Bonjour,
La trisomie est une anomalie chromosomique, et entre en fait peu dans la problématique de la discussion, car on n'a pas de transmission du problème génétique associé à la descendance... donc prétendre supprimer les trisomiques pour des raisons eugénistes (amélioration de l'espèce) est une absurdité.
J'ai l'impression que pas mal de personnes ont une vision simpliste de la génétique, et pensent qu'on pourra éliminer du patrimoine humain des gènes "responsables" de maladies génétiques. En fait il faut bien considérer plusieurs choses:
1) Dans le cas de certaines maladies, on a effectivement affaire à un allèle donné d'un gène qui est dominant (une seule copie sur les deux suffit à être atteint). Ces maladies sont très rares, car si elles se déclarent avant le moment de la reproduction, elles sont naturellement contresélectionnées par l'évolution. Dans le cas de la chorée de Huntington (renseignements ici: http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/...=FR&Expert=399 http://www.huntington.fr/article.php3?id_article=9 , la maladie se déclarant tardivement, on a persistance du problème. Je ne pense pas que pour ces maladies on ait un quelconque avantage, et que la réalisation de diagnostic préimplantatoire (http://www.ccne-ethique.fr/francais/pdf/avis072.pdf) afin d'être certain d'avoir un enfant non atteint pose problème. Mais je pense qu'on a peu d'espoir d'éliminer totalement cette maladie, car, si mes souvenirs de génétique sont bons, le gène impliqué a une tendance importante à muter, donc on aura toujours apparition de nouveaux cas, par mutation (le problème est une sorte de "béguaiement" de la succession des bases, avec d'une génération à l'autre possibilité d'accumulation d'erreurs. Le déclenchement de la maladie n'est pas quelque chose de certain, mais d'autant plus probable que le "béguaiement" est important).
2) dans pas mal d'autres maladies, on a un allèle responsable de la maladie qui n'est délétère qu'à l'état homozygote (deux copies identiques). Cet allèle peut être assez répandu dans une population (on suspecte souvent comme expliqué avant un avantage à cet allèle s'il est associé à un allèle différent). Il est à mon avis inenvisageable d'éliminer un tel allèle d'une population. Réaliser des diagnostics préimplantatoires ne peut être fait systématiquement, et si on souhaitait rechercher tous les allèles délétères, ce serait un travail fou... tout ceci pour une probabilité minime de détecter un problème pour le futur enfant (homozygotie sur une des maladies). Par contre, on aurait certainement beaucoup de chance de trouver au moins un allèle délétère à l'état hétérozygote. Cela vaut-il vraiment le coup de"trier " des embryons, et éliminer les porteurs d'un allèle "délétère" (qui auraient été en parfaite santé, voire en meilleure santé que la majorité de la population), sous prétexte qu'il a une probabilité à peine plus élevée que le reste de la population d'avoir un enfant malade? Je pense que non. Le test n'aura un intérêt que dans le cas de parents dont un est atteint par la maladie (mais on se place dans le cas d'une maladie pas si invalidante que ça, si la personne peut avoir des enfants), si l'autre parent est porteur récessif (on a alors une chance sur deux d'obtenir un enfant malade), mais dans ce cas, les enfants non atteints seront de toute façon porteur de l'allèle récessif (mais en parfaite santé).
Dans ce cas, j'espère avoir clairement montré que l'action de l'homme ne sera en fait pas beaucoup plus forte que celle de la sélection naturelle dans la contre-sélection des allèles dlétères: on n'a pas d'"amélioration de l'espèce" (et on s'en fout à mon avis, l'important est surtout qu'il y ait le moins de souffrance).
3) On a enfin le cas de maladies associées de façon plus "lâche" à des gènes: ce seront plûtôt des combinaisons de gènes, ou l'interraction des gènes avec l'environnement qui vont déterminerr l'apparition de la maladie. On connaît ainsi des gènes qui augmentent la probabilité d'avoir un cancer, d'être diabétique, ou d'avoir la maladie d'Alzheimer. On n'a par contre aucune indication du rôle qu'ils peuvent jouer dans l'expression d'autres caractères. Il se peut qu'ils puissent dans certains cas donner avec d'autres gènes des combinaisons hautement favorables. Une contre-sélection de tels gènes par action humaine serait à mon avis totalement hasardeuse, pourrait avoir des effets retords, et serait une entreprise de grande haleine ne donnant pas de résultats à la hauteur des espérances (on n'arriverait pas à contre-sélectionner rapidement ces allèles).
Devrait-on par exemple éliminer des embryons ayant 10% de chances de plus de développer un cancer?
Pour prendre un autre exemple: actuellement on ne connaît pas les gènes associés à la surdité (apparemment c'est lié à des combinaisons de gènes, d'où une probabilité assez faible pour les enfants de sourds d'être eux-même atteints par ce handicap. Si, par choix des parents, on décide que les enfants atteints ne naissent pas, on laisse de toute façon passer avec les enfants non atteint des allèles qui pourront à nouveau entraîner une surdité... s'ils se retrouvent par hasard en combinaison défavorable... donc on n'a pas une "contre-sélection" efficace. Devrait-on alors, dans cette idée a priori généreuse du "bien-être de l'humanité" interdire à ces personnes d'avoir des enfants? Personnellement je trouve une telle idée contraire à l'envie de base qui est de contribuer au bonheur des gens... ou alors on décide que certains ont droit au bonheur et d'autre pas, que certains sont plus égaux que d'autres...
Dans le cas que j'ai pris, on a une autre question (qui n'est plus du cadre de l'eugénisme): un enfant de parents sourds est-il heureux? Est-ce raisonnable que la société accepte que ces personnes aient des enfants? Mon avis est que l'on a tellement de parents soit-disant normaux qui sont incapables de s'occuper de leurs enfants, voire qui les maltraitent, ne leur assurent pas un bon dépard dans la vie, et à qui on reconnaît pourtant un "droit à avoir des enfants" qu'il serait totalement injuste qu'en raison d'un handicap qui déjà ne leur facilite pas la vie on interdise à des parents sourds d'avoir des enfants (sachant qu'en fait ils s'en sortent généralement très bien).
K.ochlée
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