquer leVIH, seule la science le peut. La morale, la politique, sont inopérantes, en revanche, la morale ou la politique déterminent entièrement nos réactions. le sida est un combat de valeurs, tout le monde profite à sa façon du sida pour faire avancer ses idées : abstinence, sexe multipartenaire protégé, liberté sexuelle totale, fidélité absolue, sauver le tiers-monde, accuser le libéralisme économisque, montrer du doigt des minorités, protéger les femmes et les enfants d’abords...
Rien ne se recoupe : une femme fidèle refuse de se protéger par amour pour son mari séropositif et est contaminée. Un multipartenaire qui se protège n’attrape rien. La capote hélas n’est pas fantastique : même en 1995, on s’est rendu compte qu’environ 15% des personnes interrogées refusaient la capote face à la mort. 22% aujourd’hui. J’estime à 100% les personnes qui l’endurent, de façon consciente ou inconsciente ( névrose consciente de celui qui la subit/la refuse, ou psychose inconsciente de celui qui la trouve fantastique , cherchez la personne la moins atteinte psychologiquement ! )
Le vaccin : le retard pris est énorme, les 10 premières années, il n’y a pas eu de budget, la recherche réelle sur les vaccins est très récente. les moyens mis en oeuvre sont très inférieurs à ce que les gens croient. On cite des milliards. La recherche sida en France c’est 15millions d’euros en 1an. la guerre en Irak a couté 400 Milliards , c’est 30 000 fois plus. La cause en est que d’un coté l’opinion publique est terrorisée et croit que tout est fait en la matière, tandis que les dirigeants ont une connaissance réelle de la très faible transmissibilité du VIH ( dans le forum, j’ai lu ceci : “5 rapports vaginaux sur 10 000 si la femme est atteinte, seraient contaminants, où vas-tu! chercher ces chiffres ????) S’ensuit un discours préventif qui rappelle qu’il suffit d’une fois, mais je retiens moi lafaiblesse inconnue et réelle de ce chiffre, qu’on ne donne pas en pature, et pour cause !. On entre dans le domaine de ce que j’appelle l’ignorance protectrice ( la vérité a une sale gueule et l’ignorance est belle comme un chateau médiéval !). 400 morts par an en France pour 2004, en l’absence de vaccin, et malgré la chute de l’usage du préservatif : je dis que ça fait non seulement réfléchir, mais qu’on a ici la clef du retard pris dans la lutte contre l’épidéme au niveau planétaire. Elle n’est pas un enjeu de santé publique majeure, le VIH est trop peu transmissible. Au pire de l’épidémie, même sans capote, il n’y aurait pas plus de 300 000 porteurs en France, dont la majorité survit en travaillera jusqu’à ‘age de la retraite, même s’ls vivent moins longtemps.
Il n’y a aucune urgence en réalité, sinon croyez-vous qu’on aurait recours à des expédients tels que le sidathon etc....?
J’ai écrit 2 pages, il en reste 28, j’espère les plus intéressantes.
Mon prochain texte sera plus court et traitera des attentes sur les essais vaccinaux en cours.
j’attends vos réactions.
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