Admettons que tout soit lié... ce qui reste à démontrer, il est évident qu'on ne pourrait pas prendre en compte toutes les interactions car il y en aurait une quasi infinité. Donc elles nous seraient inconnaissables. C'est la même chose que déterminer la trajectoire d'une molécule bien précise dans un gaz ou un liquide : il est rigoureusement impossible de prendre en compte toutes les interactions, mais on constate qu'on peut énoncer des lois robustes en considérant que chaque molécule se déplace au hasard. De même si on prend les boules du loto, elles obéissent à des règles parfaitement déterministes, mais c'est trop complexe pour être pris en compte et tout se passe comme si c'était régi par le hasard.
Discuter sur la nature du hasard, apparent ou non, qu'on invoque pour rendre compte des mutations finit par conduire à des sophismes. Ce qu'il faut retenir, c'est que les mutations apparaissent comme effets de certains mécanismes bien connus, physiques ou chimiques, qui n'ont aucun rapport avec la "signification" que le message génétique peut prendre. Autrement dit la mutation "ne se préoccupe pas" des conséquences ultimes de son apparition. La désamination d'une base pyrimidique obéît uniquement aux lois de la chimie et le fait que cela puisse éventuellement conduire à la modification d'un caractère anatomique est une conséquence totalement indépendante de la loi chimique responsable de la mutation. De la même manière qu'il n'y a aucun rapport entre ce que tape un singe dactylographe et le texte qui en résulte (parce le texte dépend de la nature AZERTY ou QUERTY du clavier). Autrement dit, si le code génétique était différent (il repose uniquement sur les aminoacyl-synthétases, et non sur l'ADN) on aurait exactement les mêmes mutations avec les mêmes probabilités, mais elles conduiraient à l'apparition d'expressions phénotypiques totalement différentes.
Donc aucun mécanisme ne peut rendre compte de mutations qui seraient orientées en fonction du résultat à obtenir (exit la thèse d'Anne Dambricourt sur une évolution de la flexion du sphénoïde qui serait programmé, téléguidée de l'intérieur - une variante de la téléologie).
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