bonjour,
Est-ce que, pour clarifier, il n'y aurait pas deux lectures à faire de la théorie des trois mondes de Popper? L'une ontologique et l'autre épistémique.
De sorte que si ontologiquement, ces trois mondes sont considérés comme indépendants (processus physico-chimiques, sensations, symbolique), épistémiquement, donc concernant les modes de connaissance, ils sont interdépendants et irréductibles car toujours présupposés.
Il me semble en effet, que cette théorie des trois mondes de Popper est en fait une reformulation de la triplicité Kantienne et/ou Hegelienne; mais, et c'est là l'intérêt de Popper, en intégrant l'élément éthique de son falsificationnisme.
En effet, il me semble que la vision popperienne (ou post-kantienne) n'a de sens que si ontologiquement le troisième monde diffère du premier. Il y a toujours présupposition du premier monde (sans quoi le "symbolique" n'a plus de sens) et donc aussi du second monde.
Par contre, comme vous le dites justement, tous ces monde sont épistémiquement dépendants du troisième, étant donné qu'on ne peut l'envisager qu'au sein de la proposition impliquant le rapport symbolique précité (donc une différence ontologique). Et c'est alors sur ce point bien précis, qu'une proposition ne renvoie pas seulement à d'autres propositions, que Popper se distingue du positivisme logique de Vienne, donc que les trois mondes sont irréductibles à l'un des mondes.
Aussi, dans ces trois mondes, il convient de se poser la question, "où commence la pensée symbolique?" ou "à partir de quel niveau de développement cognitif y a-t-il du symbole?". Ainsi, si par exemple on induit que la fourmi possède des capacités proto-symboliques (ou au contraire ne serait qu'un simple processus), alors le second monde n'est plus nécessaire. Le problème qui se pose alors c'est de savoir ce que pense une fourmi ou, comme disait Nagel, "l'effet que cela fait d'être une chauve-souris".
Mais de la même façon, en faveur de Popper, on peut se demander "quel effet cela fait-il d'être quelqu'un d'autre que soi?" Ce qui implique alors le recours à un second monde, sans quoi l'on tombe dans une forme de nihilisme ou, par exemple, je pourrais réduire la douleur exprimée par un autre individu à l'énonciation des mots, donc à quelquechose qui ne soit pas de la douleur...
Cordialement.
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