Origine du spin
Le spin de l’électron est considéré comme un moment cinétique intrinsèque et trop souvent considéré comme d’origine relativiste. Il est facile de montrer que ce n’est pas le cas.
Supposons un espace physique avec une 1 dimension d’espace et 1 dimension de temps. Il est évident que l’on peut décrire les principes de la relativité restreinte dans cet espace de Minkowski à 2 dimensions. Par contre il n’y a pas de rotation spatiale possible et donc pas de moment angulaire et pas de spin. C’est je crois l’argument le plus court pour démontrer l’absence de rapport entre spin et relativité.
D’un point de vue positif on note qu’il y a un rapport entre spin et dimension de l’espace : Il faut que l’espace soit au moins égal à 2. En générale la dimension de l’espace joue un rôle important : En théorie des supercordes il faut rajouter 6 dimensions d’espace. Ce nombre n’est pas pris au hasard, il résulte de considérations de théorie des groupes (notamment la supersymétrie) mais aussi de considérations topologiques. Dans un tout autre genre l’idée qu’il y a 2 sortes des particules (les fermions et les bosons) n’est pas vrai en 2 dimensions. Dans ce cas il existe un nombre infinis (autant qu’il y a des entiers relatifs) de particules que l’on appelle Anyons (« vus » expérimentalement dans l’effet Hall quantique fractionnaire). Là encore l’existence de ces particules est directement liée à des considérations topologiques.
Le spin a d’abord été observé expérimentalement sous la forme d’un dédoublement de niveaux dans certains atomes puis « retrouvés » théoriquement par Dirac dans la théorie de l’électron relativiste. C’est la raison probable pour laquelle le spin est assimilé à un phénomène relativiste. Rappelons très brièvement la démarche de Dirac :
Dirac veut écrire une équation de Schrodinger pour l’électron dans sa version relativiste. En écrivant un Hamiltonien invariant de Lorentz il trouve non pas une fonction d’onde mais 4 fonctions d’onde pour l’électron. Quel est le sens de cette fonction d’onde à 4 composantes ?
La résolution montre que celles-ci décrit de 2 particules : l’électron et « l’anti-électron ( le positon). Cet aspect là ne nous intéresse pas ici. Le fait d’avoir un vecteur à 4 composantes suggère que cela pourrait être un tenseur de Lorentz à 4 composantes. Et bien pas du tout, le vecteur n’a pas les bonnes propriétés de transformations. En particulier lors d’une rotation spatiale de 360° le vecteur change de signe si bien qu’il faille tourner de 720 pour laisser le vecteur invariant !!! C’est la découverte (redécouverte ?) du spineur et fait penser au spin « expérimental » préalablement découvert.
En fait la question de fond est que le « bon » groupe pour représenter les rotations n’est pas SO(3) mais SU(2). Les composantes du spin sont une représentation irréductible du groupe SU(2). Quand on effectue une rotation dans SO(3) (changement de repère) on a une rotation dans SU(2) espace des états. Le fait est que ça « tourne 2 fois moins vite » dans SU(2) que dans SU(3). Ceci est lié à des considérations topologiques des 2 groupes : SU(2) est simplement connexe alors SO(3) est doublement connexe. Tout ça c’est abstrait, voici une image qui devrait aider à comprendre:
A partir d’un ruban de papier on peut recoller les 2 bouts. Il y a deux façons de le faire. Soit on forme un cylindre soit on forme un ruban de Mobius. Le premier a 2 faces (1 intérieure et 1 extérieure) tandis que le deuxième a une seule face. Maintenant supposons que le mouvement d’un point sur chacune des surfaces soit « piloté » par un cercle (qui joue le rôle de SO(3)). Dans le cas du ruban de Mobius il faut faire 2 tours sur le cercle pour faire un tour sur le ruban de Mobius qui joue le rôle de SU(2). Par contre pour le cylindre on fait qu’un tour mais il y a 2 points (1 de chaque coté). C’est la raison pour laquelle on assimile le spin à un moment cinétique intrinsèque (mais en fait c’est image et rien qu’une image) mais on pourrait aussi bien dire que c’est un ruban de Mobius ! avec l’avantage de mettre en avant les propriétés topologiques.
Quel est le sens du double tour ?
On peut expliquer ça avec une expérience très classique. On prend un verre dans la main horizontale. On fait une rotation de 360° de la main, on se retrouve, le bras tordu dans une position inconfortable !! Pour se libérer, on peut tourner l’ensemble du corps en tournant de 360° autour de la main et ouf ! Tout est revenu dans l’état initial. L’ensemble est revenu a lui-même mais seulement après une rotation de 2 tours. Cet exemple montre si un objet (la main) est tourné de 360° il faut tourné l’environnement (le corps) de 360° pour que l’ensemble retrouve sa configuration initiale. Donc fondamentalement on a 3 exemples que la « véritable » invariance par rotation c’est le double tour. Cela n’avait rien évident.
En conclusion le spin apparaît comme une propriété topologique de l’espace et non un fait relativiste. Par contre le couplage spin-orbite est quant à lui un phénomène relativiste. Quand on a un atome non dégénéré du point de vue orbital l’effet du couplage spin-orbite est « quenché (gelé) et on a malgré tout a un nombre de niveaux « cachés » égal à la dégénérescence de spin qui peut- être levé par un champ magnétique. Encore un moyen simple pour se convaincre que le spin n’a pas du à la relativité.
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